390 [AMftfflblée national*.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {9 novembre 1790.] Manduel, Bouillargues, Redessan, Caissargues, Rodilhan, Garons. DEUXIÈME DÉCRET. « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité de Constitution sur la pétition du directoire du défiartement du Doubs et du conseil du district de Besançon; « Décrète que l’arrêté du département du Doubs, du 19 octobre dernier, sur la rectification de la nouvelle composition des cantons du district de Besançon, sera exécuté tant pour la fixation de leurs chefs-lieux, que de leurs limites respectives. » M. le Président met aux voix ces deux décrets. Ils sont adoptés sans discussion. M. Camus, au nom du comité des pensions , rend compte des difficultés qui se sont élevées par rapport â l’expédition des provisions deM. Fleu-rieu, nouveau ministre de la marine, à cause d’un brevet de retenue de 400,000 livres, accordé à M. de La Luzerne, son prédécesseur. Après avoir exposé les diverses questions que cette affaire présente, leur difficulté et leur connexité avec les questions générales sur les droits des porteurs de brevets de retenue, il conclut à ce que toutes ces questions soient ajournées à vendredi 19 de ce mois, et que cependant le rapport qui a été arrêté sur ce sujet au comité des pensions, réuni avec des commissaires du comilé militaire et de judicature, soit imprimé et envoyé à domicile. (Ges propositions sont adoptées.) M. Gonfler de Biran, député du département de la Dordogne , absent par congé de l’Assemblée nationale, annonce son retour. M. le Président. L’ordre du jour est la discussion sur la formation du tribunal de cassation (1), M. Prugnon (2). Messieurs, une cour suprême de cassation, celle qui est, non le tribunal des parties, mais celui de la loi réduite à trente juges : ces trente juges divisés en trois sections; cha cune d’elles jugeant au nombre de cinq, non pa seulement de la violation des formes, mais d l’honneur même de la justice, puisqu’elles con naîtront de toutes les prises à parties : un bureau sortant du sein de ces sections et formé de six commissaires qui concentreront en eux toute l’autorité de la cour de cassation : le ministre de la justice, président né du tribunal entier, placé en même temps à la tête de chacune de ces petites fractions, et revêtu du droit de mulcter arbitrairement tous les juges de l’Empire, sans même les avoir entendus, et de leur ravir la confiance des citoyens : voilà le tableau réduit des dispositions que présente le troisième et dernier projet du comité. C’est de la comparaison et du choc des pensées que peut sortir un résultat digne de vous. J’oppose les miennes à celles du comité et j’attaque (1) Voy. plus haut, p. 22, le projet de décret du comité de Constitution, présenté par M. Le Chapelier, dans la séance du 25 octobre 1790. (2) Le discours de M. Prugnon est incomplet au Moniteur. le titre II dans son ensemble. Je vais montrer l’imperfection ou le danger de presque tous les articles dont il est formé et je lui en substituerai un nouveau. On a prétendu qu’elles étaient trop petites, les proportions du temple; donnons-lui au moins une coupole majestueuse qui, sans pouvoir jamais menacer la liberté, imprime au peuple et à ses juges, ce sentiment religieux qui est dû à la suprême justice. L’article 1er a été décrété (1). Art. 2. « Ce tribunal sera composé de 30 juges, qui « par la voie du sort se diviseront en trois sec-« tions de dix chacune. Ainsi donc chaque département, après avoir nommé un juge pour la cour de cassation, ne l’y conservera pas, et les 83 élus demeureront exposés à unedouble récusation, et ilyen aura53 que la confiance de leurs concitoyens ne conduira qu’à un désagrément public. Est il un cas dans lequel le Corps législatif. puisse nommer les juges, et pourquoi le placer entre les départements et le roi, comme corps électoral ou réducteur? Nous avons refusé au monarque le choix entre trois juges que l’on nous proposait de lui faire présenter par le peuple, et ce choix-là, le comité le donne au Corps législatif qui dans le fait choisirait entre deux présentés. Le motif est que ce corps doit surveiller le tribunal de cassation ; mais la nécessité de la surveillance emporte-t-elle la nécessité du choix et ne peut-on surveiller que ceux que l’on a choisis? Aura-t-il assez la science des distinctions, pour arrêter son choix sur les meilleurs sujets? Pourra-t-il les discerner à une si grande distance ? Et sans qu’il s’en aperçoive, l’intrigue et la cabale ne se glisseront-elles pas dans la salle, et souvent n'élira-t-il pas sur leur parole ? Par cette combinaison, les 53 départements qui seront privés de la faveur d’avoir un juge dans le tribunal, supporteront-ils bien patiemment une telle privation ? Ils prétendront (et non sans motif) qu’ils ne sont pas jugés par des juges qu’ils ont élus ; et que ceux qu’ils avaient choisis 1 étaient supérieurs en lumières et en capacité à ceux qui sont conservés ; et comment leur prouver le contraire? Je sais qu’en principe austère la cassation n’est pas une portion de la justice, et qu’elle est pour la loi ce que l’appel est pour le plaideur ; mais les magistrats de la cour de cassation sont des juges, et dès que tout juge doit être immédiatement élu par le peuple, pourquoi froisser le principe pour les juges de cassation ? Rien ne peut justifier la violation ouverte d’un principe constitutionnel, ni en compenser la perte. Tous les juges doivent chacun individuel-, lement être du choix immédiat du peuple: ce serait donc établir une incohérence dans la Constitution ; ce serait la fausser que de blesser un tel principe, surtout quand il est à la fois possible et utile de le respecter. Ces 30 juges, n’appartenant plus à aucun département, cesseront d’être sous la censure immédiate de leurs commettants : fis n’auront plus le même intérêt à marcher sur la ligne de leur (1) Voici le texte de l’article 1er, décrété le 5 octobre 1790. « Art. l*r. Il y aura un tribunal de cassation établi auprès du Corps législatif. »