SÉANCE DU 26 VENDÉMIAIRE AN III (17 OCTOBRE 1794) - N° 12 223 12 Les sociétés populaires de Valence [Lot-et-Garonne] a, de Pélissanne [Bouches-du-Rhône] b, et le comité révolutionnaire du sixième arrondissement [Paris] c émettent leur opinion sur les circonstances actuelles, et exècrent le système affreux de terreur, favorable à la tyrannie ; enfin elles assurent qu’elles surveilleront les ennemis de l’égalité et de la liberté. Mention honorable et insertion des trois adresses au bulletin (23). a [La société populaire de Valence à la Convention nationale, s. d.] (24) Représentans, Les républicains françois qui habitent la commune de Valence croient qu’il est de leur devoir d’émettre leurs opinions sur les circonstances actuelles. Des hommes libres ne peuvent garder un honteux silence lorsque de toutes parts s’élèvent des voix qui osent réveiller la lutte impie de l’esclavage contre la liberté. Nos obligations envers la patrie, l’affermissement de la république une et indivisible, les glorieux travaux de la Convention nationale, les succès multipliés de nos frères d’armes, le bonheur de 25 millions d’hommes importunent-t-ils donc quelques vampires dévorans? médite-t-on dans l’ombre de nouveaux attentats? Jettant un oeil observateur autour de nous, nous avons vu des abimes profonds creusés par des conspirateurs, et le vaisseau de la république échappant toujours à de nouvelles tempêtes, voguer à pleines voiles sur une mer orageuse. D’habiles pilotes ont scu le garantir du naufrage, malgré les vents audacieux qui voudroient empêcher ou retarder son entrée dans le port. Quels scélérats pourroient désirer et appeller de nouveaux orages? Existe-t-il de tels monstres? Oui, pères de la patrie, oui nous croyons qu’il y a des hommes féroces intéressés à conserver un régime de sang, à perpétuer la terreur pour comprimer les bons citoyens : nous croyons qu’à l’ombre d’un prétendu patriotisme ils voudroient encore voiler la statue de la liberté, briser les balances de Thémis, couvrir d’un faux zèle leur turpitude pour mieux tromper le peuple et l’asservir. Mais le règne du triumvirat, des méchans et des fripons est passé. Les continuateurs passeront aussi, et la Convention restera. Le peuple françois est là. Il formera une masse, il lèvera le levier de sa puissance et des lois pour, avec ses législateurs, écraser les restes impurs d’un régime exécré, les dilapidateurs de la fortune publique, tous (23) P.V., XLVII, 204. (24) C 322, pl. 1355, p. 5. Bull., 26 vend.; M. U., XLIV, 423. ceux qui rendraient la liberté odieuse par la terreur, par des clameurs sanguinaires; et il fera un rempart de son corps à ses représentans qui, comme Talben, seraient en butte aux coups d’un assassin parricide. Législateurs, pères de la patrie, sauvez la république, confondez les méchans, soutenez les bons. Ceux-ci se rallieront autour de vous, comme autour du Palladium sacré auquel sont attachés la destinée et le salut de la nation française. C’est à vous, oui, à vous que le peuple a confié des pouvoirs; c’est à vous seuls qu’il appartient de faire des lois, et il vous soutiendra dans cette glorieuse mission. Poursuivez votre carrière, faites notre bonheur; protégez les arts, les sciences, l’industrie, l’agriculture, le commerce; donnez enfin à la république le degré de gloire et de stabilité que lui promettent depuis longtems vos veilles, les efforts et les sacrifices des bons citoyens. Pour nous, attachés au char de la révolution, nous surveillerons les intrigans, nous dénoncerons les aristocrates, nous électriserons les modérés, nous dévoilerons les hipocrites, les meneurs et les ambitieux, et nous consacrerons nos séances à la propagation des principes républicains et à l’instruction publique. Tousac, secrétaire et une page de signatures. b [La société populaire de Pélissanne à la Convention nationale, s. d.] (25) Citoyens représentans, La servitude, l’opprobe et la mort dévoient être les effets de la conspiration que vous avés anéanti avec les monstres qui l’avoient formé. L’orage terrible au milieu duquel elle devoit éclater, fut devancé au loin par la terreur, des flots de sang signaloient déjà dans toutes les parties de la république le retour de la tiran-nie; la liberté d’un grand peuple reconquise avec peine, étoit à la veille de périr; le plus exécrable des forfaits alloit se commettre. Mais la puissance nationale veilloit. Elle démasqua les conjurés, et le même jour qui devoit être le témoin de leur triomphe, et de notre malheur, éclaire leur suplice et notre délivrance. La délivrance de vingt cinq millions d’hommes affranchis de la tirannie dans une seule nuit. Tel est, citoyens législateurs, le tableau que nous avons constamment sous les yeux et que nous vous présentons comme leur témoignage le plus expressif de notre reconnoissance : le bienfait qu’il retrace est votre ouvrage. Que les tirans coalisés contre la République osent le contempler un instant, ils verront bientôt que rien n’égale la puissance de la convenus) C 322, pl. 1355, p. 1. Bull., 26 vend.; AT. U., XLIV, 423-424.