[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [U juillet 1791.] l’issue de cette crise violente 1 Quand l’Assemblée nationale parviendrait à élever cette nouvelle Constitution : quel monstrueux gouvernement qu’uDe république composée de 25 millions d’hommes égaux en droits, égaux même dans l’opinion, tous autorisés à concourir individuellement à la confection de la loi et à la nomination des magistrats, car, ne vous y trompez pas dans une république, l’homme qui n’est pas citoyen actif est sujet ! Le monarque est le représentant né de ceux qui, par vos lois sur les élections, ne peuvent être représentés; son veto est le gardien de leur liberté : abandonnons donc à d’oisifs spéculateurs le projet insensé d’une République française. Ce serait ici le lieu de traiter de l’inviolabilité du monarque (1), de prouver que, considéré dans ses rapports avec le corps politique, il est impeccable, parce que ses moyens d’agir sont nuis, qu’il ne peut rien sans la loi, et que les agents secondaires étant responsables si le monarque l’était lui-même, cette responsabilité des agents secondaires serait illusoire, puisque, remontant toujours à une première cause de la violation de la loi, cette violation ne saurait lui être imputée; l’Assemblée nationale ayant posé en principe l’inviolabilité du monarque, je me crois dispensé de la démontrer. M. Muguet de Nanthou, au nom des 7 comités, réunis, a fait ce matin son rapporta l’Assemblée, et posé les principes constitutionnels et invariables qui doivent nous guider dans le jugement de cette grande affaire, je me réunis à ses conclusions et j’adopte le projet de décret du comité. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. CHARLES DE LAMETH. Séance du jeudi 14 juillet 1791, au matin (2). La séance est ouverte à neuf heures du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d’hier, qui est adopté. M. Billot d’Auuiart, citoyen , âgé de 68 ans, qui avait offert, le 5 de ce mois, un don patriotique de 600 livres, étant venu pour le réaliser, ajoute à ce don une somme de 400 livres; ce qui fait celle de 1 ,000 livres, qu’il remet sur le bureau , savoir 500 livres en espèces, et un assignat de 500 livres, pour être employées à entretenir les soldats citoyens qui vont combattre sur la frontière. (L’Assemblée témoigne sa satisfaction à ce citoyen, et lui accorde les honneurs de la séance; elle ordonne en outre qu’il sera fait mention dans le procès-verbal de son action généreuse.) (1) Los orateurs qui ont parlé contre l'inviolabilité, l’ont toujours considérée dans les rapports qu’a le monarque avec les individus ; et supposant des crimes qu’il n’a aucun intérêt de connaître, ils l’ont fait méchant par système : ce qui est absurde ; car le mal, en tant que mal, ne peut devenir l’objet de l’action de la volonté. 11 fallait considérer l’inviolabilité dans les rapports qu’a le monarque avec le corps politique. Alors ils auraient vu que l’inviolabilité subsiste et doit subsister par tous les actes que la loi n’a pas réservés. (2) Cette séance est incomplète au Moniteur. M. Favre, curé d’Hotonnes-en-Valromey , et député à l’Assemblée , qui était absent par congé, annonce son retour. M. Chadelas, quartier-maître de la garde nationale de Paris , fait remettre à l’Assemblée une somme de 600 livres, dont 300 livres de la part de son frère, et 300 livres au nom d’une citoyenne de Paris, pour la solde de deux volontaires pendant une campagne. M. le Président fait donner lecture d’une lettre des secrétaires , chefs de bureau et commis du district de Charlevüle , département des Ardennes, qui offrent de prendre sur leurs appointements les frais d’équipement et d’entretieu d’un garde national tant que le besoin de l’Etat pourra l’exiger. Cette lettre est ainsi conçue : « Gharleville, ce 7 juillet 1791 . « Monsieur le Président, « Le devoir nous enchaîne à notre poste; il adoucit le sentiment pénible que nous cause l’impossibilité de voir nos noms inscrits sur la liste, honorable des volontaires nationaux. « Mais il nous reste un moyen de venir au secours de l'Empire. Nous sommes convenus de fournir, équiper et entretenir un volontaire à nos frais, tant que le besoin de l’Etat l’exigera. « Nous avons cru, Monsieur Je Président, que la faiblesse de notre hommage à la patrie ferait sa force, en nous donnant autant d’imitateurs qu’il y a d’administrations de district. « Nous invitons, par la circulaire ci-jointe, dont nous vous prions de presser l’envoi, tous nos confrères des districts à se réunir à nous. (Applaudissements.) « Nous sommes avec respect, Monsieur le Président, vos très humbles et très obéissants serviteurs. « Signé : Les secrétaires, chefs de bureau et commis du district de Charleville, au département des Ardennes. » Suit la teneur de la circulaire jointe à cette lettre et adressée aux secrétaires, chefs de bureau et commis des districts du royaume : « Frères et amis, « Nous avons pensé que, dans l’impossibilité où nous sommes de quitter notre poste pour nous enrôler sous l’étendard national, il était de notre devoir de venir d’une autre manière au secours de la patrie, et nous avons résolu de prendre sur nos appointements les frais d’équipement et d’entretien d’un garde national, tant que le besoin de l’Etat pourra l’exiger. « Nous n’aurons sans doute, frères et amis, aucun avantage sur vous à cet égard ; il s’agit du plus cher des intérêts, de la conservation de notre liberté, que la raison armée a conquise et peut seule conserver. » ( Applaudissements .) Un membre soumet quelques observations à l’Assemblée sur une difficulté qui s’est élevée relativement aux billets de tribunes délivrés par le Président. (L’Assemblée décrète que le Président est seul autorisé à délivrer des billets de barre.) M. Cochard. Je n’ai été instruit qu’hier soir que Messieurs du tribunal de cassation avaient fait leur soumission pour entretenir uu garde [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. national sur les frontières pendant tout le temps que l'Assemblée jugerait nécessaire pour la défense de l’Etat et jusqu’à l’expiration de leurs fonctions au tribunal de cassation. Comme j’ai l’honneur d’appartenir à ce corps, je supplie l’Assemblée de me permettre de me réunir à mes collègues et de faire comme eux la même soumission, dont la solde tombera à ma charge pendant tout le temps de service que l’Assemblée nationale exigera. ( Applaudissements .) M.I�a Poule. Mettez la mienne aussi, Monsieur le Président. ( Applaudissements .) M. llarquls. Je me joins également à mes collègues du tribunal de cassation et je faiscomme eux la même soumission. (. Applaudissements .) M. de Pardieu. Messieurs, M. de Talleyrand, archevêque de Reims, qui se rendait aux eaux de Spa pour le rétablissement de sa santé en compagnie de Mm® de Périgord, sa nièce, vient d’être arrêté dans sa route à Saint-Quentin ; je demande que l’Assemblée autorise M. de Montmorin à lui délivrer un passeport ainsi qu’à sa nièce. M. Bouche. L’Assemblée a rendu des décrets généraux sur la matière; elle ne peut s’occuper des moyens d’exécution. M. de Talleyrand-Périgord, évêque d'Autun , appuie la demande de M. de Pardieu. M. Ilerlin. Cela regarde le pouvoir exécutif. (L’Assemblée décrète qu’elle passe à l’ordre du jour sur la motion de M. de Pardieu.) M. Prugnon,aw nom du comité d’emplacement , présente quatre projets de décret. Le premier, relatif au logement du corps administratif du district de Meaux , est ainsi conçu : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d’emplacement, autorise le directoire du district de Meaux, département de Seine-et-Marne, à acquérir, aux frais des administrés, et dans les formes prescrites par les décrets pour la vente des biens nationaux, la maison des Cordeliers de la ville de Meaux, et bâtiments en dépendant, renfermés et circonscrits dans les lignes tracées en jaune sur le plan qui sera joint à la minute du présent décret, pour y placer le corps administratif du district. L’autorise également à faire procéder à l’adjudication, aurabais, des ouvrages et arrangements intérieurs nécessaires audit emplacement, sur le devis estimatif qui en a été dressé par le sieur Cliquot, architecte, le 14 mars dernier et jours suivants ; le montantde laquelle adjudication sera supporté par lesdits administrés. « Excepte, de la présente permission d’acquérir, l’église, les jardins, verger, potager, luzernes, «vignes, etautresterrainsnon renfermés dans la susdite ligne jaune tracée sur ledit plan, pour être, tous ces objets exceptés, vendus séparémentdans les formes ci-dessus prescrites, et le prix versé dans la caisse du district. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) Le deuxième, relatif au logement du corps administratif et du bureau de paix du district de Chaumont-en-Ve xin, est ainsi conçu : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d’emplacement, autorise le directoire du district de Chaumont-en-Vexin, département de [14 juillet 1791.J l’Oise, à acquérir, aux frais des administrés, et dans les formes prescrites par les décrets de l’Assemblée nationale, la maison des récolets de cette ville, pour y placer le corps administratif du district et le bureau de paix. « L’autorise également à faire procéder à l’adjudication, au rabais, des réparations et arrangements intérieurs nécessaires, sur le devis estimatif qui en sera dressé; le montant de laquelle adjudication sera supporté par les administrés. « Excepte, de la présente permission d’acquérir,� les terres, la petite chapelle et le jardin marqués, A, B, 0 et D, sur le plan qui sera joint à la minute du présent décret, pour être vendus séparément en la manière accoutumée; à la charge, par l’adjudicataire dudit jardin et terrain marqués G et D, de laisser 40 pieds le long des bâtiments pour la conservation des jours. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) Le troisième, relatif au logement du corps administratif du district de Forcalquier, est ainsi conçu : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d’emplacement, autorise le directoire du district de Forcalquier, département des Basses-Alpes, à louer, aux frais des administrés, et à dire d’experts, l’aile du côté du faubourg de la maison de la visitation de la ville de Forcalquier, telle qu’elle est désignée au plan qui sera joint à la minute du présent décret, pour y placer le corps administratif du district. « L’autorise également à faire procéder à l’adjudication, au. rabais, des réparations et arrangements intérieurs nécessaires à son établissement, sur le devis estimatif qui en a été dressé par le sieur Aubert, le 7 mai dernier; le montant de laquelle adjudication sera supporté par lesdits administrés ». (Ce décret est mis aux voix et adopté.) Le quatrième, relatif au logement des commissaires administrateurs du droit de timbre et d’enregistrement , est ainsi conçu : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d’emplacement, décrète que les commissaires administrateurs du droit de timbre et d’enregistrement, dont les bureaux sont placés à l’hôtel de Mesmes, transporteront leur établissement à l’hôtel de la Régie, rue de Cboiseul, pour l’occuper définitivement. « Décrète que les anciens régisseurs iront se placer, avec les bureaux qui leur restent dans l’hôtel des Fermes, pour y achever l’arriéré et la clôture de leur comptabilité. « Décrète pareillement que l’hôtel de Mesmes, sis rue Sainte-Avoie, sera incessamment mis en vente. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. l’abbé Gouttes, au nom du comité central de liquidation , fait un rapport sur la liquidation du péage de Sainte-Croix. Suit le texte du rapport imprimé sur cet objet par délibération du comité central deliquidation : Par l’article 15 du décret du 15 mars 1790, l’Assemblée nationale a supprimé généralement les péages. Mais, par l’article 36 du même décret, elle a déclaré, entre autres exceptions, que les péages acquis du domaine de l’Etat seraient remboursés par l’Etat. Le péage de Sainte-Croix, dans la ci-devant province de Guyenne, est originairement sorti du domaine de l’Etat. M. de Batz, qui en était possesseur à l’époque de la suppression, a demandé l’exécution de l’article 36, c’est-à-dire le rem-