[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j }îr 793 493. Votre comité s’est occupé d’un projet pour démonétiser les monnaies d’or et d’argent, régler leur emploi et obliger les possesseurs de mon¬ naies et matières d’or et d’argent d’en faire leur déclaration. Danton. Quand des monceaux d’or, dans le Trésor public, sont entassés poux payer des armes et pour acheter du pain aux défenseurs de la liberté, il est inconvenant de forcer les ci¬ toyens de déposer leur or et leur argent à la Monnaie. Des représentants du peuple ont pris des arrêtés de mort contre quiconque n’appor¬ terait pas son numéraire ou son or dans les caisses publiques; mais tout fonctionnaire, tout représentant ne doit faire que ce que vos lois ont voulu. Tout homme qui se fait ultra-révolu¬ tionnaire, c’est-à-dire qui outrepasse le but, fait autant de mal à la liberté que les contre-révolu¬ tionnaires décidés. Il est beaucoup d’hommes qui, sous le masque de l’exagération, échappent aux mesures révolutionnaires. Il faut le dire : si c’est avec la pique nationale que l’on détruit, c’est avec le compas du génie que l’on édifie. Le peuple nous a signifié de rester à notre poste parce que nous avons bien fait notre devoir; mais soyons dignes d’être ses représentants. Sachons faire des lois et qu’elles émanent de nous seuls. (Applaudissements.) Je demande que les représentants du peuple qui ont pris cet arrêté soient rappelés; que leurs arrêtés soient cassés; que l’on ne puisse suivre que les lois décrétées par nous; enfin que l’on ne s’écarte jamais des ordres donnés par le comité de Salut publie. Faisons tous ici le ser¬ ment que nous voulons sauver la République, ou nous anéantir avec elle, que nous voulons continuer le mouvement révolutionnaire, mais que nous voulons des mesures telles que nous puissions frapper juste pour frapper plus fort. L’Assemblée renvoie toutes les propositions au comité de Salut public. II. Compte pendu |du Journal de la Montagne (1). Cambon, organe du comité des finances, déve¬ loppe les motifs du décret qu’il est chargé de présenter, et qui a été concerté avec le comité de Salut public. II observe qu’il y a dans le Trésor national plus de numéraire que les besoins de l’Etat n’en exigent; qu’il serait peut-être dangereux d’y accumuler tout le métal qui se trouve dans la République; qu?une partie des dépouilles du fanatisme, transportées de trop loin, coûtent plus en frais de déplacement qu’elles ne peuvent rendre. Il fait sentir combien il serait impolitique d’inquiéter les citoyens à cet. égard et se plaint de ce que les représentants du peuple ont pris des arrêtés portant peine de mort contre ceux qui garderaient de l’argent chez eux. (1) Journal de'la Montagne [n® 19 du 12e jour du 3* mois de l'an II (lundi 2 décembre 1793), p. 151, col. 1]. Sur sa proposition, la Convention casse les arrêtés dont le préopinant a parlé et défend d’y obéir. Danton croit que ce n’est pas assez et qu’il faut se montrer plus sévère envers ceux qui se permettent de faire des lois pénales au lieu de faire exécuter celles de la Convention, à qui seule il appartient d’exprimer le vœu général de la nation. Il demande que l’on rappelle les au¬ teurs de ces arrêtés; que les représentants soient désormais tenus de se renfermer strictement dans les pouvoirs de leur mission ; que tous les agents de la République n’excèdent point les bornes de la loi, et qu’en favorisant, en secon¬ dant les mouvements révolutionnaires, on sache toujours concilier la fermeté avec la sagesse, etc.. Ces différentes propositions sont renvoyées au comité de Salut public. Cambon voulait lire son projet de décret. On a jugé qu’il était trop important pour n’être pas médité à tête reposée par chaque membre de l’Assemblée. La discussion est ajournée à deux jours. III. Compte rendu de Y Auditeur national (I ). Cambon, organe des comités réunis de Salut public et des finances, a soumis à la délibération les deux questions suivantes : 1° y a-t-il néces¬ sité pour la République d’avoir deux espèces de monnaie en circulation; 2° est-il nécessaire d’entasser à Paris tout l’or et l’argent de la Ré¬ publique? « Sur la première question, a dit le rapporteur,. vos comités ont pensé qu’il suffisait d’avoir une seule monnaie en circulation; que les assignats remplissaient toutes les vues à cet égard, et que, par leur moyen, les citoyens pouvaient effectuer toutes les opérations qu’exige leur intérêt. C’est pourquoi vos comités vous proposeront de dé¬ monétiser les monnaies d’or et d’argent. « Nous ne vous proposerons pas de les regar¬ der comme marchandises, car ce serait donner de l’activité à un fonds mort; ce serait favo¬ riser l’agiotage et les spéculations perfides de l’égoïste. Il suffira que d’ici au 1er jour de prai¬ rial, les citoyens puissent les employer en paye¬ ment des contributions, des domaines natio¬ naux, des biens des émigrés et généralement de toutes les sommes dues à la nation. « Quant à la seconde question, la solution. n’en peut pas être plus difficile. Nulle nécessité de réunir à Paris tout l’or et l’argent de la République ; ce serait exiger, sans nécessité, des citoyens, un sacrifice dont la malveillance pour¬ rait se prévaloir. Obligez seulement tous les pos¬ sesseurs des monnaies et des matières d’or et d’argent d’en faire la déclaration. Vous par¬ viendrez par cette mesure à avoir un état exact des fortunes mobilières, ce qui établira une juste (lj Auditeur national [n° 436 du 12 frimaire an IË (lundi 2 décembre 1793), p. 4].