SÉANCE DU 10 FRIMAIRE AN III (30 NOVEMBRE 1794) - N08 19-21 339 au maintien des bonnes mœurs ; elles sont à la base du gouvernement républicain, elles sont à la source fécondée de toutes les vertus. Citoyens, vous avez voulu que dans le sein de vos assemblées, fussent gravés les principes qui doivent animer tous les bons républicains. Au pied de cette tribune est écrit vérité : oh ! combien de fois, elle a été altérée ! combien de fois des hommes pervers l’ont-ils souillées du mensonge et de l’hypocrisie! combien de fois les agens de la vérité y ont-ils été étouffés par les cris de ceux qui n’aiment point la vérité ! Aujourd’hui que l’oppression est disparue, que l’hypocrisie est démasquée, jurons, citoyens, de ne tenir en cette tribune et de n’y entendre que le langage de la vérité. D’un côté, je vois écrit : les mortels sont égaux : guerre et haine aux tyrans ; mettons en pratique ces deux axiomes ; jurons le maintien de l’égahté et de la fraternité ; jurons haine et guerre aux égoïstes, à tous ceux qui voudroient abuser de la liberté, pour faire ce que la loi interdit, ou pour nuire aux intérêts de leurs concitoyens et à l’intérêt général; ce sont là les désorganisa-teurs, les factieux, les tyrans de l’intérieur. D’un autre côté sont écrites ces paroles consolantes : la vertu seule fait le mérite; amour et paix aux patriotes. Jurons, citoyens, de ne reconnoître que la vertu pour guide de nos affections ; de ne point nous laisser entraîner à des réputations mensongères, fruit de la cabale et de l’intrigue, ni aux exclamations vagues de quelques orateurs qui n’ont pas en eux d’autres moyens de faire croire à leur patriotisme. Jurons, nous tous vrais patriotes, jurons de nous aimer en frères ; de rester toujours unis par le lien sacré et indissoluble de notre amour commun pour le bien public. Jurons de répandre notre sang pour le salut de notre pays ; de pardonner à nos ennemis particuliers, mais de poursuivre jusqu’au tombeau les ennemis de notre patrie et de son bonheur. Jurons enfin de ne reconnoître d’autre souveraineté que celle du peuple ; d’autre point de ralliement que la représentation nationale, en qui elle repose toute entière ; et que nos bouches, d’accord avec nos cœurs, fassent retentir cette voûte de ces cris républicains ; Vive la Convention nationale! guerre aux désorganisateurs, aux factieux, aux oppresseurs ! Vive la république une et indivisible. LE PRÉSIDENT (53) : Fameuse par les services qu’elle rendit à la révolution, la société des Jacobins de Paris vit bientôt accourir dans son sein, de toutes les parties de la République, les hommes de sang affublés de patentes de patriotisme exclusif, et se déchaînant principalement contre les citoyens qui servirent la révolution dès son aurore. Sous cette enseigne, il fût facile aux brigands couronnés de signaler ceux qui pou-voient servir leurs complots contre la liberté. Vous ne me démentirez pas, Chaumette, Hébert, Ronsin, Robespierre, Couthon, ni vous qui vouliez vous saisir des rênes du gouvernement après la mort des triumvirs ; n’étiez-vous pas Jacobins (53) Bull., 10 frim. (suppl.). de Paris? La Convention nationale, chargée de maintenir la souveraineté du Peuple, a donc dû disperser ceux qui vouloient y porter atteinte ; les louanges qu’elle reçoit, prouvent que le vœu universel a été rempli. 19 Le citoyen Dumoutier, sous-lieutenant au bataillon des cinq sections réunies de Paris, ayant eu la jambe gauche emportée par un boulet de canon, en combattant les brigands de la Vendée, vient offrir à la Convention d’employer ce qui lui reste de forces et de moyens au service de la République. Il demande, en conséquence, dans les bureaux de la Convention, un emploi analogue à ses talens. Le pétitionnaire est invité aux honneurs de la séance, et la Convention renvoie la pétition au comité des Inspecteurs de la Salle (54). 20 La Convention renvoie au même comité [des Inspecteurs de la Salle] une demande semblable faite par le citoyen Dirant, ci-devant fourrier au troisième régiment d’artillerie (55). 21 Un députation des citoyens de la section de la Liberté, commune de Dijon [Côte-d’Or], présente, au nom de cette section, une adresse qui contient l’expression fidèle de leurs sentimens ; la Convention en décrète la mention honorable et l’insertion en entier au bulletin (56). [La section de la Liberté, commune de Dijon à la Convention nationale, s.l.n.d .] (57) Représentans du peuple français, Déjà la section de la liberté commune de Dijon vous a manifesté dans une précédente adresse les sentimens dont elle a toujours été animée, elle renouvelle en ce jour le serment de ne point abbandonner ces représentans. Recevés-le ce serment qui deviendra fatal à tous les factieux dont nous vous demandons l’expulsion, qu’ils soient à jamais bannis ces hommes avides de pouvoir et du sang de leurs concitoiens, ces êtres immoraux (54) P.-V., L, 206-207. (55) P.-V., L, 207. (56) P.-V., L, 207. (57) C 328 (2), pl. 1458, p. 16.