408 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE [Charles Lambert, représentant du peuple, à la Convention nationale, de Châtillon-sur-Seine, le 12 vendémiaire an III] (86) Citoyens collègues, La confusion des mots entraîne nécessairement la confusion des idées ; et si jusqu’ici on a vu la plupart des écrivains, des journalistes, des rapporteurs mêmes de nos comités, nous parler du peuple d’une telle commune, d’une telle section, d’un tel canton etc., il n’est pas étonnant que des sociétés populaires se croient égallement être peuple, et que plusieurs de leurs membres ou malveillants ou mal instruits, tirent de ce principe absolument faux, la conséquence très juste, que là où est le peuple, là est le souverain. C’est ce qui vient d’arriver à Commune-Affranchie : nos collègues Charlier et Pocholle ont pris les mesures les plus sages, pour arrêter les suittes funestes que pourroit avoir une doctrine aussi monstrueuse; mais la Convention elle-même ne devroit-elle pas prévenir de semblables écarts, en aprenant à ceux qui l’ignorent ou qui affectent de l’ignorer pour égarer leurs concitoyens : 1°. que le véritable sens, la seule acception du mot peuple, est la collection généralle de tous les individus qui forment un corps social et qui vivent sous les mêmes lois. 2°. Que le mot peuple, dont on est presque forcé de se servir en bien des circonstances pour exprimer la totalité des citoyens qui composent telle commune, telle assemblée etc., n’est dans le fait qu’une section du peuple en quelque nombre que soient ces citoyens, et qu’il ne peut être entendu que comme une expression vulgaire et habituelle; comme lorsqu’on dit que le soleil se lève, se couche, quoiqu’il soit très vrai qu’il n’y a jamais ni soleil levant, ni soleil couchant. 3°. enfin que c’est au peuple seul pris collectivement qu’appartient la vraie souveraineté ; d’où il résulte que le souverain est essentiellement un et indivisible, qu’il n’est qu’un être purement métaphysique, c’est-à-dire l’expression de la volonté généralle et que s’il en étoit autrement nous aurions quarante mille souverains en France, autant que de communes. Je vous avoue, citoyens collègues, que cette explication sera très superflue pour les gens instruits ; mais vous ne savez que trop combien cette classe est peu nombreuse ; combien il importe surtout de rendre ces idées familières aux gens de la campagne, si aisés à séduire, en attendant que des livres élémentaires puissent propager l’instruction nationalle; et quand on sait qu’un Robertson (préface de l’histoire de Charles-Quint), le Tite-Live de l’Angleterre, ap-peloit le roi de ce pays, souverain d’un peuple libre ; quand on a vu de nos jours, un Chau-mette s’en aller crier à la Commune de Paris, que le peuple souverain étoit outragé, parce que la Convention n’avoit pas voulu l’entendre à la (86) C 321, pl. 1338, p.20. Bull., 19 vend.; Débats, n° 750, 305-306; M. U., XLIV, 309. Mention dans Ann. Patr., n° 646; Ann. R. F., n° 17; J. Perlet, n° 745; Mess. Soir, n° 781. barre, lui et une vingtaine de candotaires (?), ne conviendrez-vous pas que des hommes profondément ignorants ou méchants ne cesseront d’abuser de trois ou quatre mots, tels que peuple, souverain, liberté, égalité, pour induire leurs concitoyens en erreur et élever leur domination particulière sur les ruines de la liberté publique. Salut et fraternité. Lambert. 53 Les gardiens des bureaux de la Trésorerie nationale font hommage de 311 livres de salpêtre. Mention honorable, insertion au bulletin (87). [Les gardiens des bureaux de la Trésorerie à la Convention nationale, s. d.] (88) Législateurs, Dans les élans de notre amour pour la Patrie nous nous sommes dit : Le Trésor public et le Salpêtre sont les deux foudres qui, dirigées par des mains républicaines, doivent écraser les tirans. Eh bien ! gardons les trésor et fabriquons du salpêtre sur le sol qui le renferme. Notre zèle a été couronné du succès; nous fesons hommage à la Convention de 311 livres de beau salpêtre. C’est un mandat tiré par les caves de la Trésorerie sur les fameux souterreins de la banque d’Amsterdam. Ordonnez, Législateurs, à nos ca-noniers républicains et bientôt notre mandat sera aquittë. Nous finissons par ce calcul présenté à nos ennemis. Une seule cave exploitée par des mains inhabiles, a produit 311 livres de salpêtre, combien produira la République entière? Vive la république. 54 Les ouvriers de l’atelier des réparations d’armes à feu, établi à Lille [Nord], assurent de leur zèle et de leur activité, et font hommage d’une somme de 1 216 L, fruit de leurs épargnes, pour être employée à la fabrication du salpêtre. Mention honorable, insertion au bulletin et renvoi au receveur des dons patriotiques (89). (87) P.-V., XLVII, 39. Bull., 24 vend, (suppl. 2). (88) C 322, pl. 1352, p. 28. Joint le reçu de la direction de la Raffinerie des Salpêtres, du 18 fructidor an II. (89) P.-V., XLVII, 39. Bull., 24 vend, (suppl. 2).