418 lAsaeuibléo nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 novembre 1790.] tablement un crime de lèse-nation, et ne saurait être trop tôt puni. Si les bons citoyens soupirent depuis longtemps pour une haute cour nationale, c’est aujourd’hui qu’ils regrettent de n’avoir pas à lui livrer sur-le-champ le coupable. Ce serait en vain que M. de Lameth, toujours généreux, implorerait votre clémence contre son criminel adversaire; cette auguste Assemblée considérera sans doute que la vie des législateurs appartient à la France, et qu’il est important de mettre fin à ces complots éternels, renouvelés à chaque instant contre la liberté et contre ses plus courageux défenseurs. La capitale a trop appris cette cruelle vérité, qu’il faut maintenant que les législateurs tiennent compte en champ clos des opinions énoncées dans la tribune, pour ne pas solliciter de votre sagesse enlin une loi qui prononce sur ces attentats. Vos moments sont trop précieux pour vous entretenir plus longtemps d’un objet aussi affligeant que celui qui nous amène devant vous. La section de Bonne-Nouvelle attend avec respect le décret que vous allez sans doute prononcer. Ce décret, la France entière, l’humanité, l’intérêt de tous le sollicite, et depuis longtemps. Si la vie des législateurs est sous la sauvegarde du peuple, elle doit l’être en tout temps, en toutes circonstances et contre tous les attentats. Nul d’entre eux ne peut disposer de ses jours; mais celui qui ose porter sur eux une main sacrilège doit être déclaré criminel de lèse-nation, et livré comme tel à la vengeance des lois. Ce jugement, si l’Assemblée nationale le prononce, sera celui auquel doit être soumis l’homme pervers contre lequel la capitale exerce aujourd’hui ses vengeances. ( Une très grande partie de l'Assemblée applaudit .) M. le Président répond en ces termes : « L’Assemblée nationale reçoit avec une douloureuse sollicitude votre pétition; l’objet de législation dont vous demandez qu’elle s’occupe intéresse toutes les nations : déjà des lois avaient tenté de pourvoir à des actes qui déshonorent autant ceux qui les provoquent, qu’il rend à plaindre ceux qui le3 acceptent. Froissés entre l’honneur et la loi, ils sont obligés de sacrifier leur vie et leur réputation, ou d’encourir les peines légales. Une régénération entière amènera sans doute un grand changement dans les opinions sur l’honneur. L’Assemblée ne peut pas être indifférente à ce que vous venez de lui dénoncer; elle prendra votre pétition dans une considération très sérieuse: elle vous permet d’assister à sa séance. » M. d’Ambly. Comme témoin deM. de Castries, je demande la parole. Voix nombreuses : L’ordre du jourl (L’ordre du jour est prononcé.) M. d’Ambly. Je me joins au bataillon de Bonne-NouveJie pour rendre hommage à M. Charles de Lameth; mais quant à celui qu’on dit avoir été l’agresseur, cela n'est pas vrai. M. Prlenr. L’Assemblée n’a pas pensé qu’elle passerait à l’ordre du jour sur l’injure qui a été faite. En effet, ce n’est pas dans le moment où l’on vient de réclamer contre un usage barbare qui fait couler, pour des injures, le sang des citoyens, que l’Assemblée doit autoriser ces injures dans son sein. M. Bouche. L’intention de l’Assemblée est sûrement de revenir aussi sur l’objet de la pétition qui vient de lui être lue. M. Barnave. Je considère dans toute sa simplicité la proposition qui vient de vous être faite, et j’espère avoir assez d’empire sur moi pour prêter l’attention calme et suivie qu’exige un objet aussi important, et que je ne pourrais conserver si je me livrais en ce jour aux mouvements de mon cœur. Je dis donc, M. le président, que, s’il est un véritable moyen de prévenir les vengeances personnelles et d’ôter de la main des citoyens les armes qu’ils dirigent contre leurs concitoyens, ce moyen est d’armer la loi contre eux. Qu’elle punisse les injures, et bientôt on cessera d’en faire. Que ce soit vous qui donniez l’exemple de la modération dans cette Assemblée, et bientôt vous la verrez régner partout... J’ignore comment cela se fait, mais il existe un système de provocation dirigé contre les bons citoyens. 11 semble que l’on veuille lasser leur constance, jusqu’ici la terreur et le désespoir des ennemis de la patrie. Des exemples multipliés prouvent que le complot en a été formé. Celui qui maintenant est gisant n’est pas le seul qui ait éprouvé de ces attaques ; plusieurs d’entre nous ont aussi été insultés dans les Tuileries, dans les lieux publics. ( Plusieurs membres répètent : A la tribune, à la tribune même nous avons été provoqués!) Il faut enfin que la loi reprenne toute sa vigueur et prévienne les abus de ce genre. Il n’est plus temps de se récrier contre la fureur populaire lorsqu’elle a été longuement provoquée; c'est en la prévenant par un bon exemple qu’on empêchera le peuple de se livrer aux sentiments impétueux dont nous gémissons en ce moment. Que l’Assemblée donne l’exemple; que cette salle ne présente pas chaque jour un spectacle de scandale; qu’elle n’offre que l’union, la confraternité et la confiance, et que nous ne soyons plus occupés à lutter sans cesse contre ceux à qui leurs efforts en sens contraire deviendraient tôt ou tard funestes. (On applaudit.) Je demande que l’Assemblée prenne des mesures pour arrêter l’effet des complots dont est momentanément la victime l’homme chéri et estimé dont la courageuse prudence, dont la patience patriotique a résisté pendant trois jours aux tentatives faites contre lui. Je demande que le membre qui, tout à l’heure, a proféré de si basses injures contre un de vos membres et contre l’Assemblée soit à l’instant arrêté. (On applaudit.) Nous devons être surtout sévères dans le maintien de l’exécution des lois dans le sein de cette Assemblée; si nous ne prenons des mesures à cet effet, nous n’avons plus de droit d’interdire au peuple les violences auxquelles il se porte pour faire exécuter ces lois. M . le Président. L’accusateur et l’accusé sont à la tribune; je crois leur devoir accorder successivement la parole. M. Malès. Dans le moment où l’orateur de la députation du bataillon de Bonne-Nouvelle a parlé de M. de Lameth, la très grande majorité de l’Assemblée a applaudi; intimement persuadé que les députés ne sont pas envoyés pour exercer le métier de gladiateurs, mais pour faire des lois, j’ai applaudi, même plus fort que les autres ; alors M. Roy m’a crié qu’il n’y avait que les scélérats qui pussent applaudir. M. Boy, député d'Angoulême, Je supplie l’Ai*