SÉNÉCHAUSSÉE DE NÉRAC. Nota. Le duché d’Aibret obtint trois députations aux Etats généraux : celles d’Albret au siège de Tartas, de Né-rac et de Castelmoron. (Voy. les règlements du Roi des 19 février et 18 juin 1789. — Archives parlementaires t. Ier, p. 632 et 642). — Le cahier de l’ordre de la noblesse de Nérac a été inséré, par erreur, dans le tome Ier, des Archives, \s. 701. CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances du clergé ■ des deux sénéchaussées de Nérac et Casteljaloux en Albret , adressées au Roi et à la nation, aux Etats généraux du royaume (1). L'assemblée du clergé des sénéchaussées de -Vérac et Casteljaloux, en Albret, aurait cru dans le cahier de ses doléances devoir donner le premier rang à l’intérêt de la religion. Il se serait d’abord occupé des considérations qui concernent cet objet précieux, si les circonstances actuelles ne lui faisaient un devoir de fixer son attention sur ces objets d’utilité générale qui intéressent le corps entier de la nation ; en conséquence, on demande d’abord : 1° Que les Etats généraux veuillent bien s’occuper à déterminer avant toute chose la vraie constitution de la monarchie et les rapports mutuels du souverain et de ses sujets, en établissant positivement la charte des droits ; 2u Assurer la liberté individuelle et dès lors abolir tout ce qu’on appelle lettres closes, lettres de cachet, tous ordres arbitraires ; 3° Assurer encore le droit sacré de propriété, et de là, par un acte solennel, reconnaître que la nation seule a le droit de s’imposer, c’est-à-dire le droit d’accorder les subsides, d’en régler l’étendue, l'emploi, la répartition et la durée ; 4° Fixer le retour périodique des Etats généraux, et assurer ce retour en restreignant l’impôt accordé, pour n’avoir lieu que jusqu’à l’époque de la nouvelle convocation ; 5° Demander la comptabilité et responsabilité des ministres aux Etats généraux; 6° Statuer que toute loi ne sera réputée loi générale et permanente qu’autant qu’elle sera établie par le concours mutuel de la volonté du souverain, et du consentement de la nation assemblée ; 7° Vérifier la dette nationale, et en opérer la liquidation , de la manière la moins onéreuse ; 8° Le clergé offre de venir au secours de l’Etat par des contributions au moins égales à celles des autres citoyens, et, en conséquence, il renonce à tous privilèges pécuniaires. A cet effet il propose que la vérification de ses biens soit faite dans chaque diocèse du royaume ; que, s’il résulte desdites vérifications que ledit clergé paye davantage, il n’entend réclamer aucune diminution au préjudice des autres citoyens. Que, si l’imposition dudit clergé est inférieure, il consent avec franchise et toute loyauté une augmentation qui rétablisse l’équilibre entre tous (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire . les ordres des ciiovens, sans néanmoins qu’il puisse en résulter des nouveaux emprunts qui augmentent la dette du clergé ; mais ladite augmentation sera consentie par le clergé, dans les formes ordinaires. L’ordre de Malte, ne possédant que des biens ecclésiastiques, doit être compris dans 1a. vérification proposée. 9° Demander Je rétablissement ou formation des Etats particuliers dans les provinces, organisés sur le modèle des Etats généraux, avec les modifications que les circonstances locales rendent nécessaires. 10° Demander une réforme dans l’administration de la justice civile et criminelle, avec choix des moyens les plus courts, les moins dispendieux, surtout pour les pauvres. On devra s’occuper du soin de rapprocher la justice du justiciable, amplier les sénéchaux et présidiaux, sans que dans pas un cas l’on puisse être soustrait du ressort de ses juges naturels par aucune commission ou évocation quelconque. 11° Demander que si on accorde la liberté de la presse, ce ne soit du moins qu’en obligeant l’auteur et l’imprimeur à signer leurs ouvrages et à en répondre personnellement, ainsi qrnen employant toutes les restrictions, précautions et modifications les plus propres à en prévenir les abus, parce que, en ce genre, il n’y a qu’un pas de la liberté à la licence. 12° Aviser aux moyens de former un nouveau tarif pour le contrôle plus clair, plus à portée d’être connu de la classe ordinaire des citoyens, avec la précaution d’en remettre un exemplaire dans les mains de tous les pasteurs, qui seront à même par là d’en instruire les intéressés, souvent dupes de leur ignorance. 13° Qu’on veuille bien s’occuper d’un nouveau plan pour perfectionner l’administration des collèges et universités, et généralement tout ce qui a trait à l’éducation de la jeunesse. 14° On formera une motion particulière pour venir au secours des pauvres : motion qui renfermera les demandes générales, qui auront pour objet les réformes à faire dans les établissements de charité, comme les hôpitaux, les maisons de dépôt, les prisons, les asiles des enfants illégitimes, et généralement tout ce qui concerne la branche précieuse de l’humanité pauvre et souffrante. 15° L’intérêt des pauvres exige qu’on demande qu’il soit permis aux gens de mainmorte de placer en toute main, à rente constituée, toutes sommes qui pourraient leur être remboursées. 16° Que les revenus des pauvres des paroisses soient exempts de la retenue des vingtièmes comme ceux des hôpitaux. 17° Qu’on observera qu’il serait également [États gén. 1789. Cahiers. | ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Nérac.J 231 très-important et très-intéressant au bien public u’on établit dans toutes les paroisses un bureau e charité, dont la formation et le régime sera clair et sagement ordonné, et à la dotation desquels tous MM. les ecclésiastiques seront contribuables. 18° Qu’il serait très-utile encore de former dans " toutes les communautés aisées, ou du moins dans l’arrondissement de quelques communautés réunies, un établisssment suffisant pour un bon chirurgien, qui soit également accoucheur, afin de ne pas sacrifier l’humanité au mépris de l’ignorance. 19° Il règne un abus frappant relatif aux pouvoirs accordés aux gardes-chasse des seigneurs, juges et parties dans leurs verbaux : abus qu’il est très-urgent de réformer, ainsi que bien d’autres de ce genre. 20° Le pays, de landes d’une nature la plus stérile, dépourvu d’habitants, borné à des productions du prix le plus modique, réclame une attention particulière du gouvernement, pour découvrir des moyens d’augmenter dans ces contrées la population et d’v encourager l’agriculture. Ce pays réclame encore l’exécution des règlements déjà faits pour la confection des puits et fontaines. . 21° On mettra sous les yeux des Etats généraux un objet qui intéresse essentiellement le culte, la religion et les mœurs. On leur fera remarquer la nécessité urgente d’une parfaite uniformité de culte, de discipline et d’enseignement, et on les priera de demander au clergé qu’il soit fait pour tout le royaume un même bréviaire, rituel, missel et catéchisme. 22° On demandera très-instamment qu’il soit enjoint aux officiers municipaux de tenir la main et de veiller avec la plus scrupuleuse exactitude à l’observation desdits arrêts de règlements concernant la police des cabarets et la sanctification des fêtes et dimanches. 23° Le clergé, ayant renoncé par exprès à toutes exemptions pécuniaires, se croit en droit de réclamer de la justice du Roi et de la nation la conservation et maintien de ses formes, immunités et privilèges honorifiques. 24° On demandera le rétablissement des conciles provinciaux et surtout des synodes diocésains, pour maintenir et perfectionner la discipline ecclésiastique. 25° Que les bureaux diocésains seront composés de l’évêque ou, en son absence, d’un président élu par le bureau, d’un syndic pris alternativement dans la classe de tous les intéressés, et d’un nombre de députés relatif à l’étendue du diocèse, librement élus par ceux qu’ils doivent représenter, et dont la députation ne durera que cinq ans, lesquels seront comptables au premier bureau qui se tiendra, leur commission graduellement finie. 26° Pour empêcher les injustices qui se commettent dans la perception de la dîme par sillons, elle sera payée par gerbes, sans excepter les cap-selières. 27° On demandera l’abrogation de l’édit de 1768, et par conséquent la restitution des novales, tant anciennes que nouvelles, même celles qui se trouveront dans les dîmes inféodées, à tous les curés desservants, avec le quart au moins de tous les fruits déclinables dans toute l’étendue des paroisses. 28° La construction et réparation des presbytères, ainsi que la clôture et entretien des cimetières, aux dépens de qui il appartiendra, pour tous les lieux où ils sont en mauvais état. 29° Le bien général dans l’ordre spirituel et temporel exige qu’on remette en vigueur une loi qui commande généralement et maintienne efficacement la résidence des bénéfices. 30° On ne cessera de réclamer avec tout l’empressement du zèle l’amélioration du sort des vicaires et des curés à portion congrue, en observant que les vicaires, même ceux qui ne sont envoyés que pour un temps au secours des curés infirmes, seront payés par tous les décimateurs au prorata de la quantité de fruits qu’ils prélèvent dans la paroisse. 31° On demandera que les évêques soient suffisamment autorisés à faire dans les biens-fonds ecclésiastiques toutes les suppressions, réductions et réunions qui seront nécessaires pour parvenir à la dotation des pasteurs du second ordre et cle leurs coopérateurs en second et les mettre à même de remplir un vœu bien important qu’ils ne cessent de former, c’est la suppression absolue du casuel forcé. 32° On demandera pour certaines paroisses un nouvel arrondissement, qui dorme au desservant plus de facilité pour le service et aux fidèles les moyens de se réunir plus commodément sous les yeux de leur propre pasteur. 33° On demandera que l’ordre de la hiérarchie ecclésiastique soit clairement et positivement déterminé, de manière à prévenir et éviter toutes les discussions qui pourraient s’élever sur les rangs et les préséances. 34° On demandera, avec un zèle que la reconnaissance doit rendre plus actif, que pour la conservation de l’ordre religieux, et pour lui fournir les moyens de réformer et régénérer l’ancienne discipline, l’émission des vœux soit fixée à dix-huit ans. 35° Que MM. les agents généraux, qui, par leur procuration, sont chargés de toutes les affaires du clergé, soient, comme par le passé, députés-nés aux Etats généraux et, en conséquence, convoqués à raison de leur place à la prochaine assemblée de la nation, ainsi qu’ils l’ont été en 1614, et de plus que l’un de MM. les agents soit pris dans l’ordre des curés. 36° Que, dans tous les jugements que les officiaux seront dans le cas de prononcer, ils soient assistés de deux gradués ecclésiastiques librement élus dans le synode discésain. 37° Que toutes sortes de monitoires soient abolis, ou que, si l’on pense devoir encore les conserver, ils ne soient du moins réservés que pour le meurtre et les crimes d’Etat. 38° IL paraît juste de réclamer pour les curés de Malte les secours que de nouveaux règlements accordent aux curés de tout le royaume, et de plus que lesdits curés soient inamovibles comme tous les autres. 39° On suppliera instamment le Roi et la nation assemblée de retirer et révoquer par une loi formelle tous édits et déclarations contraires aux droits du clergé du premier et du second ordre, et de plus que tous les pasteurs des deux ordres rentreront dans tous leurs droits. 40° Le clergé demande que la classe des ma-nouvriers ne soit soumise à aucune espèce d’imposition, que la milice n’ait plus lieu, comme étant un fléau dans les paroisses. 41° Que les seigneurs des fiefs se contenteront des lods et ventes sans exiger des droits de préla-tion, lequel sera personnel au seigneur, et sera gratuitement accordé dans l’année. 252 (Etats gên. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Nérac. Telles sont les très-humbles et très-r,espec-tueuses doléances du clergé des deux sénéchaussées de Nérac et de Casteljaloux, en Albret, rédigées ce jour, 3 août 1789 ; en foi de quoi ont signé l’abbé de Mélignau; Desmottes; l’abbé de Vigues; Deslrac, archiprêtre de Condom ; Pouget, curé de Saint-Raphaël ; Serré, commissaire; Bartouillo de Taillac , lieutenant général; Bertouille, curé d’Oille, commissaire, et Libérât, curé de Nérac, commissaire. Je déclare et atteste que cette copie est conforme à l’original, et qu’elle a été transcrite mot pour motet qu’on peut y ajouter toute foi, offrant de montrer le manuscrit original. Le présent certificat donné le 18 septembre 1798, à Paris. Signé f A.-C. d’Anterroches, évêque et député de la sénéchaussée de Nérac et Casteljaloux, en Albret. CAHIER Des doléances plaintes et remontrances et instructions du tiers-état des sénéchaussées de Nérac et Casteljaloux , pour être présentées aux Etats généraux par les députés qui doivent être élus à cet effet (1). SECTION PREMIÈRE De la constitution. Art. 1er. Les députés commenceront par demander la suppression de tous impôts distinctifs, notamment du franc-fief, pour être remplacés par d’autres de la perception la moins dispendieuse et de la répartition la plus aisée, qui seront payés par tous les citoyens sans distinction d’ordre et sans égard à quel privilège que ce soit, proportionnellement aux propriétés et facultés. Art. 2. Que la corvée et le logement des gens de guerre, les milices et toutes autres charges publiques, desquelles les personnes privilégiées sont exemptes, soient faites à prix d’argent, afin que chacun puisse contribuer à l’acquittement de ses charges, en proportion de ses facultés. Art. 3. Les députés ne sont autorisés à consentir aucun impôt à titre d’emprunt, ni autrement, avant que les deux articles précédents aient été accordés. Art. 4. Les députés demanderont qu’on opine par tête aux Etats généraux, et que la majeure ne soit censée acquise que par les cinq huitièmes des voix. Art. 5. Qu’en aucun cas , aucun citoyen ne pourra être détenu, par aucun ordre ministériel ou d’administration quelconque, au delà du temps nécessaire pour qu’il soit remis aux juges que la loi lui donne. Art. 6. Qu’il soit solennellement arrêté que la nation a le droit d’accorder ou de refuser les subsides, d'en régler l’emploi, la durée, la répartition, de s’en faire rendre compte, et que le gouvernement ne peut valablement emprunter sans son consentement. Art. 7. Que le retour périodique des Etats généraux, à des époques rapprochées, sera invariablement et irrévocablement fixé. Art. 8. Qu’à l’avenir aucune loi générale ne pourra être établie que du consentement de la nation aux Etats généraux, et que ces lois seront placées dans les registres des cours souveraines et sous leur garde, sans qu’elles puissent se permettre d’y apporter aucune modification. (1) Nons publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. Art. 9. Que les autres lois seront, pendant l’intervalle d’une tenue des Etats généraux à l’autre. provisoirement envoyées à l’enregistrement libre des cours ; mais qu’elles n’auront de force que jusqu’à la prochaine assemblée nationale, où elles auront besoin d’être sanctionnées par la nation pour continuer d’être obligatoires. Art. 10. Que les cours souveraines continueront comme ci-devant à être chargées de l’exécution des ordonnances du royaume, du maintien de la constitution et des droits nationaux. Art. 11. Que, conformément aux loi s du royaume, les magistrats ne pourront être privés de leurs offices, ni individuellement, ni en corps, que pour trois causes, mort, résignation, ou forfaiture préalablement jugée ; laquelle forfaiture à l’égard des particuliers sera jugée par le corps dont ils seront membres, et à l’égard des corps, par les Etats généraux de la nation ou par un tribunal qu’ils établiront eux-mêmes. Art. 12. Qu’il sera établi des Etats provinciaux particuliers pour les élections d’Agen, Condom, Ax et duché d’Albret, organisés à l’instar de ceux du Dauphiné, sauf à consentir à la jonction avec le pays de taille personnelle, si elle est demandée, lorsque l’égalité d’imposition dans tous les ordres et dans tous les pays sera réalisée et que les pays de taille personnelle seront encadas-très. Art. 13. Que tous les ministres soient déclarés comptables de l’emploi des finances qui leur auront été confiées et responsables de leur conduite aux Etats généraux assemblés. Art. 14. Que le compte générai des finances sera rendu public tous les ans, par la voie de l’impression, ainsi que la liste de toutes les pensions, avec l’énonciation de tous les motifs qui les auront fait accorder. Art. 15. La liberté de la presse, à condition que l’auteur et l’imprimeur seront signés. Art. 16. L’abolition des commissions, évocations au conseil, etc., et des droits de committimus. Art. 17. Qu’il ne pourra être statué sur aucun impôt ni subside, à quelque titre que ce soit, avant que les articles ci-dessus n’aient été pris en considération, qu’il n’y ait été statué par les Etats généraux, et que leur décision conjointement avec celledu Roi n’aient été solennellement proclamées, à moins que les circonstances n’exigent impérieusement des secours extraordinaires et momentanés; mais que, dans ce cas, ces secours ne pourront être accordés que pour un an. SECTION II. Des abus à réformer. Art. 1 er. Les députés demanderont un nouveau code criminel, civil et de police. Art. 2. Une nouvelle loi claire, précise et invariable au sujet du contrôle des actes, l’abolition du double droit de I’ensaisinement en ligne directe et l’attribution à la commission intermédiaire des Etats provinciaux de la connaissance de toute contestation au sujet du contrôle. Art. 3. L’abolition du droit descel et petit scel, et d’autres droits réservés. Art. 4. La suppression de tous les officiers ou employés dans tous les genres, dont le gouvernement pourra se passer, même la suppression de tousles tribunaux inutiles, ren pourvoyantau remboursement des emplois ou offices, à vue des contrats d’achats des titulaires supprimés et des quittances des finances, lequel remboursement sera fait aux dépens de la nation. Art. 5. La suppression des abus dans l’admi-