SÉANCE DU 21 MESSIDOR AN II (9 JUILLET 1794) - N° 58 33 gloire; et si elle a été l’admiration de nos lâches ennemis, quel Français pourrait la lui contester ? Ne plaignons pas les Français composant l’équipage du Vengeur, ne les plaignons pas; ils sont morts pour la patrie. Honorons leur destinée, et célébrons leurs vertus. (On applaudit). Un Panthéon s’élève au milieu de la commune centrale de la république ; ce monument de la reconnaissance nationale est aperçu de toutes les frontières; qu’on l’aperçoive donc aussi du milieu de l’Océan. Nous n’avons jusqu’à présent décerné aucun honneur aux héros de la mer ; ceux de la terre seuls ont obtenu des hommages. Pourquoi ne nous propo-serait-on pas de suspendre à la voûte du panthéon français un vaisseau qui serait l’image du Vengeur, et d’inscrire sur la colonne du Panthéon les noms des braves républicains qui composaient l’équipage de ce vaisseau, avec l’action courageuse qu’ils ont faite ? C’est par de tels honneurs qu’on perpétue le souvenir des grands hommes, et qu’on jette sur les terres de la république des semences de courage et de vertu. C’est ainsi que le panthéon, par un seul décret de la Convention nationale, se changera en un atelier terrible où se formeront, à la voix de le république, des vaisseaux et des marins; mais ce n’est pas assez de former des héros par des récompenses nationales, il faut encore rendre à la marine française le vaisseau que la mer a englouti. Non, il ne périra pas parmi nous le souvenir du Vengeur ! et ce nom glorieux va être donné par vos ordres au vaisseau à trois ponts qui, dans ce moment, est en construction dans le bassin couvert de Brest. Il faut conserver ainsi le souvenir de ce vaisseau qui a été le théâtre de la gloire et de la vertu républicaines. Qu’il paraisse donc sur la mer le vaisseau le Vengeur, et que bientôt il aille justifier son nom et sa renommée en se réunissant à une escadre qui devienne victorieuse de ces cruels insulaires qui ont voulu anéantir la liberté de la France et détruire les droits de l’homme ! Mais n’est-il pas encore des monuments plus durables de la gloire ? Le temps, qui démolit des montagnes et détruit les ouvrages de l’homme, ne respectera pas toujours ceux que la république élève, et des débris succéderont encore à des débris. N’avons-nous pas d’autres moyens d’immortaliser les traits que nous admirons ? Les actions des hommes célèbres de l’antiquité, qui obtinrent aussi des temples qui ne sont plus, ne sont-elles pas encore vivantes dans des tableaux, dans des écrits ? C’est aux poètes et aux peintres à tracer et à peindre l’événement du Vengeur; c’est à leurs vers consolateurs, c’est à leurs pinceaux reconnaissants à répéter à la postérité ce que les fondateurs de la république trouvèrent grand, généreux ou utile. Les monuments élevés aux héros d’Homère ne sont plus que dans ses vers; la célébrité d’Agricola ne repose plus dans l’urne faite par un artiste célèbre, elle respire encore dans les écrits de Tacite. Ouvrons donc un concours honorable à la poésie et à la peinture, et que des récompenses nationales, décernées dans une fête civique, régénèrent les arts et encouragent les artistes; ou plutôt, David, ressaisis tes pinceaux, et que ton génie arrache au sein des mers le vaisseau célèbre dont les marins ont arraché l’admiration des Anglais mêmes. Que ne puis-je faire entendre ma voix de tous ceux qui défendent la patrie sur les mers ! Je leur dirais : Marins de la république, quand vous irez confier ses destinées à cet élément terrible, tournez un instant vos regards vers le Panthéon; voyez-y la patrie reconnaissante ; souvenez-vous surtout du Vengeur, alors que vous recontrerez les tyrans de la mer. La marine des rois n’était qu’un luxe dispendieux ; la marine de la république est une arme sûre pour parvenir à l’affranchissement des mers; la liberté a une autre ambition que le commerce : celui-ci veut des esclaves, et qu’un seul peuple y domine ; la liberté ne veut pas plus de tyrans sur les mers que sur la terre. Ce n’est pas pour être esclaves maritimes que la nature nous a donné tout ce qui est nécessaire à la construction, des ports nombreux recevant des vaisseaux, et des mers baignant nos côtes. Ce n’est pas pour être tyrannisés par des banquiers et des marchands de Londres, que la révolution a remis dans nos mains une fortune énorme, des bois immenses, une population guerrière et des mains habiles. Français, soyez braves et grands comme les républicains qui montaient le Vengeur, et bientôt l’Angleterre sera détruite; rendez la mer libre de ces pirates et de ces marchands d’hommes, et les ombres des marins qui se sont immortalisés sur le Vengeur se réjouiront encore dans leur tombeau, creusé par leur courage dans l’abîme des mers. (Applaudissements) (l). Le décret est rendu dans les termes sui-vans : « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de BARÈRE, au nom] du comité de salut public, décrète : « Art. I. - Une forme du vaisseau de ligne le Vengeur sera suspendue à la voûte du Panthéon, et les noms des braves républicains composant l’équipage de ce vaisseau seront inscrits sur la colonne du Panthéon. « Art. II. - A cet effet, les agens maritimes des ports de Brest et de Rochefort enverront sans délai à la Convention nationale le rôle d’équipage du vaisseau le Vengeur. Art. III. - Le vaisseau à trois ponts qui est en construction dans le bassin couvert de Brest, portera le nom du Vengeur. Le commissaire de la marine donnera les ordres les plus prompts pour accélérer la contruction de ce vaisseau. Art. IV. - La Convention nationale appelle les artistes, peintres, sculpteurs et poètes à concourir, pour transmettre à la postérité le trait sublime du dévouement républicain des citoyens formant l’équipage du Vengeur. Il sera décerné dans une fête nationale des récompenses au peintre, au poète et au sculpteur qui auront le plus dignement célébré la gloire de ces républicains (2). (1) Mon., XXI, 173. (2) (l) P.V., XLI, 142. Minute de la main de Barère. Décret n° 9860. Bm, 21 mess. (2e suppl1); J. Sablier, n° 1427 ; J. S. Culottes, nos 510, 511, 512 ; J. Univ., n° 1690 ; J. Fr., nos 653, 654 ; J. Lois, nos 649, 650 ; J. Matin, n° 715 ; F.S.P., n° 370 ; J. Paris, n° 556 ; Mess, soir, nos 689, 691 ; M.U., XLI, 350 ; Rép., n° 202 ; J. Perlet, n° 655 ; C. Univ., n° 921; Audit, nat., n° 654; Ann. patr., n° DLV; Débats, n° 657; Ann. R.F., nos 221, 223. 3 SÉANCE DU 21 MESSIDOR AN II (9 JUILLET 1794) - N° 58 33 gloire; et si elle a été l’admiration de nos lâches ennemis, quel Français pourrait la lui contester ? Ne plaignons pas les Français composant l’équipage du Vengeur, ne les plaignons pas; ils sont morts pour la patrie. Honorons leur destinée, et célébrons leurs vertus. (On applaudit). Un Panthéon s’élève au milieu de la commune centrale de la république ; ce monument de la reconnaissance nationale est aperçu de toutes les frontières; qu’on l’aperçoive donc aussi du milieu de l’Océan. Nous n’avons jusqu’à présent décerné aucun honneur aux héros de la mer ; ceux de la terre seuls ont obtenu des hommages. Pourquoi ne nous propo-serait-on pas de suspendre à la voûte du panthéon français un vaisseau qui serait l’image du Vengeur, et d’inscrire sur la colonne du Panthéon les noms des braves républicains qui composaient l’équipage de ce vaisseau, avec l’action courageuse qu’ils ont faite ? C’est par de tels honneurs qu’on perpétue le souvenir des grands hommes, et qu’on jette sur les terres de la république des semences de courage et de vertu. C’est ainsi que le panthéon, par un seul décret de la Convention nationale, se changera en un atelier terrible où se formeront, à la voix de le république, des vaisseaux et des marins; mais ce n’est pas assez de former des héros par des récompenses nationales, il faut encore rendre à la marine française le vaisseau que la mer a englouti. Non, il ne périra pas parmi nous le souvenir du Vengeur ! et ce nom glorieux va être donné par vos ordres au vaisseau à trois ponts qui, dans ce moment, est en construction dans le bassin couvert de Brest. Il faut conserver ainsi le souvenir de ce vaisseau qui a été le théâtre de la gloire et de la vertu républicaines. Qu’il paraisse donc sur la mer le vaisseau le Vengeur, et que bientôt il aille justifier son nom et sa renommée en se réunissant à une escadre qui devienne victorieuse de ces cruels insulaires qui ont voulu anéantir la liberté de la France et détruire les droits de l’homme ! Mais n’est-il pas encore des monuments plus durables de la gloire ? Le temps, qui démolit des montagnes et détruit les ouvrages de l’homme, ne respectera pas toujours ceux que la république élève, et des débris succéderont encore à des débris. N’avons-nous pas d’autres moyens d’immortaliser les traits que nous admirons ? Les actions des hommes célèbres de l’antiquité, qui obtinrent aussi des temples qui ne sont plus, ne sont-elles pas encore vivantes dans des tableaux, dans des écrits ? C’est aux poètes et aux peintres à tracer et à peindre l’événement du Vengeur; c’est à leurs vers consolateurs, c’est à leurs pinceaux reconnaissants à répéter à la postérité ce que les fondateurs de la république trouvèrent grand, généreux ou utile. Les monuments élevés aux héros d’Homère ne sont plus que dans ses vers; la célébrité d’Agricola ne repose plus dans l’urne faite par un artiste célèbre, elle respire encore dans les écrits de Tacite. Ouvrons donc un concours honorable à la poésie et à la peinture, et que des récompenses nationales, décernées dans une fête civique, régénèrent les arts et encouragent les artistes; ou plutôt, David, ressaisis tes pinceaux, et que ton génie arrache au sein des mers le vaisseau célèbre dont les marins ont arraché l’admiration des Anglais mêmes. Que ne puis-je faire entendre ma voix de tous ceux qui défendent la patrie sur les mers ! Je leur dirais : Marins de la république, quand vous irez confier ses destinées à cet élément terrible, tournez un instant vos regards vers le Panthéon; voyez-y la patrie reconnaissante ; souvenez-vous surtout du Vengeur, alors que vous recontrerez les tyrans de la mer. La marine des rois n’était qu’un luxe dispendieux ; la marine de la république est une arme sûre pour parvenir à l’affranchissement des mers; la liberté a une autre ambition que le commerce : celui-ci veut des esclaves, et qu’un seul peuple y domine ; la liberté ne veut pas plus de tyrans sur les mers que sur la terre. Ce n’est pas pour être esclaves maritimes que la nature nous a donné tout ce qui est nécessaire à la construction, des ports nombreux recevant des vaisseaux, et des mers baignant nos côtes. Ce n’est pas pour être tyrannisés par des banquiers et des marchands de Londres, que la révolution a remis dans nos mains une fortune énorme, des bois immenses, une population guerrière et des mains habiles. Français, soyez braves et grands comme les républicains qui montaient le Vengeur, et bientôt l’Angleterre sera détruite; rendez la mer libre de ces pirates et de ces marchands d’hommes, et les ombres des marins qui se sont immortalisés sur le Vengeur se réjouiront encore dans leur tombeau, creusé par leur courage dans l’abîme des mers. (Applaudissements) (l). Le décret est rendu dans les termes sui-vans : « La Convention nationale, après avoir entendu le rapport [de BARÈRE, au nom] du comité de salut public, décrète : « Art. I. - Une forme du vaisseau de ligne le Vengeur sera suspendue à la voûte du Panthéon, et les noms des braves républicains composant l’équipage de ce vaisseau seront inscrits sur la colonne du Panthéon. « Art. II. - A cet effet, les agens maritimes des ports de Brest et de Rochefort enverront sans délai à la Convention nationale le rôle d’équipage du vaisseau le Vengeur. Art. III. - Le vaisseau à trois ponts qui est en construction dans le bassin couvert de Brest, portera le nom du Vengeur. Le commissaire de la marine donnera les ordres les plus prompts pour accélérer la contruction de ce vaisseau. Art. IV. - La Convention nationale appelle les artistes, peintres, sculpteurs et poètes à concourir, pour transmettre à la postérité le trait sublime du dévouement républicain des citoyens formant l’équipage du Vengeur. Il sera décerné dans une fête nationale des récompenses au peintre, au poète et au sculpteur qui auront le plus dignement célébré la gloire de ces républicains (2). (1) Mon., XXI, 173. (2) (l) P.V., XLI, 142. Minute de la main de Barère. Décret n° 9860. Bm, 21 mess. (2e suppl1); J. Sablier, n° 1427 ; J. S. Culottes, nos 510, 511, 512 ; J. Univ., n° 1690 ; J. Fr., nos 653, 654 ; J. Lois, nos 649, 650 ; J. Matin, n° 715 ; F.S.P., n° 370 ; J. Paris, n° 556 ; Mess, soir, nos 689, 691 ; M.U., XLI, 350 ; Rép., n° 202 ; J. Perlet, n° 655 ; C. Univ., n° 921; Audit, nat., n° 654; Ann. patr., n° DLV; Débats, n° 657; Ann. R.F., nos 221, 223. 3 34 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE [adopté au milieu des applaudissements], JEAN-BON SAINT-ANDRÉ : Je demande, par article additionnel au décret que vous venez de rendre, que le commissaire de la marine et des colonies soit tenu de faire les informations nécessaires pour savoir si, en exécution de la loi, des secours ont été accordés aux veuves et aux orphelins des braves marins qui montaient le Vengeur. Cette proposition est adoptée, et l’impression du rapport de Barère est décrétée (l). 59 ÉTAT DES DONS (suite) Le citoyen Leclerc, patriote incarcéré à Toulon le 28 juillet jusqu’après l’entrée victorieuse de l’armée républicaine dans cette cité parjure et rebelle, a fait remise d’une indemnité qui lui avoit été accordée, montant a la somme de 4,000 liv. en assignats (2). [Port de la Montagne, 30 prair II] (3). « Citoïens représentans, J’ai du recueillir les 4 000 liv. d’indemnité accordées par la représentation nationale aux patriotes opprimés du Midi, ce secours était très urgent à une foule de malheureux qui ne pourront jamais se relever des pertes considérables que l’amour de leur patrie leur a causé et je n’ai pas du me distinguer sur des collègues aussi estimables par un abandon répréhensible. Mais, plus j’envisage la somme d’opprobres et d’humiliations sous laquelle les contre-révolutionnaires nous ont tenu accablés dès la mi-juillet 1793, plus je calcule les maux physiques qui en sont déjà et ne peuvent manquer d’en être les conséquences terribles et inévitables, plus je sens le prix d’y attacher le plus grand désintéressement et de n’en recevoir de dédommagement que de mon ame si, d’ailleurs, dans une circonstance quelconque, les ennemis de ma patrie venaient à m’atteindre derechef, je ne veux pas que l’on puisse soupçonner que l’espérance d’une nouvelle indemnité alimente mon courage en défiant leur tyrannie. Permettez-moi donc, citoïens représentans, de verser cette somme à peine reçue dans les fonds de la guerre pour ÿ augmenter la masse destinée à entretenir les défenseurs de la patrie, puisque ma qualité d’officier supérieur de santé aux hôpitaux de la marine enchaine depuis le commencement de la guerre le brûlant désir d’abandonner femme et enfant pour aller me confondre dans leur rang et combattre avec eux les peuples ennemis de la liberté, de l’égalité et les amis des roix. S. et F. » Leclerc La séance est levée à trois heures et demie (4). Signé, Louis (du Bas-Rhin), Président; Besson, Bordas, Turreau, A. Dumont, Legendre, Brival, Secrétaires. (1) Mon., XXI, 175. 2 P.V., XLI, 333. 3 C 308, pl. 1192, p. 18. (4) P.V., XLI, 143. AFFAIRES NON MENTIONNÉES AU PROCÈS-VERBAL 60 [Le tribunal criminel du départ 1 de la Charente Inférieure à la Conv.; Xantes. 10 mess. Il] ( l). « Législateurs, La dénonciation qui vient d’être faite à l’accusateur public du placard cy joint donne lieu aux questions suivantes, qu’il appartient à vous seuls de résoudre. l) Lorsqu’une dénonciation faite au tribunal révolutionnaire se trouve, par le jugement, être une calomnie, l’accusation en dénonciation calomnieuse peut elle être portée concuremment et indistinctement au tribunal révolutionnaire et au tribunal criminel du département dans l’étendue duquel le prétendu délit paroissait avoir été commis ? 2) La même concurrence a-t-elle lieu entre les mêmes tribunaux, pour le cas de faux témoignage, dans une affaire jugée par le tribunal révolutionnaire ? 3) La loi du 5 ventôse contre les faux témoins est-elle applicable au dénonciateurs calomnieux ? S. et F. ». Lemercier {présid .), Marchand-joyeux, Savi-gny, Desbains, Beard (accusateur public), Dugue (greffier). Renvoyé au comité de législation (2). 61 [ L’agent nat. du distr. de Clermont -Oise, au présid. de la Conu. ; 20 mess. II] (3). « Citoyen président, La vente des biens des perfides émigrés, de ces lâches conspirateurs dont les têtes coupables vont expier les forfaits, se fait ici avec beaucoup de succès. Les patriotes, et même ceux qui voudraient qu’on les crût tels, s’empressent de se revêtir de la dépouille de ces traitres. Il se partagent à l’envie, au feu des enchères, les riches possessions de ces ingrats, non pour les abandonner lâchement, comme ils ont fait, mais pour les cultiver, pour en partager les fruits avec leurs frères. Depuis le 30 vendémiaire, époque de la lre adjudication, jusques et compris le 30 prairial, il s’en est fait 586 et depuis le 1er de ce mois, jusques et (l) D III 46. Doss. 794, p. 221. A cette pièce est jointe une affiche imprimée : « Transaction sur procès criminel du 20e jour de Floréal an II... entre Marie-Jeanne Hortense Coquemand, épouse de Louis Armand Rousseau, Jean Joseph Marie Chasseau, père, enfant, etc... Accusation d’avoir été traduite devant les tribunaux contestée par la cne Coquemand qui porte plainte. (2) Mention marginale datée du 21 mess, et signée Besson. (3) C 308, pl. 1199, p. 31. J. Sablier, n° 1428; M.U., XLI, 346; J. Matin, n° 715. 34 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE [adopté au milieu des applaudissements], JEAN-BON SAINT-ANDRÉ : Je demande, par article additionnel au décret que vous venez de rendre, que le commissaire de la marine et des colonies soit tenu de faire les informations nécessaires pour savoir si, en exécution de la loi, des secours ont été accordés aux veuves et aux orphelins des braves marins qui montaient le Vengeur. Cette proposition est adoptée, et l’impression du rapport de Barère est décrétée (l). 59 ÉTAT DES DONS (suite) Le citoyen Leclerc, patriote incarcéré à Toulon le 28 juillet jusqu’après l’entrée victorieuse de l’armée républicaine dans cette cité parjure et rebelle, a fait remise d’une indemnité qui lui avoit été accordée, montant a la somme de 4,000 liv. en assignats (2). [Port de la Montagne, 30 prair II] (3). « Citoïens représentans, J’ai du recueillir les 4 000 liv. d’indemnité accordées par la représentation nationale aux patriotes opprimés du Midi, ce secours était très urgent à une foule de malheureux qui ne pourront jamais se relever des pertes considérables que l’amour de leur patrie leur a causé et je n’ai pas du me distinguer sur des collègues aussi estimables par un abandon répréhensible. Mais, plus j’envisage la somme d’opprobres et d’humiliations sous laquelle les contre-révolutionnaires nous ont tenu accablés dès la mi-juillet 1793, plus je calcule les maux physiques qui en sont déjà et ne peuvent manquer d’en être les conséquences terribles et inévitables, plus je sens le prix d’y attacher le plus grand désintéressement et de n’en recevoir de dédommagement que de mon ame si, d’ailleurs, dans une circonstance quelconque, les ennemis de ma patrie venaient à m’atteindre derechef, je ne veux pas que l’on puisse soupçonner que l’espérance d’une nouvelle indemnité alimente mon courage en défiant leur tyrannie. Permettez-moi donc, citoïens représentans, de verser cette somme à peine reçue dans les fonds de la guerre pour ÿ augmenter la masse destinée à entretenir les défenseurs de la patrie, puisque ma qualité d’officier supérieur de santé aux hôpitaux de la marine enchaine depuis le commencement de la guerre le brûlant désir d’abandonner femme et enfant pour aller me confondre dans leur rang et combattre avec eux les peuples ennemis de la liberté, de l’égalité et les amis des roix. S. et F. » Leclerc La séance est levée à trois heures et demie (4). Signé, Louis (du Bas-Rhin), Président; Besson, Bordas, Turreau, A. Dumont, Legendre, Brival, Secrétaires. (1) Mon., XXI, 175. 2 P.V., XLI, 333. 3 C 308, pl. 1192, p. 18. (4) P.V., XLI, 143. AFFAIRES NON MENTIONNÉES AU PROCÈS-VERBAL 60 [Le tribunal criminel du départ 1 de la Charente Inférieure à la Conv.; Xantes. 10 mess. Il] ( l). « Législateurs, La dénonciation qui vient d’être faite à l’accusateur public du placard cy joint donne lieu aux questions suivantes, qu’il appartient à vous seuls de résoudre. l) Lorsqu’une dénonciation faite au tribunal révolutionnaire se trouve, par le jugement, être une calomnie, l’accusation en dénonciation calomnieuse peut elle être portée concuremment et indistinctement au tribunal révolutionnaire et au tribunal criminel du département dans l’étendue duquel le prétendu délit paroissait avoir été commis ? 2) La même concurrence a-t-elle lieu entre les mêmes tribunaux, pour le cas de faux témoignage, dans une affaire jugée par le tribunal révolutionnaire ? 3) La loi du 5 ventôse contre les faux témoins est-elle applicable au dénonciateurs calomnieux ? S. et F. ». Lemercier {présid .), Marchand-joyeux, Savi-gny, Desbains, Beard (accusateur public), Dugue (greffier). Renvoyé au comité de législation (2). 61 [ L’agent nat. du distr. de Clermont -Oise, au présid. de la Conu. ; 20 mess. II] (3). « Citoyen président, La vente des biens des perfides émigrés, de ces lâches conspirateurs dont les têtes coupables vont expier les forfaits, se fait ici avec beaucoup de succès. Les patriotes, et même ceux qui voudraient qu’on les crût tels, s’empressent de se revêtir de la dépouille de ces traitres. Il se partagent à l’envie, au feu des enchères, les riches possessions de ces ingrats, non pour les abandonner lâchement, comme ils ont fait, mais pour les cultiver, pour en partager les fruits avec leurs frères. Depuis le 30 vendémiaire, époque de la lre adjudication, jusques et compris le 30 prairial, il s’en est fait 586 et depuis le 1er de ce mois, jusques et (l) D III 46. Doss. 794, p. 221. A cette pièce est jointe une affiche imprimée : « Transaction sur procès criminel du 20e jour de Floréal an II... entre Marie-Jeanne Hortense Coquemand, épouse de Louis Armand Rousseau, Jean Joseph Marie Chasseau, père, enfant, etc... Accusation d’avoir été traduite devant les tribunaux contestée par la cne Coquemand qui porte plainte. (2) Mention marginale datée du 21 mess, et signée Besson. (3) C 308, pl. 1199, p. 31. J. Sablier, n° 1428; M.U., XLI, 346; J. Matin, n° 715.