[4 décembre 1789.] 366 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. complots sourds el affreux sont ourdis pour intercepter les grains qu’elle achète ; elle est exposée à chaque instant à manquer de subsistance. Sedan, Réthel-Mazarin, Reims, se trouvent exposés aux memes malheurs ; les uns se plaignent des accapareurs intérieurs ; les autres disent qu’au mépris des décrets de l’Assemblée nationale on continue toujours d’exporter les grains de France. Telle est la facilité attachée à vos décret3, dît-il, que ceux qui devraient les soutenir sont, i.. premiers à les enfreindre ; la loi martiale est confiée aüx mains de ceux qu’elle devrait frapper. Le comité propose de remédier au mal par l’adoption des articles suivants : Art. 1er. Quiconque sera pris exportant ou faisant exporter des grains chez l’étranger, sera puni de mort. Art. 2. Quiconque sera convaincu d’avoir arrêté ou fait arrêter les grains, et empêché la circulation dans l’intérieur du royaume, sera puni de peines afflictives plus ou moins grandes, suivant les circonstances. Art. 3. Il sera fait défense à toutes municipalités et comités de prendre aucune délibération, faire aucun arrêté sur la circulation ou exportation des grains, contraires aux décrets de l’ Assemblée, sous peine, contre les membres qui les auront signés, d’interdiction perpétuelle de toutes fonctions publiques ou sous plus grande peine, si leurs arrêtés avaient été suivis d’exécution. Art. 4. Que le décret soit aussitôt porté à la sanction, et de suite envoyé à toutes les municipalités et bourgs du royaume, pour y être lu, publié, enregistré, et exécuté suivant sa forme et teneur. L’Assemblée renvoie la discussion du décret à l’heure de deux heures. M. I�avie, député d'Alsace , rend compte d’Une délibération des communautés réunies de Beile-Magny, Hecken, Slemberg, Fulkvilu, Rrochomont, Bretten, Hambach-le-Haut, Hambach-le-Bas, Gai-venate et Eteimbes, qui adhèrent aux décrets de l’Assemblée nationale, offrent un don patriotique de 560 livres argent comptant, et proposent, indépendamment de leur contribution du quart de leur revenu, qu’ils regardent comme légère en comparaison de ce que leur aurait coûté l’ancienne administration, de faire, pendant trois ans, la moitié du travail des corvées en nature, gratuitement, sans diminution du prix qu’elles ont coutume de payer pour cet impôt en argent. Toutes les expressions de la délibération de ces communautés ne respirant que le plus pur patriotisme. L’Assemblée charge M. le président de leur écrire et de leur témoigner sa satisfaction. M. de Coulmiers, abbé d' Abbecourt, demande à présenter un plan d’emprunt viager, sous la responsabilité des biens ecclesiastiques. L’Assemblée y consent, en attendant que les commissaires chargés d’examiner les opérations de la Caisse d’escompte soient prêts à faire leur rapport. M. de Couïmiers, député de Paris , abbé d’ Abbecourt (1). Messieurs, lorsque vous avez décrété que la disposition des biens du clergé appartenait à la nation, vous n’avez eu en vue que de vous mettre à portée de corriger les abus introduits dans l’administration de ces biens, de leur ; donner une destination nationale et vraiment utile, et d’unir plus intimement ceux qui les possédaient à la grande famille de l’Etat, en leur faisant également partager avec tous leurs autres concitoyens, les charges et les impôts que pouvait exiger la prospérité de l’empire. Vous n’avez encore que déterminé le principe qui, sagement dirigé, peut devenir fécond en heureux résultats. Permetlez-moi de vous en présenter quelques développements dans un plan, incomplet, il est vrai, à bien des égards, mais qui, perfectionné par vos lumières, pourra vous faire atteindre le but que vous vous êtes proposé. Les principales causes qui s’opposaient à ce que le clergé, avec les biens qu’il possédait, ne fût aussi utile à l’Etat qu’il pouvait l’être, étaient sans doute : L’espèce d’isolement du reste de la nation, dans le sein de laquelle il formait un ordre distinct et privilégié ; Les exemptions pécuniaires dont il jouissait ; La distribution inégale de ses revenus parmi ses propres membres, dont une partie des plus utiles gémissait dans l’indigence ; L’inutilité de certains bénéfices qui, comblant de richesses les titulaires, ne leur imposaient cependant aucune obligation effective ; Enfin, beaucoup de maisons religieuses qui, avec de riches domaines, ne présentaient d’autre utilité que de nourrir des individus qui auraient pu concourir efficacement au bien public, et soulager leurs concitoyens d’une partie du fardeau qui les accablait. Vous avez déjà réformé certains de ces abus. Le clergé ne fait plus un ordre à part. Ses membres n’ont plus de privilèges pécuniaires. Leur contribution est égale à celle de leurs concitoyens. La pluralité des bénéfices est défendue. Pour achever de rétablir l’ordre parmi le clergé, il ne s’agit plus que d’abolir les bénéfices sans objet, de retrancher le superflu de ceux qui sont utiles, de porter dans les maisons religieuses une réforme telle, que leur existence devienne plus utile à l’Etat que leur destruction, et que ces nouvelles mesures procurent à la fois, et les fonds nécessaires pour doter convenablement les curés à portion congrue, un versement annuel dans le Trésor national, un secours actuel en argent, proportionné aux besoins de l’Etat, un soulagement pour les pères de famille indigents, enfin plus de zèle, plus d’activité pour les défrichements et l’agriculture. Tels sont, Messieurs, les avantages que le plan dont je vais avoir l’honneur de vous soumettre une partie seulement me paraît présenter. D’abord, pour doter la classe des ecclésiastiques la plus utile et la plus intéressante, il est de toute justice de lui attribuer, dans une juste proportion, une partie des revenus de celle qui n’offre ancune espèce d’utilité, et d’abolir en conséquence les titres d'abbés. Les revenus de toutes les abbayes ont trois différentes destinations : un tiersjappartient à l’abbé commendataire ; uu tiers, appelé tiers lot, est destiné aux frais du culte, aux aumônes, aux réparations des églises et des bâtiments, à satisfaire, en un mot, à toutes les charges de l’abbaye ; l’autre tiers est réservé à la subsistance et à l’entretien des religieux. Le tiers-lot n’appartenant ni aux abbés, ni aux religieux, peut être dès à présent, sans injustice, (1) Ce discours n’a pas été inséré au Moniteur.