360 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. fParis hors les mars.] de l’Etat soient vérifiées, constatées et consolidées. Qu’on supprime toute espèce d’impôts, tels que taille, vingtièmes, décimes, aides et gabelles, et qu’on en établisse un seul proportionné aux revenus, facultés, commerce et industrie de chaque feu, qui sera fixé au dix ou quinzième des revenus annuels, des biens, commerce, ou industrie; et que la fixation s’en fasse, eu égard à la dette et aux charges de l’Etat; et qu’en conséquence, tous privilèges et exemptions pécuniaires soient supprimés. Art. 2. Que toute justice seigneuriale qui ne ressortisse nûement au parlement soit supprimée ; et qu’on établisse, en leur lieu et place, des bailliages royaux avec un arrondissement de deux à trois lieues; de sorte qu’il n’y ait jamais que deux degrés de juridiction en matière civile, comme en matière criminelle; et qu’on donne le droit aux premiers juges de juger en dernier ressort jusqu’à concurrence d’une somme de 2 ou 300 livres; et qu’on s’occupe de faire de nouveaux codes civil et criminel, pour simplifier la procédure, réprimer tous les abus et malversations. Art. 3. La suppression des capitaineries. Une loi qui empêche aux seigneurs d’avoir trop de gibier, et qui mette le cultivateur à portée de se pourvoir contre eux, en condamnation des dommages-intérêts des torts qu’il en souffrira. Art. 4. La suppression de la milice, surtout en temps de paix; et que les troupes, lorsqu’on n’est point en guerre, soient occupées aux travaux publics, tels qu’à des canaux nécessaires pour faciliter le commerce. Art. 5. La défense d’exporter des grains hors du royaume, lorsque le prix du blé excédera 24 à 25 livres le setier. Art, 6. L’établissement d’un seul et même poids, et mesure dans tout te royaume. Art. 7. La suppression de toute servitude et banalité, de tout droit de péage et autres de cette nature qui gênent le commerce. Art. 8. S’il était possible, d’apprécier un peu plus les sueurs du journalier. Art. 9. La suppression des privilèges exclusifs accordés aux messageries ; et que le peuple puisse se faire voiturer par qui bon lui semble. Fait et arrêté en l'assemblée générale de la communauté des habitants de la paroisse de Boissy-Saint-Léger, et de Saint-Jean-Baptiste de Grosbois, annexe, le 14 avril 1789. Signé Langlois; d’Huin; Trudier; Louis Plis-son; Cholot; Mercier; Deslion ; Boilleau; Goujon; Dumazateau; Guiard; Guillin; Seguin; Bouue-tors; Dervin; D. Delion, et Lalouette. Paraphé ne varietur, par nous, Jean Lalouette, soussigné, bachelier en droit, ancien procureur du balliage ducal de Brunoy, faisant fonction de juge en cette partie, au désir de la délibération des Habitants dudit Boissy,de cejourd’hui 14 avril 1789. Signé LALOUETTE. CAHIER Des plaintes et doléances de la paroisse de Bondy (1). En conséquence de la lettre de convocation des Etats généraux à Versailles, le 27 avril 1789, et de l’ordonnance pour la convocation des trois Etats de la prévôté et vicomté hors des murs de Paris, du samedi 4 avril 1789, (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. Les habitants de la paroisse de Bondy se sont assemblés, ce 16 avril, même année, à l’effet de rédiger leurs plaintes et doléances, et ont unanimement résolu que leurs représentants à l’assemblée nationale demanderont : Art. Ier. Que le tiers-état soit désormais admis en nombre au moins égal à celui des deux autres ordres aux assemblées de la nation. Que la délibération ait lieu par tête et non par ordre : ce qui tendrait à maintenir, entre les concitoyens, une division funeste. Que le retour périodique des Etats généraux soit indiqué à une époque fixe et déterminée. Qu’on s’occupe de fixer notre constitution sur des bases solides et invariables; et que ces différents articles, une fois réglés, soient, à l’avenir, regardés comme lois constitutives de l’Etat. Art. 2. Que tout privilège pécuniaire soit détruit comme abusif dans son origine, et comme contraire aux droits de la nature et de la raison, contre lesquels on ne doit jamais prescrire. Art. 3. Que toute espèce d’impôt pèse également sur toutes les propriétés du royaume; et qu’on ne fasse, désormais, aucune distinction, sous ce rapport, entre les biens nobles, ecclésiastiques et roturiers. Que tous les impôts soient réunis en un seul, l’unité de l’impôt devant être regardée comme le chef-d’œuvre de l’administration politique; et qu’on établisse, pour atteindre ce but salutaire, la subvention territoriale en argent. Que lïmpôt ne soit consenti que pour le temps qui doit s’écouler jusqu’à la prochaine tenue des Etats; que sa perception soit simplifiée; qu’on établisse des abonnements par provinces et par districts; qu’on établisse des caisses provinciales chargées de verser directemept au trésor de la nation, après qu’elles auront acquitté les charges du gouvernement dans l’étendue de leur district. Que tous les agents du fisc quelconques soient comptables envers la nation des deniers dout elle leur aura confié le maniement, et contraints de lui en rendre, chaque année, un compte qui sera rendu public par la voie de l’impression. Qu’on supprime, le plus tôt possible, les aides. et gabelles, et toute cette multitude effroyable de financiers et de commis, que toute la nation regarde comme une peste cruelle qui ravage, depuis longtemps, les contrées du royaume. Art. 4. Qu’on réforme le code civil et criminel, et qu’on le fasse de manière que MM. les juges soient dans l’heureuse impossibilité d’être injustes ; et qu’on ait soin de les forcer de moins donner à l’arbitraire, en donnant souvent à la loi des interprétations forcées. Qu’on rapproche, le plus possible, la justice des justiciables, et qu’on établisse des tribunaux ruraux, pour connaître des différends qui naissent journellement entre les habitants des campagnes, et terminer sans frais la plupart des querelles, ainsique cela se pratique avec le plus grand succès dans la ville d’Alençon (approuvé du Roi). C’est peut-être le seul moyen de couper la racine des procès que la plupart des justiciers de campagne ont grand soin de fomenter et qui trop souvent entraînent la ruine des familles. Qu’on punisse sévèrement les banqueroutiers frauduleux, et qu’on établisse une meilleure police dans les campagnes. Art. 5. Qu’on anéantisse le code des chasses, comme barbare et contraire au droit de la nature (1) Nous publions ce cahier, d’après un manuscrit des Archives de l'Empire. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] 361 et de la raison. Qu’on supprime les capitaineries, comme fléau de l’agriculture. Que tout particulier soit libre de se clore, de sarcler et couper ses grains, lorsqu’il le jugera à propos. Qu’il soit exempt d’épiner. Qu’on ne puisse planter sur ses terres aucune remise, ni verte, ni sèche, et qu’on s’occupe ,de détruire les anciennes. Qu’on ne puisse, désormais, l’astreindre par arrêts à couper ses blés à une certaine hauteur pour abriter le jeune gibier. Qu’on en diminue l’énorme quantité. Qu’on détruise entièrement les lapins , et surtout la grande bête qui dévaste les environs des forêts. Qu’on réduise les colombiers. Art. 6. Qu’on supprime les charges qui donnent la noblesse, et qu’elle ne s’accorde désormais qu’au mérite reconnu par la nation. Qu’on supprime la distinction des peines comme avilissante pour le tiers-état. Un gentilhomme, prévenu d’un crime qui mérite la mort, n’est plus gentilhomme ni citoyen; il est l’ennemi de la société. Art. 7. Que les privilèges ecclésiastiques soient supprimés; et qu’il se fasse, à l’avenir, une meilleure répartition de leurs immenses revenus. Que tous les bénéliciers soient tenus à la résidence. Qu’on ne puisse accumuler plusieurs bénélices sur une même tête. Que le sort des curés et vicaires soit au moins triplé. Qu’on assigne aux pauvres ecclésiastiques, travaillant dans le ministère, des pensions sur des abbayes ou bénéfices simples, que l’on pourra supprimer pour cet effet. Qu’on dote les ordres mendiants aux dépens des ordres riches. Qu’on cesse de payer les annates, que l’on doit regarder comme contraires à la bonne politique. Que leur produit serve à former une caisse de bienfaisance; et que les baux des ecclésiastiques et gens de mainmorte ne soient point annulés par le décès des titulaires. Art. 8. Que le tiers-état puisse jouir, désormais, de toutes les prérogatives auxquelles il a le droit de prétendre comme citoyen. Que tout homme de mérite, né dans cet ordre, puisse parvenir à tout emploi quelconque, et que la roture ne soit un titre exclusif pour aucun. Art. 9. Qu’on établisse des droits fixes sur le commerce des grains. Qu’on ouvre les yeux sur le prix excessif actuel des blés, occasionné par les monopoleurs, et qu’cin les punisse de peines afflictives. Qu’on encourage l’agriculture. Qu’on facilite le commerce. Qu’on supprime les péages qui ne pèsent que sur le peuple. Qu’on reporte aux frontières les barrières de l’intérieur, au passage desquelles les commis tyrannisent les hommes au nom du meilleur des rois. Qu’on supprime tout privilège exclusif. Qu’on anéantisse les droits de lods et ventes pour les échanges. Qu’on supprime le droit de franc-fief. Art. 10. Qu’on s’occupe davantage de la santé des habitants de la campagne. Qu’on fonde, pour cet effet, des places de chirurgien qui se donneront au concours ; et qu’on se mette, enfin, en f;arde contre cette foule d’assassins qui prennent e titre de chirurgien, après avoir été peu de temps perruquiers dans la capitale, et fréquenté Saint-Cosme, pour aller ensuite impunément dépeupler le royaume. Qu’on ait soin de l’éducation publique, en dotant pins convenablement le maître d’école. Art. 11. La prestation des corvées se faisant en argent, nos députés demanderont que le pavé de Bondy soit incessamment rétabli, et que la partie de la route de Paris à Pantin soit tenue en meilleur état qu’elle n’a été jusqu’à présent. Art. 12. Que toutes lois faites par les représentants de la nation, assemblés en Etats généraux, seront déposées aux greffes des parlements, sans représentations , protestations ni oppositions quelconques de leur part. Art. 13. Qu’on supprime les milices, comme nuisibles à l’agriculture, et tendantes à détruire ce qui reste de mœurs et subordination dans les campagnes. Art. 14. Qu'on supprime la mendicité, et qu’on oblige chaque paroisse à nourrir ses pauvres, au moyen d’une somme annuelle qu’on pourra facilement prendre sur les biens ecclésiastiques. Le clergé du second ordre sera certainement le premier à solliciter cet établissement utile. Les riches bénéficiers auraient mauvaise grâce de s’y refuser. Us prennent le glorieux titre d’administrateurs des revenus des pauvres. Mais on sait que, depuis longtemps, ils sont des administrateurs infidèles. Se référant, lesdits habitants, aux différentes demandes portées aux cahiers des autres paroisses de la prévôté de Paris. Le présent cahier, contenant cinq pages, a été coté et paraphé ne varie tur, par première et dernière page, par nous, lieutenant de la prévôté de Bondy, soussigné, au désir de notre procès-verbal de nomination de députés de la paroisse dudit Bondy, de cejourd’hui 16 avril 1789. Signé Lemasurier ; F. Martin ; Bureau ; Lemaire ; Ph.-F. Martin ; P.-A. Chrétien ; Souchet ; Bureau; Roussel; Jolly; Rouquière ; Bossu ; P. Julien ; Gohin ; Leloup ; Roussel ; Amenson ; Gatine ; H.-H. Souchet; Leveaux; Joliveau; Vaillant; Hazey; Despries ; Fremin, et Cottereau. CAHIER Des plaintes et doléances de la paroisse de Bon-nelles (1). Les habitants de Bonnelles, encouragés par les sollicitudes paternelles du Roi, et par la présence de la nation assemblée pour concourir au bien général, présentent au pied du trône leurs doléances et remontrances. Leur vœu est : Art. 1er. Que le droit de champart soit très-scrupuleusement examiné. Que les titres seuls fassent foi sur un objet aussi important. Que celui qui sera prouvé puisse être rédimé parle propriétaire, de la manière qui sera décidée par les Etats généraux. Que le champart, qui aura été usurpé par les seigneurs ou leurs gens d’affaires, serve a en rédimer d’autres. Que ce ver rongeur de l’agriculture soit enfin écrasé ; et que, provisoirement, il soit ordonné que les pailles restent au cultivateur, comme ne devant jamais être ôtées à la terre qui les produit, et sans lesquelles la terre elle-même finit par ne plus rien produire. Art. 2. Que les gros décimateurs soient totalement supprimés. Que la dîme, qui ne doit être que pour fournir une existence honnête aux curés et aux vicaires, quand il en est besoin, soit fixée en raison de ce besoin. Que nul autre que le curé ne la puisse faire prélever, et qu’il soit tenu de rendre les pailles. Art. 3. Que le sel, si nécessaire à l’agriculture, soit mis à un prix qui permette aux cultivateurs de s’en servir dans leurs besoins. (1) Noos publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de V Empire,