182 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 31 La Convention nationale décrète que la garde sous la surveillance duquel le député Julien Le Febvre se trouve maintenant lui sera retirée et qu’il sera libre de demeurer dans son domicile (79). [Julien Le Febvre, représentant du peuple au président de la Convention nationale, Paris le 8 brumaire an III] (80) Citoyen président, Je te prie d’informer la Convention nationale que je suis encore sous la garde incommode d’un surveillant, lorsque tous mes collègues en ont été délivrés. J’attends la même justice de la Convention et j’espère qu’elle ne me la refusera pas, surtout quand elle saura que je suis dans le dénuement le plus absolu. Salut et fraternité. Julien Le Febvre. 32 L’Assemblée reprend la discussion sur le projet de décret relatif aux députés accusés. MERLIN (de Douai) relit les articles décrétés de la loi sur les formalités à remplir pour dénoncer et accuser les représentants du peuple. Les articles suivant sont décrétés sans discussion. Voici le projet en entier (81) : La Convention nationale, après avoir entendu [MERLIN (de Douai), au nom de] ses comités de Salut public, de Sûreté générale et de Législation, décrète : Article premier. - Toute dénonciation contre un représentant du peuple sera portée ou renvoyée devant les comités de Salut public, de Sûreté générale et de Législation, réunis et elle lui sera communiquée avant qu’il ne puisse en être rendu compte à la Convention nationale. Art. II. - Si les trois comités pensent qu’il doit être donné suite à la dénonciation, ils déclareront à la Convention nationale qu’ils estiment qu’il y a lieu à examen. Cette déclaration ne sera pas motivée. Art. III. - Il sera immédiatement après, nommé au sort une commission de vingt-un membres de la Convention nationale, pour lui faire un rapport sur les faits dénoncés et sur les pièces produites à l’appui. (79) P.-V., XL VIII, 100. C 325, pl. 1365, p. 27, minute de la main de Boissy, rapporteur anonyme selon C* II 21, p. 19. (80) C 325, pl. 1365, p. 27. (81) Moniteur, XXII, 382. J. Perlet, n° 766. Art. IV. - Pour parvenir à effectuer cette nomination, il sera fait un appel nominal de tous les membres de la Convention nationale, distraction faite de ceux qui seront en mission ou absens en vertu de décret, ainsi que des membres des trois comités ci-dessus désignés et du prévenu. Art. V. - Chaque membre appelé se présentera à la tribune; il inscrira son nom sur un bulletin disposé à cet effet, qu’il remettra ostensiblement au président. Le président en fera lecture et le déposera dans une urne qui sera placée sur le bureau. Art. VI. - Si un membre appelé n’est pas présent à la séance, il sera supplée, pour l’inscription de son nom, par l’un des secrétaires qui signera le bulletin. Art. VII. - L’appel nominal terminé, le président agitera l’urne et l’un des secrétaires en tirera successivement vingt-un bulletins. Le nom de chaque membre compris dans le bulletin, sorti, il sera vérifié par deux secrétaires et remis au président, qui le proclamera à haute voix. Art. VIII. - Aucun des membres désignés par le sort ne pourra être récusé ni se récuser. Art. IX. - Le rapport de la commission ne pourra porter que sur les faits compris dans la dénonciation sur laquelle les trois comités auront déclaré qu’il y a lieu à examen, ou résultans des pièces remises par eux à la commision. Art. X. - Avant de présenter son rapport à la Convention nationale, la commission entendra le prévenu, lui communiquera les pièces sans déplacement et lui en fera délivrer copie s’il la demande. Art. XI. - Après le rapport, s’il tend au décret d’accusation, la Convention nationale décidera s’il y a lieu à l’arrestation provisoire. Art. XII. - Le rapport et les pièces y relatives seront imprimés et distribués. La discussion ne pourra s’ouvrir que trois jours après la distribution. Art. XIII. - Le prévenu pourra faire imprimer et distribuer aux membres de la Convention nationale telles pièces et mémoires qu’il jugera utiles à sa défense (82). Art. XTV. - Le prévenu sera présent à la discussion et y sera entendu sur les faits articulés et précisés qui devront servir de bases à l’acte d’accusation. Art. XV. - Il ne pourra être rendu de décret d’accusation qu’à l’appel nominal (83). (82) M. U., XLV, 138-139, précise que cet article a été pris sur la motion de Goujon. (83) M. U., XLV, 138-139, indique que cet article a été pris sur la motion de Du Roy. SÉANCE DU 8 BRUMAIRE AN III (29 OCTOBRE 1794) - N° 33 183 Art. XVI. - Si la Convention nationale décrète qu’il y a lieu à accusation contre le prévenu, la commission présentera le lendemain l’acte d’accusation qui contiendra les faits articulés et précisés sur lesquels le prévenu aura été entendu dans la Convention nationale et sur lesquels l’instruction devra porter. Art. XVII. - Le tribunal qui sera chargé d’instruire ne pourra informer et juger que sur les faits compris dans l’acte d’accusation (84). [MERLIN fait de suite la seconde lecture de tout le projet de décret il est adopté sans réclamation.] (85) PERES : Je viens reproduire le dernier article de mon projet de décret. Il est d’une justice et d’une moralité profondes. Vous ne devez pas vouloir qu’un caractère aussi grand, aussi auguste que celui de représentant du peuple, repose sur une tête coupable et convaincue. Je demande donc que, lorsqu’un député accusé aura été convaincu, il vienne à la barre, et que le président lui dise... ( Plusieurs voix : Cela ne vaut rien; l’ordre du jour!) L’ordre du jour est adopté. PELET : Pourquoi n’adopterions-nous pas ce qui se pratiquait à Athènes et à Rome ? Lorqu’un fonctionnaire avait commis un délit grave, il était mis à mort, précipité de la roche Tarpéienne. Mais lorsque la liberté publique n’était pas compromise par l’existence de ce magistrat, alors il était banni à perpétuité ou pour un temps. Je demande que cette idée soit mûrie dans les comités ; car j’espère que nous ne nous séparerons pas sans avoir aboli la peine de mort. {On applaudit.) Le renvoi est décrété (86). 33 CLAUZEL obtient la parole, et dit : Citoyens, pour satisfaire à vos décrets, les comités de Législation, de Salut public et de Sûreté générale m’ont chargé de déclarer, en leur nom, à la Convention nationale, que d’après le compte qui leur a été rendu par le Tribunal révolutionnaire, du procès qui s’instruit contre les membres du ci-devant comité révolutionnaire de Nantes, et ceux qui ont pris part aux atro-(84) P.-V., XL VIII, 100-104. C 325, pl. 1365, p. 28, minute de la main de Merlin (de Douai), rapporteur selon C* Il 21, p. 19. Bull., 8 brum. ; J. Paris, n° 39 ; J. Mont., n° 16 et n° 17 ; Rép., n° 39; Débats, n° 766, 559-560; Moniteur, XXII, 382; Ann. Patr., n° 667 ; Ann. R. F., n° 38 et n° 39 ; C. Eg., n° 802 ; J. Perlet, n° 766; J. Fr., n° 764; Mess. Soir, n° 803; F. de la Républ., n° 39; J. Univ., n° 1798; Gazette Fr., n° 1031; M. U., XLV, 138-139. (85) M. U., XLV, 139. J. Fr., n° 764. (86) Moniteur, XXII, 383 ; Ann. R. F., n° 39 ; J. Perlet, n° 766. cités commises dans ladite commune et aux environs, ils estiment qu’il y a lieu à examiner la conduite du représentant du peuple Carrier, auquel les pièces ont été communiquées. Clauzel propose le projet de décret suivant (87) : La Convention nationale, après avoir entendu la déclaration de [CLAUZEL, au nom de] ses comités de Législation, de Salut public et de Sûreté générale, réunis, portant que, sur le compte rendu en exécution des décrets des 22 et 29 vendémiaire, du procès qui s’instruit contre les anciens membres du comité révolutionnaire de Nantes et sur la lecture des pièces, ils estiment qu’il y a lieu à l’examen relativement à la conduite du représentant du peuple Carrier, décrète qu’il sera, à une séance extraordinaire de ce soir, procédé, conformément à la loi de ce jour, à la nomination d’une commission composée de vingt-un membres, pour lui faire un rapport de la conduite de Carrier (88). [Décrété à l’unanimité et au milieu des acclamations du peuple qui garnissait les tribunes.] (89) La séance est levée à quatre heures (90). En vertu des lois des 7 floréal et 3 fructidor, l’an troisième de la République française une et indivisible. Signé, Marie-Joseph CHÉNIER, président , GUILLEMARDET, BALMAIN, ESCHASSERIAUX jeune, ROISSY [d’ANGLAS], Pierre GUYOMAR, GUIMBERTEAU, secrétaires (91). (87) C 322, pl. 1365, p. 30. Débats, n° 766, 560-561 ; Ann. Patr., n° 667 ; Ann. R. F., n° 38 ; C. Eg., n° 802 ; J. Perlet, n° 766; J. Fr., n° 764; Mess. Soir, n° 803; F. de la Républ., n° 38; J. Univ., n° 1798; Gazette Fr., n° 1031; M. U., XLV, 139. (88) P.-V., XL VIII, 104. C 325, pl. 1365, p.- 30, minute de la main de Clauzel, rapporteur selon C' II 21, p. 19. J. Paris, n° 39 ; J. Mont., n° 16 ; Rép., n° 39 ; Moniteur, XXII, 383 ; Débats, n° 766, 561 ; Ann. Patr., n° 667 ; Ann. R. F., n° 38 et n° 39 ; C. Eg., n° 802 ; J. Perlet, n° 766 ; J. Fr., n° 764 ; Mess. Soir, n° 803 ; F. de la Républ., n“ 39 ; J. Univ., n° 1798 ; Gazette Fr., n° 1031 ; M. U., XLV, 139. (89) Gazette Fr., n° 1031. J. Perlet, n° 766; M. U., XLV, 139. (90) P.-V., XL VIII, 104. Le Moniteur, XXII, 383, J. Perlet, n° 766 indiquent 2 heures, M. U., XLV, 139, 2 heures et demie, C. Eg., n° 802, 3 heures moins un quart et J. Fr., n° 764, 3 heures. (91) P.-V, XLVIII, 104.