[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 1189.] 725 lier de Maupeou, pour le prier de m’obtenir du Roi des provisions de conseiller en cette cour, qui se qualifiait souveraine, comme dit M. Tliou-ret; M. le chancelier me déclara qu’il n’en ferait rien; il m’objecta la compagnie, et me renvoya à M. de Choiseul. Je lui déclarai, à mon tour, que je m’adresserais toujours au ministre de la magistrature, jamais à d’autres. C’était une fort belle phrase. Mais le fait est que je n’ai pu être conseiller au Parlement qu’en 1775. J’avais promis d’attendre. Enfin, immédiatement après la suspension du privilège, ce furent des adversaires du privilège, des partisans du projet de conversion, qui, pour leur commerce particulier, obtinrent gratuitement du département de la marine, des vaisseaux tout agréés, ce qui leur valut des profits considérables, que l’ignorance ou l’intérêt attribuent à la liberté du commerce. Je l’ai dit dans mon opinion, je l’oubliais dans mon précis ; je ne dois pas négliger cette vérité, bonne à deux fins. En effet, on peut juger tout à la fois par elle, et des motifs de ia suspension, et des profils de la liberté. Je me rappelle une autre circonstance qui sûrement ne paraîtra pas indifférente aux esprits attentifs. Il ôtait convenable que le projet de conversion de la compagnie des Indes en caisse d’escompte, fût lu à la députation des actionnaires, avant d’être porté à l’assemblée générale. On le sentait, mais on différa cette lecture jusqu’à la veille de l’assemblée. Enfin on se détermina : la députation fut rassemblée. Les ministres s’étaient flattés apparemment que la présence du commissaire du Roi n’y serait pas inutile. M. Boutin vint s’asseoir au milieu de nous. L’auteur du projet se mit en devoir de commencer la lecture. Je l’arrêtai. Je demandai à M. Boutin s’il comptait rester. Sur sa réponse affirmative, je lui présentai qu’il n’en avait pas le droit; que son titre lui donnait une place à la direction, non à la députation; et je le suppliai de se retirer. M. Boutin s’y refusa ; ‘la lecture du projet fut tentée de nouveau. Alors j’assurai M. Boutin qu’il me serait impossible d’opiner devant lui, et que j’allais me retirer moi-même en laissant sur le bureau une protestation que j’avais rédigée durant ce colloque. Je la lus. J’ose dire qu’elle était courte, mais énergique. M. Boutin en fut touché, lise rendit à mes raisons et se retira. Livrés à nous-mêmes, la lecture du projet fut reprise. On fut aux voix. Les amis de ce projet se regardèrent. Le compte n’était pas difficile. Nous étions sept. Ils se virent trois contre quatre. Le croira-t-on? Ges messieurs se levèrent et quittèrent la séance, sans en donner aucun motif. Je les laissai sortir, mais je les suivais, et je les joignis dans le vestibule. Il était rempli d’actionnaires et d’officiers de la compagnie. Ce fut alors qu’élevant la voix, j'observai a ces Messieurs que la députation ayant été régulièrement convoquée, ils n’étaient pas en droit de rompre la séance par une retraite sans motif, et je les priai de déclarer qu’ils n’entendaient point, par leur absence, frapper cette séance de nullité. La déclaration me fut faite sans difficulté, par l’un d’entre eux, au nom de tous les trois. Tranquille sur ce point, je rentrai dans la salle delà députation. Nous délibérâmes et nous conclûmes à porter le lendemain à rassemblée générale un projet d’arrêté qui ne laissa, comme je l’ai déjà dit, au projet deconversion que vingt ou vingt-cinq suffrages; encore ces suffrages étaient-ils presque tous d’étrangers. A présent, je laisse au lecteur équitable à décider si la réunion de toutes les circonstances que je viens d’exposer prouve de la bonne foi ou de l’intrigue. Au surplus, les intrigues du ministère ne sont pas toujours celles du ministre. Jesuis fort éloigné d’imputer à feu M. le duc de Praslin les opérations de 1769. Nous savions tous que ce ministre écoutait volontiers M. le duc de Choiseul, qui, trop confiant quelquefois dans sa pénétration personnelle, n’était lui-même que l’instrument d’un petit nombre de personnes très-déliées; ce fui celte confiance de M. le duc de Choiseul dans sa pénétration, qui le porta, quoique averti, à proposer au feu Roi, M. de Maupeou pour chancelier. Je finis par une réflexion, qui malheureusement n’est pas propre à consoler les actionnaires, mais qui peut du moins rassurer les citoyens. Le décret qui déclare le commerce libre au delà du cap de Bonne-Espérance, n’est pas constitutionnel; mais le fût-il, l’Assemblée nationale n’étant ni ne pouvant être une convention, une autre législature éclairée par l’expérience pourra rétablir les vrais principes du commerce de l’Inde. Je le désire. Trop heureuse la nation, si des erreurs sur le commerce étaient les seules qu’elle eût à réparer ! 2e ANNEXE. Projet de V organisation du pouvoir judiciaire, proposé à V Assemblée nationale , par le comité de constitution. TITRE Ie'. Des tribunaux et des juges en général. Art. 1er. La justice sera rendue au nom du Roi : nul citoyen, nul corps ne peut avoir le droit de la faire rendre en son nom. Art, 2. Les juges seront élus par les justiciables, en la forme qui sera ci-après déterminée. Art. 3. Les juges seront institués par le Roi, sur la présentation qui lui sera faite de deux sujets élus pour chaque place vacante. Art. 4. Nulle charge, donnant le pouvoir judiciaire, ne pourra désormais être créée pour être vendue sous aucun prétexte. Art. 5. La justice sera rendue gratuitement, et il sera pourvu à ce que les juges reçoivent des appointements suffisants, en raison de la dignité de leurs places et de l’importance de leurs fonctions. Art. 6. Le pouvoir judiciaire étant subordonné à la puissance législative, les cours de justice ne pourront ni usurper aucune des fonctions du Corps législatif, ni empêcher ou retarder l’exécution de ses décrets sanctionnés par le Roi, à peine de forfaiture. Art. 7. Les cours de justice seront tenues de transcrire purement et simplement dans leurs registres, les lois qui leur seront envoyées, dans les trois jours de leur réception, et de les publier dans la huitaine, à peine de forfaiture. Art. 8. Les cours de justice ne pourront point faire de règlements, elles adresseront leurs représentations au Corps législatif toutes les fois qu’elles croiront nécessaire soit d’interpréter le sens douteux d’une loi, soit d’en rendre une nouvelle. Art. 9. Le pouvoir judiciaire étant distinct et [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 178ÎM devant être séparé du pouvoir d’administrer, les cours de justice ne pourront prendre aucune part aux choses d’administration, ni troubler, de quelque manière que ce soit, les opérations des corps administratifs, ni citer devant elles les administrateurs pour raison de leurs fonctions, à peine de forfaiture. Art. 10. Les juges légitimement élus et institués en vertu des provisions du Roi, seront inamovibles, et ne pourront être destitués de leurs places que dans le cas de forfaiture, et après qu’elle aura été jugée. Art. 11. Les jugements en toute matière et en quelque forme qu’ils soient rendus, soit sur plaidoyer, soit sur le récit et l’avis d’un juge rapporteur, seront rendus publiquement; l’instruction même de la procédure sera publique en matière criminelle. Dans tous les cas, les parties, ou leurs défenseurs, auront le droit d’être entendus, et de faire des observations sommaires sur l’avis du juge rapporteur. Art. 12. Tout citoyen aura le droit de défendre lui-même sa propre cause, soit à l’audience, soit par écrit. Art. 13. Tout privilège en matière de juridiction est aboli : tous les citoyens sans distinction plaideront en la même forme, et devant les mêmes tribunaux, dans les mêmes cas. Art. 14. L’ordre constitutionnel des juridictions ne pourra être troublé, ni les justiciables distraits de leur tribunal naturel par des commissions ou attributions, ni par des évocations arbitraires. Art. 15. Il sera fait une loi pour régler les cas de l’évocation légitime. Art. 16. Les citoyens étant égaux devant la loi, toute préférence, même pour le rang et le tour d’être jugé, est une injustice. Dans tous les tribunaux, le greffier tiendra un registre dont les feuillets seront cotés et signés par le président, dans lequel toutes les parties qui demanderont jugement, se feront inscrire dans l’ordre de leur comparution et réquisition au greffe. Le président formera trois rôles par distinction des procès de rapport, des causes d’audience, et des affaires provisoires et sommaires. Chaque affaire sera placée sur le rôle auquel elle appartiendra par sa nature, mais suivant l’ordre de l’inscription des parties sur le registre du greffe; et cet ordre sera suivi pour le jugement. Art. 17. Le code de la procédure civile sera incessamment réformé, de manière qu’elle soit rendue plus simple, plus expéditive et moins coûteuse. Art. 18. Le code pénal sera incessamment réformé, de manière que les peines soient mieux proportionnées aux délits; observant que les peines soient douces, et ne perdant pas de vue cette maxime, que « toute peine qui n’est pas nécessaire, est une violation des droits de l’homme, et un attentat du législateur contre la société. » TITRE IL De la distribution et gradation des tribunaux. Art 1er. Il y aura dans chaque canton un juge de paix, et des prud’hommes, assesseurs des juges de paix. Aat. 2. Il y aura clans chaque district un tribunal royal, sous le titre de tribunal de district. Art. 3. Il v aura en chaque département un des tribunaux de district, qui portera le nom et fera les fonctions de tribunal de département. Art. 4. Il sera établi dans les villes dont la situation sera jugée la plus convenable, des cours supérieures de justice, qui auront pour ressort le territoire de trois ou quatre départements, suivant la nécessité des lieux. Art. 5. Au-dessus des cours supérieures de justice, il y aura pour tout le royaume une cour suprême de révision. Art. 6. La haute cour nationale, qui jugera les actions de responsabilité intentées contre les ministres, les crimes de lèse-nation, et la forfaiture des cours de justice et des corps administratifs siégera, lorsqu’elle sera convoquée, auprès des législatures. Art. 7. Les matières de police, celles de commerce, et les affaires contentieuses en matière d’administration et d’impôt, seront portées et jugées où et ainsi qu’il sera expliqué ci-après, TITRE III. Des juges de paix. Art. 1er. Le juge de paix ne pourra être choisi que parmi les citoyens éligibles aux administrations de département et de district. Art. 2. Le juge de paix sera élu au scrutin individuel, et à la pluralité absolue des suffrages, par les citoyens actifs du canton, réunis en assemblée primaire. S’il y a plusieurs assemblées primaires dans le canton, le recensement de leurs scrutins particuliers sera fait par des commissaires de chaque assemblée. Art. 3. Une expédition de l’acte de nomination du juge de paix sera envoyée et déposée au greffe du tribunal du district. Art. 4. Le Roi sera supplié d’agréer que l’acte de nomination et celui de dépôt tiennent lieu de provisions au juge de paix. Art. 5. Chaque municipalité du canton nommera quatre notables, destinés à faire les fonctions de prud’hommes auprès du juge de paix. Us seront élus au scrutin de liste double, et la même forme que les membres des administrations de département et de district. Art. 6. Le juge de paix appellera du nombre de tous les prud’hommes du canton, les deux qui se trouveront les plus voisins du lieu où il aura besoin de leur assistance. Art. 7, Le juge de paix et les prud’hommes seront élus pour deux ans; mais ils pourront être confirmés par réélection. Art. 8. Le juge de paix, assisté de deux prud’hommes, connaîtra de toutes les causes personnelles, sans appel jusqu’à la valeur de 50 livres, et à charge d’appel, jusqu’à la valeur de 100 livres; mais en ce dernier cas, ses jugements seront exécutoires par provision, nonobstant l’appel, en donnant caution. Art. 9. Il connaîtra de même sans appel jusqu’à la valeur de 50 livres, et à charge d’appel à quelque valeur que la demande puisse se monter, des actions pour dommages faits, soit par les hommes, soit par les bestiaux, aux champs, fruits ou récoltes; des usurpations de terres, arbres, haies et fossés, commises dans l’année; des réparations locatives des maisons et fermes; des indemnités prétendues par le fermier pour non-jouissances, et des dégradations �alléguées par le propriétaire, pourvu qu’en ces deux derniers cas, le bail n’excède pas 300 livres de loyer; du payement des salaires des gens de tra- [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 1789.] vail, et des gages des domestiques ; et des actions pour injures verbales, rixes et voies de fait légères. Art. 10. Le demandeur, accompagné du greffier de la municipalité, citera sa partie devant le juge de paix, en vertu d’une cédule de ce juge, qui désignera le jour et l’heure de la comparution. La copie de cette cédule, certifiée par le greffier, sera remise à l’ajourné, ou à la personne trouvée à son domicile, ou sera affichée à la porte du domicile, si elle est fermée. Art. 11. Les parties seront entendues devant le juge de paix, sans qu’elles puissent fournir aucunes écritures, ni employer le ministère d’aucun homme de loi ni de pratique. L’instruction sera faite par un procès-verbal sommaire du juge de paix et des prud’hommes, contenant en substance les dires des parties, les dépositions des témoins, s’il y en a eu d’entendus et le résultat de la visite des lieux, s’ils ont été visités. Art. 12. Le juge de paix ne pourra juger qu’avec l’assistance, et en prenant l’avis de deux prud’¬ hommes. Art. 13. Le jugement sera écrit à la suite du procès-verbal d’instruction dont il est parlé dans l’article 11, et il sera fait du tout deux doubles, signés du juge de paix et des deux prud’hommes assesseurs; l’un de ces doubles sera dans un registre dont le dépôt sera fait au greffe du tribunal de district à la fin de chaque année, et l’autre sera remis à la partie qui aura gagné sa cause. Art. 14. L'appel des jugements du juge de paix, lorsqu’ils seront sujets à l’appel, sera porté au tribunal de district, et jugé sommairement sur le simple exploit d’appel, à l’audience. Art. 15. S’il y a une ville dans le canton, cette ville aura un juge de paix et des prud’hommes particuliers, également élus par les citoyens actifs de la ville. Art. 16. Si la ville a plus de 4,000 âmes, il y aura autant déjugés de paix, que de quartiers ou divisions d’assemblées primaires. A l’égard des villes au-dessus de 100,000 âmes, il y sera pourvu particulièrement. Art. 17. Dans toutes les matières qui excéderont la compétence du juge de paix, ce juge et ses prud’hommes formeront un bureau de paix et de conciliation, comme il sera expliqué au titre IX, ci-après. TITRE IV. Des tribunaux de district. Art. 1er. Le tribunal de district sera composé de cinq juges, et d’un procureur du Roi qui fera en même temps le service d’avocat du Roi. Art. 2. en cas d’empêchement momentané du procureur du Roi, ou de vacance de la place, ses fonctions seront remplies par celui des juges qui aura été élu le dernier. Art. 3. Les juges et le procureur du Roi du tribunal de district seront nommés au scrutin par un corps électoral, qui sera composé des membres de l’administration de district, des électeurs du district qui auront concouru à faire la dernière élection des députés à l’Assemblée nationale, des juges du tribunal du district, et des quatre plus anciens hommes de loi, faisant leurs fonctions auprès de ce tribunal. Art. 4. A la prochaine élection, le corps électo-772 ral sera composé des membres de l’administration de district, des électeurs du district qui au-rontnomméles membres de cette administration, et des huit plus anciens hommes de loi faisant leurs fonctions auprès des sièges de justice royale, actuellement établis dans l’étendue du district. Art. 5. Nul ne pourra être élu juge ou procureur du Roi du tribunal de district, s’il n’est âgé de vingt-sept ans accomplis, et s’il n’a exercé les fonctions d’homme de loi pendant trois ans auprès d’une cour supérieure ou pendant cinq ans auprès d’un tribunal inférieur, sans qu’il puisse jamais être accordé aucune dispense de ces deux conditions. Art. 6. Les électeurs ne choisiront que des sujets ayant un revenu qui suffise avec les appointements de leur place, pour qu’ils puissent vivre décemment. Le moindre taux de ce revenu doit être, indépendamment des appointements, de la valeur de 25 setiers de blé à 75 seliers, évalués au taux moyen d’une année sur dix, suivant la fixation qui sera faite entre ces deux termes par les administrations de départements, eu égard au prix des choses nécessaires à la vie en chaque département. Les législatures pourront changer cette fixation tous les vingt-cinq ans. Art. 7. Les membres du tribunal de district, y compris le procureur du Roi, éliront entre les cinq juges du tribunal celui qui présidera. Tous les trois ans il sera procédé à une nouvelle élection lors de laquelle l’ancien président pourra être réélu. Art. 8. Le tribunal de district connaîtra en première instance de toutes les causes personnelles, possessoires et réelles, en toutes matières, même en celles qui étaient ci-devant attribuées aux tribunaux d’exception, hormis seulement celles qui ont été déclarées ci-dessus être de la compétence des juges de paix, les affaires de commerce dans les districts où il y aura des tribunaux de commerce établis, les matières de police, et le contentieux en matière d’administration, ainsi qu’il sera expliqué. Art. 9. Le tribunal de district connaîtra en premier et dernier ressort jusqu’à la valeur de 250 livres et ses jugements seront exécutoires nonobstant l’appel, en donnant caution, jusqu’à la valeur de 500 livres. Art. 10. 11 prononcera de même en dernier ressort sur l’appel des jugements des juges de paix, à quelques sommes que les condamnations puissent se monter, dans les matières qui sont, par leur nature, de la compétence des juges de paix. Art. 11. Dans tous les cas où le tribunal de district prononcera en dernier ressort, le jugement ne pourra être rendu que par trois juges au moins. Art. 12. Après avoir élu les juges du tribunal de district, le corps électoral choisira et désignera quatre homme de loi, du nombre de ceux faisant leurs fonctions auprès de ce tribunal, parmi lesquels le juge prendra, en cas de nécessité, les assesseurs dont il aura besoin par supplément. TITRE V. Des tribunaux de département. Art. 1er. Le tribunal de département sera composé de dix juges, d’un avocat du Roi, et d’un procureur du Roi. "728 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 1789.] Art. 2. Les conditions d’éligibilité aux places dn tribunal de département, sont les mêmes que celles détaillées aux articles 5 et 6 du titre précédent, pour les places du tribunal de district. Art. 3. Les juges, l’avocat du Roi, et le procureur du Roi du tribunal de département seront nommés au scrutin par un corps électoral composé des membres de l’administration du département, des membres de l’administration du district, des électeurs du district qui auront concouru à la dernière élection des députés à l’Assemblée nationale, des juges du tribunal de département, et de dix hommes de loi faisant leurs fonctions auprès de ce tribunal. Art. 4. Pour la prochaine élection, le corps électoral sera composé des membres de l’administration de département, des membres de l’administration de district, des électeurs du district qui auront nommé les membres de cette administration, et de vingt hommes de loi, s’il s’en trouve jusqu’à ce nombre, faisant leurs fonctions auprès du tribunal royal actuellement établi au chef-lieu du département. Art. 5. Les membres du tribunal de département, y compris l’avocat du Roi et le procureur du Roi, éliront entre les dix juges du tribunal celui qui présidera. Il sera procédé tous les trois ans à une nouvelle élection dans laquelle l’ancien président pourra être réélu. Art. 6. Ce tribunal connaîtra, comme tribunal de district, de toutes les causes qui sont de la compétence de pareils tribunaux, en jugeant au même nombre de juges, et dans les mêmes limites soit pour le dernier ressort, soit pour l’exécution provisoire nonobstant l’appel. Art. 7. Il connaîtra en dernier ressort, comme tribunal de département, de l’appel des jugements des autres tribunaux de district, situés dans l’étendue du département, lorsque ces jugements seront sujets à l’appel. Art. 8. Cette compétence du tribunal de département jugeant sur appel et en dernier ressort, s’étendra jusqu’à lajaleur de 3,000 livres. Elle sera réglée provisoirement par les édits subsistants sur le fait de la présidialité, et définitivement par les lois qui seront faites sur cet objet par les législatures. Art. 9. Quant à l’appel des jugements rendus par ces tribunaux, comme tribunaux de district, il sera porté d’un tribunal de département à l’autre, dans le ressort de la même cour, mais sans réciprocité entre eux à cet égard; c’est-à-dire, que le tribunal de département qui connaîtra de l’appel des jugements rendus par le tribunal de département voisin, comme tribunal de district, ressortira, dans le même cas, d’un autre tribunal de département situé dans le ressort de la même cour supérieure. Art. 10. Dans les tribunaux de département, aucun jugement ne pourra être rendu en dernier ressort qu’au nombre de cinq juges au moins. Art. 11. Après avoir élu les juges du tribunal de département, le corps électoral choisira et désignera six hommes de loi du nombre de ceux faisant leurs fonctions auprès de ce tribunal, parmi lesquels le juge prendra, en cas de nécessité, les assesseurs dont il aura besoin par supplément. TITRE VI. Des cours supérieures, Art. lPr. Chaque cour supérieure sera composée de vingt juges, d’un avocat général et d’un procureur général. Art. 2. Nul ne pourra être élu juge, avocat général, ou procureur général dans une cour supérieure, s’il n’est âgé de 30 ans accomplis, et s’il n’a exercé les fonctions de juge pendant cinq ans dans les tribunaux inférieurs ; ou celles d’homme de loi pendant cinq ans auprès d’une cour supérieure, ou pendant sept ans auprès des tribunaux inférieurs. Art. 3. Dans le cas où le ressort d’une cour supérieure serait régi par plusieurs coutumes, il y aura, dans cette cour, jusqu’à l’abolition de la diversité des coutumes, au moins trois juges ayant occupé une place de judicature, ou exercé les fonctions d’homme de loi pendant le temps prescrit dans le ressort de chaque coutume Art. 4. Les juges, l’avocat général, et le procureur général de la cour supérieure, seront nommés au scrutin par un corps électoral, composé des membres des administrations de département, d’un député de chaque administration de district, d’un député de chacun des tribunaux de département et de district du ressort de la cour supérieure, des membres de cette cour, et de vingt députés des hommes de loi, faisant leurs fonctions auprès d’elle. Art. 5. Pour la prochaine élection, le corps électoral sera composé des membres des administrations de département du ressort de la cour, d’un député de chaque administration de district, d’un député des membres déjà institués ou simplement élus pour chacun des' tribunaux de district et de département, et de vingt députés des hommes de loi, faisant leurs fonctions auprès de la cour ou du tribunal royal actuellement existant dans la ville où se fera l’établissement de la cour supérieure. Art. 6. Les membres de chaque cour supérieure, y compris l’avocat général et le procureur général, éliront, entre les vingt juges, deux présidents. 11 sera procédé, tous les trois ans, à une nouvelle élection, lors de laquelle les anciens présidents pourront être réélus. TITRE VII. De la forme des élections aux cours de justice, aux tribunaux de département, et aux tribunaux de district. Art. 1er. Lorsqu’une place deviendra vacante dans une cour supérieure, ou dans un des tribunaux de district, et de département, l’avis en sera donné dans la quinzaine par le président ou par celui qui le remplacera, savoir : Aux directoires de toutes les administrations de département du ressort de la cour supérieure, si la place vaque dans une cour; Aux directoires de département, si la place vaque dans un tribunal de département; Au directoire de district, si la place vaque dans un tribunal de district. Art. 2. L’époque de l’assemblée du corps électoral pour les remplacements à faire dans une cour supérieure, sera celle de la fin des sessions annuelles des administrations de département.jLes membres de ces administrations se réuniront immédiatement après la clôture de leur session, dans la ville où la cour supérieure sera établie. Art 3. Le jour de cette réunion et de l’élec-î ion sera concerté et convenu entre les diffé- [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 1789.] 729 rentes administrations de département par la voie de leurs présidents. Les procureurs généraux syndics le feront notifier, quinze jours d’avance, par affiches dans les villes, bourgs, et municipalités de leurs départements respectifs, et en instruiront par lettres les présidents des tribunaux de département et de district. Le procureur général syndic du département dans lequel la cour supérieure sera établie, en donnera avis, de la même manière, au président de cette cour qui avertira les hommes de loi. Art. 4. L’époque de l’assemblée du corps électoral pour les remplacements à faire dans un tribunal de département, sera de même celle de la fin de la session annuelle de l’administration de département. Les membres de l’administration de district et les électeurs du district se réuniront aux membres de l’administration de département, immédiatement après la clôture de la session de ces derniers, dans la ville où le tribunal de département sera établi. Art. 5. Le procureur général syndic fera notifier quinze jours d’avance, par affiches dans les villes, bourgs et municipalités du département, le jour qui aura été fixé par l’administration de département pour procéder à l’élection. Il en instruira par lettre le directoire du district, qui convoquera les autres membres de l’administration et les électeurs du district. 11 en donnera avis de même au président du tribunal de département, et celui-ci aux hommes de loi faisant leurs fonctions auprès de ce tribunal. Art. 6. Quand il vaquera une place dans un tribunal de district, l’élection sera laite dans les deux mois de l’avertissement que le président du tribunal aura donné de la vacance arrivée. Art. 7. Le directoire de district fixera le jour de l’élection ; le procureur syndic le fera notifier quinze jours d’avance par affiches dans les villes, bourgs et municipalités du district. Il en instruira par lettre le président du tribunal, qui avertira les hommes de loi; et le directoire convoquera tous les membres de l’administration et les électeurs du district. Art. 8. Si la vacance d’une place arrive, soit dans une cour supérieure, soit, dans un tribunal de département, pendant la session des administrations de département, de manière qu’il n’y ait plus lieu au délai de quinze jours pour la notification par affiches, il n’en sera pas moins procédé à l’élection, aussitôt que la session des administrations sera finie, pourvu que les avis nécessaires à la réunion des électeurs puissent être donnés. Art. 9. L’élection des juges et des gens du Roi, sera toujours faite au scrutin individuel, et à la pluralité absolue des suffrages. Art. 10. Les hommes de loi qui seront choisis et désignés pour assesseurs par supplément dans les tribunaux de département et de district, pourront être élus au scrutin de liste double, et à la pluralité relative des suffrages. Art. 11. Les corps électoraux éliront toujours, pour chaque place à remplir, deux sujets qui seront présentés au Roi, entre lesquels le Roi choisira celui qu’il voudra agréer et instituer. Art. 12. Les juges de chaque tribunal et cour supérieure de justice éliront et présenteront de même au Roi deux sujets pour chaque place de président; et le Roi fera expédier gratuitement, à celui des deux qu’il voudra bien agréer, un brevet de nomination à la place de président. TITRE VIII. De l'installation des juges des cours supérieures , et des tribunaux de département et de district. Art. Ier. Lorsque le Roi aura donné son institution aux juges qu’il aura choisis dans le nombre des sujets élus pour composer les cours supérieures, ces juges seront installés dans leurs fonctions en la forme suivante. Art. 2. Les membres du directoire de département, et ceux du corps municipal de la ville où la cour supérieure sera établie, se rendront au palais, à la grande salle d’audience, et occuperont le haut banc, les membres du directoire étant à la droite, et ceux du corps municipal à la gauche. Art. 3. Les juges introduits dans l’intérieur du parquet, prêteront à la nation et au Roi, devant les membres du directoire et du corps municipal, et en présence de la commune assistante, le serment de « maintenir de tout leur pouvoir la constitution du royaume, d’être fidèles à la nation, à la loi et au Roi. et de remplir avec exactitude et impartialité les fonctions de leurs offices. Art. 4. Après ce serment prêté, les membres du directoire et du corps municipal descendant dans le parquet, feront prendre aux juges séance sur le haut banc, et au nom de la commune prononceront pour elle l’engagement de « porter à la cour et à ses arrêts le respect et l’obéissance que tout citoyen doit à la loi et à ses organes. » Art. 5. La même forme sera observée pour l’installation des juges des tribunaux de département et de district, à la seule différence pour les tribunaux de district, que les membres du directoire de district y assisteront au lieu de ceux du directoire de département, Art. 6. A l’avenir, chaque juge élu et institué en remplacement de ceux qui manqueront, prêtera, avant son installation, le serment énoncé ci-dessus en l’article 3, en présence du directoire et du corps municipal dans la salie d’audience; après quoi, le directoire et le corps municipal retirés, it sera installé par le tribunal qui viendra prendre sa séance ordinaire. TITRE IX. Des bureaux de paix, et des tribunaux de famille. Art. 1er. Aucune action ne sera reçue au civil dans le tribunal de district, entre parties qui seront domiciliées dans le ressort d’un juge de paix, soit à la ville, soit à la campagne, si le demandeur n’a pas donné, en tête de son exploit, copie du certificat du bureau de paix composé du juge de paix et de ses prud’hommes, constatant que la partie adverse a été .inutilement appelée au bureau de paix, ou que ce bureau a employé sans fruit sa médiation. Dans le cas où les deux parties comparaîtront devant le bureau, il dressera un procès-verbal sommaire de leurs dires, aveux ou dénégations sur les points de fait. Art. 2. En chaque ville où il y aura uu tribunal de district, le corps municipal formera un bureau de paix composé de six membres choisis [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 1789.] 730 parmi les citoyens recommandables par leur patriotisme et par leur probité, dont trois au moins seront nommes de loi. Art. 3. Les membres du bureau de paix seront nommés par les officiers municipaux, pour un an, et pourront être continués par une nouvelle nomination. Art. 4. Aucune action ne sera reçue au civil dans le tribunal de district, entre parties domiciliées dans les ressorts de différents juges de paix, si le demandeur n’a pas donné, en tète de son exploit, copie du certificat du bureau de paix du district, ainsi qu’il est dit en l'article premier ci-dessus ; et si les parties comparaissent devant le bureau, il dressera de même le procès-verbal sommaire de leurs dires, aveux ou dénégations sur les points de fait. Art. 5. Si une partie qui aura perdu sa cause devant le tribunal de district, appelle de la sentence, soit au tribunal de département, soit à la cour supérieure; elle sera jugée non-recevable dans son appel, si elle n’a pas signifié copie du certificat du bureau de paix du district, constatant que la partie adverse a été inutilement appelée à ce bureau pour être conciliée sur l’appel, ou que le bureau a employé sans fruit sa médiation. Art. 6. Le bureau de paix du district sera en même temps bureau de jurisprudence charitable, chargé d’examiner les affaires des pauvres qui s’y présenteront, de leur donner des conseils, et de plaider ou faire plaider leurs causes. Art. 7. Il sera établi par les soins des corps municipaux de pareils bureaux de jurisprudence charitable , auprès des tribunaux de département et des cours supérieures. Art. 8. Le’service qui sera fait par les hommes de loi dans les bureaux de paix et dans les bureaux de jurisprudence charitable, leur vaudra l’exercice public des fonctions de leur état auprès des tribunaux et des cours supérieures ; le temps en sera compté pour l’éligibilité aux places de judicature; et il sera même compté double en faveur de ceux qui, ayant été assidus au bureau, auront en outre plaidé pendant deux ans les causes des pauvres. Art. 9. Tout appelant dont l’appel sera jugé mal fondé, sera condamné en une amende qui ne pourra, sous aucun prétexte, être remise ni modérée. Cette amende sera de 9 livres pour les appels des jugements des juges de paix aux tribunaux de district, de 30 livres pour les appels des jugements des tribunaux de district aux tribunaux de département, et de 60 livres pour les appels portés aux cours supérieures. La même amende aura lieu contre les intimés qui auront refusé de paraître devant le bureau de paix, lorsque le jugement sera réformé; et elle sera double contre ceux qui, ayant appelé sans s’être présentés au bureau de paix et en avoir obtenu le certificat, seront, par cette raison, jugés non-recevables. Art. 10. Le produit de ces amendes, versé dans la caisse de l’administration de département, sera employé au service des bureaux de jurisprudence charitable, et spécialement à dédommager, en cas de besoin, les hommes de loi qui s’emploieront à la défense des causes des pauvres, suivant la taxe qui leur sera faite modérément par le juge sur chaque affaire. Art. 11. Aucune femme ne pourra se pourvoir en justice contre son mari, aucun mari contre sa femme, aucun frère contre son frère, aucun neveu contre son oncle, aucun fils ou petit-fîls contre son père ou son aïeul, aucun pupille con“ tre son tuteur, pendant trois ans depuis la tutelle finie et réciproquement, qu’après avoir nommé des parents pour arbitres, devant lesquels ils éclairciront leur différend, et qui, après les avoir entendus, et avoir pris les connaissances nécessaires, rendront une décision motivée. Art. 12. Si un père, ou une mère, ou un tuteur, a des sujets de mécontentement et d’alarmes très-graves sur la conduite d’un enfant ou d’un pupille dont il ne puisse plus réprimer les écarts, il pourra en porter sa plainte au tribunal domestique de la famille, assemblée au nombre de huit parents les plus proches, ou de six au moins, s’il n’est pas possible d’en réunir un plus grand nombre. Art. 13. Le tribunal de famille, après avoir vérifié les sujets de plainte, pourra arrêter que le jeune homme, s’il n’est âgé que de quinze ans jusqu’à vingt, sera renfermé pendant un temps qui ne pourra excéder celui d’une année dans les cas les plus graves. Art. 14. L’arrêté de la famille ne pourra être exécuté qu’après avoir été présenté au président du tribunal de département, qui en ordonnera, ou refusera l’exécution, ou en tempérera les dispositions, sur les conclusions du procureur du Roi chargé de vérifier les motifs qui auront déterminé la famille. TITRE X. De la coût' suprême de révision. Art. Ier. La cour suprême de révision sera composée de trente-six juges, dont trois seront présidents. Art. 2. Le corps électoral formé par chaque cour supérieure du royaume, indiquera au Roi tous les deux ans, le nom du sujet qui lui paraîtra, parmi les juges de cette cour, et parmi les hommes de loi qui y exerceront leurs fonctions, mériter le mieux de devenir membre de la cour suprême de révision. Art. 3. Le corps électoral procédera au choix et à la désignation de ce sujet par la voie du scrutin, et à la majorité absolue des suffrages. Art. 4. Il faudra, pour être éligible, avoir exercé les fonctions de juge à la cour supérieure au moins pendant trois ans, ou celle d’homme de loi auprès de cette cour au moins pendant dix années, avec distinction. Art. 5. La liste de tous les sujets qui seront indiqués et présentés au Roi par les corps électoraux de toutes les cours supérieures du royaume, sera imprimée et publiée tous les ans. Art. 6. Le Roi choisira, dans le nombre des sujets désignés par les corps électoraux et inscrits sur la liste, les membres qui remplaceront dans la cour suprême de révision ceux qui viendront à manquer. Art. 7. Pour la première formation de la cour suprême de révision, l’Assemblée nationale élira parmi les membres actuels du conseil 'des parties, les juges des cours, et les hommes de loi qui ont exercé leurs fonctions auprès des cours, soixante-douze sujets qu’elle présentera au Roi, et sur lesquels Sa Majesté en nommera et instituera trente-six pour composer la cour suprême de révision. Art. 8. Les trente-six juges éliront au scrutin individuel et à la majorité des suffrages, six [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [22 décembre 1789.] 731 d’entre eux parmi lesquels le Roi choisira et nommera les trois présidents. 11 sera procédé tous les trois ans à une nouvelle élection, lors de laquelle les présiden ts anciens pourront être continués. Art. 9. La cour suprême de révision connaîtra: Des demandes en cassation des arrêts des cours supérieures, et des jugements en dernier ressort rendus par les tribunaux de département et de district ; Des révisions en matière criminelle, tant que l’ordre actuel de procéder en cette matière subsistera ; Des règlements de compétence entre les cours supérieures et les tribunaux de département, dans les cas où ils jugent en dernier ressort ; Des demandes tendantes à renvoi d’une cour à une autre, pour cause de suspicion légitime ; Des prises à partie contre une cour supérieure, ou contre un tribunal de département ayant jugé en dernier ressort, ou contre les gens du Roi, ou même personnellement contre un des juges ou des gens du Roi d’une cour supérieure, ou d’un tribunal de département ayant jugé en dernier ressort. La cour de révision fera encore le rapport au Roi des demandes de lettres de grâce. Suite clu projet de l'organisation du pouvoir judiciaire, présenté à l'Assemblée nationale par le comité de constitution. TITRE XI. De la haute cour nationale. Art. 1er. La haute cour nationale sera formée par un grand juré composé d’autant de membres qu’il y a de départements dans le royaume, et présidé par cinq grands juges qui dirigeront l’instruction, et qui appliqueront la loi après la décision du. juré sur le fait. Art. 2. Lors des élections pour le renouvellement d’une législature, les électeurs de chaque département, après avoir nommé les représentants au Corps législatif, éliront au scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages, un citoyen recommandable qui sera membre du grand juré pendant tout le cours de cette législature. Art. 3. Chaque nouvelle législature, après avoir vérifié les pouvoirs de ses membres, dressera la liste des jurés élus par les quatre-vingt-trois départements du royaume, et la fera publier. Art. 4. Chaque législature sortant de fonctions, désignera, dans les derniers jours de sa session, quinze personnes qu’elle aura choisies au scrutin individuel dans le nombre des sujets présentés au Roi pour la cour suprême de révision, et inscrits sur la liste dont il est parlé dans le litre précédent. Art. 5. Si la législature suivante trouve matière à une accusation devant la haute cour nationale, elle fera convoquer le grand juré, et on tirera au sort publiquement dans la salle où la législature sera séante, en présence de trois commissaires du Roi que Sa Majesté sera invitée d’y envoyer, les noms des cinq grands juges (du nombre des quinze sujets désignés par la précédente législature), qui présideront le grand juré. Art. 6. Il n’y aura point de procureur général du Roi à la haute cour nationale, mais aucune affaire n’y sera portée qu’après que le Corps législatif aura décidé qu’elle est de nature à y être poursuivie : en ce cas, le Corps législatif nommera quatre de ses membres pour en faire la poursuite, sous le titre de grands procurateurs de la Nation : et si le Corps législatif ne trouvait pas l’affaire assez grave pour être portée en la haute cour nationale, il en renverrait la connaissance aux tribunaux ordinaires. Art. 7. La haute cour nationale connaîtra *. 1° Des conspirations et attentats contre la personne du Roi ; 2° Des conspirations et attentats contre la sûreté du royaume ; 3° Des conspirations et attentats pour soulever le peuple, ou une partie du peuple, ou les milices nationales contre la constitution, contre l’exercice des pouvoirs publics qu’elle a établis, et contre la soumission due aux actes émanés de leur autorité; 4° Des conspirations et attentats pour détourner les troupes réglées de la fidélité qu’elles doivent à la nation, a la loi, au Roi et à leur engagement, en conformité du serment qu’elles ont prêté ; 5° Des conspirations et attentats des ministres, des autres agents du pouvoir exécutif, et de toutes personnes de quelque qualité qu’elles soient, contre la constitution, notamment des complots et entreprises pour empêcher ou gêner la formation des assemblées représentatives, ou la liberté des suffrages individuels, soit par corruption, dons et promesses, soit par menaces, violences et emploi de la force militaire ; 6° De la prévarication des ministres et des autres agents du pouvoir exécutif dans l’exercice des fonctions de leur département, aux trois cas d’attentat à la liberté personnelle, de violation de la propriété, et de dissipation des fonds publics qui leur auront été confiés; 7° De la désobéissance des assemblées administratives ou des municipalités, ou des corps de milices nationales aux décrets du Corps législatif sanctionnés par le Roi, et aux ordres de Sa Majesté relatifs, soit à l’administration générale, soit à la direction de la force publique; 8° De la désobéissance des commandants, officiers et corps de milices nationales, aux réquisitions des municipalités et aux ordres des corps administratifs, conformes aux décrets des législatures sanctionnés par le Roi; 9° De la désobéissance des tribunaux et cours supérieures de justice aux règles constitutionnelles sur le pouvoir judiciaire, soit par cessation combinée de service, soit par refus de transcription pure et simple et d’exécution des lois qui leur seront adressées, soit par entreprises sur les fonctions de la puissance législative, ou sur celles du pouvoir administratif. TITRE XII. Des juges et de la forme de juger en matière criminelle. Art. Ier. La forme de la procédure par jurés, en matière criminelle, est un des points fondamentaux de la constitution française. Art. 2. il sera incessamment rédigé un nouveau code de procédure criminelle, pour rendre la forme du jugement par jurés praticable dans l’organisation judiciaire du royaume, au plus tard 732 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (22 décembre 1789.] en l’année 1792, et on ne s’écartera pas dans la rédaction de ce code des règles suivantes. Art. 3. Les jurés seront élus tous les deux ans, parmi les citoyens de bonnes mœurs et de probité reconnues, par les électeurs qui nommeront les représentants au Corps législatif. Art. 4. Aussitôt après l’élection des jurés, le tableau de leurs noms sera dressé, et ce tableau contiendra un nombre de noms triple au moins du nombre des jurés qui sera nécessaire pour porter une décision. Art. 5. Les jurés ne pourront prononcer qu’au nombre de douze au moins. Art. 6. Trois jours avant de commencer la procédure en présence des jurés, le tableau général de leurs noms sera présenté à l’accusé. Art. 7. L’accusé, et tous les accusés ensemble, s’il y en a plusieurs, pourront récuser, sans être tenus d’en dire le motif, autant de jurés qu’il leur plaira, pourvu qu’il en reste douze. Le nouveau code réglera la manière dont ces récusations seront exercées. Art. 8. L’accusé aura le droit de prendre tel nombre de conseils qu’il jugera convenable ; et le juge sera tenu, si l’accusé le requiert, de lui en nommer au moins un d’office. Art. 9. Le conseil de l’accusé aura le droit d’être présent à tous les actes de la procédure, et de parler le dernier en faveur de l’accusé immédiatement avant le jugement. Art. 10. L’instruction et le rapport du procès seront faits publiquement. Art. 11. L’accusé ne sera déclaré coupable, que par la sentence des jurés ; et le juge ne pourra appliquer la loi, ni prononcer la peine qu’après que les jurés auront déclaré l’accusé coupable, aux cinq sixièmes des voix. TITRE XIII. Des juges en matière de police. Art. 1er. Les corps municipaux veilleront et tiendront la main, dans l’étendue de chaque municipalité, à l’exécution des loisetdes règlements de police, et connaîtront du contentieux auquel cette exécution pourra donner lieu. Art. 2. Le procureur de la commune poursuivra d’office les contraventions aux lois et aux règlements de police, et cependant chaque citoyen qui en ressentira un tort ou un danger personnel, pourra intenter l’action en son nom. Art. 3. Il n’y aura point d’appel des jugements des corps municipaux en matière de police, si l’objet ou le montant de la condamnation n’excède pas la valeur de 50 livres : au-dessus de cette somme, l’appel en sera permis, et il sera porté au tribunal royal de district, qui le jugera en dernier ressort, à quelque somme ou valeur que la condamnation puisse se monter. Art. 4. Les objets de oolice, confiés à la vigilance et à l’autorité des corps municipaux sont : 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, places et voies publiques ; ce qui comprend le nettoiement, l’illumination, l’enlèvement des encombrements, la démolition ou le redressement des bâtiments menaçant ruine, les défenses de rien exposer aux fenêtres ou autre partie des bâtiments qui puisse nuire par sa chute, et celle de rien jeter qui puisse blesser ou endommager les passants, ou causer des exhalaisons nuisibles. 2° Le soin de réprimer et de punir les délits contre la tranquillité publique, tels que les rixes et disputes accompagnées d’ameutement dans les rues, le tumulte excité dans les lieux d’assemblées publiques, les bruits et attroupements nocturnes qui troublent le repos et la sécurité des citoyens. 3° Le maintien du bon ordre dans les endroits où il se fait de grands rassemblements d’hommes, tels que les foires, marchés, réjouissances et cérémonies publiques, églises, spectacles, jeux, cafés et autres lieux publics. 4° L’inspection sur la fidélité du débit des denrées de première nécessité, qui se vendent au poids, à l’aune ou à la mesure, et sur la salubrité des comestibles exposés en vente publique. 5° Le soin de prévenir par des précautions convenables, et celui de faire cesser par la distribution des secours nécessaires, les accidents et fléaux calamiteux, tels que les incendies, les épidémies, les épizooties, en provoquant dans ces deux derniers cas l’autorité des administrations du département et du district. 6° Le soin d’obvier ou de remédier aux événements fâcheux qui pourraient être occasionnés par les insensés ou les furieux laissés en liberté, et par la divagation des animaux malfaisants ou féroces . Art. 5. Tous les spectacles publics ne pourront être permis et autorisés que par le pouvoir municipal; en conséquence, les privilèges exclusifs accordés par les gouverneurs des provinces, même ceux qui auraient été confirmés par des arrêts du conseil, sont et demeureront supprimés. Les entrepreneurs et directeurs de spectacles se pourvoiront devant les officiers municipaux, qui ne pourront exiger d’eux d’autre redevance que celle des pauvres. Art. 6. Les bateleurs ne pourront s’établir dans les villes, bourgs ou villages, et les empiriques ne pourront vendre leurs drogues ou remèdes, qu’avec la permission des officiers municipaux; et elle ne pourra être accordée aux empiriques, qu’après que le juge royal du district aura vérifié qu’ils sont autorisés à débiter leurs drogues ou remèdes. Art. 7. Les contraventions au fait de la police, ne pourront être punies que de l’une ae ces deux peines, ou de la condamnation à une amende pécuniaire, ou de l’emprisonnement par forme de correction pour un temps qui ne pourra excéder un mois dans les cas les plus graves. Art. 8. Les officiers municipaux sont spécialement chargés de dissiper les attroupements et émeutes populaires, conformément aux dispositions de la loi marliale, et responsables de leur négligence dans cette partie de leur service. TITRE XIV. Des juges en matière de commerce. Art. 1er. Il sera établi un tribunal de commerce dans toutes les villes où l’administration de département, jugeant cet établissement nécessaire, en formera la demande.’ Art. 2. Ce tribunal connaîtra de toutes les affaires de commerce faut de terre que de mer, sans distinction, et des lettres et billets de change seulement lorsque des banquiers, négociants ou marchands eu devront la valeur, ou seront poursuivis comme endosseurs. Art. 3. H connaîtra de toutes les suites civiles [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 1189.] des faillites, telles qu’apposition de scellés, inventaires des meubles, marchandises et papiers des faillis ; vente de ces meubles et marchandises; ordre et distribution, tant des deniers en provenant que des fruits et revenus amobiliés des immeubles; oppositions, revendications, contributions; et généralement de toutes contestations qui pourraient s’élever de la part de quelques créanciers refusant d’accéder soit à l’acte d’atermoiement, soit au contrat d’union, et aux autres délibérations des créanciers. Art. 4. Le tribunal de commerce connaîtra au civil de l’exécution de ses jugements sur les effets mobiliers de la partie condamnée; des contestations au sujet des saisies et arrêts de deniers faits en vertu de ses sentences, tant entre le saisissant et la partie saisie, qu’entre le saisissant, les opposants à la saisie, et le tiers saisi, lorsque celui-ci sera débiteur pour faits de commerce ; des saisies et ventes mobilières, des oppositions qui pourront y être faites, et de la distribution des deniers en provenant, après toutefois que les titres des opposants pour créance étrangère aux faits de commerce auront été vérifiés et liquidés par le juge ordinaire de la liquidation des dommages et intérêts, ainsi que des dépens adjugés par ses sentences, et des frais et mises d’exécution d’icelles. Art. 5. Ce tribunal aura aussi la police de son auditoire, et pourra condamner ceux qui manqueront au respect dû à ses audiences, à une amende ou à l’emprisonnement , et ordonner l’impression et i’aftiche de sa sentence. Art. 6. Les juges du tribunal de commerce ne pourront rendre aucun jugement, s’ils ne sont au nombre de trois au moins. Art. 7. Ce tribunal prononcera en dernier ressort sur toutes les demandes dont l’objet n’excédera pas la valeur de 1,000 livres; et toutes ses sentences seront exécutoires par provision, nonobstant l’appel, en donnant caution, à quelque somme ou valeur que les condamnations puissent se monter. Toute ordonnance ou arrêt de défense tendant à arrêter cette exécution provisoire sera nul et demeurera sans effet. Art. 8. La contrainte par corps continuera d’avoir lieu pour l’exécution de tous les jugements du tribunal de commerce : s’il survient des contestations sur la validité des emprisonnements, elles seront portées devant lui; et les jugements qu’il rendra sur cet objet seront de même exécutés par provision, nonobstant l’appel. Art. 9. Lorsqu’un tribunal de commerce sera établi dans une des villes d’un district, il connaîtra des affaires de commerce dans toute l’étendue du ressort du district. Art. 10. Chaque tribunal de commerce sera composé de cinq juges, y compris le président; et celui des juges qui aura été élu le dernier, remplira en cas de nécessité les fonctions de ministère public. Art. 11. Les juges du tribunal de commerce seront élus dans l’assemblée des négociants, marchands, manufacturiers, armateurs et [capitaines de navire de la ville où le tribunal sera établi. Art. 12. Cette assemblée sera convoquée huit jours en avant, la première fois par les juges consuls, actuellement en exercice dans les lieux où il y en a d’établis, et par les officiers munici-cipaux dans ceux où il se fera un établissement nouveau : ia convocation sera faite par affiches aux lieux publics, et par billets envoyés aux syndics et aux autres chefs des corporations commerçantes. 733 Art. 13. Nul ne pourra être élu juge d’un tribunal de commerce s’il n’a résidé et fait le commerce au moins depuis trois ans dans la ville où le tribunal sera établi, et s’il n’a 30 ans accomplis. Il faudra être âgé de 35 ans, et avoir fait le commerce depuis dix ans, pour être élu président. Art. 14. L’élection sera faite au scrutin individuel, et à la pluralité absolue des suffrages ; et lorsqu’il s’agira d’élire le président, l’objet spécial de cette élection sera annoncé avant d’aller au scrutin. Art. 15. Les juges du tribunal de commerce seront trois ans en exercice. Le président sera renouvelé par une élection particulière tous les trois ans; et les quatre autres juges le seront tous les dix-huit mois par moitié. La première fois les deux juges qui auront eu le moins de voix sortiront de fonctions à l’expiration des dix-huit premiers mois; les autres sortiront ensuite à tour d’ancienneté. Art. 16. Dans les districts où il n’y aura aucun tribunal de commerce, le tribunal royal de district connaîtra de toutes les matières de commerce; elles y seront instruites et jugées dans la même forme que dans le tribunal de commerce. Le tribunal de district prononcera sans appel sur ces matières jusqu’à la somme de 1,000 livres; ses jugements seront exécutoires provisoirement nonobstant l’appel, lorsque la condamnation excédera 1,000 livres, et dans tous les cas ils emporteront une contrainte par corps. TITRE XV. Des juges en matière d’administration et d’impôt. Art. 1er. Il sera établi en chaque département un tribunal sous le titre de tribunal d'administration, composé de cinq juges, qui connaîtra du contentieux en matière d’impôt et d’administration, ainsi qu’il va être dit dans les articles suivants. Art. 2. Les juges de ce tribunal seront élus au scrutin individuel et à la pluralité des suffrages, par les mêmes électeurs qui nommeront les membres de l’administration de département. Il sera toujours élu pour chaque place deux sujets qui seront présentés au Roi, et dont un sera institué par Sa Majesté. Art. 3. En matière de contribution directe, les contribuables qui croiront être fondés à se plaindre du taux de leur cotisation, se pourvoiront d’abord par voie d’administration au directoire du district, qui tâchera de concilier l’affaire après avoir pris l’avis de la municipalité qui aura fait la répartition. Si l’affaire ne peut pas être conciliée, elle sera portée au tribunal d’administration qui décidéra en dernier ressort, sur simples mémoires, sans forme de procédure et sans frais, après avoir vu l’avis motivé du directoire de district. Art. 4. Tant que les impôts indirects subsisteront, les actions pour fraudes commises à la perception de ces droits seront portées en première instance au tribunal d’administration, et par appel à la cour supérieure de justice. Il sera formé en chaque cour un bureau de cinq juges qui décidera ces appels, également sur simples mémoires, sans forme de procédure et sans frais. Art. 5. Les actions relatives à la perception des droits de traites sont seules exceptées de la dis- 734 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 1789.] position de l’article précédent; ces actions continueront d’être portées aux tribunaux qui en connaissent; mais il ne sera conservé de ces tribunaux, que ceux qui seront nécessaires, et aux lieux seulement où les barrières seront établies. Art. 6. Les entrepreneurs des travaux publics seront tenus de se pourvoir sur les difficultés qui pourraient s’élever en interprétation ou dans l’exécution des clauses de leurs marchés, d’abord par voie de conciliation devant le directoire du département ; et, dans le cas où l’affaire ne pourrait pas être conciliée, elle sera portée au tribunal d’administration. Art. 7. Les contestations entre les corps administratifs et les particuliers, sur le règlement des indemnités dues à raison des terrains pris ou fouillés pour la confection des chemins, canaux, ou autres ouvrages publics, seront portées de même par voie de conciliation devant le directoire du département, et ensuite au tribunal d’administration, si la conciliation n’a pas eu de succès. Art. 8. Les particuliers qui se plaindront de torts et dommages procédant du fait personnel des entrepreneurs des travaux publics, et non du fait de l’administration, se pourvoiront contre les entrepreneurs, d’abord devant la municipalité du lieu où les dommages auront été commis ; et ensuite devant le tribunal d’administration, lorsque la municipalité n’aura pas pu concilier l’affaire. Art. 9. Aux cas des trois articles 6, 7 et 8 ci-dessus, le tribunal d’administration prononcera en dernier ressort, mais toujours sur simples mémoires et sans frais, après avoir pris l’avis motivé du directoire de département ou de la municipalité, suivant qu’il est précédemment expliqué. Art. 10. L’administration, en matière de voirie, appartiendra aux corps administratifs ; et la police de conservation, au tribunal d’administration pour les grandes routes, et au tribunal royal de district pour les chemins vicinaux. Art. 11. En matière d’eaux et forêts, la conservation et l’administration appartiendront aux corps administratifs ; les ventes et adjudications des bois seront faites devant eux; et les actions pour la punition et réparation des délits seront portées au tribunal royal de district, qui aura aussi l’exécution des règlements concernant les bois des particuliers et la police de la pêche. Art. 12. Tout le contentieux relatif aux transactions du commerce maritime, dont les amirautés connaissent actuellement, appartiendra aux tribunaux de commerce ; et il sera pourvu à ce que la police de la navigation et des ports soit utilement administrée. Art. 13. La compétence attribuée aux juridictions des monnaies, et par appel à la cour des monnaies, soit pour la police des communautés qui travaillent les matières d’or et d’argent, soit pour les contestations entre les particuliers et les orfèvres, relatives au commerce de l’orfèvrerie, appartiendra aux tribunaux de district, et par appel aux cours supérieures : cependant, les officiers des juridictions des monnaies continueront de surveiller la fabrication des espèces dans les hôtels des monnaies, ainsi qu’ils ont fait par le passé ; et il sera pourvu par une commission de sept officiers nommés par le Roi, au jugement définitif des directeurs des monnaies. TITRE XVI. De la suppression des offices et tribunaux incompatibles avec la présente constitution judiciaire. Art. 1er. Au moyen des dispositions contenues aux articles 3, 4, 10, 11, 12 et 13 du titre précédent, les élections, greniers à sels, cours des aides, bureaux des finances, grueries, maîtrises des eaux et forêts, amirautés, juridictions contentieuses des monnaies, et la cour des monnaies demeureront supprimées ; et les juges qui composent ces tribunaux, cesseront leurs fonctions aussitôt que les corps administratifs, les tribunaux de district, et ceux d’administration seront formés. Art. 2. Au moyen de l’abolition du régime féodal, les cours des comptes demeureront supprimées, et les juges qui les composent cesseront leurs fonctions dès qu’il aura été pourvu à un nouveau régime de comptabilité. Art. 3. Au moyen de la disposition contenue en l’article 13 du titre Ier ci-dessus, les committimus au grand et au petit sceau, les lettres de garde gardienne, les privilèges de cléricature, de scolarité, du scel des châtelets de Paris, Orléans et Montpellier, des bourgeois de la ville de Paris et de toute autre ville du royaume, et en général, tous les privilèges et attributions en matière de juridiction ; ensemble tous les tribunaux de privilège ou d’attribution, tels que les requêtes du palais, les conservations des privilèges des universités, les officialités, le grand conseil, la prévôté de l’hôtel, la juridiction prévôtale, les sièges de la connétablie, le tribunal des maréchaux de France, et généralement tous les tribunaux extraordinaires, excepté les juridictions des traites, sont supprimés et abolis. Art. 4. Au moyen de la nouvelle institution et organisation des tribunaux pour le service de la juridiction ordinaire, tous ceux actuellement existants sous les titres de vigueries, châtellenies, prévôtés, vicomtés, sénéchaussées, bailliages, châtelets, présidiaux, conseils supérieurs et parlements, demeureront supprimés; et les juges qui les composent cesseront leurs fonctions aussitôt que les nouveaux tribunaux entreront en activité. Art. 5. Les juges et les gens du Roi des cours, sièges et tribunaux qui doivent être supprimés, sont autorisés à remettre dès à présent au contrôleur général des finances, qui en rendra compte au comité des finances et à celui de judicature, leurs quittances de finances et autres actes de propriété, pour être procédé à la liquidation de leur indemnité relativement au prix porté au dernier contrat d’acquisition de chaque office. Art. 6. Le comité des finances fera incessamment le rapport des moyens par lesquels il sera pourvu à cette indemnité, soit par le remboursement des capitaux, soit par le payement de l’intérêt à 5 0/0 de ce qui ne pourrait pas être actuellement remboursé, et des époques auxquelles il pourra être satisfait au remboursement.