SÉANCE DU 18 FLORÉAL AN II (7 MAI 1794) - N° 30 131 Mais nous devons vous dire qu’en dernière analyse, le résultat n’en sera pas tel que nous vous le présentons; le Tribunal révolutionnaire a dérangé tous nos calculs; et par la punition d’un grand nombre de conspirateurs dont notre section était infestée, leurs propriétés, sont devenues nationales, et la République se trouvera avoir emprunté sur elle-même. A peine la fabrication du salpêtre a-t-elle été ordonnée, que nous nous sommes tous mis en réquisition permanente; nous en avons fourni jusqu’à ce jour, 9.000 livres; et tel est le résultat heureux du concours du zèle de tous les citoyens avec les lumières des commissaires que nous avons nommés, que le plus beau salpêtre nous reviendra à un prix inférieur à celui que vous avez accordé; de sorte que nous pouvons dire, sans exagération, que par le même moyen et pour ainsi dire, du même coup, nous foudroyerons les tyrans, et nous soulagerons les malheureux; ce sont les premiers devoirs des républicains. Le Comité de salut public qui, au milieu de ses immenses et glorieux travaux, ne laisse cependant échapper aucun détail utile, aucune mesure salutaire, a senti combien il était important de prévenir la disette du papier sans lequel la liberté de la presse serait illusoire, nous a demandé des chiffons; nous en avons comblé une salle entière. Ah ! que les tyrans tremblent et que les peuples se lèvent ! nous avons du pain, du feu, de la poudre et du papier. Enfin, représentans du peuple, le territoire de notre section qui trop longtemps fut souillé par la présence de ce qu’on appelait les grands et qui maintenant sont si petits; qui trop longtemps nous offrit le spectacle hideux de tous les crimes; de tous les vices enfantés par la superstition, la fainéantise, les richesses, le luxe et l’insolence, notre territoire est enfin purgé; grâce à notre énergie, à notre persévérance et surtout à la justice du tribunal révolutionnaire, tous ces ennemis du peuple ont fui en lâches, ou sont morts en criminels. Sur la place où naguère l’imposture avait des autels, et la paresse des dortoirs, sont élevés des forges et des enclumes; et des bras libres et vigoureux y fabriquent avec une activité incroyable, des armes aux défenseurs de la patrie. Enfin nous respirons maintenant un air pur; nous sommes tous sans-culottes, mais heureux, mais riches car nous avons des bras, des vertus et la République triomphe. Mais, représentans du peuple, tous nos devoirs ne seraient pas encore remplis, si nous n’avions pas fait tous nos efforts pour augmenter le nombre de nos phalanges républicaines. Nous vous offrons deux cavaliers jacobins que nous avons armé et équipé; ils se désespèrent de n’être pas partis encore; ils brûlent de voler à la frontière du Nord; ils sentent que là aussi, la victoire se prépare; que la nature et l’humanité n’y seront pas longtemps outragées par le barbare autrichien, et que la vengeance nationale sera d’autant plus terrible qu’elle aura été plus tardive. Recevez leur serment; ils y seront fidèles puisqu’ils sont patriotes. Vive la République, vive la Montagne, honneur à la morale, à toutes les vertus qu’elle a mis à l’ordre du jour, et qui sont dans le cœur de tous ses membres (1) . (On applaudit.) Le PRESIDENT répond : Citoyens, Vous venez de prouver à la Convention nationale que c’est au profit des républicains qu’elle a mis les vertus et la probité à l’ordre du jour. Les détails vrais, ingénus, mais modestes, des actions de la section, considérée, soit comme Société populaire, soit comme section, ne permettent pas à l’assemblée de douter que la pratique des vertus, que le patriotisme ne soient aussi à l’ordre du jour parmi vous. Continuez, braves républicains : vous donnez un grand exemple à vos frères; continuez, et vous soutiendrez une réputation bien acquise. Continuez à développer vos principes; faites les germer dans le cœur de ces jeunes élèves qui vous accompagnent et vous entendent; soutenez-vous; unissez-vous; soutenez vos efforts, et l’aristocratie déconcertée (si toutefois elle peut survivre encore), et l’aristocratie même sera forcée de vous admirer. Deux cavaliers jacobins sortis de votre sein vaudront bien mieux que toutes les légions des tyrans coalisés. Ils sont Français, ils sont républicans; avec ces titres, ils peuvent avec assurance voler à la victoire. La Convention nationale loue vos délibérations; elle loue votre demande; elle accepte vos offrandes, et, en son nom, je vous invite à assister à sa séance. LEGENDRE : C’est avec justice que la section de la Fontaine Grenelle reçoit les applaudissements de la Convention nationale et du peuple des tribunes. J’ai remarqué, dans l’adresse, la renonciation que fait la Société sec-tionnaire à tenir désormais des séances. Vous savez qu’il y a une grande différence entre les Sociétés populaires et les Sociétés sectionnaires; vous savez toute l’utilité des premières, vous savez que les autres ont été imaginées par des ennemis du peuple; qu’ils espéroient s’y créer des complices en trompant les bons citoyens, et y influer sur l’opinion publique. Vous avez accueilli avec applaudissement la démarche de la section de la Fontaine-Grenelle; les autres sections suivront sans doute l’impulsion utile que celle-là vient de donner. Pour la seconder, je demande l’insertion honorable au bulletin de l’adresse et de la réponse du président (2) . (On applaudit.) Mention honorable, insertion au bulletin (3). 30 Le représentant du peuple Esnuë-Lavallée demande un congé de quatre décades pour rétablir sa santé. Accordé (4). (1) C 303, pl. 1110, p. 26, non datée, signée Jullien, Lepine, Pillon, Rainon, Roux. (2) Débats, n°s 595, p. 226 et 599, p. 302. (3) P.-V., XXXVII, 44. (4) P.-V., xxxvn, 45. Minute du secrétaire. (C 301, pl. 1070, p. 28). Décret n° 9048. SÉANCE DU 18 FLORÉAL AN II (7 MAI 1794) - N° 30 131 Mais nous devons vous dire qu’en dernière analyse, le résultat n’en sera pas tel que nous vous le présentons; le Tribunal révolutionnaire a dérangé tous nos calculs; et par la punition d’un grand nombre de conspirateurs dont notre section était infestée, leurs propriétés, sont devenues nationales, et la République se trouvera avoir emprunté sur elle-même. A peine la fabrication du salpêtre a-t-elle été ordonnée, que nous nous sommes tous mis en réquisition permanente; nous en avons fourni jusqu’à ce jour, 9.000 livres; et tel est le résultat heureux du concours du zèle de tous les citoyens avec les lumières des commissaires que nous avons nommés, que le plus beau salpêtre nous reviendra à un prix inférieur à celui que vous avez accordé; de sorte que nous pouvons dire, sans exagération, que par le même moyen et pour ainsi dire, du même coup, nous foudroyerons les tyrans, et nous soulagerons les malheureux; ce sont les premiers devoirs des républicains. Le Comité de salut public qui, au milieu de ses immenses et glorieux travaux, ne laisse cependant échapper aucun détail utile, aucune mesure salutaire, a senti combien il était important de prévenir la disette du papier sans lequel la liberté de la presse serait illusoire, nous a demandé des chiffons; nous en avons comblé une salle entière. Ah ! que les tyrans tremblent et que les peuples se lèvent ! nous avons du pain, du feu, de la poudre et du papier. Enfin, représentans du peuple, le territoire de notre section qui trop longtemps fut souillé par la présence de ce qu’on appelait les grands et qui maintenant sont si petits; qui trop longtemps nous offrit le spectacle hideux de tous les crimes; de tous les vices enfantés par la superstition, la fainéantise, les richesses, le luxe et l’insolence, notre territoire est enfin purgé; grâce à notre énergie, à notre persévérance et surtout à la justice du tribunal révolutionnaire, tous ces ennemis du peuple ont fui en lâches, ou sont morts en criminels. Sur la place où naguère l’imposture avait des autels, et la paresse des dortoirs, sont élevés des forges et des enclumes; et des bras libres et vigoureux y fabriquent avec une activité incroyable, des armes aux défenseurs de la patrie. Enfin nous respirons maintenant un air pur; nous sommes tous sans-culottes, mais heureux, mais riches car nous avons des bras, des vertus et la République triomphe. Mais, représentans du peuple, tous nos devoirs ne seraient pas encore remplis, si nous n’avions pas fait tous nos efforts pour augmenter le nombre de nos phalanges républicaines. Nous vous offrons deux cavaliers jacobins que nous avons armé et équipé; ils se désespèrent de n’être pas partis encore; ils brûlent de voler à la frontière du Nord; ils sentent que là aussi, la victoire se prépare; que la nature et l’humanité n’y seront pas longtemps outragées par le barbare autrichien, et que la vengeance nationale sera d’autant plus terrible qu’elle aura été plus tardive. Recevez leur serment; ils y seront fidèles puisqu’ils sont patriotes. Vive la République, vive la Montagne, honneur à la morale, à toutes les vertus qu’elle a mis à l’ordre du jour, et qui sont dans le cœur de tous ses membres (1) . (On applaudit.) Le PRESIDENT répond : Citoyens, Vous venez de prouver à la Convention nationale que c’est au profit des républicains qu’elle a mis les vertus et la probité à l’ordre du jour. Les détails vrais, ingénus, mais modestes, des actions de la section, considérée, soit comme Société populaire, soit comme section, ne permettent pas à l’assemblée de douter que la pratique des vertus, que le patriotisme ne soient aussi à l’ordre du jour parmi vous. Continuez, braves républicains : vous donnez un grand exemple à vos frères; continuez, et vous soutiendrez une réputation bien acquise. Continuez à développer vos principes; faites les germer dans le cœur de ces jeunes élèves qui vous accompagnent et vous entendent; soutenez-vous; unissez-vous; soutenez vos efforts, et l’aristocratie déconcertée (si toutefois elle peut survivre encore), et l’aristocratie même sera forcée de vous admirer. Deux cavaliers jacobins sortis de votre sein vaudront bien mieux que toutes les légions des tyrans coalisés. Ils sont Français, ils sont républicans; avec ces titres, ils peuvent avec assurance voler à la victoire. La Convention nationale loue vos délibérations; elle loue votre demande; elle accepte vos offrandes, et, en son nom, je vous invite à assister à sa séance. LEGENDRE : C’est avec justice que la section de la Fontaine Grenelle reçoit les applaudissements de la Convention nationale et du peuple des tribunes. J’ai remarqué, dans l’adresse, la renonciation que fait la Société sec-tionnaire à tenir désormais des séances. Vous savez qu’il y a une grande différence entre les Sociétés populaires et les Sociétés sectionnaires; vous savez toute l’utilité des premières, vous savez que les autres ont été imaginées par des ennemis du peuple; qu’ils espéroient s’y créer des complices en trompant les bons citoyens, et y influer sur l’opinion publique. Vous avez accueilli avec applaudissement la démarche de la section de la Fontaine-Grenelle; les autres sections suivront sans doute l’impulsion utile que celle-là vient de donner. Pour la seconder, je demande l’insertion honorable au bulletin de l’adresse et de la réponse du président (2) . (On applaudit.) Mention honorable, insertion au bulletin (3). 30 Le représentant du peuple Esnuë-Lavallée demande un congé de quatre décades pour rétablir sa santé. Accordé (4). (1) C 303, pl. 1110, p. 26, non datée, signée Jullien, Lepine, Pillon, Rainon, Roux. (2) Débats, n°s 595, p. 226 et 599, p. 302. (3) P.-V., XXXVII, 44. (4) P.-V., xxxvn, 45. Minute du secrétaire. (C 301, pl. 1070, p. 28). Décret n° 9048.