(Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [3 août 1790.] mille livres qui sera délivré à chacun desdits enfants, que cette exception a été décrétée par elle, comme un témoignage de son estime particulière pour la mémoire d’un officier aussi distingué par ses talents et son humanité, que par sa bravoure et ses services éclatants. La même mention sera faite dans les brevets à expédier à la famille d’As-sas, dont il sera parlé en l’article suivant. Art. 20. Les pensions accordées aux familles d’Assas. de Chambors et au général Luckner, seront conservées en leur entier, nonobstant les dispositions des articles précédentsqui pourraient y être contraires. A l’égard des autres exceptions qui ont été, ou seraient proposées, elles sont renvoyées au comité des pensions, qui en fera le rapport à l’Assemblée. (Les membres présents à la séance applaudissent comme témoignage de leur agrément à l’ensemble du décret qui vient d’être lu.) M. Dupont (de Nemours). Je propose un article additionnel au décret des pensions, pour que les veuves des ministres morts en activité de service soient traitées comme les veuves des maréchaux de France. Cette addition ne peut tirer à conséquence. Il n’y a actuellement que trois veuves dans ce cas : dent Mme de Maurepas, âgée de 80 ans, et Mrae de Fourqueux, dont le mari a donné des preuves d’attachement à la bonne cause; car il est mort, pour avoir voulu se rendre au conseil, pour y défendre la double députation du tiers, quoiqu’il eût un accès de goutte. Les services civils méritent la même considération que les services militaires. Il faut encourager les bons ministres, vous en aurez toujours moins que de bons généraux. La place est peu enviable et si peu tenable. (Cette proposition n’est pas appuyée.) M. de K.yspoter, secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier au matin. M. Alqnier, autre secrétaire, lit le procès-verbal de la séance d’hier au soir. M. Goupil. Je demande qu’on retranche du procès-verbal l’apostrophe faite par l’un des orateurs à ceux qui ont prêté le serment du jeu de paume. Il n’est pas d’usage d’insérer ces mouvements oratoires. M. Alqnier efface la phrase. M. Camus. Hier, on a passé beaucoup de temps dans une malheureuse contestation. Je demande qu’on ne renouvelle pas une semblable controverse à propos du procès-verbal. (MM. Dupont et Malouet demandent la parole.) M. Malouet. L’Assemblée n’a-t-elle voulu entendre sévir que contre un seul écrit sanguinaire, ou contre tous ? Si elle n’a voulu statuer que sur l’écrit de M. Marat, elle autorise tous les écrits qui prêchent la sédition et l’effusion du sang. U faut craindre une fausse interprétation d’un décret qui n’a pas été délibéré hier soir, car la séance a été levée avant qu’on l’eût mis aux voix... Plusieurs membres : Gela est faux I M. Malouet. Vous avez entendu hier une de ces voix qui osent tout, qui vous a dit qu’elle lr# Série. T. XVII. 571 oserait : attendrez-vous que l’effet suive la menace ? M. Ce Bois-Desguays. Que l’opinant aille plaider au Châtelet, ce n’est pas ici un tribunal où l’on puisse se livrer aux mouvements de l’in-térêt personnel. (L’Assemblée délibère, et l’on passe à l’ordre du jour.) M. Dupont paraît à la tribune. — On refuse dej’entendre. — 11 insiste. — L’Assembléedécide qu’il ne sera pas entendu. — Il parle. — Des cris répétés : A l'ordre , à l'ordre ! étouffent sa voix. M. l’abbé Pïnelle, député de Colmar, demande la permission de s’absenter pour six semaines pour raisons de santé et d’affaires. Ce congé est accordé. M. Alqnier, secrétaire , lit une note énoneia-tive de? expéditions en parchemin envoyées par le garde des sceaux à l’Assemblée nationale, pour être déposées daus ses archives, et dont la teneur suit : Expéditions en parchemin pour être déposées dans les archives de l' Assemblée nationale. « 1° De lettres patentes sur le décret du 26 juin, qui approuve une délibération prise par le conseil d’administration du département de la Haute-Saône, relativement à la disette des grains; « 2° De lettres patentes sur le décret du 29, relatif à la navigalion du canal de Picardie; « 3° De lettres patentes sur le décret du 4 juillet, relatif à la fourniture de sel à l’étranger; « 4° D’une proclamation sur le décret du 10, portant que les biens des non-catholiques, qui se trouvent encore entre les mains des fermiers de la régie, seront rendus aux héritiers desdits fugitifs ; « 5° De lettres patentes sur le décret du 13, concernant les dispositions que doivent faire les directoires de département et ceux des districts, pour constater la situation actuelle des recouvrements des impositions des exercices 1788, 1789 et 1790, et accélérer la perception et rentrée des sommes arriérées; « 6° De lettres patentes sur le décret du 19, qui abolit le retrait lignager, le retrait demi-denier, les droits d’écart, et autres de pareille nature ; « 7° De lettres patentes sur le décret du même jour, qui ordonné la continuation de la levée et perception de toutes les contributions publiques, à moins que l’extinction et suppression n’en ait été expressément prononcée, et notamment des droits perçus sur les ventes de poisson dans plusieurs villes du royaume; « 8° De lettres patentes sur le décret du 20, concernant la régie de tous les droits qui formaient l’objet des baux passés par les ci-devant États d’Artois, à l’exception de ceux des eaux-de-vie ; « 9° De lettres patentes sur les décrets des 9 et 21, qui suppriment les offices de jurés-priseurs ; ordonnent que le droit de 4 deniers pour livre du prix des ventes continuera d’être perçu, et autorisant les notaires, greffiers, huis-sieis et sergents à procéder auxdites ventes; « 10° Et, enfin, d’une proclamation sur le décret du 26, concernant la procédure commencée 37 578 |Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [3 août 1790.] à l’occasion des événements arrivés dans la ville de Montauban, le 10 mai. Paris, le 2 août 1790. L’ordre du jour appelle un rapport du comité des recherches, relatif aux obstacles qu'éprouve, dans différentes paroisses du département du Loiret, le paijement des droits de champart et aucuns droits féodaux qui ne sont pas supprimés sans rachat ou indemnité. M, de Macaye, rapporteur. Messieurs, le directoire du district du département du Loiret nous a envoyé un libelle intitulé : Réponse des officiers municipaux des campagnes du Gâtinais aux administrateurs du département du Loiret. Ce libelle est une réponse à l’envoi du dernier décret sur les droits de champart. 11 a pour objet d’exciter le peuple à ne payer ni ces droits ni les droits féodaux supprimés-avec indemnité. Il y est dit que l’Assemblée a conservé ces droits par vue d’intérêt personnel; qu’il faut élever des potences pour y attacher ceux qui les demanderont ou voudraient les payer. Ce libelle avait été remis par le curé d’Echileuse près Pithiviers, à une femme chargée d’en distribuer à toutes les municipalités. La société des Amis de la Constitution de Mon-targis a écrit à la société du même nom à Paris, que le 14 juillet, à Jouy, un nommé Pradier avait élevé une potence fabriquée dans la grange d’un officier municipal, et que le sieur Pradier avait dit l’avoir faite de l’ordre de la municipalité. Deux particuliers ont failli être pendus. Le comité des recherches propose de décréter que le président se retirera sans délai par devers le roi, pour supplier Sa Majesté d’ordonner aux officiers du tribunal de Nemours d’informer contre les auteurs d’un écrit intitulé : Réponse des officiers municipaux des paroisses des campagnes du Gâtinais aux administrateurs du département du Loiret, et même de se transporter hors de leur territoire, si le cas l’exige. Voici notre projet de décret : « L’Assemblée nationale, sur la dénonciation, faite par son comité des recherches, d’un imprimé intitulé : Réponse. des officiers municipaux des paroisses des campagnes du Gâtinais , à messieurs les administrateurs du département du Loiret, concernant les droits féodaux , imprimé qui tend à empêcher le payement des champarts et à exciter des insurrections dangereuses, a décrété que son président se retirera sans délai par devers le roi, pour supplier Sa Majesté de donner les ordres les plus pressants aux officiers du bailliage de Nemours, d’informer contre les auteurs de cet écrit, circonstances et dépendances, même de se transporter hors de leur ressort, si le cas le requiert.» (Plusieurs membres demandent la question préalable sur ce projet de décret.) M. l’abbé Gouttes. Je vous propose, Messieurs, de décider simplement que le roi sera prié de veiller à ce que le droit de champart soit payé dans tout le royaume. J’ajoute que, dans plusieurs départements, les officiers municipaux des campagnes sont les premiers à engager le peuple à ne pas payer ces droits. �M. Bognaud (de Saint-Jean-d’Angély). Il ne s’agit pas uniquement d’un écrit incendiaire, mais de faits criminels qu’il faut arrêter et punir. Je demande que le décret soit dirigé contre tous ceux qui se refusent par des moyens quelconques à payer le droit de champart. M. Dupont (de Nemours). Messieurs, le décret que le comité vous propose a deux objets très distincts, entre lesquels je vous demande la division ; d’abord il porte sur un écrit incendiaire, ensuite il parle de violences commises et de potences plantées suivant les conseils de cet écrit. Quant ap premier point, les préopinants ont eu raison de dire qu’on pouvait interpréter votre décret d’hier, de manière que la poursuite de l’écrit incendiaire serait interdite, puisque l’ouvrage de M. Marat est le seul pour lequel vous n’ayez pas sursis aux procédures, jusqu’au rapport dont vous avez chargé vos comités de Constitution et de législation criminelle. C’est une raison de plus que j’allègue pour que vous ne donniez pas indeterminément cette mission à vos comités,* par l’expression vague : dans le plus court délai possible , comme vous l’avez décrété hier, et moins encore sans indiquer même aucun désir de célérité, comme on doit l’inférer du décret, tel qu’il se trouve dans votre procès-verbal, où l’expression du plus court délai possible est supprimée, ce dont je me plaignais amèrement lorsque vous avez refusé de m’écouter. C’est pourquoi j’insiste pour que vous fixiez un délai dans' lequel vos deux comités devront vous faire ce rapport, et pour que vous fassiez cesser l’état d’impuissance où se trouve la société de réprimer les écrits qui invitent le peuple à la violation des lois, au crime, au renversement de la Constitution. Vous n’avez pas," Messieurs, un devoir plus impérieux que celui qui vous prescrit de hâter cette mesure. Vous ne pouvez vous dissimuler que l’art horrible des séditions ne soit infiniment perfectionné, et ne se perfectionne chaque jour. Je vous eusse hier exposé les progrès effrayants et honteux de cet art infernal, si j’eusse pu obtenir la parole. Je l’aurais fait ce matin, si l’on ne me l’eût point ôtée. Vous me l’accordez à présent, je remplirai mon devoir. Je ne serai ni moins honnête, ni moins intrépide que le vertueux Démeuniers , et puisqu’on affectait hier de ne le point entendre , par cette raison même qu’on l’entendait fort bien, je serai beaucoup plus clair. Vous avez vu croître, Messieurs, l’habileté à répandre des motions d’assassinat : vous avez vu comment six hommes, qui s’entendent, forment d’abord un petit groupe, dans lequel un d’entre eux pérore avec véhémence ; comment soixante autres s’amassent au bruit ; comment ensuite les six premiers moteurs se dispersent, et vont reformer de place en place d’autres groupes, au milieu des personnes qui, moins serrées, environnent le premier ; vous avez vu comment, de temps en temps, on ranime l’attention par le passage, l’apparition, de quelques mots de harangue des plus grands personnages. Vous avez eu, il y a peu de jours, un exemple de l’excès du désordre que peuvent causer, et que causent ainsi quelques scélérats audacieux et payés ; vous avez entendu les cris forcenés par lesquels on vous demandait la proscription de plusieurs hommes publics chargés de l’exécution de vos lois, avant même qu’on vous eût rendu compte de leur conduite avant qu’ils eussent pu se défendre, avant que vous les eussiez jugés. On vous disait, dans cette salle, que e'étaient seulement quarante citoyens qui exprimaient leqj* pensée ; et il est possible qu’on n’eût en effet dépensé