212 [Àfiemblée nationale*] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* [22 août 1790.J sont condamnés des ouvriers non navigants, sera substituée l’obligation de travailler dans le port pendant le même temps; 3° Les peines qui devaient être prononcées ou par le commandant du port, ou par le chef des classes, ne pourront plus l’être que par le concours du commandant et intendant, et du major-général de la marine; 4° L’article 29 sera supprimé. Art. 56. Tous les hommes, sans distinction, composant l’état-major ou l’équipage d’un vaisseau naufragé, continueront d être soumis à la présente loi, ainsi qu’à toutes les règles de la discipline militaire, jusqu’au moment où ils auront été légalement congédiés. Art. 57. Les officiers, sous-officiers et soldats, soit des troupes de la marine, soit des troupes de terre, embarqués sur des bâtiments de guerre, seront assujettis comme les officiers de Ja marine, officiers-mariniers et matelots, à toutes les dispositions de la présente loi pendant le temps de leur séjour sur les vaisseaux. Art. 58. Toute autre personne embarquée sur un vaisseau sera également soumise à la présente loi et à toutes les règles de police établies dans le vaisseau. Art. 59. Les peines de discipline et les peines afflictives prononcées dans les cas ci-dessus énoncés, seront applicables à tous les délits commis dans les arsenaux parles officiers-mariniers, matelots et soldats. Art. 60. Eu ce qui concerne les manquements au service par négligence ou désobéissance de la part des maîtres d’ouvrage, ouvriers et autres, employés dans les arsenaux, le commandant et l’intendant du port, chacun en ce qui les concerne, pourront, selon le cas, prononcer les arrêts, la prison pendant trois jours, la privation d’un mois de solde ou appointements ; pour tous autres délits majeurs, les délinquants seront légalement poursuivis, conformément aux ordonnances actuellement subsistantes pour l’exercice de la justice dans les arsenaux, en observant toutefois ce qui est prescrit pour la formation et le prononcé d’un jury. Art. 61. L’Assemblée nationale abroge toutes les dispositions pénales contenues dans les ordonnances de la marine militaire qui ont paru jusqu’à ce jour; entendant néanmoins ne porter aucune atteinte aux autres lois sur le fait de la marine, qui doivent être exécutées, jusqu’à ce qu’il y ait été autrement statué. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DUPONT (DE NEMOURS). Séance du dimanche 22 août 1790 (1). La séance est ouverte à onze heures du malin. (Il y a à peine quelques députés dans la salle.) M. le Président fait donner lecture d’une lettre du ministre de la marine, en date de ce jour, à laquelle sont jointes viugt-cinq pièces ou copies certifiées par M.de La Luzerne, contenant les détails de ce qui s’est passé dans la par-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur. tie française de Saint-Domingue depuis le 29 mai dernier, jour où le décret et l’instruction de l’Assemblée nationale des 8 et 28 mars, sanctionnés par le roi, sont arrivés', jusqu’au 22 juin suivant. L’Assemblée ordonne le renvoi de ces instructions officielles au comité colonial. M. Roussillon, député de Toulouse , demande un congé. M. Pellerin, député de Nantes, demande également la permission de s’absenter. Ces deux congés sont accordés. M. l’abbé Joubert, au nom du comité des recherches. Une fausse interprétation de vos décrets sur l’exportation des grains a donné lieu à des réclamations contre une injustice qu’il est de votre devoir de faire cesser. Voici, en peu de mots, de quoi il est question j: la république de Genève avoisine le ci-devant pays de Gex ; plusieurs Genevois y possèdent, sur la frontière, des propriétés isolées qui font partie des domaines ou corps de fermes qu’ils possèdent sur le territoire de Genève : on ne s’était pas encore opposé au transport des blés en gerbes provenant de la récolte de ces fonds, parce que cette faculté a toujours été regardée comme un droit de propriété. Une grande partie du territoire de la république de Genève est enclavée dans le pays de Gex ; toutes les propriétés de ce canton sont possédées par des Génevois, qui n’y peuvent communiquer qu’en empruntant le passage dans le pays de Gex, sur un espace d’environ une lieue. Jamais ils n’ont éprouvé d’obstacles pour le transit de leurs grains jusqu’à ce jour où les troupes, postées sur les frontières pour surveiller l’exportation des grains, s’autorisant de vos décrets, arrêtent et saisissent les grains. En défendant l’exportation, votre intention n’a sûrement pas été de donner atteinte aux droits des gens, ni de rien innover sur ce qui se pratique respectivement entre des puissances voisines. Votre comité vous propose, en conséquence, le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait des obstacles qu’éprouvent les Génevois, dans le ci-devant pays de Gex, pour le transport de leurs grains provenant, soit de leur territoire, soit de la récolte des propriétés qu’ils possèdent sur les frontières, et dépendantes des domaines ou corps de ferme, situés sur le territoire de Genève, délare qu’elle n’a entendu, par ses précédents décrets sur l’exportation des grains, rien innover sur le droit de transit, dont les Génevois ont joui jusqu’à présent dans le ci-devant pays de Gex pour le transport desdits grains, lequel continuera d’avoir lieu comme par le passé, sauf au directoire du district à prendre les précautions les plus convenables pour éviter les abus ; l’Assemblée charge son président de se retirer parde-vers le roi, pour le prier de donner les ordres les plus prompts pour l’exécution du présent décret. » (Ce projet du décret est adopté.) M. le Président. L’ordre du jour est un rapport du comité des finances sur la comptabilité des percepteurs. M. d’André. Je rappelle que l’Assemblée a ajourné à jour fixe et à la séance d’aujourd’hui un rapport du comité de Constitution sur la 213 [Assemblée aationale.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 août 1790.J liberté de la presse. M. le président pourrait demander au comité s’il est prêt à présenter son travail. M. l«e Chapelier. Les deux comités de Constitution et de législation ont pensé qu’il était impossible de soumettre à votre délibération une loi complète, non sur la liberté, mais sur les excès de la presse, avant d'avoir présenté la loi sur l’établissement des jurés. L’on ne pourrait prendre une autre marche sans exposer la liberté nationale et la liberté individuelle. Les deux comités se sont occupés de cette loi, qu’ils doivent vous offrir incessamment. (On demande à passer à l'ordre du jour.) M. d’André. Lorsqu’on a fait la dénonciation d’un libelle, on a dit, pour éluder les suites de cette dénonciation, que dans deux jours les comités pourraient présenter une loi provisoire. M.Le Chapelier a distingué la liberté de la licence. L’usage de la presse doit être permis ; mais ce qui n’est pas permis, c’est d’exciter les insurrections des régiments, c’est de vouloir soulever le peuple. J’ai entre les mains un libelle, dans lequel on l’engage à élever des gibets dans les Tuileries pour y attacher les députés. Vous avez rendu des décrets contre les libelles, et les libelles se répandent chaque jour. Ce sont ces écrits qui perpétuent les désordres, qui trompent et animent le peuple, qui décréditent vos travaux, qui détruisent la tranquillité publique, sans laquelle vos travaux ne sont rien. Si le comité de Constitution ne peut faire ce que l’Assemblée exige de lui, il faut nommer un comité ad hoc , qui s’en occupe jour et nuit. M. Malonet. Puisqu’on ne présente pas cette loi si instante sur la presse, je demande qu’on donne ordre au maire de Paris de s’assurer de l’homme qui a écrit qu’il fallait élever dans les Tuileries huit cents potences, pour y attacher une partie des membres de l’Assem blée nationale et tous les ministres. Plusieurs membres de la partie droite demandent qu’on arrête aussi l’imprimeur. M. Regnaud(de Saint-Jean-d' Angély .)Ce n’est pas l’imprimeur qu’il faut ordonner d’arrêter: l’imprimeur de semblables atrocités se cache dans l’ombre : mais ce sont les audacieux colporteurs. Ce n’est pas contre une partie de l’Assemblée nationale, c’est contre l’ensemble de vos opérations qu’on s’élève; ce sont les ennemis de votre ouvrage, qui disent qu’il faut élever huit cents gibets contre vous. Comment le Châtelet n’a-t-il faitaucune poursuite contre le libelle, signé Marat, que vous avez excepté par un de vos décrets? On dit qu’il est occupé d'opérations plus pressantes ; mais est-il rien de plus pressant que de se conformer à une disposition que vous avez prise, et dont vous avez assez annoncé que vous demandiez une prompte exécution ? M. Malonet. L’imprimé que voici est signé: Marat , l'ami du peuple ; il contient cette phrase : (11 s’agit de la proposition qu’a faite M. de Mirabeau l’aîné, de licencier l’armée.) Ici je vois la nation entière se soulever contre cet infernal projet. Si les noirs et les ministres gangrenés et archigangrenés sont assez hardis pour le faire passer , citoyens , élevez huit cents potences , pen-dez-y tous ces traîtres et à leur tête l'infâme Ri-quetti l'aîné ... M. de Mirabeau l'aîné. Il me sera permis de demander si ce n’est pas une dérision tout à fait indigne de l’Assemblée, que de lui dénoncer pareilles démences? (M. Malouet reprend la parole.) M. Aer chère. C’est pour nous empêcher de travailler, qu’on vient nous occuper de ces folies. M. Malouet. Si vous voulez adopter ma proposition, je cesserai volontiers cette lecture, car le cœur soulève à l’honnête citoyen. Je demande donc qu’il soit donné ordre à M. le maire de Paris défaire arrêter M. Marat et les colporteurs de ces libelles. M. de Mirabeau, l'ainè. Sans doute, il est bon de faire des lois sur les délits qui se commettent par la voie de la presse, comme sur tous les autres délits. Il est vrai que ceux-ci méritent peut-être une plus grande considération, parce que leur propagation est plus rapide: mais ce qui est mauvais, c’est de se hâter sur une semblable matière, c’est de se hâter, parce qu’on publie des extravagances. Je vous prie de remarquer que dans ce paragraphe d’homme ivre, je suis seul nommé. On parle des noirs dans ce libelle; eh bien, c’est au Châtelet du Sénégal qu’il faut dénoncer ce libelle. Ehl que signifie cette expression des noirs ? Messieurs, je vous le demande... Parmi les libelles, les libelles les plus fameux, il en est un, libellas famosus, ce fameux libelle est de l’homme à qui l’on veut renvoyer l’extravagance qu’on vous dénonce ; cet homme est M. le procureur du Châtelet. Ehl passons à l’ordre du jour. {On applaudit.) M. le Président propose de mettre aux voix la motion de M. Malouet. M. Regnaud {de Sant-Jean-d' Angély .) On ne peut mettre aux voix la motion de M. Malouet, car on ne sait pas si M. Marat est l’auteur du libelle dont il s’agit, et on ne peut le savoir que par une information. Je demande la question préalable. M. d’André. J’appuie la question préalable ; mais je demande qu’il soit donné ordre au maire de Paris de faire arrêter les colporteurs qui débitent ces papiers . (On réclame l’ordre du jour.) (L’Assemblée délibèreet passe à l’ordre du jour.) M. Oeoffroy. Je demande qu’on vote des re-mercîments à M . Malouet pour le temps qu’il nous a fait perdre. M. de Reynand, député de Saint-Domingue , fait lecture d’une lettre adressée à sa députation par 1’assemblée provinciale du nord de cette île. Cette assemblée s’occupe d’une adresse relative au décret du 8 mars, et à l’instruction du 28 du même mois; elle prie l’Assemblée de surseoir à faire droit sur les délibérations de l’assemblée générale de la colonie de Saint-Domingue. (Celle lettre est renvoyée au comité colonial.) M. le Président. L’ordre du jour est un rap-