638 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [29 septembre 1~91.] je rédigerai celui dont je m’occupe en ce moment, dans les principes que je viens d’énoncer; sauf à revoir un jour ces œuvres de la suspicion pour y établir une concordance du moins supportable. En quoi consiste ici le germe dont il s’agit ? Je réponds que partout il consiste en différence et en puissance. Ici, il est question de différencier, pour certains, les peines auxquelles doivent être soumis les officiers d’avec celles infligées aux soldats ; je ne dis pas que la peine appliquée à tel délit doit être moindre pour l'officier que pour le soldat, tant s’en faut ; je dis seulement que la peine ne doit pas toujours être de même nature pour fofticier et le soldat, et que surtout elle ne doit point porter un caractère destructif de la considération du grade. Ne confondons point une considération à laquelle tous peuvent prétendre et parvenir, avec des privilèges héréditaires. Chacun pouvant mériter et obtenir celle-là, le législab ur, par des vues profondes et sages, semble accorder à la vanité ce qui est un élément de la chose militaire, qu’il a modifié et placé de manière à ce qu’il agisse principalement sur les imaginations, afin de suppléer, par une espèce de fantôme, à l’impossibilité de faire des lois pour cette immensité de circonstances dissemblables, où les agents de l’échelle hiérarchique doivent avoir les uns sur les autres une puissance morale, capable de cq: - tenir et de diriger une masse de forces physique-, dont l’explosion aurait des suites funestes ; et aussi où quelquefois ses agents supérieurs doivent encore avoir une latitude d’autorité arbitraire, proportionnée à l’importance des commissions ou des fonctions, dont ils sont chargés. Que l’Assemblée nationale ne s’effarouche point de ce mot « arbitraire »; il est de grâce et de punidon, et ne s’étend ni sur la \ie, ni sur l’honneur, ni sur l’état du subordonné. C’est une auréole de commandement dont les bons effets sont incalculables, les abus à peu près zéro, et sans laquelle il n’y a ni justice ni discipline dans une armée, où les fautes journalières sont toujours en grand nombre, et où la plaidoirie, métamorphosant un camp en barreau, ne présenterait qu’on chaos ridicule et méprisable. Oui, si l’Assemblée se refusait de laisser aux chefs cette portion d’arbitraire, qui, d’une part, abrège et simplifie tout, et, de l’autre part, répand de fa considération sur les grades, sous peu, personne ne douterait plus qu’il ne faille dans l’armée nue subordination d’opinion, et que cette opinion ne s’établît point par l’assimilation des supérieurs aux inférieurs, et par de tiéquents compromis entre eux. L’on m’objectera qu’il n’y a point de plaidoirie pour les fautes, que la cour martiale ne connaît que les délits. Mais c’est une erreur que cette objection : 1° parce que le conseil de discipline est déjà un jury, quoi qu’il n’en porte pas le nom; 2° parce que les circonstances sont si diverses dans notre métier, qu’un même fait peut ici être un délie et là n’être pas mêmeune faute; c’est pourquoi je désire que le commandant de la troupe, qui sait distinguer les hommes et les circonstances, puisse user d’indulgence, en n’infligeant qu’une punition de discipline à tel homme qui aura failli en telle circonstance, et dont le jugement légal n’entraînerait que des longueurs, au détriment de la considération du chef et du bien du service ; et que, dans le cas où le commissaire-auditeur ou le prévenu lui-même requerrait un jury, et où le jury déclarerait que le prévenu n’est coupable qu’au troisième ou au second chef, le commandant puisse, ou lui faire grâce, ou lut infliger t lie punition de discipline qu’il jugera avoir méritée ; à moins que l’article de la loi ne contienne la peine qui doit être appliquée à tel délit au troisième ou au second chef. On voit donc, et on le verra encore mieux dans les articles, que je n’étends pas fort loin l’autorité graciable des commandants, que je n’en demande que ce qu’il en faut rigoureusement pour qu’une armée ne tombe pas en dissolution ; quoiqu’il me soit démontré qu’à la guerre tout commandant en premier, ne fût-ce que d’un détachement de 50 hommes, devrait avoir la dictature sur sa troupe. Mais les esprits étant encore frappés de défiance , je transigerai avec eux, en ne proposant que la possibilité de conféier ce grand pouvoir, dont la simple présence est déjà si imposante qu’il agit même sans se déployer, et que lorsqu’il se déploie, il produit, par la promptitude de son action, l'effet de la volonté de l’E'e nel, Et comme la crainte de la mort est la première loi de la nature, que c’est cette loi qui veille sans cesse à la conservation des êtres vivants ; que sans elle les espèces animées n’eussent paru qu’un jour sur la terre et que le globe que nous habitons ne serait qu’une vaste solitude; Je rétablis la peine de mort et une mort honteuse pour certains délits majeurs qui attaquent les fondements de l’existence d’une armée, afin que la honte et la mort se confondent dans l’esprit, et n’y forment, pour ainsi dire, qu’une seule et même idée avec les délits auxquels je les attache; lorsque, par contre, la mort disparaît devant le sentiment du devoir et de l’honneur, le besoin de l’estime, l’amour de ta renommée, l’ambition de s’élever et c*t attrait du beau moral qui a son principe dans la perfectibili é d’un être créé pour de hautes destinées. C’est ainsi que le législateur concilie les contraires et atteint le but qu’il se propose, quand, puisant des lois dans les lois invariables de la nature, il fonde ses institutions sur nette action et cette réaction que le créateur a placées dans le monde moral comme dans le monde physique; car la chute des Empires vient toujours de ce que le législateur a mal combiné la force qui attire l’homme vers le centre de l’intérêt personnel, avec la force qui doit l’attirer vers le centre commun de l’intérêt social. Cette dernière réflexion fournit tant à la pensée étaux regrets que je m’en arrache pour passer au projet que je suis chargé de vous soumettre. TITRE 1er. De la juridiction militaire. Art. 1er. « Les délits militaires consistent dans la violation du devoir, de la discipline et de la subordination militaire, et la loi détermine h s peines qui doivent y être appliquées. Art. 2. « En tout jugement d’un délit dont la loi admet plusieurs chefs, si le prévenu est trouvé coupable, le jury prononcera si les circonstances ou d’autres considérations h* rendent coupable au troisième, au second, ou au premf r chef. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [29 septembre 179!.] Arl. 3. ,< Lorsque la loi ne détermine pas la peine à appliquer au troisième ou au second chef d’un délit, le déclaré coupable au troisième ou au second chef, subira la punition de discipline qui sera ordonnée par le commandant de la troupe dont il fait partie. Art. 4. « Aucun fait ne peut être imputé à un délit militaire, s’il n’est déclaré tel par la loi. Ai t. 5. « Nul n’est exempt de la loi commune et de la juridiction des tribunaux, sous prétexte du service militaire; et tout délit qui n’attaque pas immédiatement le devoir, ou la discipline, ou la subordination militaire, est un délit commun dont la connaissance appartient aux juges ordinaires, et pour raison duquel le prévenu, soldat, sous-officier, ou officier, ne peut être traduit que devant eux. Art. 6. « Nul délit n’est militaire, s’il n’a été commis par un citoyen qui fait partie de l’armée; tout autre citoyen “ne peut jamais être traduit, comme prévenu, devant les juges délégués par la loi militaire. Art. 7. « Si, parmi deux ou plusieurs prévenus du même délit, il y a un ou plusieurs militaires, et un ou plusieurs citoyens non militaires, la connaissance en appartient aux juges ordinaires. Art. 8. « Si, dans le même fait, il y a complication de délit commun et de délit militaire, c'est aux juges ordinaires d’en prendre connaissance. Art. 9. « Si, pour raison de deux faits, la même personne est dans le même temps prévenue d’un délit commun et d’un délit militaire, la poursuite en est portée devant les juges ordinaires. Art. 10. « Lorsque les juges ordinaires connaissent en même temps, par la préférence qui leur est accordée, d’un délit commun et d’un délit militaire, ils appliqueront les peines de l’un et de l’autre, si elles sont compatibles, et la plus grave si elles sont incompatibles. Art. 11. « Le condamné a le droit de demander la cassation du jugement, et le commissaire-auditeur a le même droit: mais la déclaration doit en être faite dans les trois jours qui suivent la lecture du jugement; et, dans les trois jours suivants, la procédure et le jugement doivent être envoyés au greffe du tribunal de cassation, pour en prendre connaissance dans la forme et les délais prescrits à l’égard des jugements criminels en général. Art. 12. « En cas de prévarication de la part des juges, l’accusé a le droit de les prendre à partie et de les citer au tribunal de cassation . Art. 13. « Tout général en chef pourra, à la guerre, 639 faire un règlement pour le maintien du bon ordre dans son armée; et ce règlement aura force de loi pendant la durée du commandement de ce général en chef. Art. 14. « Les ordres de circonstance que donnera à la guerre un commandant en premier d’une troupe ou d’un corps détaché, auront force de loi pendant la durée de son commandement. Art. 15. « Les peines attachées aux délits prévus par le règlement du général en chef, ou les ordres de circonstance du commandant en premier, ne pourront être appliquées que conformément à la loi, si elles s’éteudent sur la vie, ou sur l’honneur, ou sur l’état du prévenu. Art. 16. « L’on sera censé être en temps de guerre, pour l’exercice de l’autorité accordée aux généraux en chef, aux commandants en premier, et pour l’application des peines, à raison du temps de guerre, après que la proclamation en aura été faite aux troupes ; et, en temps de paix, tout rassemblement de troupes campées ou cantonnées pour former un camp sera censé être en état de guerre. Art. 17. « il n’est pas dérogé, par les articles du présent décret, à l’article 3 de la loi du 22 septembre 1790, concernant la compétence des tribunaux militaires à l’égard des personnes qui suivent l’armée. Art. 18. « La dictature militaire consiste en ce que celui qui en est revêtu peut, de son chef et de son autorité suprême, appliquer à sis subordonné-, sans formes ni procès, tous les genres de peines établis par la loi. Art. 19. « La dictature militaire ne peut être conférée que par nn décret du Corps législatif; et le général qui s’en trouve investi peut la communiquer à ceux de ses inférieurs qu’il chargerait de quelque expédition importante. Art. 20. « Dans tous lis cas, le dictateur sera proclamé à l’ordre, et ensuite reconnu comme tel à la tête de la troupe dont il aura le commandement. Art. 21. « Par la dénomination de militaire, la loi entend tous les individus qui composent l’armée, sans aucune distinction de grade, de métier ou de profession. TITRE IL Des-délits et des peines. Art. 1er. « Tout soldat, tout sous-officier, tout officier qui, en cas d’alerte, d’appel ou de la générale, ne se sera pas rendu h son poste au moment où la troupe prend les armes, pourra être puni d’une punition de discipline par le commandant de la troupe dont il fait partie, ou être traduit devant la cour martiale. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [29 septembre 1791. J g40 [Assemblée nationale.] « S’il est traduit devant la cour martiale et déclaré coupable au troisième ou au second chef, la punition en appartiendra au commandant de la troupe dont il fait partie; et s'il est déclaré coupable au premier chef, la peine est, en temps de paix, de 3 mois de prison, et, en temps de guerre, d’être renvoyé du service. Art. 2. « Le militaire qui, à la guerre, ne se sera pas rendu à son poste, ou qui aura abandonné son poste pour songer à sa propre sûreté sera pendu. Art. 3. « Le militaire qui, dans une place prise d’assaut, quittera son poste pour se livrer au pillage, sera puni de la peine appliquée à ce délit par la proclamation du généra! qui aura commandé l’assaut. Art. 4. « Tout soldat trouvé endormi en faction ou en vedette sera puni d’une punition de discipline par le commandant de la troupe dont il fait partie, si le commissaire-auditeur ne juge pas devoir le poursuivre devant la cour martiale. « Dans le cas où le prévenu serait traduit devant la cour martiale et déclaré coupable au premier chef, la peine est, en temps de paix, de 3 mois de prison, et, en temps de guerre, d’être pendu. Art. 5. « Tout commandant d’un poste, tout sergent d’un poste, ainsi que la sentinelle qui sera convaincu d’avoir transmis de fausses consignes à la place de celles qu’il avait reçues, sera peudu. Art. 6. « Le commandant d’une patrouille, qui sera convaincu d’avoir perfidement caché au commandant de son posie les découvertes qu’il aura faites, sera pendu. Art. 7. u Le commandant d’un poste qui tairait à celui qui le relève, les découveries essentielles qu’il aurait faites, soit par lui-même, soit par ses patrouilles, soit par ses espions, ou par tomes autres personnes, relativement à la défense du poste, sera pendu. Art. 8. « Le commandant d’un poste qui aura cru devoir s’écarter de sa consigne, en sera responsable au commandant de la troupe dont il fait partie, et si, traduit à ia cour martiale, il est déclaré coupable au premier chef, il sera pendu. Art. 9. « Un soldat en sentinelle ou en vedetle qui aura manqué à sa consigne, sera puni d’une punition de discipline, par le commandant de la troupe dont il fait partie, et si, traduit à la cour martiale, il est déclaré coupable au premier chef, il sera pendu. Art. 10. « Tout soldat, sous-officier, qui aura quitté son poste sans la permission de son commandant, sera puni, d’une punition de discipline, par le commandant de la troupe dont il fait partie; et si, Iraduit à la cour martiale, i! est déclaré coupable au premier chef, il sera pendu. Art. il. « Tout, soldat, sous-ofücier ou officier, convaincu d’avoir communiqué le secret du poste ou le mot d’ordre à quelqu’un qui n’en devait pas avoir connaissance, sera puni, d’une punition de discipline, par le commandant de la troupe dont il fait partie; et si, traduit à la cour martiale , il est déclaré coupable au premier cli ef, il sera pendu. Art. 12. « Tout militaire convaincu d’avoir insulté une sentinelle de propos ou de geste, la peine est contre le simple militaire d’un mois d’arrestation, de six semaines contre le sous-officier, et de 13 mois contre l’officier. « Si l’insulte avait été faite avec une arme quelconque, ou si elle consistait en voies de faits, et que la sentinelle n’eût pas tué cet ennemi de la loi, la peine est d’être pendu. Art. 13. « Tout militaire convaincu d’entretenir, ou d’avoir entretenu une correspondance dans Tarin e ennemie, sans la permission par écrit du commandant de la troupe dont il fait partie, sera puni par ledit commandant d’une punition de discipline; et s’il est soumis au juré d’accusation, et déclaré suspect, il sera livre aux tribunaux ordinaiies. Art. 14. « Tout militaire qui aura passé les postes avancés de l’année, oa qui sera sorti d’une place assiégée, sans la permission du commandant de la troupe dont il fait partie, sera puni conformément au règlement du général de l’armée, ou du commandant de la place. Art. 15. « Tout militaire convaincu d’avoir été en maraude sera puni conformément au règlement du général de l’armée; et, s’il est traduit à la cour martiale et déclaré coupable au premier chef, il sera pendu. Art. 16. « Si, sur la réclamation d’un subordonné, ou du commissaire-auditeur, un supérieur est convaincu d’avoir par haine, vengeance ou autre passion, donné un ordre à son subordonné dans la vue de le faire périr, la peine est d’être dégradé et renvoyé du service ; et si le subordonné avait en effet péri en exécutant Tordre de ce supérieur, la peine est d’être pendu. Art. 17. « Si, sur la réclamation d’un subordonné, ou du commissaire-auditeur, un supérieur est convaincu de vexer ses subordonnés, sous prétexte de leur faire remplir leur devoir, ou sous quelque prétexte que ce soit, la peine est d’être suspendu du commandement pour 6 mois, et, en cas de récidive, la peine est d’être destitué et déclaré incapable de commander. Art. 18. « Un supérieur convaincu d’avoir sciemment infligé une punition injuste à son subordonné, sera suspendu pour 2 mois de ses fonctions s’il est déclaré coupable au troisième chef, pour 6 mois si c’est au second chef, et pour un an si c’est au premier chef. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [29 septembre 1791.] [;41 « En cas de récidive du même supérieur au même inférieur, la peine est du double ; et à la troisième fois du même supérieur au même inférieur, la peine est d’être destitué et déclaré incapable de commander. Art. 19. « Si un supérieur a méchamment offensé un subordonné actuellement de service, la peine est d’être suspendu de ses fonctions pour 6 mois, s’il est déclaré coupable au troisième chef ; pour un an, si c’est au second chef; et si c’est au premier chef, la peine est d’être envoyé dans une citadelle pour un an. « En cas de récidive du même supérieur au même inférieur, la peine est d’être destitué et renvoyé du service. Art. 20. « Si un supérieur a offensé son subordonné, soit sous les armes ou hors des armes, par des propos injurieux à son honneur, il sera tenu de lui en faire une réparation aussi publique qu’aura été l’offense, à peine d’être destitué s’il s’y refusait. Art. 21. « Si le supérieur, dans l’exercice de ses fonctions, a méchammgnt maltraité un soldat, la peine est d’être suspendu de ses fonctions pour 6 mois ; si le subordonné maltraité était un sous-officier, la suspension sera d’un an ; et si c’était un officier, le supérieur sera dégradé et renvoyé du service. Art. 22. « Le subordonné, convaincu de n’être pas fondé dans l’accusation formée contre son supérieur, sera puni de 2 mois de prison si c’est un soldat, de 4 mois si c’est un sous-officier, et d’un an si c’est un officier. a En cas de récidive du même subordonné contre un supérieur quelconque, la peine sera du double pour le soldat et le sous-officier ; et pour l’officier, la peine sera d’être renvoyé du service. Art. 23. « Tout subordonné qui ne s’est pas conformé sur-le-champ et sans murmure à un ordre de son supérieur, relatif au service militaire et à la discipline, à la subordination, à la tenue, sera, en temps de paix, puni d’un, de 2, de 4 mois de prison, suivant qu’il sera déclaré coupable au troisième, au second, au premier chef. « Si l’acte de désobéissance a lieu en temps de guerre, la prison sera remplacée au troisième et second chef, par la garde du camp, le piquet, les corvées, pour le soldai et le sous-officier ; et si c’est un officier qui s’en est rendu coupable, la peine est pour l’officier d’être renvoyé du service; mais, en temps de guerre, tout subordonné, de quelque grade qu’il soit, déclaré coupable de désobéissance au premier chef, sera pendu. Art. 24. « Si un subordonné est convaincu d’avoir menacé son supérieur de la parole ou du geste, la peine est de 3 mois de prison contre le soldat, de 6 mois contre le sous-ofticier et d’un an contre l’officier. « Si la menacea été accompagnée de quelques mouvements d’armes, la peine est contre le sol-1" Série. T. XXXI. datde 2 ans de chaîne, contre le sous-officier de 4 ans et contre l’officier d’être cassé et renvoyé du service. Art. 25. « Si un subordonné est convaincu d’avoir frappé son supérieur, la peine est contre le soldat, de 4 ans de chaîne, contre le sous-officier de 8 ans, et contre l’officier d’être cassé et de 12 ans de prison. Art. 26. « Si un subordonné est convaincu d’avoir blessé méchamment son supérieur, la peine est d’être pendu. Art. 27. « S’il y a révolte contre les supérieurs, la p ine de la désobéissance combinée est, à l’égard de ceux qui l’ont suscitée, d’être pendus, et de ceux qui l’ont partagée, d’être condamnés à 10 ans de chaîne. Art. 28. « Si la désobéissance combinée consiste en résistance d’inertie, la peine contre les moteurs de cette révolte est de 5 ans de chaîne, et contre ceux qui ne se seront pas rendus à la troisième sommation du commandant, la peine est d’être passés par les courroies et chassés. Art. 29. « En cas d’attroupement, les supérieurs commanderont qu’on se sépare et que chacun se retire; et s’ils ne sont pas sur-le-champ obéis, ils nommeront ou désigneront ceux qu’ils jugeront être les auteurs de l’attroupement, qui dès lors demeurent déclarés chefs de révolte, et subiront la peine énoncée dans l’article 27. « Si le rassemblement n’est pas dissous par le commandement fait au nom de la loi, les supérieurs sont autorisés à employer tels moyens de force et de violence qu’ils jugeront bons, sans préjudice des peines portées, et sans que les supérieurs puissent jamais être ni recherchés, ni inquiétés pour raison des voies de force et de violence qu’ils auront jugé nécessaire d’employer. Art. 30. « Dans le cas de la peine de l’arrestation, ainsique de celle de suspension, par jugement de la cour martiale, le temps entier de la peine est distrait de celui du service. Art. 31. « Celui qui volera l’argent de l’ordinaire ou du pain, ou des effets à ses camarades; celui qui vendra ou qui mettra en gage en tout ou en partie, ses armes ou son équipement, ou son fourniment, sera passé par les courroies et chassé. Art. 32. « Celui qui aura déserté en temps de paix, n’étant pas de service, sera puni de 3 mois de prison ; s’il était de service, de 6 mois de prison ; et s’il a déserté, étant de faction, il sera passé par les courroies et chassé. Art. 33. « Celui qui aura déserté en temps de guerre, n’étant pas de service, sera condamné à 2 ans de chaîne; s’il était de service, à 6 ans de chaîne; 41 642 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [29 septembre 1791.; s’il était en faction lors de sa désertion, il sera condamné aux galères perpétuelles; s’il a passé chez l’ennemi, il aura le poing coupé et sera pendu. Art. 34. « La loi accorde au déserteur 6 jours de repentir, pendant lesquels il peut revenir à ses drapeaux, ou prouver, par une déclaration authentique, que son intention est d’y revenir; et en ce, cas, la peine ne sera que d’une prison d’autant de jours qu’il en aura été absent; mais s'il est arrêté pendant lesdits 6 jours de repentir, il sera considéré et puni comme déserteur. Art. 35. « Tout militaire condamné à être chassé sera préalablement dépouillé de son uniforme, et cette peine emporte la dégradation civique, et l’expédition du jugement tiendra lieu de congé absolu à celui qui aura été chassé. Art. 36. e Le ministre de la guerre fera un règlement d’exécution pour le présent décret; et tout militaire en activité ou non, qui aura à se plaindre d’une injustice éprouvée sous l'ancien régime, est autorisé à se pourvoir devant la cour martiale de l’arrondissement où se trouvera actuellement le corps dans lequel il a éprouvé cette injustice, pour en obtenir le redressement. » Plusieurs membres observent que ce n’est pas à la veille de la clôture de la session qu’un objet aussi important peut être porté à la délibération de l’Assemblée. M. de Whnpfen, rapporteur, insiste pour que ce décret, qu’il considère comme très pressant, soit adopté dans le cours de cette séance; il annonce d’ailleurs que le comité militaire a été unanime sur le projet présenté. (L’Assemblée, consultée, repousse l’ajournement.) Les articles 1 à 17 du titre Ier, sont successivement mis aux voix et adoptés, à l’exception des articles 2 et 3. Une discussion s’engage sur les articles 18, 19 et 20 du même titre, ayant pour objet de conférer la dictature militaire aux généraux d’armée. M. Robespierre dit que c’est violer tous les principes et tous les droits que d’établir ainsi une dictature, espèce de dignité au-dessus des lois, contraire à la sûreté des individus et au bien de la société; que c’est un moyen de faire commettre des vexations et des atrocités; qu’un pareil genre d’autorité est incompatible avec les principes de la Constitution et qu’elle a déjà été rejetée avec horreur. (Applaudissements.) _ M. Emmery insiste pour l’adoption des articles du comité : il observe qu’il est des cas si urgents et d’une nécessité si impérieuse, qu’il est impossible de ne pas créer une puissance dictatoriale pour y mettre ordre. (Murmures.) Il dit que l’armée ne doit pas se conduire comme le reste de la société et que la dictature militaire dépendra toujours de la loi. Il observe que, d’ailleurs, on peut restreindre cette dictature aux cas de guerre extérieure et lorsque l’armée sera hors du royaume. (Murmures.) M. Rewbell s’élève avec chaleur contre toute proposition de dictature : il dit que le rapporteur lui-même convient que c’est donner à un seul homme le droit arbitraire de vie et de mort sur les autres hommes ; qu’une Assemblée qui a établi la liberté et assuré les droits des citoyens ne doit pas oublier que l’armée est aussi composée de citoyens et qu’une dictature fut toujours un fléau pour les pays qui la virent s’élever dans leur sein. (Applaudissements .) Plusieurs membres demandent l’ajournement. M. de Wimpfen, rapporteur, déclare consentir à l’ajournement. (L’Assemblée, consultée, décrète l’ajournement des articles 18, 19 et 20 du titre Ier; elle adopte ensuite l’article 21 du même titre, ainsi que les 9 premiers articles du titre II et renvoie la suite de la discussion à demain.) M. de Wiutpfen, rapporteur, prévient l’Assemblée qu’il donnera demain lecture des articles décrétés aujourd’hui. M. le Président lève la séance à dix heures et demie. ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU JEUDI 29 SEPTEMBRE 1791, AU SOIR. INSTRUCTION sur la PROCÉDURE CRIMINELLE (1). De la police. L’Assemblée nationale, en s’occupant de pourvoir à la sûreté publique, par la répression des délits qui troublent la société, a senti que l’accomplissement de ce but exigeait le concours de deux pouvoirs : celui de la police et celui de la justice. La police, considérée sous ses rapports avec la sûrete publique, doit précéder l’action de la justice; la vigilance doit être son caractère principal; la société, considérée en masse, est l’objet essentiel de sa sollicitude. L’action de la police sur chaque citoyen doit être assez prompte et assez sûre pour qu’aucun d’eux ne puisse l’éluder; elle doit faire en sorte que rien ne lui échappe ; mais son action doit être assez modérée pour ne pas blesser l’individu qu’elle atteint ; il ne faut pas qu’il ait à regretter l’institution d’un pouvoir constitué pour son avantage, et que les précautions prises en sa faveur soient plus insupportables que les maux dont elles doivent l’affranchir. L’Assemblée nationale n’a point créé de nouveaux mandataires pour exercer la police de sûreté; elle l’a confiée à des agents déjà honorés par la Constitution du dépôt d’une grande confiance; c’est principalement aux juges de paix qu'elle en a conféré la plénitude; et, en ajoutant ce nouveau pouvoir à celui dont les juges de paix jouissaient antérieurement, elle a pensé que (1) Voir, ci-dcssus, séances des 28 et 29 septembre 1791, au soir, pages 532 et 636.