305 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 avril 1790.] M. Garat Vainé. Si le serment n’était clair, n’était précis, il serait odieux. On ne se joue pas du serment ; il ne doit jamais être un piège pour la conscience de celui auquel on l’impose. Le sens du vôtre est de déclarer n’avoir jamais signé, ne vouloir pas signer, être déterminé à ne signer jamais des actes sanctionnés ou acceptés. Le serment est indivisible de l’acceptation ou de la sanction; cela est si évident, que le provocateur du décret, quand il a voulu le faire entendre d’une autre manière, a été obligé d’ajouter un mot à la formule du serment, puisqu’il a dit : les décrets rendus par l’Assemblée; le mot rendu ne se trouve pas dans la formule. Au surplus, je ne puis concevoir que des membres puissent être exclus des dignités de l’Assemblée sans être exclus de l’Assemblée même; je ne puis concevoir qu’une Assemblée soit divisée en deux espèces d’individus, les uns incapables d’occuper des places, les autres admissibles à ces places; voilà une bizarrerie qu’il est impossible d’admettre : quiconque est indigne de nos places est indigne de cette Assemblée. Cela posé, on parle d’un acte particulier, et j’entends une partie de l’Assemblée déclarer qu’elle a souscrit cet acte, qui est, dit-on, celui sur lequeL on a entendu faire porter le serment. Le serment prononcé par M. de Virieu est vrai, si cet acte ne regarde pas des décrets sanctionnés et acceptés. Comment se peut-il que nous nous occupions pendant trois heures d’un acte qui n’est pas connu de l’Assemblée, dont l’existence est avouée, et que plusieurs membres semblent s’honorer d’avoir souscrit ? Je demande que cet acte soit connu. Ou il est dans l’intention du décret accepté, ou il est diffamateur de ce décret ; dans ce dernier cas, je ne croirais pas que nous dussions souffrir ici aucun de ces signataires. (La partie droite applaudit. — Une partie du côté gauche demande la question préalable sur toute cette discussion.) (L’Assemblée, consultée, décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer.) M. le comte de Virieu reprend le fauteuil et dit : Satisfait d’avoir vu terminer d’une manière douce et modérée une discussion qui présentait des dangers si imminents, je n’ai plus rien à désirer. Douloureusement affecté des débats trop longs et trop animés qu’a excités mon élection, je dois donner un témoignage éclatant que mes sentiments sont toujours la règle de ma conduite et que ma conduite est conforme aux sentiments que j’ai manifestés. Ainsi, après avoir marqué, avec un profond respect, à l’Assemblée, ma reconnaissance de la confiance qu’elle m’a marquée en me portant à cette place, que je n’avais jamais désirée, j’ai l’honneur de vous prévenir, Messieurs, que la séance sera levée au moment où je descendrai de ce fauteuil, et je résigne entre vos mains des fonctions pour lesquelles le court essai que j’ai fait de mes forces, m’a démontré, de plus en plus, mon insuffisance. (, Réclamations à droite.) (La séance est levée à cinq heures et demie.) ANNEXE à laséancede V As semblée nationale du Tlavril 1790. Rapport sur le plan de municipalité convenable à la ville de Paris , fait au nom du comité de constitution, par M. Démeunier (1). (Imprimé par ordre de l’Assemblée nationale.) Messieurs, l’organisation municipale de la ville de Paris est d’une telle importance pour la prospérité de la capitale et le maintien de la liberté, que chacun des membres de votre comité a regardé comme un de ses devoirs de donner une attention scrupuleuse à cet objet particulier. Nous avons étudié, à diverses reprises, l’effet des combinaisons qu’on pourrait adopter, et le plan dont je vais avoir l’honneur de vous rendre compte, est le résultat d’un long travail. Il faut que les mêmes principes régissent désormais toute la France ; cette nation ne peut avoir qu’un gouvernement représentatif; les législateurs doivent ménager au citoyen le repos et te temps qu’exigent ses affaires personnelles; ils doivent écarter avec un soin extrême les sujets de discorde, de jalousie ou de troubles, qui se propageraient du centre aux extrémités d’un État. En rapprochant de ces vérités incontestables les plans ou les pétitions des représentants ou des commissaires de la commune ou des districts, nous ne craindrons pas de le dire, nous avons vu le patriotisme égaré par le zèle; la passion du bien public entraînée, par le moment actuel, sans songer à l’avenir; un généreux dévouement qui dédaigne ses intérêts particuliers et se trompe sur l’intérêt général, et enfin l’enthousiasme de la liberté observant mal les institutions humaines que la sagesse ordonne de calculer sur les dispositions habituelles de l’homme et l’instinct de la raison. Si les opinions deviennent exagérées, c’est à vous, Messieurs, de les ramener au vrai; si la théorie des gouvernements n’est pas encore bien connue ; si l’art de maintenir et d’assurer la liberté publique est nouveau parmi nous, il est de votre devoir d’en étendre les progrès et de cféer, par votre sagesse et votre prévoyance, la prévoyance et la sagesse de tous les citoyens. Les circonstances obligent à relever ici des erreurs qui, en se répandant, attireraient sur nous d’innombrables calamités. Le comité a vu avec douleur plusieurs communes du royaume faire d’une fausse application des grands principes du pouvoir constituant et du pouvoir législatif ; chercher leur force en elles-mêmes, au lieu de la chercher dans la constitution et dans l’unité nationale ; oublier que l’Assemblée permanente des représentants de la nation garantira mieux la liberté de tous les Français, qu’une commune ne pourra jamais garantir son territoire ; rappeler le régime des cités de la Grèce, comme si la France pouvait, sans se dissoudre, devenir un gouvernement fédératif sous aucun rapport; appeler les citoyens à des délibérations continuelles, sans faire attention que la sagesse ne dirigerait pas de pareilles assemblées ; compter sur leur présence journalière, comme s’ils n’avaient pas une famille et des affaires à soigner; annoncer comme le résultat de la majorité, ce qui serait (1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur. 20 lre Série. T. XV.