654 [Assemblée nationale,] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [1er février 1791.] sillon doit le faire dans l’instant; ainsi, c’est par tolérance que je vous ai écouté. M. Audier-HIassillon, au nom du comité de judicature. Messieurs, vous avez pris les mesures les plus favorables pour accélérer le travail de la liquidation des offices; mais toutes les règles que vous avez établies ne trouvent leur application, pour d�s offices attachés à des compagnies, que lorsqu’on se présente en corps à la liquidation ou que les compagnies ont fourni les états et les renseignements que vous avez exigés par vos décrets. Vous avez cependant voulu que le refus d’une compagnie ne pût pas nuire aux titulaires qui voudraient se faire liquider, et qu’après le délai du mois ils pussent se présenter seuls à la liquidation : il reste à déterminer de quelle manière doit s’opérer cette liquidation pour que les règles que vous avez établies, pour celles qui se font en corps, puissent y être également observées et que les intérêts de la nation ne soient pas lésés. Vous avez, par vos décrets des 2 et 6 septembre, chargé la nation de toutes les dettes des compagnies, tant antérieures que postérieures à 1771, à l’égard des créanciers seulement. Plusieurs articles de ce même décret déterminent la portion de dettes qui doit être à la charge de la nation, et ordonnent qu’il en sera fait au titulaire la déduction sur le montant de sa liquidation. Il est impossible d’exécuter aucune de ces dispositions, si on n’a pas sous les yeux l’état de dettes actives et passives de la compagnie, l’état et le nombre des officiers dont elle esi composée, et les règles de proportion d’après lesquelles chacun des officiers contribuait aux charges communes ; aussi vous avez ordonné à chaque compagnie d’envoyer ces états et aux créanciers d’envoyer un extrait de leurs titres certifiés. Par votre décret du 6 octobre dernier vous avez procuré, tant aux compagnies qu’aux créanciers, les plus grandes facilités pour satisfaire à cette injonction, en permettant que les états que vous demandiez aux compagnies fussent attestés par la seule signature du greflier, et que les créanciers pussent faire certilier leurs titres par le greffier de l’ancien tribunal, ou par le procureur syndic du district. Un très grand nombre de compagnies a satisfait à vos décrets : mais il en est qui n’ont fait encore aucun envoi des pièces que vous avez exigées, et dont les membres se présentent cependant pour la liquidation. Il est nécessaire de régler à leur égard la manière dont doit être faite cette liquidation individuelle pour que les décrets soient pleinement exécutés, et que la nation ne soit pas grevée d'une masse de dettes qui devait être à la charge des titulaires. L’article 7 des décrets des 2 et 6 septembre porte que le titulaire, membre d’une compagnie, laquelle aurait refusé de se faire liquider, pourra, après le délai d’un mois, se présenter seul pour se faire liquider. Cet article présente beaucoup de difficultés dans son exécution. D’abord, vous n’avez pas décidé comment le titulaire constaterait le refus de la compagnie, comment vous pourrez prélever sur cette compagnie refusant la portion de dettes qui doit être à sa charge, et de qui sera composée cette compagnie, si tous les membres qu’elle renferme se présentent a la liquidation, soit successivement, soit en même temps, ou chacun séparément. Si vous admettiez tous ceux qui se présenteraient sans aucune dis inction , pour être liquidés, sans déduction du titre pour les dettes mêmes qui ontété contractées postérieurement à 1771, ou qui ont eu même pour objet l’acquit de la finance à rembourser, il est évident que la nation serait exposée à demeurer chargée sans retour d’une masse de dettes que vous avez jugé devoir être payées par le titulaire, et à payer deux fois. Parmi ceux qui se présenteraient individuellement, il y en aurait sans doute qui seraient de bonne foi, et qui n’auraient pas pu se procurer l’état des dettes actives et passives que vous exigez ; mais combien yen aurait-il qui abuseraient de cette facilité pour rejeter sur la nation deux dettes qui devaient être à leur charge, et se soustraire ainsi à leurs obligations. Serait-il raisonnable d’accorder un pareil avantage à ceux qui, par négligence ou par ruse, auraient éludé la disposition de vos décrets, et de ne garder la rigueur et la sévérité de vos lois que pour ceux qui ont montré autant d’empressement que d’exactitude à s’y soumettre? D’autre part, il ne serait pas juste que des propriétaires d’office, membres des compagnies qui refusent les titres nécessaires à opérer la liquidation, et qui n’auraient rien négligé pour y parvenir, fussent privés du prix de leur finance par l’obstination de leurs collègues. Votrecomité a cherché les moyens de favoriser l’exécution des règles que vous avez établies sans blesser l’intérêt de la nation ni la justice due à chaque titulaire d’oflice. Il n’en a pas trouvé de plus sûr que d’accorder un nouveau délai aux créanciers des compagnies, pour envoyer leurs titres; et de déclarer que tous les créanciers postérieurs à 1781 qui n’en auront pas envoyé copie certifiée, et qui ne seraient pas, dans le délai que vous fixerez, compris dans les états envoyés par les compagnies, seront privés de la faveur qui leur avait été accordée par vos décrets et ne seront point compris au rang des créanciers de l’Etat, sauf leur recours contre les anciens officiers des compagnies. La règle que le comité vous propose ne peut nuire ni aux créanciers ni aux titulaires. Les créanciers qui ont déjà été invités à produire leurs titres d’office par les décrets des 2 septembre et 6 oc obre, et qui seront encore avertis par celui qu’on vous propose de rendre, ne pourront pas se plaindre s’ils sont privés par leur négligence du béoélice que vous aviez voulu leur accorder, dès que vous leur conserverez encore leurs droits sur les premiers débiteurs; et les titulaires qui n’ont pas remis leurs pièces n’ont pas à regretter ce qu’ils ont personnellement payé, dès qu’ils n’en ont pas essuyé la déduction sur leurs offices, et qu’ils n’ont fourni aucun des moyens qui pouvaient opérer cette déduction. Dailieurs cette règle paraît absolument nécessaire pour mettre l’Assemblée à portée de connaître le montant des dettes dont elle s’est chargée, et poser un terme aux engagements qui doivent être rejetés sur la nation ; autrement, s’il était permis dans deux ans comme dans dix, et après que les liquidations auraient été faites, de faire surgir de nouveaux créanciers des compagnies, même avec de simples obligations privées, vous replongeriez les finances dans ce chaos ténébreux dont vous avez voulu les retirer. Nous avons pensé que, lorsque les titulaires n’auraient pas fourni l’indication des règles proportionnelles observées entre eux pour la répartition de leurs dettes, il n’y avait pas d’autre moyen, pour parvenir à la liquidation individuelle, que de faire cette répartition entre tous les officiers de la compagnie, sur le nombre fixé dans les états et rôles du conseil ou autres renseignements qui auraient pu être recouvrés, sauf à se liquider entre eux. Il [!•' février 1791.) [Assemblée nationale.) s’est présenté encore dans le cours de la liquidation une autre difficulté qui ne peut être levée. que par vos décrets. Il y a un grand nombre de titulaires d’cffice qui n’étaient pas propriétaires de la finance de l’oflice dont ils avaient l’exercice. Doit-on appeler les propriétaires ou titulaires d’oftices pour faire la liquidation au nom et au protit des titulaires en exercice? Si vous n’aviez voulu rembourser ou liquider les titulaires� en exercice qu’autaut qu’ils auraient été en même temps propriétaires de leurs finances, il aurait fallu exiger de chaque officier qu’il joignit à ses provisions son contrat, ou autre titre de propriété. Cette règle aurait jeté dans le plus grand embarras le grand nombre d’officiers qui, quoique vrais et uniques propriétaires de la finance de leur office, seraient fort en peine d’en justifier, soit parce que, possédant leurs offices par succession, ils ne connaissaient plus le premier titre qui en a transmis la propriété dans leur famille, soit parce qu’ils les ont acquis eux-mêmes sans contrat, et après une simple procuration ad resi-gnandum. D’ailleurs l’exameu des titres de propriété aurait fait naître une foule de difficultés qui auraient beaucoup retardé la liquidation que vous voulez accéérer. Votre comité a pensé que la règle la plus sûre, la plus favorable aux officiers supprimés, celle qui pourrait contribuer le plus à faciliter la liquidation, c’était de regarder tous les titulaires comme propriétaires et de faire la liquidation à leur nom et à leur profit, sur la seule rémission de leurs provisions et des provisions nécessaires pour connaître la valeur des offices, d’après les règles prescrites par lesdécrets, sauf aux prétendants droit auxdits offices de les conserver par la voie des oppositions. Mais comme il fallait prévoir le cas où le titulaire ne serait pas propriétaire, où, par conséquent, n’ayant qu’un très petit intérêt à se faire liquider, il négligerait d’envoyer ses provisions et les pièces nécessaires, nous avons pensé qu’il fallait alors autoriser les prétendants droit à leurs offices, et même fes créanciers privilégiés sur l'office à poursuivre eux-mêmes la liquidation en faisaot la remise portée par vos décrets, et alors la reconnaissance de liquidation pourra être expédiée aux préten-dapts droit ou créanciers privilégiés sur l’office en rapportant le jugement contre les titulaires. C’est d’après ces règles et d’après des conférences avec les commissaires des comités des finances, de liquidation et d’aliénation que je suis chargé, au nom de celui de judicature, de vous présenter le décret suivant : L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité de judicature, décrète : Art. 1er. Les créanciers pour dettes contractées, en nom collectif, par les compagnies des offices supprimés , et liquidés eu exécution des décrets des 2 et 6 décembre, qui n’auraient pas fait l’envoi prescrit par l’article 2 du titre III du susdit décret, enverront, dans le délai d’un mois ou tel autre qu’il vous plaira citer, à compter de la sanction du présent décret, pour tout delai, au commissaire du roi, directeur général de la liquidation, expéditions de leurs titres de créances, certifiés en la forme prescrite par le susdit décret, ou en celle prescrite par ie décret du 6 octobre dernier. Art, 2. Ceux des créanciers postérieurs à 1771, qui n’auront pas satisfait à l’article ci-dessus, et qui ne seraient pas d’ailleurs compris dans les états envoyés par les compagnies, en conformité 655 de l’article 3 du titre III des décrets des 2 et 6 septembre, seront déchus des droits qui leur auront été accordés par le susdit décret, et la nation sera déchargée du payement desdites dettes, sauf aux créanciers le recours contre les membres qui composaient lesdites compagnies, ainsi qu'il appariiendra. Art. 3. Postérieurement au délai fixé par l’article ci-dessus, il sera loisible à fout titulaire d’office de se faire liquider individuellement sans représenter l’état des dettes actives et passives de sa compagnie, en remplissant d’ailleurs les formes prescrites par le précédent décret, et rapportant une attestation du directoire du district dip lieu de la séance du tribunal auquel lesdits offices étaient attachées, portant que celui au nom duquel on poursuit la liquidation est le dernier titulaire de l’office, et qu’il était en exercice à l’époque de la suppression ; et dans le cas où l’office serait vacant, l’attestation portera la date du jour de la vacance. Art. 4. Lorsqu’il sera procédé aux liquidations d’office individuellement et sans que les compagnies, ni aucun des membres pour elles, aient fait l’envoi prescrit par le décret des 2 et 6 septembre, il sera déduit à chaque titulaire sa portion des dettes passives postérieures à 1771, telles qu’elles se trouveront établies d’après l’envoi fait par le créancier, sans avoir égard aux compensations avec les dettes actives accordées par les susdits décrets. Art. 5. Dans toutes les compagnies qui n’auront pu envoyer l’indication des règles observées entre les officiers pour la répartition des dettes, cette répartition se fera par égales parts entre tous les officiers de la compagnie sur le nombre fixé dans les états et rôles du conseil ou autres renseignements qui auront pu être recouvrés, sauf à se régler entre eux ainsi qu’il appartiendra. Art. 6. Les liquidations d’office seront faites au nom et au profit des derniers titulaires, sauf aux prétendants droit à la propriété des finances des offices à conserver leur droits par Ja voie d’opposition entre les mains des conservateurs des finances et des gardes des rôles réunis. Art. 7. Dans le cas où les titulaires négligeraient de remettre les titres et pièces nécessaires pour procéder à la liquidation de leurs offices, les prétendants droit à la propriété de la finance ou les créanciers privilégiés sur icelle pourront poursuivre la liquidation, en faisant eux-mêmes la remise portée par les décrets. Art. 8. Lorsqu’une liquidation, aura été faite à la poursuite des prétendants droit à la propriété de la finance ou des créanciers privilégiés, la reconnaissance de liquidation ne pourra leur être expédiée que du consentemment du titulaire, ou après qu’ils se seront fait autoriser à recevoir par un jugement rendu en forme exécutoire avec lui. Art. 6. Les conservateurs des finances et gardes des rôles seront tenus d’expédier des certificats lorsqu’ils en seront requis, même quand il y aura des oppositions, en faisant mention du nombre des oppositions et des noms d -s opposants. Art. 10. Le certificat du conservateur des finances et garde des rôles sera remis au bureau de liquidation et joint à la quittance de remboursement pour la vérification définitive; et pour les reconnaissances provisoires, ledit certificat sera joint aux titres et originaux qui resteront à cet effet déposés auxdits bureaux. Art. 11. Il serait fait mention desdits certifi-ARCHIVES PARLEMENTAIRES.