[États gén« 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] 387 mollesse ; nous aurions beaucoup a dire si nous ne réservions ces plaintes au clergé non privilégié. Nous pouvons avec confiance en demander la suppression, comme étant une surcharge. Nous nous soumettrons toujours a donner une juste rétribution aux prêtres nécessaires pour le soutien de la religion ; mais nous ajouterons que l’acquittement actuel de la dîme nous force à reconnaître un autre monarque qui ne diffère du roi bienfaisant qui nous gouverne que par un payement plus fort que celui de la taille. La dîme enfin s’appuie moins sur des titres certains que sur une possession aussi unique qu’abusive. Notre intérêt, le bien de la patrie, l’obéissance enfin ont été des motifs pressants qui nous ont engagés à décrire le récit tendre et sincère de nos doléances, malgré qu’on nous donne à entendre qu’un jour nous payerons cher les efforts que nous aurons faits pour nous tirer de l’esclavage. Que pourrait nous arriver de pire, et quel effroi peut causer la mort à des citoyens malheureux, sinon le regret que nous aurions de ne pouvoir emporter avec nous les chaînes que nous laisserions pour héritage à nos descendants? Mais rassurons-nous ! Notre auguste monarque rompra pour jamais des chaînes que le nœud de la fatale prescription semble avoir consolidées au préjudice des malheureux. DécLarant, au surplus, le conseil, se référer absolument au cahier général qui sera dressé dans le chef' lieu, d’après le vœu de la prochaine assemblée, soit encore à celui que l’ordre du tiers déterminera lors de l’élection des sieurs députés aux Etats généraux, approuvant, dès à présent tout ce qui y sera fait et arrêté comme devant contribuer à une heureuse régénération qui nous délivrera d’une aristocratie tyrannique que les gentilshommes , surtout les possédant fiefs et les prélats, exerçaient sur nous. Et, ainsi que dessus, se sont tous les chefs de famille sachant écrire soussignés. Signé Àry, maire ; Gaivety ; propr. ; H. Roubins; Cavasse; Boulanger; Chapelle, chirurgien; Cavasse; Benoit; Rey, cuisinier, Roux ; Alex. Frigier ; Boulanger; L. Armand; Maréchal; Germain Jouanel; Boniface Rey;J. Mérentier; Gaspard Peloutier ; François Silvy; Fermalet ; Alexis ; Roubin ; Joseph Nous-seau; J. -B. Jouvencel; J. Guyot; Etienne Roubin; Christophe Jouvencel; Josepli Pally; F. jouvencel; J. -F. Monachey. Le nombre de ceux qui n’ont su signer est de quatre-vingt-cinq. Et nous, H. Pa-loutier, greffier. CAHIER D'instructions , remontrances et doléances de la communauté de Puyvcrt, sénéchaussée d’Aix (1). Cette communauté dont les impositions sont plus fortes qu’aucunes de la Provence, impose annuellement 44 livres sur chaque livre cadastrale, et dénuée de tout moyen de se soulager, ne pouvant, par sa triste position, établir aucun revenu, ses fonds qui sont d’une qualité au-dessous du médiocre, étant grevés de dîme, de taxes et de cens ; ils payent la dîme au quatorze et au vingt des grains, raisins, agneaux et chanvres ; au seigneur, d’une taxe au huitain presque générale, sur les grains, légumes, olives’ raisins, feuilles de mûriers, chanvres, lins, amanl des et noix. En outre, une partie de ses fonds est surchargée d’un cens, en blé ou argent, d’autant (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. plus ruineux que les particuliers y sorit à là solidaire pour le payement. Six émines de prés pour huit particuliers seulement payent le cens d’une panai un quart de blé; ce qui excède cette quantité paye le huitain de chaque coupe, und panai un quart de blé pour chaque maison pour le droit de fournage , la mouture des blés au vingtain, une poule de cens pour chaque bastide et jardin, le droit du tiers sur les dommages, le droit de lods, le retrait féodal, que le particulier, par crainte, par ménagement, laisse pousser jusqu’à trente ans; dans ce long intervalle, ne se croyant pas sûr propriétaire, peut-il exploiter soigneusement un bien qu’on peut lui enlever? Charge ses députés de solliciter que ce long intervalle de temps soit moindre, et tel qu’il plaira à Sa Majesté de le fixer. La mortalité presque générale des oliviers dé cette communauté, causée par les froids de F hiver dernier, est pour elle une perte d’autant plus essentielle qu’elle est irréparable. Cette communauté est une succursale de Laüris qu’on fait desservir moyennant 120 livres, et la dîme en produit plus de 1,000. Cette énorme différence engage cette communauté à solliciter la suppression de la dîme, s’obligeant à paver le desservant au taux qu’il plaira à Sa Majesté de fixer. Cette communauté a toujours appartenu et appartient encore à des seigneurs grands et magnifiques, qui, vivant dans la capitale, étaient trop éloignés pour entendre les plaintes et les supplications de leurs vassaux. Leurs cœurs généreux pouvaient-ils prévoir que leurs fermiers et préposés, abusant du crédit que donne, dans un petit lieu, l’agence ou la ferme, nuiraient à des eM-phytéotes, chercheraient à établir des abus, détruiraient une montagne, qui, quoique très-petite, faisait toutes leurs ressources pour la nourriture des bestiaux et leur bûcherage, et les réduiraient à de petites ramilles et plus de glandée? Si nous avions pu leur faire connaître les menées de ces gens-là, leurs douces maximes les auraient empêchées. Nous ne serions pas aujourd’hui dans le cas de demander l’abolition des jouissances sans titres. Ce sont là les motifs qui engagent cette communauté à implorer la bonté du Roi, et à espérer qu’elle jouira des avantages qui seront sollicités et obtenus par les autres communautés de cette province; c’est surtout à ces objets essentiels pour elle que ses députés sont priés de donner leurs attentions les plus particulières. Le conseil, réunissant soii intérêt particulier aux intérêts généraux, charge expressémentses députés de solliciter à l’assemblée la réformation du code civil et criminel, la suppression de tous les tribunaux inutiles et onéreux, une attribution à ceux des arrondissements de souveraineté jusqu’à concurrence d’une somme déterminée, l’abrogation de toutes lettres attentatoires à la liberté des citoyens; la faculté à ceux-ci, de quelque ordre qu’ils soient, de concourir à tous emplois militaires, bénéfices et charges attributives de noblesse, et de réclamer surtout contre la vénalité des offices. Lesdits sieurs députés réclameront en outre une modération dans le prix du sel rendu uniforme par tout le royaume, comme aussi l’abolition de tout droit de circulation dans son intérieur, et notamment le reculeuient des bureaux de traites dans les frontières et la suppression de la mendicité. Le conseil charge, au surplus, ses députés d’insister à demander au meilleur des rois la formation ou la réformation de la constitution du pays, 388 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] de réclamer de sa justice qu’il soit permis aux communes de se nommer un syndic avec entrée aux Etats; comme aussi de requérir l’exclusion des mêmes Etats des magistrats et tous officiers attachés au fisc; la désunion de la procure du pays du consulat de la ville d’Aix; l’admission des gentilshommes non possédant fiefs, et du clergé du second ordre; l’égalité des voix pour l’ordre du tiers contre celles des deux premiers ordres tant dans les Etats que dans la commission intermédiaire, et surtout l’égalité des contributions pour toutes charges royales et locales sans exception d’aucunes, et nonobstant toute possession ou tout privilège quelconque ; l’impression annuelle des comptes de la province dont envoi sera fait dans chaque communauté, et que la répartition des secours que le Roi accorde au pa�s, ensemble de l’imposition de 15 livres par feu, affectée à la haute Provence, sera faite dans le sein des Etats, et par eux arrêtée ; de demander que chaque communauté soit obligée de faire et réparer à ses frais les ponts et chemins sans aucune association avec les vigueriesni avec la province, comme aussi de porter les deniers royaux directement à la caisse du trésorier de la province. Déclarant, au surplus, le conseil, que, quant à tous autres objets, soit généraux pour le rovaume, soit particuliers à cette province, il s’en réfère absolument au cahier général qui sera dressé dans le chef-lieu, d’après le vœu de la prochaine assemblée; soit encore à celui que l’ordre du tiers déterminera lors de sa réunion pour l’élection de ses députés aux Etats généraux, approuvant, dès à présent, ce qui sera fait et arrêté soit dans l’assemblée du chef-lieu, soit dans celle des communautés et vigueries. Ainsi que dessus, il a été délibéré, et se sont tous les chefs de famille sachant écrire soussignés. Signé Bernard, maire ; Rouvet, consul ; G. Gui-ran;H.-T. Guitton ; Barret ; Gorgier ; G. Janselme; A. -A. Guitton; J. Anerre; A. Bernard; Sambuet; Chauvin; E. Bernard; C.-J. Cavalier; Viem; J. Fran-chesquin ; J. Rouvin; Anastay; Pierre Serre; Michel, greffier. Nous, Jean-Pierre Michel, avocat en la cour et juge de ce lieu de Puyvert, avons coté et paraphé le présent cahier de doléances et nous nous sommes soussigné, le 29 mars 1879. signé Michel, juge. CAHIER Des plaintes et remontrances de la communauté de Quinson , dressé par la présente assemblée et de suite paraphé pour être remis aux députés qui sont chargés de le porter â Aix en rassemblée qui sera tenue par M. le lieutenant général au siège le 2 du mois prochain, avec pouvoir de faire a MM. les commissaires-rédacteurs toutes les observations qu’ils croiront être nécessaires pour le bien de l'Etat et celui de notre communauté (1). Le lieu de Quinson' appartint au seigneur roi, Raymond, comte de Béranger, roi de Jérusalem et de Sicile, roi de la Pouille, prince de Gapoue, comte de Provence et Forcalquier; en 1277, il passa échange avec le sieur prévôt de l’eglise collégiale de Barjols, par lequel il remit audit sieur prévôt ledit lieu de Quinson, son terri-(1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit clés Archives de l’Empire. toire et dépendances, sous la réserve de merum imperium , albergues et cavalcades , et ledit sieur prévôt, de son chef, lui remit, en contre-échange la forteresse de Barols et sa guerine, sous la réserve du pied hors les murs dans lequel passent les eaux, pour l’arrosage des jardins ; ledit seigneur roi déclara, dans ledit acte, que tous les droits qu’il cédait audit sieur prévôt, ne donnaient qu’une rente annuelle de 50 livres. D’après une pareille déclaration, l’on peut se permettre de dire que le seigneur roi n’avait pas entendu céder les droits de lods et droits de fournage, puisque ces deux articles réunis produisent audit sieur prévôt, depuis des siècles, une rente annuelle de 800 livres ; la rente actuelle, d’après le bail passé par le prévôt à son fermier, est de 1,050 livres. Outre cette rente, le fermier est obligé de nourrir le juge dudit sieur prévôt toutes les fois qu’il descend dans le lieu pour l’instruction du jugement des procès; les jugements soit à pièces mises, procès réglé ou sentence par défaut sont payés par les parties, et quelquefois les épices excèdent la valeur de l’objet que l’on plaide. Lods. Nous nous permettons donc de dire que puisque le seigneur roi n’a pas cédé, dans l’acte d’échange, le droit de lods, le sieur prévôt l’a perçu indûment; ce môme acte fait présumer que le seigneur roi ne l’exigeait pas ; mais en supposant que l’acte d’échange ait autorisé le sieur prévôt d’exiger le droit de lods, il ne pouvait ni ne devait prétendre les percevoir à raison d’un sixième, mais bien au treize, ainsi que tous les auteurs qui ont traité cette matière ont décidé; que le mot de lods et terrain sont synonymes ; cependant plusieurs arrêts ont autorisé les seigneurs possédant fiefs de les exiger au sixième ; cela n’est pas étonnant, puisque les juges étaient seigneurs eux-mêmes ; aussi les communautés se sont déterminées de vivre dans cet esclavage, et de supporter cette oppression au lieu de plaider. Banalité de fours. Les banalités qui existent en province n’ont été établies que par usurpation; notre loi statutaire le prouve; celle qui nous concerne 1<» prouve encore, puisque la communauté la contesta en 1582, et par arrêt du 2 juin 1583, la banalité du four de ce lieu fut déclarée au profit du sieur prévôt, sans avoir égard au statut. Cet arrêt, dit ce même statut, fut rendu sur la simple thèse; or donc, l’acte d’échange ne lui avait pas donné la banalité; et cela est si vrai, qu’à celte époque il y avait plusieurs fours dans le lieu, et dans les maisons de campagne où il y en a encore. Cette banalité n’est autre chose qu’une usurpation toujours soutenue par les magistrats des cours souveraines ayant intérêt à la chose, puisque nous voyons des seigneurs qui font construire des fours et des moulins dans lesquels ils engagent les habitants à aller, et dès que la trentième année est expirée, ils établissent la banalité toujours fondée sur les arrêts des cours supérieures. « Nota. Le nombre des fours fut réduit, suivant « l’acte du 14 mars 1426, notaire Bertrand, à Beau-« douin ; le seigneur en profita. Cette réduction « nous a laissés avec un seul four insuffisant pour « le lieu, où il y a 1,100 âmes vivantes. »