440 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 septembre 1791.] semblée, aimant la Constitution et la liberté, qui ne voulût la prendre sur lui, et rendre le compte que l’on demande de l’emploi qui a été fait par l’Assemblée du dépôt qui y avait été remis. Ce compte sera donc rendu, et j’ai été bien aise d’annoncer, de répéter ce que je crois formellement, c’est que ce sont les ennemis de la Consii-titution et de la liberté qui veulent faire entendre qu’on ne rendra pas de compte, tandis que, je le répète, il n’est aucun de nous qui ne soit prêt à le rendre... M. de FoIlevIIIe. Je prends acte de ce que vient de dire M. Regnaud; et à la condition qu’il propose, je me charge de toutes les inculpations qu’il m’a faites. M. Regnaud (de Saint-Jean-d' Angély)... Mais, ce n’est pas un compte de comptable que doivent rendre les membres de cette Assemblée; tout le monde sait que l’Assemblée n’a fait qu’ordonner les dépenses et qu’elle n’a jamais eu de maniement de fonds : il n’y a que la mauvaise foi qui ait voulu égarer le peuple sur ces objets. Ce sont ceux qui ont été chargés d’exécuter les décrets qui sont comptables de la distribution des deniers et qui devront rendre compte à la législature de leur gestion. Voilà ce qui est très clair, mais ce dont on ne veut pas convenir; voilà ce que je croyais important de répondre aux placards que l’on répand avec tant de profusion. M. Eiavie. J’ai encore une réponse à faire à M. de Fol le ville et la voici : s’il y a des comptes à rendre à la nation, ils sont dans le Livre rouge. C’est là que l’on verra les dilapidations auxquelles nous avons mis un terme ; c’est là que l’on trouvera les aristocrates que nous avons empêchés de piller les finances; c’est là que l’on se rendra compte si ce sont les opposants à la Révolution qui ont dilapidé les fonds nationaux, ou bien si ce sont les bons citoyens qui ont fait la Constitution. Voilà tout le compte que nous avons à rendre. Un grand nombre de membres : L’ordre du jour ! (L’Assemblée décrète qu’elle passe à l’ordre du jour.) M. de Folleville. Je ne demande pas à me défendre des inculpations de M. Regnaud ; mais je demande... M. le Président. Monsieur de Folleville, vous n’avez pas la parole. M. Bouche. C’est le coq qui chante ! M. de Fa Rochefoucauld observe que l’Assemblée, en ajournant le projet de décret sur les salines et salins nationaux , n’a pas fixé sous quelle administr ition seraient les forêts affectées aux différentes salines ; il propose à cet égard un projet de décret qui est mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, en ajournant le projet de décret sur l’administration des salins et salines, décrète que les forêts affectées aux différentes salines seront régies par l’administration forestière, qui fera les délivrances de bois nécessaires pour l’exploitation des salines. » (Ce décret est adopté.) Mé Delattre, au nom des commissaires chargés de l'inventaire des meubles et diamants de la couronne. Messieurs, les commissaires que vous avez chargés de faire l’inventaire des différents diamants de la couronne se sont acquittés, avec toute la diligence qu’il était possible, de la mission dont vous les avez honorés. Nous venons aujourd’hui déposer notre travail sur le bureau; il est revêtu de toutes les signatures qui doivent en constater la légalité et l’authenticité. Nous vous demandons d’ordonner que la remise en soit consignée dans le procès-verbal et que le dépôt en soit effectué dans les Archives, (Assentiment.) Nous aurions désiré, Messieurs, que le temps nous eût permis de faire un rapport circonstancié decet inventaire, ainsi que del’examende l’administration du garde-meuble dont vous nous aviez également chargés. Le terme fixé pour là fin de la session oe nous permet pas de présenter aucun détail sur ces deux objets ; nous pouvons toutefois assurer l’Assemblée de l’existence au garde-meuble du précieux dépôt des diamants de la couronne; quant à l’administration du garde-meuble elle-même, l’examen général auquel nous nous sommes livrés ne nous y a fait remarquer que des améliorations. J’annoncerai en terminant que l’inventaire, dont je fais le dépôt sur le bureau, vient d’être remis à l’impression ; c’est pour M. Baudouin un ouvrage de longue haleine. Pendant le travail de l’impression, nous aurons le temps de rédiger un rapport sinon détaillé, au moins explicatif tant de l’inventaire que de l’examen de l’administration du garde-meuble, et noos ferons imprimer ce rapport soit à la tête soit à la suite de l’inventaire. (Très bien ! très bien!) M. d’André. Si, en effet, d’après le rapport de MM. les commissaires, ils n’ont reconnu dans l’adminisiration du garde-meuble que des améliorations et une bonne administration, je demande qu’il soit fait mention de cette conclusion dans le procès-verbal, parce qu’il faut rendre justice à tous et que personne n’ignore qu’à une certaine époque on a répandu des soupçons et des opinions fâcheuses sur les administrate rs. M. Rewbell appuie cette motion. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il sera fait mention au procès-verbal du compte rendu de M. Delattre, et de la remise de l’inventaire des meubles et diamants de la couronne, et elle ordonne le dépôt de ce document aux Archives.) M. Bureaux de Pusy, au nom du comité militaire , fuit un rapport et présente un projet de décret sur les officiers généraux employés dans les colonies . Ce projet de décret est mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité militaire sur la manière de fixer l’état des officiers généraux qui sont employés dans les colonies et possessions françaises de l’Asie, de l’Afrique et de l’Amérique, décrète ce qui suit : Art. 1er. « Les officiers généraux employés dans les colonies ne font pas nombre parmi ceux décrétés pour le service de l’armée dans le royaume. Art. %. * Ils concourront pour la suite de leur avan- [28 septembre 1791.] 441 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. cernent, soit par ancienneté, soit au choix du roi, avec les officiers géuéraux employés eu France. Art. 3. « Les appointements attribués à ces officiers généraux continueront à leur être payés sur les fonds des colonies, comme ci-deyant; néanmoins leur nombre, provisoirement et jusqu’à l’organisation définitive du service des troupes employées dans les colonie-, ne pourra excéder celui de 9, dont : 3 pour les îles sous le Vent; 2 ponr les îles du Vent; 3 pour l’Inde et les îles de France et de Bourbon ; 1 Pour la Guyane. « De ces 9 officiers généraux, 3 pourront être lieutenants généraux, savoir : ceux qui commanderont en chef aux îles sous le Vent, aux îles du Vent et dans l’Inde. » (Ce décret est adopté.) Un membre propose un article additionnel qui est mis aux voix dans les termes suivants : Art. 4. « Les aides de camp nommés par lesdits officiers généraux seront maintenus dans leurs grades et fonctions, après que leur nomination aura été confirmée par le roi. » (Cet article additionnel est adopté.) Un de MM. les secrétaires annonce l'hommage fait par M. Poirier, ancien homme de loi à Dunkerque, d’un ouvrage manuscrit sur le commerce des fraudeurs anglais, et d’un ouvrage imprimé intitulé : « Collection des travaux publics pour le corps social. ■> (L’Assemblée décrète qu’il en sera fait mention honorable dans le procès-verbal.) M. Moreau expose que l 'article 6 du décret rendu hier relativement aux citoyens qui prendraient dans les actes des titres ou qualifications supprimés par la Constitution (1) se contente d'interdire aux préposés aux droits d’enregistrement, sous peine de destitution, l’enregistrement des actes énonçant ces titres ou qualifications ; il observe qu’il vaudrait mieux autoriser les préposés à retenir les actes et à les dénoncer ensuite au commissaire du roi. M. Le Chapelier, rapporteur, adopte cette motion. En conséquence, l’article modifié est mis aux voix comme suit : Art. 6. « Les préposés aux droits d’enregistrement seront tenus, à peine de destitution, d’arrêter les actes qui leur seraient présentés, et qui, datés du jour de la publication de la présente loi, contiendraient quelques-uns des titres et qualifications abolis par la Constitution, et de les remettre au commi. saire du roi près le tribunal, lequel sera aussi tenu d’agir comme il est prescrit par l’article 3. » (Adopté.) M. Démeunier, au nom du comité de Constitution, propose un article additionnel au décret (1) Voy. ci-dessus, séance du 27 septembre 1791, au matin, page 372. rendu le 26 de ce mois et concernant les actes illégaux des corps administratifs , municipalités et assemblées électorales (1). Cet article additionnel est mis aux voix dans les termes suivants : Art. 4. « Les mêmes peines auront lieu contre les mêmes personnes, lorsque les assemblées primaires, les assemblées de commune par communauté entière ou par section, ou les assemblées municipales, auront commis les mêmes délits. » (Adopté.) Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du mardi 27 septembre au matin , qui est adopté. M. Victor de Broglie. Messieurs, il est nécessaire que l’Assemblée prenne des précautions pour que le décret rendu hier relativement aux juifs qui prêteront le serment civique (2), n’ait pas de mauvais effets en Alsace; car, d’après les intrigues dont l’influence se fait déjà sentir, il pourrait en avoir de très mauvais. Ii faut donc qu’il ne puisse être mal interprété, et qu’il soit dit que la prestation du serment civique, de la part des juifs, sera regardé comme une renonciation formelle aux lois civiles et politiques auxquelles les individus juifs se croient particulièrement soumis. (Assentiment.) M. Prugnon. Je demande qu’au lieu de mettre : « Sera regardé comme une renonciation à leurs lois civiles, etc., » on mette : « Sera regardé comme une renonciation à leurs privilèges ; •> car les lois civiles des juifs sont identifiées à leurs lois religieuses ; et il n’est pas dans notre intention d’exiger qu’ils abjurent leur religion. (La motion de M. Prugnon est adoptée.) En conséquence, le décret modifié est mis aux voix comme suit : « L’Assemblée nationale, considérant que les conditions nécessaires pour être citoyen français et pour devenir citoyen actif, sont fixées par la Constitution, et que tout homme qui, réunissant lesdites conditions, prête le serment civique et s’engage à remplir tous les devoirs que la Constitution impose, a droit à tous les avantages qu’elle assure; « Révoque tous ajournements, réserves et exceptions insérés dans Jes précédents décrets relativement aux individus juifs qui prêteront le serment civique, qui sera regardé comme une renonciation à tous privilèges et exceptions introduits précédemment en leur faveur. » (Ce décrit est adopté.) M. Rewbell. La manière dont le décret a été rendu hier, sans discussion, sans examen, les inconvénients qui pourraient en être la suite, détermineront, j’espère, l’Assemblée à me permettre aujourd’hui quelques réflexions sur sa rédaction. (Murmures.) M. Chabroud. Je demande qu’il n’y ait plus de discussion, puisque le décret est rendu. M. Rewbell. On vous propose aujourd’hui une nouvelle rédaction... (1) Voir ci-dessus, page 343. (2) Voir ci-dessus, page 372.