480 (Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (18 avril 1791. J « Art. 8. Il sera présenté incessamment une requête officielle à l’Assemblée nationale, pour demander que la loi prononce, en cas de contravention, la peine de destitution pour les supérieurs, et même de suppression des chapelles suivant les cas. « Art. 9. Les religieuses cloîtrées, qui ne voudraient pas profiter de la faveur qui leur est accordée par l’article 6, sont libres d’en faire la déclaration à la municipalité. A cette condition, elles régleront seules ce qu’elles jugeront convenable à l’exercice de leur culte, en se servant des chapelles intérieures de leur couvent. S’il n’y a pas de chapelle intérieure dans leur couvent, elles s’adresseront à la municipalité, qui pourra, après la visite des lieux, leur accorder la disposition de la chapelle extérieure, ou seulement d’une partie de cette chapelle, si elle se trouve plus grande qu’il n’est nécessaire pour leur usage particulier; mais, dans ce cas, toute communication extérieure sera fermée, et les religieuses cloîtrées seront dispensées de la seconde condition exigée par l’article 7 ci-dessus. « Art. 10. Les églises et chapelles qui ont été fermées en vertu de l’article 5 seront, aux termes des décrets, mises en vente au profit de la nation ou réservées à toute autre destination qui pourrait être déterminée par l’Assemblée nationale. Les acquéreurs de ces édifices resteront libres d’en faire tel usage qu’ils jugeront à propos. « Art. 11. Tout édifice ou partie d’édifice que des particuliers voudront destiner à réunir un grand nombre d’individus pour l’exercice d’un culte religieux quelconque portera, sur la principale porte extérieure, une inscription pour indiquer son usage, et le distinguer de celui des églises publiques appartenant à la nation, et dont le service est payé par elle. « Art. 12. Cette inscription ne pourra, pendant le cours de cette année 1791, être placée qu’a-près avoir été vue et autorisée par le directoire du département. * Art. 13. Seront exempts de l’inscription, les maîtres des maisons qui ont déjà, ou auront des chapelles particulières pour l’usage seulement intérieur de leurs maisons. « Art. 14. Il est expressément défendu de mêler aux exercices de quelque culte que ce soit des provocations contre la Constitution, contre les lois ou contre les autorités établies. A ce signe, la police doit distinguer, de ceux qui se réunissent paisiblement pour leur religion, ceux qui, sous ce prétexte, s’assembleraient dans des vues criminelles, et pour tenter des coalitions factieuses contre l’établissement de la Constitution. « Art. 15. Toute contravention aux articles 11, 12 et 14 sera réprimée, la première fois, par les moyens et les peines ordinaires de police, et la seconde fois, par telle autre peine plus sévère prononcée par la loi, le directoire du département se réservant de s’adresser à l’Assemblée nationale pour avoir à cet égard une loi pénale. « Art. 16. Le directoire ordonne expressément à la municipalité d’employer tous les moyens, pour réprimer efficacement les coupables effets de l’odieuse intolérance qui s’est récemment manifestée, et pour prévenir les même délits, sous quelque forme qu’ils se reproduisent contre la pleine liberté religieuse reconnue et garantie par la nouvelle Constitution. « Art. 17. Le présent arrêté sera envoyé à la municipalité de Paris, pour qu’elle ait à veiller à son exécution; et il sera imprimé et affiché partout où besoin sera : Signé : La Rochefoucauld, président. Blondel, secrétaire. M. Goupil-Préfeln. Je crois, avec M. d'André, que l’arrêté du département de Paris est conforme aux notions de la plus pure et de la plus saine philosophie, digne même d’être consacré par votre sagesse. Mais il est des règles dont la conservation est si importante, qu’il est impossible de les omettre sans ébranler les fondements de l’ordre public. Vous avez sagement établi, Messieurs, que tout Etat dans lequel la destination des pouvoirs n’est pas bien marquée, n’est pas bien assurée, n’a pas de bonne constitution. C’est cette distinction de pouvoir que, dans un mouvement de zèle dont le principe est sans doute infiniment louable, le directoire du département de Paris a méconnue : c’est ce qui fait le vice essentiel de son arrêté ; c’est ce qui ne vous permet pas d’accepter comme arrêté ce qui est excellent à vous être présenté comme pétition. ( Applaudissements à l'extrême gauche.) Rappelez-vous que vous avez entendu dans cette Assemblée, il y a fort peu de temps, le reproche adressé à des patriotes de tendre par leurs opinions au pouvoir fédératif : Eh bien, si chaque directoire de département peut, avec de bonnes intentions, en présentant des vues sages, s'arroger la puissance législative ( Applaudissements à l'extrême gauche.), nous voilà parvenusaux portes de l’Etat fédératif dans lequel notre Constitution une fois précipitée se trouvera anéantie et perdue sans ressource. Messieurs, considérez, je voue prie, dans votre sagesse la souveraine importance de l’exemple dont il s’agit ici. Tout l’Empire a les yeux ouverts sur la délibération que vous allez prendre. Ce que le directoire du département de Paris aura pu se permettre, chacun des 82 directoires de département pourra sans doute se le permettre également; et vous allez avoir en France 83 pouvoirs législatifs ( Applaudissements .) Vous avez été frappés de la nécessité de renfermer strictement les corps administratifs dans les limites de l’autorité qui leur est attribuée. Vous avez distingué l’administration et l’ordre judiciaire. Vous avez donné aux départements ce qui concerne la tenue, et aux tribunaux ce qui tient aux questions d’éligibilité. Maintenant, je viens vous démontrer que l’arrêté dont on vient de vous donner lecture entreprend véritablement sur les fonctions du Corps législatif. L’article 1er porte que : « La municipalité nommera pour chaque église paroissiale un officier public sous le nom de préposé laïque, etc. » Je demande si un officier peut être jamais établi autrement que par la loi. Gela me paraît assez clair et assez évidemment démontré. ( Applaudissements .) Je passe rapidement sur plusieurs dispositions immédiatement subséquentes à celle-ci. Je me contenterai de cette observation générale, que par l’ensemble des dispositions on change absolument l’ordre légal établi jusqu’à présent pour l’administration des paroisses, et que l’on transfère à la municipalité de la ville ce que les lois attribuaient ci-devant aux assemblées de paroisses, arrangement très bon en lui-même, mais qui ne peut être introduit que par une loi; car enfin il est indubitable que ce n’est que par l’autorité (18 avril 1791.) 181 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (Assemblée nationale.) législative qu’une loi précédente peut être changée. Je viens à l’article 4 qui est ainsi conçu : « Il ne pourra être fait d’exception à l’article précédent, qu’en faveur des prêtres ou ecclésiastiques qui seront munis d’uoe licence particulière, accordée par l'évêque du département, visée et consentie par le curé de la paroisse. » Je vois que le directoire du département de Paris, avec des vues très bonnes, dans l’effervescence de son zèle, a tranché une des grandes 3 uestions du droit public ecclésiastique, c’est-à-ire l’admission dans une paroisse d'un prêtre étranger à cette paroisse. L’admission des prêtres étrangers aux paroisses a été longtemps discutée par les canonistes français; les uns donnaient ce droit d’admission aux curés qui sont aussi d’institution divine; les autres, au contraire, ne le donnaient qu’aux évêques, cet objet ne pouvait être décidé que par une loi. L’article 2 est obscur, il n’a pas la précision que doit avoir la loi. Gomment interpréter quel est le nombre nécessaire d’individus qui peuvent être admis dans les églises louées? Je passe aux articles 1 1 et 12 d’autant plus volontiers qu’ils présentent une idée belle et sage, mais qui ne peut trouver place que dans une pétition ; et je demande à ce directoire législateur comment il fera si le citoyen n'obéit pas à sa loi? Qu’arrivera-t-il? Remarquez que vous avez attribué la police aux municipalités. Eh bien! si la municipalité ne rend point une ordonnance conforme, quel est le citoyen qui se croira lié par cet arrêté du département? Mais, me dira-t-on, le directoire est supérieur : il ordonnera à la municipalité de rendre une ordonnance ; le citoyen sera traduit devant la municipalité, et l’appel porté devant un tribunal. Mais le juge établi pour faire l’application de la loi doit-ii faire, ou ne doit-il pas faire l’application du règlement fait par ce directoire? S’il ne doit pas en faire l’application. ce règlement est impuissant ; s’il doit en faire 1 application, c’est donc bien véritablement une loi que le directoire a faite de son propre mouvement. Je dis que, si le directoire du département de Paris a ordonné l’exécution d’une disposition qui n’est pas dans la loi, il a fait une loi particulière. Non pas que je n’approuve ce règlement en lui-même ; je le regarde comme sage, et je pense que c’est s’égarer étrangement que de le croire opposé à nos principes religieux et civils. Je crois même que la difficulté des circonstances exige que vous vous empressiez d’adopter ce système; mais ce n’est pas assez de faire le bien, il faut encore le bien faire. Pour ne pas abuser des moments que vous avez l’indulgence de m’accorder, je n’étendrai pas davantage mes réflexions et voici le projet de décret que je voue propose : a L’Assemblée nationale, sans approuver l’arrêté du directoire du département de Pans, lequel ellea déclaré de nul effet, prenant ledit arrêté pour pétilion, arrête que les articles dudit arrêté seront mis successivement en délibération. » M. de Jessé. Je n’aime pas plus que le préo-inant le système des républiques fédératives. i je croyais voir que l’arrêté du département nous menait à cet ordre de choses, je serais le premier à m’élever pour le repousser. Mais je ne sais rien de tout cela, et je ne puis être aucunement de l’avis de M. Goupil. L’arrêté du département est la conséquence claire et précise d’un article de la déclaration des droits de l'homme. Il donne ua appui au droit imperceptible qu’a tout homme de faire ce qui n’est pas défendu par la loi ; et surtout de se réunir tranquillement dans un lieu commun pour l’exercice du culte. Encore y apporte-t-il une espèce de restriction en demandant une inscription au-dessus du temple. Nous ne saurions trop approuver ces vues saines et fermes pour la cessation d’une odieuse intolérance. La mesure du département, de faire rendre aux non-conformistes les édifices qui ne sont point nécessaires au service public, me paraît exactement conforme à ces principes. Cette manifestation, loin de troubler l'ordre public, doit au contraire le rétablir et prévenir la persécution qui nous plongerait dans les discordes et les maux Tes plus fâcheux. Cette arme, mise aux mains des fanatiques par des gens habiles, est un volcan placé sous votre Constitution. Il faut lui donner une issue, si vous voulez préserver la patrie. Un membre à gauche : Ce n’est pas là la question. M. de Jessé. Je ne rechercherai pas si ces cénobites, qui ont consacré le cours de leur vie à la recherche d'une perfection chimérique, sont des hommes d’une raison faible et égarée par les préjugés; mais je sais qu’ils doivent jouir d’une liberté sans bornes eu tout ce qui ne contrarie pas les principes de la Constitution. Je conclus à l’adoption de l’arrêté, et à Renvoi aux départements, comme instruction pour faciliter l’exécutioo des décrets sur la Constitution civile du clergé. M. Treilhard. Je ne trouverais certainement dans cette Assemblée aucune contradiction, quand je rendrais hommage au zèle, à la pureté, au patriotisme des membres du directoire du département de Paris ; mais personne n’est à l’abri de l’erreur. Déjà l’un des préupiuantsvous a prouvé qu’il y avait quelques articles dans cet arrêté qui excédaient les bornes prescrites aux corps administratifs. Dans les deux premiers articles, par exemple, on crée des officiers publics pour la garde et la conservation des meubles, ornements et effets, lesquels sont, dans l’état actuel, confiés à des administrations particulières qu’on ne peut déplacer sans innovation. De plus, en excédant ainsi les bornes de son pouvoir, le département augmente la dépense, à moins que la même opération ne supprime les administrations qui existent. L’article 3 me paraît rédigé dans un sens contraire aux internions du département , et il me semble qu’à ce sujet il faut faire une déclaration qui lève toutes les difficultés. Vous avez ordonné que les ecclésiastiques fonctionnaires publics prêteraient un serment, et la seule peine qu’ait entraîné le refus de prêter serment, ou plutôt sa seule conséquence, c’est que le prêtre fonctionnaire public le refusant est devenu un ecclésias� tique ordinaire. Les uns et les autres ont conservé le droit d’exercer partout les fonctions ecclésiastiques où ils voudront et où ils pourront le faire (. Applaudissements unanimes.)-, et cependant il résulterait del’article 3que tousles ecclésiastiques refusant de prêter le serment ne pourraient pas aller dire la messe dans une paroisse. ïf Jamais les simples ecclésiastiques n’ont été privés de faire les fonctions ecclésiastiques, excepté celles attachées à un titre dont ils n’é- 182 [Assemblée nationale j ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 avril 1791.] taient pas pourvus. Le directoire ne veut sans doute pas leur ôter ce droit ; mais cet article n’est pas clair, et il faut que l’assemblée nationale déclare positivement que les ecclésiastiques qui n’ont pas prêté le serment peuvent remplir toutes les fonctions qui ne sont pas attachées à uu titre d’oflice public. ( Applaudisse - ments.) L’article suivant fait une exception en faveur des prêtres qui seraient munis d’une licence particulière. 11 est certain que cette mesure est mauvaise. L’édit de 1695 voulait bien qu’on ne pût prêcher ni confesser dans aucune paroisse sans permission : mais jamais ni cet édit, ni aucune loi n’ont exigé la licence de l’évèque pour qu’un prêtrepûtdire la messe. ( Applaudissements .) Cet article aurait encore un autre inconvénient, il augmenterait singulièrement la dépense du culte, et en voici la preuve : Vous savez que dans toutes les paroisses il existe aussi des curés et des vicaires; mais il existe aussi des prêtres habitués, lesquels ne sont pas salariés. Ces prêtres sont nécessaires pour le service, et jusqu’à ce moment-ci ils ont vécu du casuel de leur service. Vous n’avez pas supprimé le casuel de ceux-là; vous avez supprimé le casuel des curés et celui des vicaires, parce que vous avez payé les curés et les vicaires; mais vous n’avez pas supprimé le casuel des prêtres habitués, que des particuliers peuvent employer à des cérémonies pour en augmenter la pompe. Cependant s’ils sont suspendus, alors les églises se trouvant privées du secours qu’elles en reçoivent, il faudrait nécessairement augmenter de beaucoup le nombre des vicaires et, par conséquent, la dépense du culte. Enfin il résulte de cet article, rapproché avec l’article 11, des conséquences qui ne peuvent être dans l’intention du directoire du département de Paris. Je déclare d’abord hautement que la liberté des cultes est nécessaire, qu’elle est une conséquence de vos décrets. ( Applaudissements 'prolongés.) Je ne connais qu’un culte dans l’Eglise de France; dans l’Eglise catholique, apostolique et romaine, il ne peut eu exister deux. Il est impossible qu’on trace une démarcation entre les prêtres assermentés ou non assermentés {Applaudissements). La seule différence qui existe entre eux est que les premiers sont fonctionnaires publics et que les autres ne le sont pas; mais ils sont tous du même culte. Cependant je vous prie de remarquer que, en adoptant l’arrêté, il en résulte que vous auriez déclaré un schisme, que vous auriez été contre le vœu de la nation qui n’a jamais entendu faire un schisme, et qui ne consentira jamais à être schismatique, (Ap-plaudissements.) Il y a encore une autre considération, et je demande ici votre attention : c’est que si, par une mesure quelconque, il pouvait résulter un schisme, la conscience de tous les prêtres qui ont accepté des offices parce qu’ils ont bien senti qu’ils n’étaient pas schismatiques et qu’il n’y avait qu’un culte en France, pourrait être alarmée. Par exemple, supposons l’éplise des thé-atins donnée à des prêtres qui n’ont pas prêté le serment; supposons que M. l'Archevêque de Paris vînt y faire l’oflice, y faire des ordinaires; que pourriez-vous dire? il en résulterait alors que vous perpétueriez une scission qui ne doit pas être perpétuée. Les prêtres vivraient d’oblations; vous n’auriez, à la vérité, qu’un seul culte payé par la nation ; mais il y aurait un autre culte et, en établissant le schisme, vous auriez établi la mendicité. Je déclare que je regarde la liberté des cultes comme nécessaire, comme décrétée, mais je ne veux pas voir deux cultes là où il n’en existe qu’un. Je pense donc que vous ne pouvez vous dispenser de renvoyer l’arrêté du directoire du département de Paris au comité de Constitution ; c’est à ce comité qu’il doit être porté, puisqu’il y est question d’objets de police. Je propose donc de décréter les dispositions suivantes : « L’Assemblée nationale déclare que les ecclésiastiques fonctionnaires publics, qui n’ont pas prêté le serment prescrit par la loi du 26 décembre 1790, n’étant réputés par ladite loi que démissionnaires de leurs titres de fonctionnaires publics, peuvent exercer librement, dans toutes les églises nationales, les fonctions ecclésiastiques qui ne sont pas attachées à des titres de fonctionnaires publics, qu’ils peuvent même confesser dans lesdites églises avec la permission des évêques diocésains et des curés du lieu ; « Décrète : 1° Que les églises et chapelles dépendant des maisons et communautés séculières, etei-devant régulières, ne pourront servir qu’à l’usage particulier desdites maisons, sans pouvoir, dans aucun cas, être ouvertes au public ; « 2° Que celles desdites maisons qui auraient admis des étrangers dans leurs églises seront supprimées; « 3° Seront pareillement supprimées celles desdites maisons dans lesquelles il aura été fait des provocations contre la Constitution, contre les lois et contre les autorités légitimes. « L’Assemblée nationale renvoie, au surplus, l’arrêté du directoire du département de Paris, du 11 de ce mois, au comité de Constitution, pour en rendre compte incessamment. » M. Lanjuinais. L’arrêté du département est un délit national. Le renvoi ne peut en être ordonné ; et je m’oppose à ce que l’arrêté du département de Paris soit considéré comme pétition. M. Buzot. Il me semble que l’on veut, avec de bonnes intentions sans doute, prêcher l’intolérance religieuse à la tribune. ( Murmures et applaudissements.) M. le Président. Vous n’avez pas la parole. M. Bnzot. C’est une motion d’ordre. M. de Folleville proteste. M. lianjuinais. J’avais la parole avant Monsieur. Je me renferme dans la question. ( Murmures. ) M. Buzot. Monsieur le Président, puisque tous les préopinants ont demandé le renvoi au comité de Constitution, je ne sais pourquoi on l’arrête; mais je me demande auparavant comment il est possible que l’Assemblée qui a tant de choses à faire semble donner cours à une discussion qui ne sert qu'à échauffer les imaginations et à perpétuer cette fermentation malheureuse qui agite en ce moment le peuple. Ceux qui ont parlé avaient sans doute de bonnes intentions; mais ils n’en ont pas moins prêché l’intolérance religieuse la plus caractérisée. Je veux être libre, moi, et c’est parce que je veux l’êlre que je veux aussi que les autres ïe (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 avril 1791.J 183 soient. De quel droit, en effet, réclamerait-on la liberté individuelle lorsque la liberté publique ne serait pas assurée; je ne puis concevoir que celui qui veut la liberté pour lui ne la veuille pas pour les autres. Je ne crois pas qu’il y ait de bonne réponse à cela, et puisque l’arrêté n’est pas mauvais au fond, puisqu’on dit seulement que le directoire du département de Paris a fait ce qu’il ne pouvait faire, pourquoi donc, quand vous avez d’autres affaires plus importantes, vous occuper encore de celle-ci ? Pour abréger cette discussion, je demande, dans l’intérêt de l’ordre public, que le renvoi au comité de Constitution soit décrété, et que l’on passe à l’ordre du jour. (. Applaudissements .) M. Camus. Je demande à faire un amendement à la motion de M. Buzot. (Murmures.) M. le Président. La parole est à M. Lanjui-nais. M. Lanjuinais. Et moi aussi je veux être libre (Murmures.)-, et c’est parce que je veux être libre que je ne peux pas tolérer que l’on renvoie l’arrêté du département de Paris au comité de Constitution; parce que je ne saurais consentir à ce que, par provision, notre Constitution soit violée, et à ce que l’acte qui la viole ait son exé - cution provisoire. ( Applaudissements .) Voici ma motion : Ou le directoire a usurpé le pouvoir du Corps législatif, ou il s’est maintenu dans les bornes de ses fonctions. S’il a réellement usurpé les pouvoirs du Corps législatif, il a commis volontairement ou involontairement le plus grand des délits possibles, le crime de lèse-nation au premier chef. ( Murmures et rires.) Son arrêté doit avoir son exécution dans les vingt-quatre heures; il ne faut pas laisser écouler ces vingt-quatre heures s’il est attentatoire au pouvoir législatif. Je ne dirai point, Messieurs, comment l’acte dont il s’agit contient des dispositions illégales; il est opposé à vos décrets, il a abrogé vos lois, il a donc empiété sur vos fonctions. (Murmures.) Si l’on convient de ce que j’avance, si cette usurpation est reconnue, je conclurai tout de suite; mais si l’on en doute, je demande à prouver mon assertion. Plusieurs membres : Oui! oui! Prouvez! prouvez ! M. Ijanjuïnais. Vous avez rendu, le 29 décembre dernier, un décret portant qu’il est défendu à qui que ce soit de rien innover relativement au gouvernement des églises et des fabriques jusqu’à ce que vous ayez fait une loi générale sur cette matière. Or, la violation de cette loi, sanctionnée et publiée, est si évidente... M. le Président. Ce n’est pas là la question. Vous n’avez la parole que sur la motion du renvoi. M. lianjuinals. Je suis parfaitement dans l’ordre. Je dis, Monsieur le Président, qu’on ne peut pas renvoyer purement et simplement cet arrêté au comité ; il faut déclarer que l’arrêté dont il s’agit sera regardé comme non avenu. Si, d’ailleurs, on veut ménager les personnes qui l’ont rendu, et dont les intentions pouvaient être pures, il faut dire au moms que les choses resteront dans le même état où elles étaient avant l’arrêté du directoire. (Murmures.) S’il m’était permis d’entrer dans d’autres détails, je prouverais que cette loi est la plus injuste, la plus impolitique possible; qu’elle pourrait compromettre essentiellement votre Constitution et attirer sur le royaume les plus grands malheurs. (Murmures.) M. d’André. On n’a encore pris la parole que contre l’arrêté. Je demande à parler pour. M. Canins. Je fais à la motion de M. Buzot un amendement qui consiste en un seul mot : « L’Assemblée nationale renvoie aux comités de Constitution et ecclésiastique... (Murmures.) et sursoit à l’exécution de l’arrêté du directoire de département. » Voici pourquoi j’insiste sur ce sursis; c’est précisément pour ramener la paix et pour prêcher la tolérance; car deux dispositions de cet arrêté sont absolument contraires à vos décrets. Vous avez décrété que les fonctionnaires publics non assermentés ne pourraient pas remplir leurs fonctions dans les églises paroissiales ; cependant aujourd’hui on leur en accorde le droit, pourvu qu’ils aient une permission de l’évêque. Qu’arri-vera-t-il, Messieurs? Ou force, en quelque sorte, ces prètres-là à aller dans des maisons particulières, dans des chapelles secrètes, et c’est comme cela qu’on excite la fermentation. Il faut leur laisser la faculté libre de jouir du droit qu’ils ont de dire la messe dans leurs paroisses; et lorsque cette liberté leur sera laissée, ils n’auront plus d’excuse si des troubles arrivent. En outre, l’arrêté n’excepte point les chapelles des communautés. Or, vous avez décrété qu’il serait permis à toutes les communautés d’exercer le culte, pourvu que cet exercice ne fût pas paroissial. L’arrêté leur ôte leurs chapelles; elles n’ont que des chapelles privées, il faut les leur laisser. Plusieurs membres: Gela est dans l’arrêté. M. Camus. Cela n’y est pas. On a bien parlé des chapelles des prisons, des collèges, des hôpitaux, mais non pas des maisons religieuses. Laissez donc les choses dans l’état où elles étaient; et en renvoyant l’arrêté aux comités de Constitution et ecclésiastique, ordonnez qu’il soit sursis à son exécution. Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée. M. d’André. J’ai demandé la parole pour une motion d’ordre. La discussion qui a été ouverte sur l’arrêté du directoire du département de Paris a pour but d’éclairer l’opinion publique sur cet arrêté. Vous ne pouvez donc pas fermer la discussion, quand vous n’avez encore entendu que des orateurs qui parlaient contre lui; ce serait là vraiment autoriser la fermentation qui agite les esprits, puisqu’on n’aurait entendu aucun défenseur de l'arrêté dont il s’agit. Quand il aura été expliqué, quand il aura été entendu, les opinions se réuniront peut-être en sa faveur, comme nous avons déjà vu les préopinants en reconnaître la sagesse, et M. Goupil notamment, bien qu’il l’ait trouvé mauvais dans sa forme. En vain me demande-t-on de me renfermer dans la question du renvoi. MM. Camus et Lanjuinais, qui avaient annoncé qu’ils ne parleraient que sur le renvoi, sont entrés dans l’examen du fond, pour eu faire ressortir les inconvénients. 184 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 avril 1791.) On a dit que nous avions d'autres objets importants à discuter ; mais quand il s’agit d’un objet qui tient à la liberté publique, quand depuis trois jours Paris est en mouvement, quand les ennemis de la Révolution d’un côté, et les fanatiques de l’autre se servent de cet arrêté pour exciter des troubles, en laisser la discussion en arrière, sous le prétexte d’un renvoi, c’est se résigner bien inutilement à tout le mal qui pourrait résulter de l’incertitude des esprits. Vous ne pouvez donc pas éviter cette discussion très importante, et pour qu’elle soit commencée avec la sagesse et la dignité qui vous convient, je demande pour motion d’ordre qu’un membre du directoire du département, M. l’abbé Sieyès, soit entendu, pour savoir dans quel sens l’arrêté du département a été rédigé. Je me réserve ensuite de prouver qu’il est aussi régulier dans la forme que juste dans le fond. (M. l’abbé Sieyès paraît à la tribune. On applaudit à plusieurs reprises.) M. l’abbé Sieyès. Je vais répondre à l’interpellation qui vient de m’être faite. J’expliquerai dans quelles intentions, dans quel esprit, le directoire du département s’est cru obligé de prendre l’arrêté qui vous est soumis en ce moment. Rappelez-vous les circonstances dans lesquelles le directoire a été obligé de prendre ces dispositions. L’ordre public était troublé dans Paris. Le fanatisme d’un côté, l’intolérance de l’autre, semblaient attaquer à l’envi l’établissement de la Constitution. Une partie des églises, devenues inutiles par l’établissement de la constitution civile du clergé, étaient choisies pour les rendez-vous des réfractaires à la loi; et je vous prie d’observer qu’il était bien singulier que des établissements nationaux fussent, en quelque sorte, offerts par la nation à ceux qui faisaient profession de désobéir à la loi. La nation veut sans doute favoriser le service du culte catholique ; elle veut, par conséquent, que tout individu quelconque qui voudra professer la religion catholique, apostolique et romaine, puisse le faire dans des églises publiques. C’est d’après cet esprit que l’Assemblée nationale a formé sa constitution civile du clergé; elle a mis le culte public dans les églises paroissiales; elle a décrété l’existence, le traitement des évêques, des curés et des vicaires; elle a supprimé tout le reste; ainsi l’intention de la nation n’a pu être que d’offrir le service du culte public dans les églises paroissiales. S’il n’y a pas assez d'églises paroissiales, je dis u’il faut accorder à chaque paroisse une ou eux succursales, si l’on n’aime mieux augmenter les paroisses; mais quand une fois toutes les paroisses seront tellement établies qu’on ne puisse pas dire que le service public catholique ne répond pas aux besoins publics, je dis que dès ce moment la nation ne doit plus rien. C’est dans cette intention que le directoire a pris les mesures qu’il était urgent de prendre. Ce n’est pas seulement l’ordre public troublé, c’est une lettre du roi, écrite par M. Delessart au directoire du département, qui l’a obligé de prendre ces mesures. A présent, la question est de savoir si les mesures prises par le directoire du département sont bonnes ou mauvaises, compétentes ou non compétentes. On n’a pas voulu traiter la question au fond, disait-on; et cependant on l’a très bien traitée au fond , et vous avez vu des membres du comité ecclésiastique venir prétendre que le département est intolérant, et que le comité seul était tolérant ; plaisante tolérance que celle qui déclare hautement qu’elle ne connaît qu’un culte et qu’elle n’en veut pas d’autre. Un membre à gauche : Oui, pour les catholiques, il n’en faut qu’un. M. l’abbé Sieyès. Je n’entre pas dans le fond de la question, puisqu’il paraît que l’Assemblée ne veut pas le traiter; mais je me borne à la simple explication des raisons que le directoire du département a eu pour ordonner ces mesures dans la ville de Paris. Je lirai l’arrêté article par article et je prouverai la compétence. L’article premier est ainsi conçu : « Article premier. La municipalité nommera pour chaque église paroissiale un officier public, sous le nom de préposé laïc, lequel aura la garde de l’édifice, celle de la sacristie, le dépôt des ornements et le soin de la police intérieure. » On a beaucoup attaqué l’article premier : On a prétendu qu’il n’appartenait pas à un corps administratif de créer des fonctions nouvelles. Je distingue entre fonctions et fonctions; car certainement, lorsque vous donnez un devoir à un corps administratif, vous lui permettez sans doute de nommer, par commission, des agents pour l’action immédiate de ce qu’il a à faire. Il y a plus : les préposés laïcs existaient déjà. En effet, dans toutes les églises, il y a des personnes chargées de la police, de la garde de l’édifice, du dépôt et de la garde des ornements. Comment-voulez-vous que les corps administratifs puissent donner des ordres à ces préposés s’ils ne les connaissent pas ? Gomment voulez-vous qu’ils puissent être obéis, s’ils n’ont pas des agents responsables ? Ges agents étaient, pour ainsi dire, disséminés; on ne savait où les prendre. Le directoire a réuni leurs fonctions sur un seul agent responsable. Les corps administratifs ont le droit de prendre des mesures provisoires; sans cela, toute administration serait dissoute. Le directoire a dû dire qu’il y aurait un agent responsable, et que, pour que l’unité fût conservée, les autres agents lui seraient subordonnés. Je sais qu’il y a des intérêts particuliers choqués par nos mesures qui cependant ne sont que provisoires. Aussi ce n’est qu’un malentendu, parce que l’intention du directoire était de faire entendre à la municipalité, par un arrêté particulier, que tout curé qui voudrait se charger lui-même de la responsabilité, n’avait qu’à se présenter pour être préposé laïc ; que tout curé qui ne voudrait pas se charger de cette responsabilité serait autorisé à présenter quelqu’un pour que la municipalité le nomme. Ainsi tous les intérêts particuliers qui ont paru se réunir contre cette disposition me paraissent très mal entendus; il n’y a pas le moindre inconvénient dans la mesure ; de plus elle est compétente en soi. Je passe au troisième article. Il est ainsi conçu : « Tout préposé laïc et les employés sous ses ordres seront tenus sous peine de destitution d’empêcher qu’aucune fonction ecclésiastique ne soit exercée dans leur église, sacristie ou bâtiments en dépendant, par d’autres que par les fonctionnaires publics ecclésiastiques salariés par la nation, nominativement attachés à ladite église paroissiale, et inscrits sur un tableau exposé à cet effet à la porte de la sacristie. » Cet article paraît avoir soulevé l’indignation de beaucoup de membres du comité ecclésiastique. Nous allons l’examiner sous le rapport de la corn- 185 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 avril 1791.) pétence. L’Assemblée nationale a obligé tout fonctionnaire public à prêter un serment ; elle n’a pas voulu sans doute que cette loi fût vaine; elle ne veut pas sans doute que les prêtres non assermentés exercent des fonctions qu’ils n’ont pas : il faut que tout homme qui exerce une fonction publique dans une église publique et nationale, soit assermenté. Comment voulez-vous vous assurer que cette loi sera exécutée, si vous ne rendez pas quelqu’un responsable de son exécution ? Il fallait donc commencer par nommer le préposé laïc, ou bien par rendre le curé lui-même responsable de tous les délits de cette espèce. Vous sentez bien que toute fonction exercée dans un bâtiment public pour le service du public, est une fonction publique ecclésiastique... (. Applaudissements sur un grand nombre de bancs ; murmures à droite.) Il s’élève des réclamations : il faut prouver. Je dis que toute fonction ecclésiastique exercée dans un lieu public, pour le public, est une fonction publique. Je fais une comparaison : l’instruction publique est nationale et publique comme le culte public. Vous avez des chaires publiques. Si un particulier disait : Je vepx instruire nos concitoyens, et s’il les instruisait dans une de ces chaires, n’exercerait-il pas une fonction publique ? (Murmures.) Un membre à droite : Il s’agit de la messe. M. l’abbé Sieyès. Il y a de l’obscurité dans l’idée qu’on se forme des fonctions publiques. Dans toute fonction publique, il y a deux choses : les hommes qui agissent pour les besoins publics, et ceux qui profitent du service qu’on leur rend. Les citoyens sont les administrés : ceux qui leur rendent ces services pour la nation sont des fonc-tionnaires publics. (Applaudissements.) Il y a plusieurs personnes qui réclament dans ce moment, parce qu’elles songent à plusieurs fonctions qu’on remplit dans les églises, sans être fonctionnaire public, par exemple la fonction de dire la messe. Je réponds que la fonction de dire la messe ne fut-elle pas une fonction publique, quoique je le soutienne, un prêtre au milieu delà messe peut très bien faire un prône. (Murmures.) Je vois beaucoup de personnes qui ne sont pas du même avis que le département : Elles veulent que tout prêtre, soit qu’il ait prêté son serment, soit qu’il ne l’ait pas prêté, ait le droit d’aller dire sa messe dans une église publique. Eh bien! l’arrêté du département le dit. Jusqu’à présent, dans la ville de Paris, nul homme n’a été reçu dans une église, n’a reçu des ornements pour dire la messe, sans avoir une permission faite et donnée au secrétariat de l’archevêché. C’est là une règle de police nécessitée par de graves inconvénients. Il arrivait souvent que des personnes qui n’étaient pas même ecclésiastiques endossaient l’habit ecclésiastique et se faisaient un métier d’aller dire une, deux, trois messes dans la journée, pour gagner quarante-cinq sols. C’est un fait qui ne peut pas être contredit, que nul n’était reçu dans une paroisse s’il n’était pas connu. Plusieurs membres : Cela ne se faisait pas. M. l’abbé Sieyès. Si cela n’était pas fait, il faut que cela soit fait. (Applaudissements.) Cette mesure de police existait. Si elle n’existait pas, il faudrait la faire exister, et elle ne sortirait pas de la compétence de la police des corps administratifs. Ce n’est pas au Corps législatif qu’il appartient de s’occuper des mesures de police, pour connaître les prêtres qui peuvent exercer des fonctions dans les églises. (Applaudissements.) Le département a parfaitement senti qu’il pouvait y avoir dans l’étendue d’une paroisse des personnes qui se prêtassent au service de cette paroisse ; il a dû faire l'exception suivante qui est l’objet de l’article 4. « Art. 4. Il ne pourra être fait d’exception à l’article précédent qu’en faveur des prêtres ou ecclésiastiques qui seront munis d’une licence particulière, accordée par l’évêque du département, visée et consentie par le curé de la paroisse, laquelle permission aura besoin d’être renouvelée tous les trois mois. » Cette mesure existait déjà. On la confond avec des idées d'approbation, tandis qu’il ne s’agit que de permission. Cette permission était nécessaire ; cet usage doit être conservé. Faites attention aux inconvénients qui pourraient résulter du défaut de cette mesure. Il y a deux opinions r�les uns prétendent que depuis qu’ils ne sont plus les ministres de nos temples, ces temples ne sont plus catholiques; les autres prétendent que nos temples sont véritablement catholiques, et ils ont parfaitement raison. Hé bien, qu’arriverait-il lorsque deux prêtres, dont l'un serait assermenté et l’autre ne le serait pas, sortiraient de la même sacristie pour aller dire la messe? La foule se porterait sur leur passage pour les huer ou les applaudir, selon l’opinion qui la dominerait; ou bien le choc des partis se ferait sentir. Quelles scènes ! Quels scandales I La police aurait à craindre toutes les chances de calamité qui pourraient résulter d’un pareil événement. Il faudrait donc que la police ait un bataillon à la porte de chaque église, depuis le matin jusqu’au soir. Vous concevez qu’un corps administratif, qui a des mesures à prendre pour que l’ordre public ne soit pas troublé, ne doit pas s’exposer à ces inconvénients-là, surtout dans ce moment-ci. (Applaudissements prolongés.) Le département ne peut savoir si tel prêtre doit être admis à remplir des fonctions, il ne peut s’en rapporter qu’au chef ecclésiastique. Cette mesure appartient au département, puisque c’est une mesure de police. Elle est nécessaire puisqu’elle tend à éviter que des fanatiques ne se présentent pour exciter des troubles. Que des prêtres aient ou non prêté serment; qu’importe qu’ils disent la messe, pourvu qu’ils aient une permission de l’évêque. Ainsi la mesure que nous avons prise n’est pas une imposition nouvelle pour la liberté, puisqu’elle existait déjà. J’ai prouvé que cette mesure est bonne, et qu’elle est dans la compétence des corps administratifs. Voici l’article qui suit : « Art. 5. Toute autre église ou chapelle appartenant à la nation, dans la ville de Paris, sera fermée dans les 24 heures, si elle n’est du nombre de celles qui sont expressément exceptées par l’article suivant. » La nation a créé des paroisses pour rendre le service ecclésiastique à l’universalité des citoyens. Elle a cru qu’il suffisait d’avoir des évêques, des curés et des vicaires; mais il devrait y avoir aussi d’autres établissements ecclésiastiques pour les prisons, les hôpitaux et les collèges, et pour les religieuses auxquelles la nation a permis de rester cloîtrées. Elle leur devait la facilité de suivre leur règle ; il fallait pour cela des chapelles particulières. Elle devait le service public à tous les citoyens; il fallait pour cela des églises paroissiales et des succursales. Voilà 186 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 avril 1*791 -j ce qu’elle a fait. Notre arrêté est parfaitement dans ce sens. Je vais plus loin, les autres églises sont inutiles au service public; elles se trouvent dès lors dans la classe des propriétés nationales qui doivent être vendues. Notre arrêté n’est encore à cet égard qu’une mesure pour l’exécution de vos décrets. L’article 6 contient des exceptions à l’article précédent. L’article 7 est conçu en ces termes : « Les « exceptions portées en l’article précédent n’au-« ront lieu qu’aux conditions suivantes : que ces « chapelles, ne devant servir qu’à l’usage parti-« culier de la maison, ne seront, en aucun cas, « ouvertes au public; qu’aucune fonction ecclé-« siastique ne pourra y être exercée que par « ceux qui auront à cet effet une mission parti-« culière de l’évêque de Paris, visée par le curé « de la paroisse, laquelle mission n’aura pu être c accordée que sur la demande des supérieurs »• de ces maisons. » La nation doit un service public ecclésiastique dans les églises paroissiales qui doivent être suffisantes ; mais la nation ne doit aucun service public pour des maisons particulières ; le public ne doit donc pas aller à ces maisons particulières. (. Applaudissements .) Le département avait à remplir son devoir ou à suivre sa commodité ; son devoir était de faire cesser les troubles commencés. Sa commodité eût été de ne rien faire et de ne pas s’exposer aux attaques qu’il éprouve. C’est ouvrir un schisme, nous dit-on, que de permettre à des particuliers réunis d’exercer le culte catholique romain, séparément des églises paroissiales. Faites attention que les personnes qui ont présenté cette observation méritent seules ce reproche-là ; car elles voudraient que toutes les églises publiques et nationales servissent de rendiz-vous à tous les réfractaires qu’elles veulent éloigner du service public. Fous sentez bien que s’il y a à craindre que le schisme soit prononcé, ce danger-là est bien plus imminent, lorsque les prêtres réfractaires s’acquitteront de l’exercice du culte religieux dans des églises nationales que nous autorisons, qui nous appartiennent. Ils sont bien plus autorisés là, que lorsqu’ils se réunissent dans leurs appartements, dans les chapelles qu’ils ont achetées et qui ne sont pas à la nation. ( Applaudissements .) Vous ne faites pas assez attention que je me réfère à la position où nous sommes. Vous ne savez donc pas que les réfractaires se retirent dans des réduits obscurs avec la permission des anciens évêques, que les habitations de simples particuliers recèlent ce qu’il y a de plus sacré dans la religion; qu’on peut craindre de la part des fanatiques, s’il y en a, des prédications, des provocations, des serments. Ces inconvénients doivent être connus des corps administratifs et non du Corps législatif, car il n’est pas de son devoir de s’en informer. Ce sont autant de chances pour les troubles que ces conciliabules qui échappent à la surveillance de la police. Par le moyen des mesures que nous avons prises, on pourra dire aux réfractaires : Pourquoi vous cachez-vous? Vous voulez faire croire que vous êtes persécutés; vous ne l’êtes pas..... {Applaudissements prolongés.) L’Assemblée connaît, comme nous, la fermentation qnt règne relativement à la différence des opinions religieuses. M. l’abbé Jllaury. Je demande la parole. M. l’abbé Sieyès. Le département chargé de pourvoir à l’ordre public doit donc être très impartial, et dire aux réfractaires qui se réunissent clandestinement : « Pour votre intérêt, il faut que vous n’échappiez pas à la surveillance de la police, car vous n’échapperiez pas à celle de cette partie du peuple qui entoure vos établissements cachés et qui pourrait croire que ce sont des clubs aristocratiques contre la Révolution, et confondre les mesures que vous prenez avec celles de gens qui veulent gêner la liberté des autres. » Afin d’épargner des crimes à quelques fractions du peuple, il fallait prendre des mesures pour éviter le danger de ces réunions d’hommes. Il fallait dire à ces hommes : « Vous refusez de prêter le serment, vous ne voulez pas vous soumettre aux précautions de police exigées dans les églises. Eh bien! si vous voulez vous réunir, voici les conditions auxquelles la police veillera à votre tranquillité. Nous vous obligeons à établir une inscription au-dessus de l’édifice que vous destinez à votre culte. Nous vous obligeons, pour cette année, à obtenir à cet effet l’aveu du directoire de département, parce que les mesures de police l’exigent. Il est fâcheux qu’on doive révéler ainsi les mesures administratives, mais il faut bien le faire puisqu’on est attaqué. Le département n’a fait autre chose que de dire à ceux qui se cachent : « Vous n’êtes pas persécutés », et aux intolérants, aux fanatiques :« Vous ne persécuterez pas. » Enfin le département n’a pas fait une loi nouvelle; il a rappelé l’exécution d’une loi ancienne, et il a consigné dans l’article 15, qu’il savait très bien où sa compétence finissait, et où commençait celle du Corps législatif, et qu’il savait très bien qu’il fallait s’adresser aux législateurs, pour avoir des lois, parce que le département n’est pas législatif. {Applaudissements.) Un membre à droite : Ce n’est pas encore le moment. M. l’abbé Sieyès. L’article 14 porte des défenses ainsi exprimées. « Il est expressément défendu de mêler aux exercices, de quelque culte que ce soit, des provocations contre la Constitution, contre les lois ou contre les autorités établies. A ce signe, la police doit distinguer, de ceux qui se réunissent paisiblement pour leur religion, ceux qui, sous ce prétexte, s’assembleraient dans des vues criminelles, et pour tenter des coalitions factieuses contre l’établissement de la Constitution. » Vous voyez combien ces mesures, ces défenses seraient illusoires, si ces conciliabules échappaient à la [ surveillance de la police. Voici quels sont les termes de l’article 8. « Il sera présenté incessamment une requête officielle à l’Assemblée nationale, pour demander que la loi prononce, en cas de contravention, la peine de destitution pour les supérieurs, et même de suppression pour les chapelles, suivant les cas. » Le directoire a bien senti où sa compétence finissait, et où commençaitcelle de l’Assemblée nationale. Il fallait des lois; il n’est que corps administratif. L’article 9 établit que les religieuses cloîtrées qui ne voudront pas profiter de l’exception faite en leur faveur par l’article 5, régleront seules ce qu’elles jugeront convenable à l’exercice de leur culte, en se servant des chapelles intérieures de leur couvent. Cette faveur était de leur laisser leur chapelle extérieure. Si elles veulent se mettre dans la classe désobéis- [Assemblée natioaale.j ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (18 avril 1791.] santé à la loi, il faut qu’elles en soient libres; mais la nation doit leur retirer la faveur des chapelles extérieures, qui était un avantage réel, un bénélice véritable. L’article continue ainsi : « S’il n’y a pas de chapelle intérieure dans leur couvent, elles s’adresseront à la municipalité qui pourra, après la visite des lieux, leur accorder la disposition de la chapelle extérieure, ou seulement d’une partie de cette chapelle, si elle se trouve plus grande, qu’il n’est nécessaire pour leur usage particulier; mais, dans ce cas, toute communication extérieure sera fermée, et les religieuses cloîtrées seront dispensées de la seconde condition exigée par l’article 7 ci-dessus. « L’article 10 établit que les églises et chapelles qui auront été fermées, seront mises en vente au profit de la nation, etc... » Cet article n’est que l’exécution de votre décret. Le onzième article qui exige qu’une inscription soit placée sur les maisons destinées à la réunion d’un grand nombre d’individus pour l’exercice d’un culte religieux quelconque, cet article, dis-je, a excité de vives réclamations. Le département n’est pas assez ignorant de vos décrets, pour ne pas savoir que vous avez établi la liberté des opinions religieuses. En conséquence, tout particulier qui veut, à ses frais et dépens, avoir une chapelle chez lui, ou même une collection d’hommes qui, comme les différents clubs, s’assemblent entre eux, le peut; et il est dans les limites de la loi. Nous avons dit : <> Nous sommes les exécuteurs de la loi; nous sommes obligés de protéger la liberté contre tous ceux qui voudraient y porter atteinte; cette protection est impossible dans ce moment-ci, sans quelques mesures de police. Nous avons donc restreint cette liberté, autant que l’intérêt général l’a exigé. Ceux qui nous accusent d’avoir été plus loin que l’Assemblée nationale, d’avoir de fait établi l’intolérance religieuse, ignorent bien les décrets de l’Assemblée nationale, la déclaration des droits de l’homme. Encore une fois nous ne sommes pas législateurs; mais le directoire du département ne peut maintenir la liberté qu’en ayant une surveillance toujours active partout où les circonstances font craindre que cette liberté ne soit attaquée d’une manière puissante. Et je vous [trie bien de considérer, Messieurs, que le département ne vous a pas apporté son arrêté à juger. 11 se soumettra parce qu’il le doit; mais il savait trop bien qu’il n’était pas sorti de sa compétence, pour venir vous demander votre jugement sur les mesures administratives qu’il avait prises. Vous êtes Corps législatif, il est corps administratif. Il ue veut pas empiéter sur votre pouvoir; de même il ne croit pas que votre intention soit de reunir tous les pouvoirs nécessaires pour maintenir les lois de police en France. En conséquence il s’est contenté de vous demander purement et simplement, par l’article 15, que l’Assemblée nationale vînt au-devant de ses mesures, par la loi pénale, que lui ne pouvait pas décréter. Je vais donner lecture des articles 16 et 17. « Art. 16. Le directoire ordonne expressément à la municipalité d’employer tous les moyens, pour réprimer efficacement les coupables effets de l’odieuse intolérance qui s’est récemment manifestée, et pour prévenir les mêmes délits, sous quelque forme qu’ils se reproduisent contre la pleine liberté religieuse reconnue et garantie par la nouvelle Constitution. 487 « Art. 17. Le présent arrêté sera envoyé à la municipalité de Paris, pour qu’elle ait à veiller à son exécution ; et il sera imprimé et affiché partout où besoin sera. » Si après ces explications sur l’intention du directoire du département, si après vous avoir prouvé qu’il n’est pas sorti de sa compétence, il m’est permis de conclure en motion quelconque, comme membre de l’Assemblée nationale, je demande qu'elle veuille bien décréter sur-le-champ, qu’après avoir pris connaissance de cet arrêté de police, elle approuve toutes les dispositions qui y sont contenues, comme conformes à la loi, et en décrète l’envoi à tous les départements du royaume. Quant au renvoi demandé au comité de Constitution, il y a une observation très importante à vous faire. Lorsque les corps administratifs, chargés par la Constitution de maintenir l’ordre public, se croient obligés de prendre des mesures très promptes pour prévenir les désordres, si alors les personnes qui doivent obéir, ont le droit de dire ; « Cela vous plaît à dire : vous nous ordonnez d’obéir à votre arrêté; mais nous avons le recours à l’Assemblée nationale. Nous pouvons faire dénoncer par quelques membres de l’Assemblée nationale votre arrêté, et par conséquent en empêcher l’exécution. Songez aux malheurs inconcevables qui en résulteraient, si cette idée-là était reçue dans le public ! Gomment concevez-vous que, toutes les fois qu’on porte une loi d’exécution, ceux qui sont obligés d’observer cette loi puissent contester son exécution? Provisoirement ils doivent obéir; car s’ils n’obéissent pas provisoirement, il n’y a plus d’administration, il n’y a plus de liberté, plus d’exécution. (. Applaudissements .) Ils doivent provisoirement obéir, sauf à s’adresser ensuite à l’autorité supérieure, s’ils croient avoir éprouvé quelque injustice. Autrement il n’y a plus d’exécution dans le royaume, et alors on ne peut coafier l’administration à personne; car ceux qui vous diraient qu’ils peuvent administrer avec de telles entraves, mentiraient et à leur conscience et à votre confiance. (Applaudissements.) M. de Folleville. Il faut examiner la question de savoir si cet arrêté doit être une loi générale, et ne pas laisser à l’avenir aux départements de pareilles homologations. En satisfaisant à la piété filiale, je dois vous dénoncer un acte tout a fait différent du département de l’Ain. Il a fait défense à tout curé, desservant ou vicaire, de laisser remplir les fonctions sacerdotales par des prêtres non assermentés, sous peine, par les contrevenants, d'être regardés comme perturbateurs du repos public. (Plusieurs membres de l’ extrémité gauche de la partie gauche applaudissent.) Je demande, malgré les applaudissements, s’il y a un monument plus fait pour soulever le coeur des amis de la liberté et ue la tolérance. Quant aux principes renfermés dans l’arrêté du directoire du département de Paris, je dois les approuver plus que personne, car je les ai proposés à cette tribune et ils ont été repoussés par un mis à l’ordre. Je demande que l’Assemblée, prenant cet arrêté en considération, le fasse distribuer à tous les membres de celte Assemblée, que le comité de Constitution prenne du directoire les éclaircissements nécessaires, afin que l’Assemblée puisse prononcer un jugement. M. Girot - Pouzol. Les détails que le 188 (Assemblée nationale.] préopinant vient de présenter à l’Assemblée prouvent la sagesse des vues du directoire, mais ils ne prouvent pas qu’il ait eu le droit de faire l’arrêté qui est émané de lui. 11 ne s’agit pas d’examiner si les dispositions qu’il renferme sont fondées sur l’utilité publique, mais de s’assurer si elles sont attentatoires à l’autorité du Corps législatif. Or, je soutiens que ces dispositions y portent une atteinte manifeste. Elles suppléent aux lois que l’Assemblée aurait dû porter; elles autorisent des établissements nouveaux; elles donnent aux religieuses des moyens qui pourvoient à l’insuffisance des lois portées par l’Assemblée nationale, mais ces moyens, ces mesures ne sont autre chose que des actes législatifs, que des entreprises faites contre la puissance législative. Que résulte-t-il de ce qui vous a été dit par le directoire? C’est qu’il se croit autorisé à faire ce que vous n’avez pas fait, et à établir les lois de développement, que l’Assemblée était seule en droit de porter. Quant à la position du directoire, elle n’a pu l’autoriser à faire une loi sur cet objet, mais seulement à demander que l’Assemblée portât une loi qui pût prévenir les troubles, et assurer la tranquillité publique. L’arrêté du directoire ne porte aucune atteinte à la religion ; il renferme des principes de tolérance qui sont aussi conformes au véritable esprit de la religion qu’aux principes de la saine raison; mais je trouve qu’il porte une atteinte formelle à la puissance législative, et c’est sous ce point de vue que je le combats. Qu’a fait le département? Il a tiré les conséquences d’un principe consacré par la déclaration des droits de l’homme. Mais ces conséquences sont des lois de développement. Notre Constitution elle-même est une conséquence des principes de la déclaration des droits. Dira-t-on pour cela que les corps administratifs ont le droit de faire les lois constitutionnelles qui dérivent de ces principes? Si vous admettiez de pareilles entreprises, vous prépareriez la ruine de votre Constitution. Il est établi par la déclaration des droits de l’homme que nul ne doit être troublé dans la manifestation de ses opinions religieuses, que la confusion des pouvoirs produit le despotisme. Quelles sont les conséquences naturelles qui résultent de ces principes? C’est que les citoyens ne doivent pas être troublés dans la manifestation de leur culte; c’est que les pouvoirs doivent être divisés. Mais s’ensuit-il de là que chaque corps administratif doive faire les lois qui résultent de ces principes; qu’ils doivent autoriser la publicité des cultes; et faire eux-mêmes la séparation des pouvoirs? A quels maux ne nous exposerions-nous pas? Combien les conséquences ne différeraient-elles pas? car les hommes ne tirent pas toujours les mêmes conséquences d’un principe établi. Quelle confusion ! quel bouleversement! La Constitution se trouverait bientôt anéantie. Les départements deviendraient des États fédérés, et l’unité monarchique serait détruite. Je n’attaque ici que la forme de ces dispositions, et je demande le renvoi au comité de Constitution de l’excellent projet d’arrêté du directoire du département pour faire une loi générale. M. l’abbé lllaury et M. Bouchotte se présentent à la tribune. M. Blin. Tous les orateurs, soit qu’ils aient Il 8 avril 1791.] approuvé l’arrêté ou qu’ils ne l’aient pas approuvé, en ont demandé le renvoi au comité. Si quelqu’un veut parler contre ce renvoi, il doit avoir la parole. M. le Président donne lecture de l’ordre du jour de la semaine et de la séance de demain ; il donne eusuite communication d’une lettre de M. Lasnier de Vaussenay, qui prie l'Assemblée d’agréer sa démission, et d’une adresse des États plaignants de la principauté de Porentruy. (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette adresse au comité diplomatique et décrète qu’il en sera fait lecture à la séance de mardi soir. La discussion sur l'arrêté du directoire du département de Paris est reprise. M. le Président. La parole est à M. l’abbé Maury. M. l’abbé llanry. J’ai demandé la parole pour inviter l’Assemblée nationale à déclarer nulle et comme non avenue la délibération du département de Paris et pour répondre à M. l’abbé Sieyès. Je serai très court, très précis et, j’ose ajouter infiniment modéré. (. Applaudissements .) Il est d’autant plus nécessaire que l’Assemblée nationale s’occupe de la proclamation du directoire du département de Paris, qu’un très grand nombre et peut-être la totalité des départements du royaume, ont pris des mesures absolument semblables, relativement au culte public. L’orateur du département de Paris a fait des efforts très ingénieux pour prouver que ce département s’était renfermé dans les objets de pure police, qui appartiennent essentiellement à sa compétence, mais avant d’écarter les sophismes que l’on a développés dans cette tribune pour justifier le département delà ville de Paris, il me semble, Messieurs, que la seule date de cette proclamation aurait dû avertir ce corps ad-ministratif de rester dans les bornes du respect qu’il doit aux représentants de la nation, en les consultant avant de rendre une loi qui pouvait troubler la tranquillité. Qu’un corps a iministratif, dans l’intervalle d’une session à l’autre, pressé par le besoin, rende des proclamations provisoires sur des cas que les législateurs n’ont pas pu prévoir, alors les circonstances excusent tout. Mais que, dans une ville, où les représeniants de la nation sont assemblés, le directoire du département ait cru être autorisé à voir dans l’administration de la religion ce que les représentants de la nation n’y avaient point aperçu, c’est sans doute une indiscrétion qui doit être réprimée avec d’autant plus de célérité, que c’est le premier exemple que ce corps vous ait donné. Vous savez, Messieurs, qu’il est de l'essence de tousles corps administratifs de prétendre sans cesse à l’accroissement de leur autorité. Le département de Paris vous avertit ici, au nom de tous les départements du royaume, qu’il doit être réprimé, qu’il doit être contenu dans les bornes que la Constitution lui a données, parce que rien ne sollicitait sa décision. Tout au contraire semblait l’inviter avenir à cette barre avertir la sollicitude des représentants de la nation . C’était au département de Paris à vous dénoncer les scandales inouïs dont cette capitale a été malheureusement témoin; mais, le département a cru qu’il était plus instant de faire fermer les églises que d’arracher des mains d’un peuple séduit des ins-ARCHIVES PARLEMENTAIRES.