[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j 17 Sabre* 17<T 77 civique; que votre courage s’agrandisse encore à cet aspect et tienne toujours le niveau des hautes destinées que vous avez en mains. « Unité dans les principes, énergie dans les mesures, rapidité dans l’action, la République triomphe. « Salut, fraternité. « Les membres composant le comité de sur¬ veillance de la commune d’Aunay et Perrigny et dépendances. » (Suivent S signatures.) Le citoyen Leîrancq envoie à la Convention na¬ tionale, âu nom de son fils, capitaine, comman¬ dant le vaisseau de la République V Entreprenant, le brevet qui l’avait porté, le 7 octobre 1787, au grade de sous-lieutenant de vaisseau. Il prie la Convention d’ordonner que ce brevet, délivré par une autorité justement abhorrée, soit employé à faire une gargousse de calibre de quatre. Il joint à ce brevet une lettre de change de 50 livres pour les frais de la guerre. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). La Société populaire et les autorités constituées de Neuville, département du Loiret, envoient le procès-verbal de la fête qu’ils ont célébrée à l’occasion d’une seconde plantation des arbres de la liberté et de la fraternité. Cette fête s’est terminée par un autodafé des titres féodaux et du monstre Mirabeau, et par une illumination et des danses. Insertion au « Bulletin » (2). PROÇÈS-VERBAL (3). Municipalité de Neuville, district de Neuville, département du Loiret, 10 brumaire Van II de la République française une et indivisible. Première fête décadaire. Inauguration d’une deuxième plantation des arbres de la liberté et de la fraternité. Les autorités constituées, civiles, militaires et judiciaires, sur l'invitation faite par la munici¬ palité de se rendre en costume à la maison commune pour en partir à quatre heures après-midi dans l’ordre suivant : un fort détachement de la garde nationale et de volontaires de la première réquisition ouvrait la marche, sui¬ vaient les autorités constituées : diptrict, municipalité, tribunal, juge de paix, bureau de conciliation, Société populaire en masse et une compagnie d’ouvriers représentant les arts et métiers. La marche était fermée par un autre détachement de la garde nationale, les volontaires de la première réquisition, la gendarmerie et tous les citoyens et citoyennes. A la tête du district on voyait la pierre de îa Bastille. Entre chacun des autres corps était un des grands hommes de la République. Au milieu de la Société populaire était l’Acte co nstitutionnei . (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 42. (2) Ibid. (3) Archives nationales, carton C 284, dossier 823. On a fait deux fois le tour de la grande place au bruit des tambours, de la musique, du canon et des couplets patriotiques. Pendant ce temps on a planté pour la seconde fois les arbres de la liberté et de la fraternité; il a été ensuite prononcé les discours suivants par le prési¬ dent du district, le maire, le procureur de la commune, le président du tribunal et le vice-président de la Société des Sans -culottes de la Montagne. Le président du district a dib : « Républicains, les places de président du district et de la Société des Sans-culottes de la Montagne de cette ville auxquelles la confiance de mes concitoyens m’a appelé, m’imposent le devoir de prendre la parole dans cette circonstance. « Citoyens, la fête que nous célébrons dans ce moment doit pénétrer de joie le cœur des vrais sans -culottes puisqu’elle a pour objet la consécration d’une institution nationale qui porte un coup mortel aux préjugés dont nous étions esclaves. Les Français se sont levés en masse pour briser les chaînes dont la ci-devant caste royale, nobiliaire et sacerdotale les surchargeait avec autant d’impudence que de cruauté depuis un trop grand nombre de siècles. « Les Français ont enfin osé réfléchir, ils ont osé parler et réunir leurs forces physiques et leurs lumières pour reprendre leur première qualité : celle d’hommes libres. « Citoyens, qu’est -il résulté de oette lutte de la liberté contre la tyrannie, des lumières contre l’ignorance, de la philosophie contre les préjugés? Une victoire complète contre les monstres politiques; car aujourd’hui ils sont écrasés dans toutes les parties de la Répu¬ blique, « Qu’en est -il résulté encore? Une Consti¬ tution républicaine qui sera d’autant plus immuable, d’autant plus inaltérable qu’elle repo e sur des principes pris dans la nature même, je veux dire sur la liberté et l’égalité. « Citoyens, un des grands effets que produi¬ ront indubitablement notre nouvelle Constitu¬ tion et l’institution de ces nouvelles fêtes natio¬ nales, c’csl de terrasser un autre monstre qui n’est pas moins redoutable, et qui n’a pas moins fait de mal que ceux dont je viens de parler : c’est l’intolérance religieuse qui a fait verser le sang de tant de millions d’hommes. « L’armée des rebelles de la Vendée, qui a porté des coups si funestes à la nation et qui a commis tant d’horreurs, nous fournit un exemple terrible du fanatisme et de l’intolé¬ rance religieux. « Citoyens, nous détruirons l’un et l’autre en nous instruisant réciproquement et frater¬ nellement; en attendant, respectons les opi¬ nions religieuses de nos concitoyens, quelles qu’elles soient. Mais la Convention nationale a fait un grand pas vers le salut de la nation en décrétant et en consacrant dans la Consti¬ tution que l’on ne reconnaissait pas de reli¬ gion dominante dans l’étendue de la Répu¬ blique. « Le premier des cultes auquel des républi¬ cains doivent s’attacher est celui de îa loi, celui de notre Constitution qui consacre à jamais cette maxime gravée dans le cœur de tous les hommes par les mains de la raison : Ne faisons pas à autrui ce que nous ne voudrions pas qu’il nous fût fait. « Citoyens, en suivant littéralement cette [Coaveatioa nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j ” 78 maxime sacrée et en adoptant pour notre premier culte celui de la Constitution et des lois, nous assurerons non seulement notre tranquillité, notre félicité individuelles, mais encore nous travaillerons efficacement au salut de la patrie et au bonheur de l’univers. » Le maire a dit : « Citoyens, la fête de la première décade que nous célébrons aujour¬ d’hui, les vestiges de la féodalité que les flammes vont bientôt consumer, les emblèmes simples qui nous entourent, tout nous retrace ici le régime républicain, les vertus qui en sont la base, et la pureté des mœurs qui en est le résultat. L’institution de cette fête a frappé d’un coup mortel le fanatisme; que dis-je? elle a ter¬ rassé ce monstre hideux, enfant du mensonge et de la superstition que ses prosélytes s’effor¬ çaient de propager et d’accréditer partout. Oui, mes chers concitoyens, ce sont ces commu¬ nications douces et fraternelles, oui, ce sont ces réunions civiques, cet ensemble de l’observance des lois qui nous ont amenés à ne pas mettre de différence entre un citoyen et un autre citoyen. Je vous invite donc, comme magistrat du peuple, à célébrer chaque décade par cet exemple, vous prouverez votre civisme, votre amour pour la République, et enfin votre soumission à la loi. » A la plantation de l’arbre de la liberté, le procureur de la commune a dit : « Républi¬ cains, c’est pour nous, c’est par nos mains que s’élève l’arbre de la liberté, image chérie de tous les Français; le jour que nous avons choisi est celui de la vérité, tu répondras à nos vœux et à nos soins. Elève toi, que tes ra¬ meaux s’étendent au loin et annoncent à l’univers la fidélité de nos serments. « Vous, nos frères, vous, braves volontaires, marchez aux frontières, que l’ennemi en vous voyant tremble, et que vos bras forts et cou¬ rageux l’anéantissent. Vos frères, citoyens, vont vous remplacer et ne laisseront pas le temps à vos parents de s’apercevoir de votre absence. « Braves sans-culottes, ne perdez jamais de vue l’arbre de la liberté, celui-ci n’est qu’une faible image, le vrai est dans le cœur de tout républicain; il est aussi ancien que le monde, ses branches majestueuses ombragent et parfu¬ ment les cieux; ses racines sont au centre de la terre : celui-là, citoyens, ne craint point les despotes. « Revenez victorieux, vous retrouverez des frères qui s’empresseront de vous serrer d’un bras, et de l’autre vous ceindre la couronne civique. » A l’inauguration de l’arbre de la fraternité, le procureur de la commune a dit : « Ce n’est, républicains, que parmi nous que la fraternité n’est pas un mot vide de sens; tout l’annonce aux peuples d’esclaves qui couvrent le globe terrestre; ils voient ce que peut la fraternité, ils voient que leurs efforts sont inutiles, que la victoire est assurée aux sans-culottes. Citoyens, chez les despotes, point de vérité, point d’humanité, point de parents, point de frères et jamais d’amis; chez les despotes ils sont plus fourbes que le mensonge, ils ont la perfidie de se couvrir du masque de la vertu. « Citoyens, vos magistrats vont donner l’accolade fraternelle aux arbres, mais c’est à vous à qui ils l’offrent, et ils vous invitent à la recevoir. » Le président du tribunal a dit : « Républi¬ cains, l’heureuse Révolution qui vient de régénérer le gouvernement français sur les bases de la liberté, et qui, pour reconquérir ce bienfait de la nature, le plus précieux dont l’humanité puisse jouir, a opéré les grandes merveilles dont l’antiquité ne fournit pas d’exemple, a terrassé le despotisme et l’aris¬ tocratie, renversé le trône royal et fait tomber la tête criminelle du tyran, qui dans ce moment fait trembler sur leurs trônes ébranlés, les tyrans étrangers, et mugir de rage les cohortes de leurs satellites; qui a fait disparaître de dessus cette terre de la liberté cette multitude innombrable d’abus, de désordres qui la dévas¬ taient et en désolaient les habitants, et qui enfin du flambeau électrique sorti du sommet de la Montagne a porté la lumière dans les esprits jusqu’alors ensevelis dans les ténèbres de l’ignorance et de la superstition. Cette Révolution pouvait-elle, après cela, laisser subsister aucun vestige du fanatisme, com¬ pagnon chéri du despotisme, et par conséquent le fléau le plus funeste à la liberté, ce fléau qui a allumé, fomenté et qui alimente encore le feu de la guerre désastreuse et meurtrière des brigands de la Vendée et des autres re¬ belles? Et ne devait-elle pas poursuivre jusque dans ses derniers retranchements ce monstre enfanté par le mensonge, la fourberie et l’am¬ bition? Cette mesure, citoyens, la Montagne vient de l’exécuter, elle a fait disparaître ces signes publics et scandaleux d’une religion dominante, elle a proscrit la publicité de tout exercice du culte et de tout acte religieux, en le concentrant dans les lieux qui y sont desti¬ nés; elle a aboli l’obligation des fêtes sans toutefois toucher à la liberté des opinions à cet égard, enfin elle a supprimé un calendrier ridicule qui, en s’écartant de son objet pure¬ ment civil, consacrait particulièrement des idées superstitieuses dont l’influence favorable au fanatisme, en eût perpétuellement entretenu l’esprit, et eût pu en opérer le retour, elle en a créé un nouveau qui, comptant à partir de l’ère de la République française, en consacre les fêtes civiques. « Ces fêtes nationales, citoyens, seront comme celle-ci qui en est l’inauguration, des jours de repos et d’allégresse, de rassemblement et de réunion des républicains. Là se resserreront les liens de l’union, de la concorde et de la fraternité; là se propageront et se vivifieront de plus en plus les principes de la liberté et de l’égalité et de toutes les vertus civiques. « Puissent ces fêtes, suivant la base de leur institution, produire à jamais ces heureux effets. « Puissent ces idées sublimes d’une Révo¬ lution qui a fondé la République et qui en assure le bonheur, pénétrer tous les esprits et y rester gravées éternellement. « Puis sent -elles surtout, dans les cœurs de cette brillante jeunesse, de ces jeunes défenseurs de la patrie qui nous environnent, prêts à voler au combat, inspirer l’amour sacré de la République, la haine des tyrans, et y porter le feu de cet enthousiasme héroïque devant lequel marche toujours la victoire; puissent enfin ces enfants chéris être bientôt rendus dans les bras de leurs parents, et y jouir, au sein d’une paix durable à laquelle ils auront concouru, de la récompense glorieuse qu’ils auront méritée. » Le citoyen Brouet, juge, vice -président de la Société populaire, a parlé sur la nouvelle [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j Jé3>rel793 79 inauguration des arbres de la liberté et de la fraternité, il a dit : « Premier emblème de notre liberté, arbre que nous vénérerons à jamais, crois, élève tes rameaux majestueux dans les airs; qu’ils publient nos serments de vivre libres ou mourir. Dis que la face de l’univers va changer, que tous les tyrans tomberont, que l’homme a reconquis irrévoca¬ blement sa grandeur, sa dignité première, qu’il est désormais aussi parfait que lorsqu’il sortit des mains de l’auteur de tous les êtres; dis qu’il a oublié tous les temps pour ne se sou¬ venir que de l’époque de sa liberté; dis enfin que le vrai, que le beau, le juste, auront seuls droit sur son cœur; que l’égalité et la liberté sont le centre de tons ses désirs et de toutes ses pensées. « Elève de l’égalité et de la liberté, arbre chéri de la fraternité, porte aussi ton front dans les airs, annonce à l’univers que la France ne forme qu’une famille, est un peuple de frères, et que bientôt il en sera de même du monde entier. » Les autorités constituées ont aidé à enterrer l’arbre de la liberté. Elles ont donné l’accolade fraternelle à l’arbre de la fraternité, en expri¬ mant que c’était pour tous nos frères les sans-culottes de la République. On a dansé la Carmagnole autour des arbres sacrés, chanté l’hymne de la liberté, suivi des couplets patriotiques. Alors tous les citoyens ° o nfo ndush épét aient sans cesse : Vive la liberté! Vive la République! Vive la Montagne ! La fête s’est terminée par un autodafé de titres féodaux et du monstre Mirabeau donné par le citoyen Bordier, par une illumination et des danses. Les autorités constituées se sont retirées dans le même ordre qu’elles étaient parties. Ducloux, maire; Tesmoing, Madoc, Mer¬ cier, officiers municipaux; B ou te vill ain , procureur cle la commune; Moyse, secré¬ taire-greffier. La Société, en conséquence de ces précédents arrêtés, arrête, d’après l’invitation de la municipalité, que le présent sera signé par les membres du bureau de ladite société. Bordier, président; Brouet, vice-prési¬ dent ; Marti y, secrétaire; Bavinier-L ans on, secrétaire. La Société populaire de Saint-Calais, départe¬ ment de la Sarthe, invite la Convention à rester à son poste jusqu’à ce que le gouvernement soit solidement établi. Insertion au « Bulletin » (1). Suit V adresse de la Société populaire de Saint-Calais (2). La Société populaire de Saint-Calais, département de la Sarthe, à la Convention nationale. « De Saint-Calais, le 16 brumaire de l’an II de la République fran¬ çaise, une et indivisible. « Citoyens législateurs, « Il ne vous a pas fallu quarante ans, comme (1) Procès-verbaux de la Convenlion , t. 27, p. 42. (2) Archives nationales, carton C 286, dossier 835. au législateur Moïse, pour conduire le peuple français à la terre promise, une seule année vous a suffi pour arriver à ce terme heureux. Les fou¬ dres et les orages se sont brisés contre la Mon¬ tagne, et le code sacré du bonheur des Français ou plutôt de tous les hommes, en est sorti scellé du sceau de la philosophie et de la sagesse hu¬ maine. Mais ce n’est point assez, citoyens légis-, lateurs, de nous avoir montré la terre promise ; il faut nous en mettre en possession. Restez donc à votre poste jusqu’à ce que le grand œuvre que vous avez fait pour notre bonheur soit af¬ fermi, et que nous puissions en goûter les fruits en paix. « Le grand et terrible exemple que vous avez donné à l’univers entier, en livrant au glaive de la loi les membres mêmes de votre sein qui s’opposaient au salut du peuple, doit faire trem¬ bler tous les ennemis de la République et les faire rentrer dans le néant. « Conservez donc cette attitude imposante qui frappe de terreur nos ennemis, et qui im¬ prime à notre République un caractère de gran¬ deur qui la fera respecter de toutes les puis¬ sances étrangères. « Bollé, président de la Société populaire de Saint-Calais, département de la Sarthe, district de Saint-Calais; Blavette, secré¬ taire; Charles Latousche, secrétaire. » Le citoyen Voilier écrit de Mouzon, qu’aidé d’un gendarme national, dont il ignore le nom, il a découvert 4 émigrés. Cette découverte a en¬ richi le trésor national de 7 à 8,090 livres et purgé la République de 4 monstres. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre du citoyen Voilier (2). « Citoyens, « Persuadé qu’il est du devoir d’un républi¬ cain de ne point épargner la gente aristocratique, j’ai, sur le. rapport qui m’a été fait de l’inci¬ visme de M. Quoê, ex-avoué de Sort-le-Château (Solre-le-Château), examiné scrupuleusement sa conduite et ayant trouvé que la loi contre les émigrés pouvait l’atteindre, j’en ai sollicité l’exécution auprès de la municipalité du lieu, qui a fait droit à ma demande. Sur-le-champ, 100 pièces de 24 livres ont été versées dans les coffres de la République par le père de l’accusé, et M. Quoë fils a été déclaré émigré. Cette dé¬ couverte a éveillé la justice de la municipalité qui, après un examen sévère de la conduite des habitants de Sors-le-Château, a été obligée de convenir que M. Quoë n’était pas le seul cou¬ pable. Trois autres ont subi le même sort, en sorte qu’en un jour, le Trésor national s’est trouvé enrichi de 7 à 8,000 livres, et ce sol de la liberté purgé pour jamais de quatre de ses ennemis qu’une coupable ou aveugle indulgence avait laissés impunis. « Salut et respect. « Vollier, professeur de langues, « Mouzon, ce 7e jour de la lre décade du (1) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 27, p. 42. (2) Archives nationales, carton C 286, dossier 835.