196 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les mars.] Art. 20. Que les droits du contrôle soient diminués, et ceux du papier terrier et déclarations des seigneurs payés par eux seuls, ou supprimés : cela ruine les peuples. Art. 21. Supplient très-humblement Sa Majesté, de faire diminuer la cherté du blé, ce qui ruine tous les peuples ; que le mardi de Pâques, 14 avril, au marché de Montlhéry, il est arrive quatre charretées de blé ; et aussitôt le blé s’est trouvé soulevé dans les chambres, quoiqu’il y eût des cavaliers de maréchaussée à cheval. Les peuples, se voyant sans espérance d’avoir du blé, on entend leurs cris effroyables retentir partout (Mourir pour mourir, il nous faut du blé ; ]’en aurai : je n’ai que 12 livres, il m’en faut une mine ; les autres un minot, je n’ai que 6 livres! Mourir pour mourir, nous en aurons!). On se l’arrache des mains de. toutes parts. Ah ! Sire, quelle désolation pour tous les peuples, dans un temps de la résurrection de Jésus-Christ, le Roi des rois, de voir de pareils désastres, de se voir tous exposés à périr dans des révoltes ! Ah ! grand Dieu, souverain Roi des rois, inspirez Sa Majesté, le Roi très-chrétien, dont le nom est si grand, pour qu’il fasse retentir sa puissance et développe le canal de sa charité envers tous les peuples qui crient et meurent de faim; et ils font tous retentir, de tous côtés, les cris lamentables du prophète Jérémie, et ils attendent tous la diminution du blé! Avec les secours de tous les nobles de l’assemblée générale, attachés et portés pour tous les peuples, de faire faire visites chez tous les fermiers, faire mener aux marchés, et en taxer le prix des blés ; défaire battre toutes celles meules de blés qui sont depuis si longtemps dehors, qui se consomment. Art. 22. Qu’il soit fait défense à tous de faire des meules au proche des ormes sur les grandes routes royales; qu’elles soient éloignées des routes, crainte des attaquements qui pourraient se faire sur les routes. Art. 23 et dernier. Sa Majesté, de bonté pour ses peuples, a bien voulu lui permettre dans le règlement fait le 24 janvier 1789, article 51, de se pourvoir par devers elle, par voie de représentation et simple mémoire. Nous, députés nommés dans l’assemblée générale de la Villedubois du 15 avril dernier, Nous nous sommes, entre nous les députés, . exposés à représenter ledit supplément ci-attaché audit cahier de la Villedubois. Fait et arrêté le 17 avril 1789, neuf heures du soir. Signé F. Froissant, vigneron; Bilbaust, syndic; C. Cossonnel,. vigneron. Les députés ont demandé s’ils pourront s’en aller. On leur a dit : Non ; si nous nous étions en allés pour revenir le lendemain, nous l’aurions fait signer de tous les habitants ; et offrons de le faire signer, et de le rapporter à qui il appartiendra. SUPPLÉMENT AU CAHIER DE LA VILLEDUBOIS. Que le retardement de la séance n’a été remis au lendemain que par le tardement des soulèvements des nobles qui se sont présentés dans l’assemblée du tiers-état; que le tiers-état n’en veut pas un seul pour député, et suivant le règlement du Roi du 24 janvier 1789. CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances des habitants de la paroisse de Villejuif (1). L’an 1789, le mardi 14 avril, onze heures du matin, issue de la messe de paroisse, dite, chantée et célébrée en l’église de la paroisse de ce lieu de Villejuif, sont comparus par-devant nous, François de Gaulle, avocat au parlement, bailli du bailliage de Villejuif, assisté de maître Gilles-Brice Quiller, greffier delà municipalité de ladite paroisse de ce lieu ; les habitants de cedit lieu de Villejuif, majeurs de vingt-cinq ans, payant taille en cédit lieu, tous convoqués au son de la cloche, en la manière accoutumée ; Lesquels, en vertu de l’ordonnance de convocation de M. le lieutenant civil, du 4 du présent mois, assemblés dans l’une des salles du séminaire de Saint-Nicolas, en leur maison de ce lieu de Villejuif, ont proposé les doléances qui suivent. Art. 1er. Que, quoiqu’ils soient dans la banlieue, et presque à la porte de Paris, loin de se ressentir de l’aisance que devrait leur procurer le voisinage de la capitale, et la facilité de commercer avec elle à cause de la grande route qui traverse leur paroisse et territoire, ils sont au contraire, pour la plupart, réduits à une extrême indigence. Art. 2. Qu’ils sont surchargés d’impôts, que la superficie du terrain qu’occupe leur paroisse n’est que de 927 arpents, mesure du roi, ou 1,385 arpents, mesure commune; que, cependant, ils payent en taille, brevet d’icelle, vingtième et capitation, une somme de 18,000 livres : ce qui fait 20 livres par chaque arpent, mesure du roi, et 13 livres, mesure du pays. Encore est-il à observer que sur cette quantité de 1,385 arpents, il y en a plus de 50 qui appartiennent aux gens de mainmorte , lesquels ne payent pas de vingtièmes, et 150 sont privilégiés; qu’à la vérité aucun d’eux ne fait valoir dans leur paroisse. Art. 3. Que, en outre, ils sont assujettis à payer le droit de gros manquant, pour raison de leur récolte des vins, qu’ils consomment dans leurs ménages, à raison de moitié des droits de huitième ou environ ; que pour raison du payement de ce droit, ils éprouvent des poursuites rigoureuses, et qui leur deviennent coûteuses et vexa-toires, jusqu’à les priver de leurs meubles. Art. 4. Que, non contents de leur faire payer ces sommes et droits énormes pour un territoire aussi resserré et aussi exigu que le leur, on vient d’y ajouter, depuis deux ans, un impôt sous le nom de corvée, montant, par an, à 800 livrés ou environ; impôt d’autant plus onéreux pour eux que, leur route faisant partie de l’entretien du pavé de Paris, ils n’étaient tenus à aucune corvée personnelle. Mais, que ce qui achève de mettre le comble à leur détresse et à leur infortune, c’est qu’outre ces impôts : L’on a établi, depuis dix ans, dans leur village, des bureaux des fermes, à l’aide desquels on perçoit à la rigueur les droits d’entrée sur la majeure partie des objets de consommation; que cette perception, qui est d’autant moins .authentique qu’il n’y a pas même de barrière établie, donne lieu à des procédures ruineuses, rarement méritées, d’après même le tarif illégal du fisc, plus souvent ménagées par adresse, et préparées par l’avidité (1) Nous publions ce ca hier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. 197 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] des préposés ; qu'enfm cette perception abusive a tellement renchéri les objets de première nécessité, tels, par exemple, que le bois à brûler, et celui de construction, que l’on gagne à s’en approvisionner à Paris, et que l'entretien des bâtiments est devenu, dans leur village, aussi cher que dans la capitale : ce. qui porte les loyers à un prix excessif, et beaucoup au-dessus de" leurs facultés. Art. 5. Qu’outre tous ces maux, ils éprouvent un fléau habituel qui ne les désole pas moins, en ce qu’il leur enlève la seule ressource qui leur reste pour adoucir leur situation, savoir : leur récolte, fruit de leur sueurs et de leurs travaux ; que ce fléau est la capitainerie royale, dans le ressort de laquelle iis ont le malheur d’avoir leurs possessions. Qu’elle est cause de la dévastation de leurs héritages, en y introduisant une quantité de gibier telle qu’il n’était pas rare, il n’y a pas même encore un an, d’en voir jusqu’à soixante et quatre-vingts pièces rassemblées dans un seul arpent de terre. Qu’à la vérité, depuis ce temps, et notamment depuis qu’il est question de la prochaine tenue des Etats généraux, on a. travaillé à en diminuer le nombre. Mais qu’il serait à craindre, si la capitainerie subsistait même en partie, que ce mal ne reprît bientôt son ancienne vigueur ; que cette quantité de gibier les empêche de proliter de la bonté de leur sol, et les nécessite à ne faire que des mars et autres menus grains, ou de doubler leurs semences ; et en ce qu’ils mangent et détruisent les vignes. Que, de plus, la capitainerie leur fait éprouver des vexations de tous les genres, et notamment les oblige à supporter un nombre considérable de remises dans l’étendue de leur territoire ; lesquelles rendent sans valeur, pour le cultivateur, les terres qui les avoisinent. Que le régime de ladite capitainerie parvient à détruire ce que le gibier a épargné, et à ruiner leurs récoltes en empêchant lesdits cultivateurs d’entrer dans leurs terres après le 15 mai pour ôter les mauvaises herbes, de clore leurs héritages, de faucher leurs prés avant le 15 ou même avant le 20 juin, autrement qu’avec des permissions. Qu’à la vérité, ces permissions s’accordent assez aisément dans le moment actuel, mais que, comme par leur nature, elles dépendent du caprice ou de l’intérêt des préposés, elle sont, par cela seul, sujettes aux plus grands abus. Qu’en outre, le régime de capitainerie les soumet à des frais considérables ; qu’il les oblige à mettre des épines dans leurs terres, aussitôt qu’ils ont fini leur récolte; qu’il les expose pareillement à des persécutions de tous les genres, et les rend le plus souvent victimes du ressentiment ou de l’avidité de gens qui sont aussi suspects qu’à craindre; suspects, en ce que, fomentant les amendes qu’ils font encourir, ils sont personnellement intéressés à trouver des délinquants , et même à supposer des transgresseurs, et à craindre en ce que, parla nature de leur établissement, ils n’ont d’autres supérieurs qu’eux-mêmes, d’autre tribunal pour juger et réprimer leurs infractions, que celui dont ils sont membres. Que ce dernier abus de la capitainerie met le comble à tous les autres et complète le désastre qu’ils en éprouvent ; qu’en effet, ils n’ont aucun moyen de faire • parvenir leur plaintes ; que les appels de ce tribunal se portent à des commissions du conseil, et que la connaissance des affaires qui concernent la capitainerie est interdite aux tribunaux de la loi et de la nation : ce qui rend toute réclamation impraticable et même dangereuse, tout réclamant étant, par le seul fait de sa réclamation, jugé réfractaire, et les sentences exécutoires par provision. En conséquence, lesdits. habitants autorisent leurs députés à charger ceux qui le seront pour le tiers-état dans l’assemblée hors des murs de Paris, de requérir, au nom desdits habitants, très-humblement des bontés de Sa Majesté le redressement desdits griefs, et notamment la suppression, dès à présent, desdits droits d’entrée, de gros manquant et de la capitainerie. Fait les jour et an que dit est ; et ont, lesdits habitants, signé avec nous, et ledit maître Qui-cler, greffier, hors les sieurs Pierre Moncouteaux; Jean-Baptiste-Henri Mayeux; Claude Huard; Jean-Baptiste Desmeures; Louis Pays, qui ont déclaré ne le savoir, de ce interpellés. Signé Fleury ; Thibault ; Sevin ; Radot ; Sin-dele; Godefroy; Duchêne; F. Clavier; Barre; Creping; J.-M. Tardu; Moncouteaux; Harland; Radot ;D.Duguet; Merle; C.-R. Repepin ; Varans gue; Lesage; P. -F. Baudon ; Folibet; Prévost; Fiamont; Legendre; Vincent; Antoine Sevin; Thibault fils ; Massuct ; Halle ; M. Demort ; Fi-bantz ; Bonot ; Jacques Roye; Thomas ; de Gaulle; Rodot, syndic ; Quicler, greffier. Paraplié ne varietur , au désir du procès-verbal de cejourd’hui 14 avril 1787. Signé De GAULLE. CAHIER Des plaintes , doléances et vœux du tiers-état de la paroisse de Villejust , en la châtellenie de Mont-Ihénj , délibérés et arrêtés en l’assemblée générale du tiers-état , convoquée en exécution du règlement de Sa Majesté du 24 janvier dernier , pour la tenue des Etats généraux du royaume, et présidée par M. Jean-Paul Loyal, prévôt de la prévôté dudit Villejust (1). Art. 1er. Pour entrer dans les vues bienfaisantes de Sa Majesté, le tiers-état de ladite paroisse estimerait qu’il serait avantageux au bien de l’Etat et au bonheur des peuples de simplifier les lois, réformer les abus qui se sont introduits dans toutes les parties d’administration, notamment dans les finances, la justice et le commerce ; et veiller continuellement à ce qu’il ne s’y en introduise aucun à l’avenir. Art. 2. En conséquence, que tous les impôts soient supprimés, et qu’il en soit créé un seul qui serait supporté proportionnellement par les biens-fonds, le commerce et l’industrie, et qu’il n’en soit, à l’avenir, établi aucun que du consentement des Etats généraux. Art. 3. Que les droits d’aides, notamment ceux sur les boissons et sur les bestiaux, de consommation, soient supprimés et remplacés par un droit unique sur les boissons. Art. 4. Que les gabelles soient supprimées, et le prix du sel diminué, ainsi que celui du tabac. Art. 5. Qu’il ne soit accordé aucune pension que du consentement des Etats généraux, et pour justes causes ; et que celles actuellement existantes soient vérifiées par les Etats généraux, pour être conservées, ou réduites, ou supprimées. Art. 6. Que les intendants des provinces et (1) Nous publions ce cahier d’après un manusGrit des Archives de l'Empire.