716 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 1789.] On passe ensuite à la lecture du procès-verbal de la séance de la veille. M. Regnaud de Sainl-Jean-d'Angély observe qu’il a été fait au décret relatif aux finances, quelques changements dont on n’a pas fait mention dans le procès-verbal ; il est convenu que cette omission serait réparée. M. Le Couteulx de Cauteleu observe qu’il faut faire mention que ce changement ne porte pas sur le fond du décret, mais seulement sur quelques moyens d’exécution; cette observation n’est pas combattue. M. Chasset fait ensuite lecture des différentes adresses des villes et provinces du royaume, qui toutes expriment leur confiance, leur respect et leur reconnaissance pour les décrets de l’Assemblée nationale. La teneur de ces adresses suit : Adresse de félicitations et dévouement de la garde nationale de la ville de Moulins ; elle déclare qu’elle maintiendra, au péril de sa vie, l’exécution des décrets de l’Assemblée nationale. Adresse du même genre delà ville de Moulins: dans une assemblée générale, tous les habitants ont pris l’engagement solennel d’adhérer religieusement à tous les décrets de l’Assemblée nationale. Adresses du même genre des communautés de Palluau-la-Chapelle, de Palluau-Saint-Paul, de Montpevit et Grand-Landes en Poitou; elles demandent une justice royale. Adresse du même genre des communautés de la Oelle-Barmontoise et de la Ghaussade en Auvergne ; elles demandent d’être comprises dans les ressorts du siège royal qu’il conviendrait d’établir dans la ville de Bellegarde, capitale du Franc-Alleu. Délibération du conseil permanent et municipal de la ville de Lamballe en Bretagne, qui, persuadé que le bonheur qu’on prépare aux Français dépend de leur fermeté et de leur réunion, a réitéré le serment d’une parfaite adhésion aux décrets de l’Assemblée nationale, d’une inviolable fidélité au Roi, et d’une union indissoluble avec toutes les parties du royaume. Secours au premier signal. Adresse de la communauté de Saint-Joire en Dauphiné, qui adhère de tout son pouvoir, avec la plus respectueuse reconnaissance, aux décrets et lois émanés de l’Assemblée nationale , et notamment à celui concernant la contribution patriotique; elle fait en outre don et remise à la nation de la somme de 4,400 livres, qui lui est due sur les Etats de Sa Majesté, aux termes du contrat déposé au Trésor royal le 24 janvier 1752. Dans ce temps de disette et de misère, elle supplie avec instance l’Assemblée nationale de fixer au plus tôt le prix du rachat des rentes et celui des arrérages des rendes en grains, à un taux modéré. Délibérations des communautés de Saint-James de Vrigniôres,de Bernadets, d’Urost, de Gendevist et de Bœil en Béarn, qui adhèrent purement et simplement à tous les décrets de l’Assemblée nationale, et donnent des pouvoirs généraux et illimités à leurs députés. Adresse de félicitations, remercîments et adhésion des citoyens de la ville de Grenade-sur-Ga-ronne; elle supplie instamment l’Assemblée nationale de conserver le couvent des religieuses Ursulines, établi dans leur ville. Délibération du conseil permanent de la ville de Cailla en Languedoc, contenant adhésion à la délibération du conseil permanent de la ville de Nîmes, adressée à l’Assemblée nationale le 11 novembre dernier. Adresse de la ville de Rennes en Bretagne, dans laquelle elle rend compte de tout ce qui s’est passé à Rennes depuis la réception du décret du 3 novembre, du retardement des magistrats à rentrer la première semaine, du défaut d’enregistrement dans la seconde, et du défaut de déférence aux lettres de jussion dans la troisième ; elle suplie l’Assemblée nationale de pourvoir, le plus tôt possible, à ce que le tribunal souveraiu rende aux citoyens la justice que l’Etat leur doit, et sans laquelle l’ordre ne peut subsister. Adresse du comité municipal de la ville de Melz, contenant le procès-verbal de prestation de serment de la milice nationale de cette ville, une délibération de la commune de Metz, relativement à un mémoire antipatriotique publié au nom du chape re de la cathédrale de cette ville, enfin, une lettre originale datée de Yilleneuve-de-Berg en Vivarais, signée Tavernot de Barrés, lieutenant criminel de la sénéchaussée, adressée à la municipalité de Metz, dans laquelle on ose la soupçonner de fomenter la discorde et l’insurrection la plus criminelle contre les représentants de la nation : les membres du comité municipal protestent qu’ils n’ont jamais rien fait qui ait pu leur attirer ce soupçon injurieux, et dénoncent cette lettre criminelle à l’Assemblée nationale. Adresse des habitants de la ville et banlieue de Verdun-sur-Garonne, assemblés en conseil général renforcé; ils adhèrent et reconnaissent pour lois fondamentales tous les décrets émanés de l’Assemblée nationale ; ils déclarent traîtres envers la patrie et criminels de lèse-nation tous ceux qui s’opposeraient directement ou indirectement à l’exécution de ces mêmes lois ; supplient l’Assemblée nationale d’accorder aux vœux de ses habitants l’établissement d’une assemblée de district, et d’un tribunal secondaire dans l’enceinte de la ville de Verdun. Adresse du comité permanent et des ofliuers municipaux de la ville de Romorantin, qui renferme l’invitation qu’ils ont faite à tous les citoyens de concourir à l’exact payement des impôts, et de tous les droits quelconques de tous genres, et sous quelque dénomination qu’ils soient perçus, jusqu’à ce qu’il en ait été autrement ordonné par l’Assemblée nationale ; ils les invitent encore à l’exactitude dans la déclaration du quart de leur revenu, et à ne pas borner leurs efforts à ce qui est demandé par la loi, mais à les proportionner aux besoins de l’Etat, en ne consultant que leur zèle, leurs facultés et leur amour pour la patrie. Adresse des officiers municipaux et notables, composant les corps et communautés de la ville de Marseille, qui offrent l’hommage de leur reconnaissance pour le zèle et les succès avec lesquels l’Assemblée nationale s’est occupée de la restauration de l’Etat; ils donnent l’assurance qu’ils chercheront toujours à se distinguer par leur exactitude à concourir au maintien de la sûreté générale et particulière, et ajoutent celle que, bien qu’ils n’aient été remis à la France qu’en 1659, ils ne seront pas moins bons et fidèles sujets que les habitants des plus anciennes provinces, ainsi qu’ils en ont donné la preuve en continuant d’acquitter exactement touslesimpôts ; ils témoignent tous leurs regrets de ce que la- [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 décembre 1789.] 747 dite ville a été oubliée dans la formation du district de Verdun, ainsi que dans le remplacement du député actuel du Verdunois ; ils demandent la destruction de la gabelle, la conservation de leur juridiction royale et de leur milice nationale sur le pied de son existence actuelle. Adresse des habitants de la ville de Trouhan, qui félicitent l’Assemblée nationale sur son décret concernant la division du royaume, décret qui rapprochera désormais tous les Français, et n’en fera plus qu’une même famille ; ils développent les motifs sur lesquels ils fondent la demande de l’établissement d’un bailliage et celui d’être le cbef-lieu d’un discrict. Adresse de la garde nationale de la ville de Tours, qui demande que l’Assemblée nationale autorise l’exécution du règlement qu’elle a fait pour l’ordre de son service et de sa discipline. M. iluval d’Eprémesnilfait une motion pour que l’Assemblée prononce sur le privilège exclusif de la compagnie des Indes. ( Voy . les développement de cette motion annexés à la séance.) Un membre du comité de commerce annonce qu’on rendra incessamment compte à l’Assemblée de cette affaire. Un membre demande ensuite que le comité féodal soumette incessamment à l’Assemblée le projet d’une loi pour le rachat des rentes ; qu’il est chargé par la ville de Saint-Etienue-de-Saint-Geoirs en Dauphiné, de la solliciter; qu’elle l’attend avec impatience pour se racheter des rentes considérables qu’elle paye. M. le Président annonce que M. Lebrun a été choisi dans le comité des finances, et M. le baron de Flaschlanden dans le comité militaire, pour former une commission demandée par le Roi pour l’examen des affaires relatives aux Invalides. La parole est donnée à un membre du comité de constitution, pour soumettre à l’Assemblée l’ordre dans lequel ce comité a classé tous les articles déjà décrétés, relatifs à l’établissement et l’organisation des municipalités , assemblées de district , et assemblées administratives. M. Thouret, rapporteur du comité de constitution, observe que les trois bases de population, d’étendue et de contribution ayant été précédemment décrétées par l’Assemblée, il était nécessaire d’offrir quelques développements et quelques moyens d’exécution pour les décrets antérieurs, et en conséquence, il propose les trois articles suivants, qui sont décrétés ensemble. « Art 1er. Le premier tiers du nombre total des députés formant l’Assemblée nationale, sera attaché au territoire, et chaque département nommera également trois députés de cette classe. « Art. 2. Le second tiers sera attribué à la population : la somme totale de la population du royaume sera divisée en autant de parts que ce second tiers donnera de députés, et chaque département nommera autant de députés de cette seconde classe, qu’il contiendra de parts de population. « Art. 3. Le dernier tiers sera attribué à la contribution directe. La masse entière de la contribution directe du royaume sera divisée de même en autant de parties'' qu’il y aura de députés dans ce dernier tiers, et chaque département nommera autant de députés de cette troisième classe qu’il payera de parts de contribution directe. » M. Thouret reprend la lecture du travail du comité relatif à l’établissement des assemblées administratives : il observe, dans le cours de sa lecture, qu’il est indispensable que l’Assemblée décrète un nouvel article qu’il lui propose. Cet article est mis aux voix et adopté, ainsi qu’il suit : « L’Assemblée nationale décrète : « Que les directoires de districts seront chargés de l’exécution, dans le ressort de leurs districts, sous la direction et l’autorité de l’administration de département et de son directoire ; ils ne pourront faire exécuter aucuns arrêtés du conseil de district qui pourraient intéresser l’administration générale, si ces arrêtés n’ont été approuvés par l’ administration de département. » M. Thouret fait ensuite sentir la nécessité de décréter une addition à l’article 29 de la seconde section. Cette addition, ayant été soumise à l’Assemblée, est décrétée. Elle consiste dans ces mots : « Et l’ouverture de cette session précédera d’un mois celle du conseil de déparlement. » M. Thouret propose également une addition à l’article 1er de la 3e section. L’addition est décrétée ; elle est conçue en ces termes : « D’ordonner et de faire faire, suivant les formes qui seront établies, les rôles de taille et de cotisation entre les contribuables de chaque municipalité. » M. d’AIIIy. Je demande que la surveillance relative au service des postes et des messageries fasse partie des fonctions des assemblées administratives. M. le marquis d’Âmbly. Je pense qu’il faut aussi décréter que les administrations actuelles rendront incessamment leurs comptes. M. Thouret adopte cet avis, et propose de comprendre dans l’article à rédiger à ce sujet les receveurs et trésoriers qui ont eu le maniement des deniers publics. M. de la Galissonnière propose d’étendre cette disposition aux intendants et aux subdélé-guês. Ces objets sont renvoyés au comité de constitution. L’ordre des articles sur les assemblées administratives est unanimement adopté. M. le Président fait ensuite lecture de la lettre suivante de M. Necker, qui accompagne l’envoi d’un mémoire de M. le marquis de Bouillé qui rend compte à l’Assemblée nationale des dispositions qu’il a faites pour empêcher l’exportation des grains ; la lecture de ce mémoire est renvoyée à la séance du soir. Monsieur le président, « Je viens de recevoir une lettre de M. le marquis de Bouillé, que je crois devoir vous communiquer en original, avec les pièces qui y étaient jointes, en vous priant de vouloir bien en faire part à l’Assemblée nationale. « J’ai l’honneur d’être avec respect, « Signé : NECKER. » M. le Président. M. Thouret a la parole pour un rapport au nom du comité de constitution sur l’organisation du pouvoir judiciaire.