[Assemblée nationale.] ARCHIVES ‘PARLEMENTAIRES. [14 septembre 1791.] 035 devant les juges, pour faire ordonner à son profit, provisoirement -et .-sous la -réserve de ses droits, la délivrance de la somme offerte, dans le délai d’un mois -du jour du jugement,; et, faute de réalisation et d’exécution de la pant du débiteur, il sera déchu de ses offres, < En cas 'dfinsuf Usance de la somme offerte, l’intérêt du surplus courra du jour de la demande. « Art. 9‘. Dans les pays et les lieux où l’usage était de ne point payer en argent L’indemnité due par les gens de mainmorte, aux ci-devant seigneurs de fief, à raison des acquisitions faites sous leur mouvance, mais où il était d’usage de fournir pour cette indemnité une rente annuelle, soit en argent, soit en grains, la nation demeure chargée de la prestation de ladite rente, jusqu’à la vente des fonds ; et, en cas de vente, ;elle demeure chargée du remboursement de ladite rente, suivant le taux et les modes fixés par le décret du B mai 1790. « Il en sera fait de même dans les pays où l’usage était de payer l’indemnité par une somme d’argent, si ladite indemnité a été convertie en une rente, par convention. « Art. 10. Dans les pays et les lieux où il était d’usage, pour l’indemnité due par les gens de mainmorte aux ci-devant seigneurs de fief, d’accorder à ceux-ci une prestation d’un droit de quint, lods, mi-lods, ou autre prestation quelconque payable à certaines révolutions, telles que vingt, trente, quarante ans, ou autre révolution, la nation demeure chargée d’acquitter les dites prestations à leur échéance, jusqu’à la vente des fonds ; et, en cas de vente, elle sera tenue de racheter les droits ci-devant seigneuriaux ou casuels dont lesdits fonds étaient tenus avant •l'acquisition faite par la mainmorte, au taux et au mode prescrits par le décret du 3 mai 1790, et delà même manière que si le fonds n’était point passé en mainmorte. » Les 3 premiers articles de ce projet de décret sont successivement mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, voulant faire cesser plusieurs difficultés qui se sont élevées sur l’exécution ou L’interprétation des articles 7, 48, 49, 50, 51 et 52 du décret du 3 mai 1790, et du titre II du décret du 18 décembre dernier, ainsi que sur les articles 19, 20, 40 et 43 du décret du 3 mai, décrète ce qui suit : Art. let. « Lorsqu’il s’agira de racheter des droits ci-devant seigneuriaux, soit fixes soit casuels, ou des rentes foncières ci-devant non rachetables, qui seront affectés à un douaire, soit coutumier, soit préfixe, non ouvert, ledit rachat ne pourra être fait qu’à la charge du remploi, sauf au redevable, qui ne voudra point demeurer garant du remploi, , à consigner le prix du rachat, lequel ne pourra être délivré au mari grevé dudit douaire qu’en vertu d’une ordonnance du tribunal de district sous le ressort duquel se trouveront situés les Jonds chargés desdits droits ou desdites rentes, rendue sur les conclusions du commissaire du roi, auquel il sera justifié de 1! emploi. «(Adopté.) Art. 2. « Dans te pays où -la femme peut consentir A l’aliénation du fonds affecté au douaire, le défaut de remploi ne pourra être ©pposëi par la femme qui aura donné son consentement ;au «rachat, ni par les enfants qui seront héritiers purs Et simples de la femme qui aura donné ce consentement, encore que le fonds dudit douaire leur ait été déclaré propre par la loi ou par la convention. » (Adopté.) Art. ,3. Les deux dispositions préeedentesme pourront autoriser aucun 'recours de la -part de ta femme ou des enfants, à l’égard des rachats qui auront été consommés avant la publication du présent décret. » (Adopté.) Un huissier annonce le roi. Le roi entre dans l’ Assemblée, précédé de la députation et suivi de ses ministres portant la décoration de l’ordre de Saint-Louis. L'Assemblée se lève. Le roi va se placer àla gauche du président et, debout, il dit : « Messieurs, « Je viens consacrer ici solennellement l’acceptation que j’ai donnée à l’acte constitutionnel ; en conséquence, je jure (l'Assemblée s’assied.) d’être fidèle à la nation et A la loi, d’employer tout le pouvoir qui m’est délégué à maintenir la Constitution décrétée par l’Assemblée nationale constituante (le roi s’assied.) (1), et à faire exécuter les lois. (Applaudissements répétés et cris: Vive le roi!) « Puisse cette grande et mémorable époque être celle du rétablissement de la paix, de l’union, et devenir le gage du bonheur du peuple et de la prospérité de l’Empire! » (Nouveaux applaudissements et nouveaux cris : Vive le roi !) M. Duport-Dutertre , ministre de la justice, présente au roi Pacte constitutionnel. Le roi inscrit au bas, en présence de l’Assemblée, les mots : « J’accepte et je ferai exécuter », et appose sa signature. M. D upo rt-Du tertre-, ministre de la justice , descend au bureau, contresigne l’acte constitutionnel avec les autres ministres et le remet à l’un des secrétaires . M. le Président (debout) s’exprime ainsi : « Sire, « De longs abus, qui avaient triomphé des bonnes intentions des meilleurs rois, et qui auraient bravé sans cesse l’autorité du trône, opprimaient la France. (Le roi restant assis, le président s’assied.) « Dépositaire du vœu, des droits et de la puissance du peuple, l’Assemblée nationale a rétabli, par la destruction de tous les abus, les solides bases de la propriété publique. Sire, ce que cette Assemblée a décrété, l’adhésion nationale le ratifie. L’exécution la plus complète dans toutes les parties ce l’Empire atteste l’assentiment général; il déconcerte les projets impuissants de ceux que le mécontentement aveugla trop longtemps sur leurs propres intérêts; il promet à Votre Majesté qu’elle ne voudra plus en vain le bonheur des Français. « L’Assemblée nationale n’a plus rien à désirer en ce jour à jamais mémorable où vous consommez dans son sein, par le plus solennel engage-(1) 'Le Hodey (dans son Journal logographique), relate le fait de la façon suivante : « Le roi s'apercevant que lui seul est debout, s’assied. » 636 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 septembre 1791.1 ment, l’acceptation de la royauté constitutionnelle. C’est l'attachement des Français, c'est leur confiance qui vous défèrent ce titre respectable et pur à la plus belle couronne de i’univers; et ce qui vous le garantit, Sire, c’est l’impérissable autorité d’une Constitution librement décrétée; c’est la force invincible d’un peuple qui s'est senti digne de la liberté; c’est le besoin qu’une aussi grande nation aura toujours de la monarchie héréditaire. « Quand Votre Majesté, attendant de l’expérience les lumières qu’elle va répandre sur Ie3 résultats pratiques de la Constitution, promet de la maintenir au dedans , et de la défendre contre les attaques du dehors , la nation se reposant et sur la justice de ses droits, et sur le sentiment de sa force et de son courage, et sur la loyauté de votre coopération, ne peut connaître au dehors aucun sujet d’alarmes, et va concourir, par sa tranquille confiance, au prompt succès ae son gouvernement intérieur. « Qu’elle doit être grande à nos yeux, Sire ! chère à nos cœurs, et qu’elle sera sublime dans notre histoire, l’époque de cette régénération qui donne à la France des citoyens, aux Français une patrie; à vous, comme roi, un nouveau titre de grandeur et de gloire ; à vous encore, comme homme, une nouvelle source de jouissances et de nouvelles sensations de bonheur! » {Vifs applaudissements dans toutes les parties de la salle.) Le roi quitte sa place et sort de l’Assemblée dans le même appareil qu’à l’arrivée, au milieu des apfdaudissements les plus vifs et des cris répétés de : « Vive le roi ! » M. le Président. Messieurs, on fait la motion que l’Assemblée emière reconduise Sa Majesté jusqu’au château des Tuileries. (Cette motion est adoptée par acclamation.) L’Assemblée entière sort de la salle et accompagne le roi. La séance est levée à midi et demi. PREMIERS ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU MERCREDI 14 SEPTEMBRE 1791. DERNIÈRE OPINION de M. Stanislas Clermont-Tonnerre sur l’affaire d’Avignon , du H septembre 1791. Avertissement. — Après de nombreuses tentatives, on avait envoyé dans le Gomtat 3 médiateurs pour y rétablir la paix; ils ont pris parti, ont accablé les opposants et provoqué un vœu de réunion sous les yeux et par l’influence de l’armée de Jourdan. On a soutenu que la circonstance’ n’empêchait pas de regarder ce vœu comme légal. On a fermé la discussion au moment où je montais à la tribune. On a pris Avignon et le Gomtat. J’imprime cette opinion comme une dernière preuve de mon attachement à ce que j’ai cru la vérité dans cette malheureuse affaire. Messieurs, Il est impossible de séparer, de l’examen du vœu que l’on vous présente au nom des Avigno-nais et des Comtadins, l’examen même de la conduite des médiateurs dont l’influence l’a provoqué. Vos médiateurs vous ont dit hier que leur devoir était tracé dans votre loi ; c’est donc cette loi, c’est le titre même de la mission qu’ils ont reçue, qui doit nous servir de guide. Qu’ordonniez-vous aux médiateurs par votre décret du 25 mai? Vous leur ordonniez de faire tous leurs elforls pour amener les Âvignonais et les Comtadins à la cessation de toute hostilité, comme un provisoire nécessaire avant de prendre aucun parti ultérieur relativement aux droits de la France. Dans ce peu de lignes sont contenus la solution entière des questions qui vous occupent, le jugement de vos commissaires, et les démonstrations que les conclusions prises par M. de Menou, au nom de vos comités, sont tout à fait inadmissibles. J’ai à démontrer que vos commissaires n’ont pas fait tous leurs efforts pour amener les deux partis à la cessation des hostilités. J’ai à en conclure que le préliminaire déclaré par vous-mêmes être un provisoire nécessaire avant de prendre un parti ultérieur relativement aux droits de la France n’ayant pas été rempli, il n’est pas temps selon vous-mêmes, il est inconséquent selon vous-mêmes de prendre le parti ultérieur avant lequel vous avez déclaré le provisoire nécessaire. Toute mon opinion se réduit à ces deux propositions. Je prie ceux qui parleront après et contre moi, ou de prouver que les commissaires ont établi la paix dans le Comtat, ou de nier que vous ayez déclaré que la paix était un provisoire nécessaire avant l’adoption d’aucun parti. Vos commissaires n’ont pas rétabli la paix. Ceci est un fait, et ce fait est prouvé malgré les efforts de vos commissaires pour le détruire. Il y avaitdeux parties belligérantes; ils en ontdésarmé u e et ont protégé l’autre;ils ont laissé à celle-ci les armes avec lesquelles elle opprime, les armes avec lesquelles elle dévaste, les armes avec lesquelles elle a fini par les effrayer et les chasser. Qu’out-ils répondu à ce reproche? Ils vous ont parlé des excès, des crimes commis par le parti qu’ils ont désarmé; ils ont tu, pallié les excès et les crimes commis par le parti qu’ils ont voulu favoriser. Ai-je à vous prouver cette partialité criminelle ? Elle est démontrée par des pièces, elle l’est à tout homme de bonne foi, par la défense même que leur confiance dans la faveur qui les environne leur a permis de prononcer devant vous. Les commissaires ont rédigé et fait accepter, sauf ratification, les préliminaires d’un traité de paix qui accorde toute influence à l’Assemblée illégale de Vaucluse; et, en offrant ce traité aux Carpentrassiens, ils leur ont écrit en propres termes : « Peut-on encore hésiter dans votre commune à recevoir des mains des médiateurs le traité de pacification qu’ils vous présentent? Pressez vos concitoyens... Dites-leur que, s’ils résistent, nous avons la force en main pour les contenir. » Leur lettreaux Carpentrassiens prouve la manière dont ils ont accueilli les observations. Les commissaires ont reconnu d’abord la légalité de l’assemblée électorale de Vaucluse, de cette assemblée créée par le parti favorisé et en horreur à celui qui n’a pas plu à vos médiateurs. Ils l’ont reconnue, disent-ils eux-mêmes, pour l’honneur des principes, comme la dépositaire de la souveraineté nationale ; ils ont donc prononcé entre deux partis ; ils ont prononcé en souverains ; ils ont reconnu la souveraineté nationale dans le rassemblement fait par l’un des partis, et mé-