580 [Convention nationale.] ARCHIVES acte de sagesse et de patriotisme; aussi, la So¬ ciété (comme électrisée par le discours de Thu¬ riot) ayant écouté avec le plus scrupuleux si¬ lence son récit et les vérités frappantes qui en ont été la suite, s’est spontanément levée et a fait retentir la salle des cris d’allégresse et de : Vive la République ! Dans ce moment heureux, récompense si douce pour les cœurs vraiment patriotes, vous eussiez, citoyens législateurs, vrais défenseurs du peuple et vrais Montagnards, partagé notre ivresse et nos embrassements. L’orateur n’eut pas plus tôt fini, que tous les membres de la Société l’embrassèrent à l’envi en reconnais¬ sance du superbe présent qu’il venait de leur faire. les citoyens de la tribune voulurent aussi lui témoigner, par ce signe de vérité, leur recon¬ naissance et leurs sentiments. Sitôt que nos cœurs se furent épanchés, et que pleins de l’objet, qui leur plaisait tant, l’as¬ semblée eut repris son travail, son premier soin a été de prendre un arrêté qui constatât à jamais cet heureux événement et qui remplaçât sur-le-champ par une célébration solennelle des principes éternels de la vérité, toutes ces céré¬ monies superstitieuses, inventées par le men¬ songe et la cupidité. En conséquence, la Société a arrêté que la déclaration de l’évêque de Paris et des vrais citoyens qui l’ont imité, serait gra¬ vée sur une pierre scellée dans la salle de la Société pour constater ce moment heureux et apprendre à la postérité que ç’a été dans ce jour que le dernier chaînon qui tenait encore la raison captive a été brisé; elle a ensuite arrêté qu’à compter de la 2e décade du présent mois et toutes les décades suivantes, tous les citoyens seraient invités à se rendre à 10 heures du matin dans la salle de l’assemblée pour y célébrer par des discours moraux et des hymnes à la patrie, la fête de la vérité; elle a, en même temps, arrêté qu’elle donnerait à cette cérémonie, sans sortir de la simplicité des principes, le grand caractère qui en doit être inséparable. Après s’être occupée de cet objet important, et l’avoir décidé, l’assemblée a reçu membre de la Société populaire le citoyen Thuriot, qui l’a désiré. Son admission a été un nouveau sujet de satisfaction pour elle, par la certitude dont elle s’est sentie pénétrée que ce patriote entre¬ tiendrait dans son sein ce foyer brûlant de patriotisme qui, nous vous le jurons, en son nom, ne se ralentira jamais (1). La Société a nommé, pour vous faire part de ces arrêtés, citoyens législateurs, les citoyens Gagné, Vanube, Lacombe, Le Roy, Mareschal neveu, Perché et Mareschal, receveur. Mareschal. Compte rendu du Moniteur universel (2). La section des Tuileries , par l’organe de ses commissaires, instruit l’Assemblée que le repré-(1) Vifs applaudissements, d’après Y Auditeur na¬ tional [n° 413 du 19 brumaire an II (samedi 9 no¬ vembre 1793), p. 3] et d’après les Annales patrio¬ tiques et littéraires [n° 312 du 19 brumaire an II (samedi 9 novembre 1793), p. 1450, col. 1]. ‘ (2) Moniteur universel [n° 50 du 20 brumaire an II (dimanche 10 novembre 1793), p. 202, col. 1]. 18 brumaire an II 8 novembre 1793 sentant du peuple, Thuriot, domicilié sur son arrondissement, lui ayant fait hier le récit de la scène mémorable à laquelle a donné lieu la démarche vraiment philosophique de l’évêque de Paris, et des autres prêtres qui l’accompa¬ gnaient, tous les citoyens présents ont mani¬ festé leur allégresse et leur enthousiasme, et la section a unanimement arrêté que les jours de repos de chaque décade, il serait célébré une fête morale et patriotique en l’honneur de la vérité. Les commissaires demandent à être ren¬ voyés au comité d’instruction publique pour se concerter avec lui sur les moyens d’exécu¬ tion. Le renvoi à ce comité est décrété. Les Invalides ont été admis à défiler dans le sein de la Convention. L’orateur a prononcé le discours suivant : « Législateurs, « Nous vous apportons la dépouille de l’hypo¬ crisie, et les hochets de la superstition, qu’il était bien temps de faire servir au succès de la liberté, après avoir été pendant tant de générations le masque du vice, l’appui honteux du despotisme, et l’instrument de l’esclavage des peuples. « Les militaires invalides, indignés du luxe insultant qui régnait dans leur asile, ont tourné leurs regards sur la patrie menacée par les tyrans de l’Europe, et réduits à la triste impuissance de ne pouvoir aller les combattre, ils n’ont eu qu’un vœu, celui de faire servir contre les despotes et les fanatiques les métaux qui, pendant si long¬ temps, avaient servi à rehausser l’orgueil et l’am¬ bition des uns et des autres. « Ainsi, la superstition, au milieu des erreurs dont elle s’investissait, avait encore quelque chose de bon et de réel; c’était l’or et l’argent dont elle couvrait son hideuse effigie, et que nous venons déposer aux pieds de l’autel de la patrie, non pas, à la vérité, pour sauver des âmes, mais pour sau¬ ver la République et consolider le règne de la raison et de la liberté. » Mention honorable, insertion au « Bulle¬ tin » (1). D’autre part, le Journal des Débats et des Décrets (brumaire an II, n° 416, p. 255) rend compte de l’admission à la barre de la Société populaire de la section des Tuileries dans les termes suivants î « Une députation de la Société populaire de la section des Tuileries félicite la Convention sur sa séance d’hier. Elle en apprit hier soir les détails par Thuriot qui les présenta avec tout l’intérêt qu’ils inspirent à un législateur philosophe. La Société arrêta sur-le-champ que quelques-uns de ses membres iraient demander à la Convention d’or¬ donner pour chaque décadi les cérémonies d’une fête civique. (Renvoyé au comité d'instruction pu¬ blique.) » (1) Procès-verbaux de Ja Convention, t. 25, p. 66. PARLEMENTAIRES. j