37â [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 mars 1790.] fectés à leurs créances ou droits, seront tenus, dans le délai de deux mois, à dater de la publication du présent décret, de faire leurs déclarations aux bureaux qui leur seront indiqués à cet effet dans les divers départements. Art. 9. Faute par les créanciers d’observer cette formalité, leurs hypothèques n’auront plus de dates qu'après celles consenties au profit des administrateurs. Art. 10. Les contrats faits par les propriétaires aux différentes caisses territoriales, n’auront de force et de circulation, que pour une année, pendant laquelle ils seront tous les jours échangeables en espèces et à vue. Art. 11. Il sera libre aux propriétaires de rembourser les obligations qu’ils auront contractées en tout ou partie, ou de renouveler annuellement ces obligations, en continuant le paiement des intérêts. Art. 12. Les contrats seront conçus dans la forme qui suit : Contrat territorial n*4, Département du Lyon-échéance du premier nais, pour 1,000 liv. janvier 1789. A Lyon, le premier janvier 1789. Nous soussigné, Jean-Paul Rolland, domicilié à Laval, d’une part, et les administrateurs de la caisse territoriale de Lyon, d’autre part ; nous avons arrêté ce qui suit : Moi, Rolland, je déclare et reconnais avoir aujourd’hui tiré sur ma terre de Damourt, dont les deux tiers libres ont été évalués 2U,00ü livres par la compagnie territoriale de Lyon, la somme de mille livres, pour laquelle j’affecte celte terre spécialement, par privilège et hypothèque, me dessaisissant, en tant que de besoin, du droit de propriété en faveur du porteur du présent, jusqu’à la concurrence de ladite somme de 1,000 livres, pour qu’à défaut de paiement ou de renouvellement du contrat à l’époque du Ier janvier 1789, ladite propriété proportionnelle lui soit acquise, et dévolue de plein droit, sans qu’il soit besoin d’aucune autre formalité de justice. Et nous, administrateurs de la caisse territoriale de Lyon, au nom de la compagnie, nous nous rendons garants et responsables de l”énoncé ci-dessus, et des promesses et engagements du sieur Rolland. Nous nous obligeons de plus solidairement de payer à vue, peudantle cours de l’année, échéant le lor janvier 1789, dans celle des caisses territoriales du royaume où l’on se présentera, ladite somme de 1,000 livres au susdit porteur, ou à son ordre. Fait à Lyon, en l’hôtel de la compagnie territoriale, le 1er janvier 1788. Bon pour mille livres, Ici doivent se trouver les payables par nous, ad-signatures du proprié-ministrateurs. taire, de deux administrateurs, du cor Irô-leur du bureau et de l’enregistreur. Ces contrats seront imprimés avec les lacunes nécessaires pour remplir les noms des personnes, les noms du lieu de ia situation des biens et les sommes. Ils seront fabriqués à Paris, numérotés ; chaque numéro sera inscrit sur un registre général, et, d’après ces formalités, ils seront envoyés dans les caisses territoriales. Ils seront uniformes pour tout le royaume. On ne distinguera ceux des divers départements, que par le nom de ces mêmes départements qui seront placés en tête des contrats. Il y en aura de plusieurs sommes, de 1,000, de 500, de 300 et de 100 livres. Art. 13. Si le propriétaire conserve le contrat, il n’y apposera aucun endossement ; s’ille négocie, soit aux administrateurs territoriaux, pour en recevoir à l’instant la valeur, soit à toute autre personne, il mettra un endossement semblable à celui d'une lettre de change ordinaire. Art. 14. Ces contrats ainsi endossés pourront circuler dans le royaume et chez l’étranger, comme les lettres de change. Art. 15. Quand une fois ils seront mis en circulation, ils seront remboursables à vue dans toutes les caisses territoriales. Art. 16. Si le porteur est négligent à venir recevoir le montant du contrat, à son échéance, il paiera, dès cet instant, l’intérêt de 4 0/0 à la caisse d’administration, à laquelle il aura été passé, et ce à la décharge du propriétaire qui l’aura souscrit. Art. 17. Les particuliers qui désireront se procurer des contrats territoriaux pour de l’argent comptant pourront se présenter aux différentes caisses, et il leur en sera délivré sans aucune rétribution. Art. 18. Outre l’inscription descontrats sur deux registres, l’un particulier, l’autre général, il sera imaginé un mot d’ordre pour que les véritables propriétaires, ou les porteurs qui tiendront d’eux, puissent seuls se faire connaître et toucher le montant, et qu’eu cas de perte ou de vol, un injuste et illégitime possesseur ne puisse s’en faire payer. Art. 19. Il n’y aura point de contrats au-dessous de 100 livres. Art. 20. L’intérêt de ces contrats sera tixé à 4 0/0 par an, sans aucune retenue. Cet iutérêt se payera lors de la confection des contrats, et lors de leur renouvellement, en faisant raison de l’escompte pour l’avance de cet intérêt. Art. 21. Sur les 4 0/0 d’intérêt, un et demi tournera au prolit des administrateurs, dans l’origine de l’établissement, sauf à modérer cette rétribution par la suite pour les indemniser de leurs cautionnements, de tous les irais de régie et des chances qui pourraient tourner contre eux, s’ils avaient commis des erreurs dans leurs évaluations; le surplus tournera au profit de la nation, et sera versé dans ses coffres. Art. 22. Si le gouvernement, pour des besoins d’Etat, et la libération de la dette publique, engage, de concert avec les représentants de la nation, une partie des biens domaniaux sur de pareils contrats, il ne payera qu’un et demi d’intérêt, droit accordé aux administrateurs. Art. 23. Un contrat échu pourra se rembourser ou en argent, ou en un contrat de la même nature et de la même valeur, non échu. Art. 24. On prendra les précautions les plus grandes pour qu’uu contrat soldé ne puisse plus être reproduit : il sera dressé un proces-verbal de délivrance, qui sera transcrit sur les deux registres. Art. 25. Si le propriétaire, quinzaine après l’échéance, ne rembourse pas son contrat, ou ne le renouvelle pas en payant les intérêts, les administrateurs lui feront faire deux sommations de huitaine en huitaine, et ils se mettront ensuite en possession de son bien, sans aucune formalité de justice. Iis le feront régir, prélèveront les frais de gestion, les intérêts qui écherront annuellement, remettront le surplus soit au propriétaire, [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 mars 1790.] 378 soit à ses créanciers, qui auraient fait les diligences, et se seraient mis en règle pour toucher. Et cette administration bienfaisante durera pendant trois années, passé lequel temps, le propriétaire, manifestant une volonté absolue d’abandonner sa propriété, elle sera mise à l’enchère avec le moins de frais possible, et les administrateurs se rempliront de leurs capitaux et déboursés. M. Lanjuinais. Je demande que ce plan soit imprimé et renvoyé au comité des impositions. M. Dnpont {de Nèmours). Ce projet n’est pas neuf ; il est connu de tout le monde, c’est celui de M. Ferrières, de M. l’abbéd’Espagnac, deM. Rei-gnier ; en un mot, c’est la banque d’Ecosse, Je considère ce plan comme dangereux dans son organisation et dans ses effets ; j’ajoute qu’il a un très grand inconvénient, celui d’être inexécutable. J’ai dit que ce plan était dangereux, parce que si tous les propriétaires ont la possibilité d’emprunter, ils emprunteront presque tous ; et c’est une règle générale, que les prêteurs s’enrichissent quaud les emprunteurs se ruinent. J’ajoute que ce ne serait pas remplir le vœu des contribuables, que de verser leurs contributions dans les caisses des prêteurs territoriaux ; j’ajoute aussi que cette caisse n’aura jamais la possibilité de remplir tous ses engagements. Je conclus à ce que le projet soit renvoyé à l’examen de la dixième législature. M. Rœderer. Je ne pense pas avec M. Dupont que le plan qui vous est présenté doive être renvoyé à la dixième législature. Je conviens cependant avec le préopinant que ce plan présente peut-être, dans le mode d’exécution, tous les inconvénients qu’il vous a fait remarquer; mais j’observe aussi qu’il présente d’un autre côté des avantages bien grands ; je le crois digne d’une sérieuse discussion, et j’en demande le renvoi, non au comité des impositions, mais au comité des finances. M. Lanjuinais. Vous ne voudrez pas condamner, Messieurs, d’après l’avis d’un seul homme, le plan de M. Pétion de Villeneuve. Il est bien connu que ce plan a deux sortes d’ennemis, les économistes et les marchands d’argent. Moi, qui ne suis ni l’un ni l’autre, j’ai cru voir, dans l’exécution de ce projet, des avantages incalculables ; je demande donc qu’il soit imprimé, renvoyé au comité des finances, et discuté ensuite dans l’assemblée générale. M. Fréteau appuie l'avis de M. Lanjuinais, et conclut delà même manière que lui. M. lie Coultéuxde Cantelen. Je connais ce plan depuis longtemps; je l’ai médité avec réflexion, et j’avoue que jai été séduit des avantages qu’il présente. Mais j’avoue aussi qu’il m’a paru toujours défectueux, relativement aux hypothèques. Je demande donc qu’ilsoit nomméune commission chargée de s’occuper de la partie des hypothèques. Le travail de cette commission devra s'accorder avec le reste du plan. M. Bonchotte. Le comité des finances est surchargé de travail. Je demande que ce plan soit renvoyé au comité d’agriculture et de commerce. M. le marquis dé Foucault demande qu’on nomme un député par département pour l’examen de ce plan. L’Assemblée décrète : 1» que le comité des finances et celui d’agriculture et de commerce nommeront chacun six membres pour examiner le plan présenté par M. Pétion de Villeneuve ; 2° que l’auteur du plan sera admis dans le comité, pour répondre aux différentes questions qui pourraient lui être faites; 3* que ce plan sera imprimé et distribué. M. le Président fait lecture d’une lettre datée de Lausanne, en Suisse, dans laquelle M. d’An-traigues se disculpe des propos qu on lui impute d’avoir tenus en passant par la ville de Bourg-en-Bresse. Cette lettre est ainsi conçue : Lausanne, le 20 mars 1790. Monsieur le Président. C’est avec la plus grande surprise que j’ai appris ce matin, 20 mars, en lisant les papiers : Nouvelles de France, que j’étais inculpé dans l’Assemblée nationale et que les motifs de cette inculpation étaient les propos incendiaires que l’on m’accuse d’avoir tenus à Bourg-en-Bresse, et notamment d’avoir excité les citoyens à ne pas payer la contribution patriotique, de les avoir menacés de la banqueroute, en blâmant les décrets de l’Assemblée. Je ne peux répondre à ces allégations, qu’en vous exposant quelle fut ma conduite à Bourg-en-Bresse. J’y arrivai malade, le 5 mars, à sept heures du soir. Je fus conduit dans une chambre où je restai sans en sortir un seul instant, jusqu'au lendemain 6 mars, que je partis à 6 heures du matin. Je n’ai vu pendant tout ce temps qu’une seule personne qui habite le bourg en ce moment, que je priais de me venir voir, et qui passa deux heures avec moi. Nous causâmes seuls sur les affaires publiques; et pendant ce temps, il se peut que le maître du logis soit entré dans ma chambre; mais eût-il, lui ou tout autre, écouté toute notre conversation, je vous donne ma parole que je ne tins pas un seul des propos que l’on m’impute et que je parlai beaucoup plus des troubles intérieurs des provinces et de leur origine, que de ce qui se passait à Paris. Questionné ainsi que le sont maintenant tous les voyageurs, j’ai dit qu’il fallait espérer que tout s’arrangerait; et c’est tout ce que je peux dire sans trahir mon opinion. Je n’ai caché mon nom nulle part ; je n’ai point recommandé de le taire et ce ne peut être un tort, car ceux qui voyagent avec les coupables projets de soulever les peuples et de les rendre furieux, agissent beaucoup, mais ils ne se nomment pas. Pardon, Monsieur le Président, de vous occuper de ces détailssi petits, si minutieux; mais pouvais-je les éviter? L’accusation elle-même est une inquisition odieuse ; il faut bien que je vous dise ce qui s’est passé dans ma chambre, puisque je n’en suis pas sorti un seul instant, et avec qui j’ai parlé pendant mon séjour à Bourg-en-Bresse, puisque je n’y ai vu personne, autre que celui que j’ai prié de me venir voir. Après avoir justifié mes discours, j’en prouve la vérité par ma conduite extérieure. Je n’ai pas toujours été de l’opinion quia formé tous les décrets de l'Assemblée et je pense encore comme je pensais en m’y opposant ; mais en gardant mon opinion, j’ai toujours soumis ma conduite aux décrets.