ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] [2 juillet 1789.] 183 serves ne sont pas celles du clergé qui était alors parmi nous. Or, il faudrait supposer que des individus ligués ensemble peuvent usurper la puissance, le titre qui appartient au corps entier, et qu’eux seuls doivent décider de la force de la majorité. i M. l’archevêque de Vienne. J’observe que cés actes étaient si peu avoués du clergé que la majorité de cet ordre, réunie depuis longtemps, déclarait n’y prendre aucune part. j M. le comte de Mirabeau. J’ajouterai à la respectable déclaration faite par le préopinant, qu’il est fort étonnant qu’on se permette de protester dans cette Assemblée contre l’Assemblée; on ne proteste pas, on ne fait pas de réserves contre la nation. Nul ne peut rester membre de l’Assemblée nationale s’il n’en reconnaît pas la souveraineté ; et l’Assemblée elle-même ne peut pas délibérer en présence de quiconque se croit le droit de protester contre ses délibérations. Celui qui veut protester contre les actes de l’Assemblée doit, pour en acquérir le droit, commencer par se retirer. Mon opinion est qu’il est absolument contraire aux principes et aux convenances de recevoir des pièces pareilles à celle que vient d’offrir M. le cardinal, et surtout d’en donner acte. M. de Clermont-Tonnerre. Nous sommes réunis dans le sein national, nous sommes parties intégrantes du pouvoir législatif. Sans doute personne ne peut dire je veux ; mais personne n’a plus le droit de rappeler ces temps malheureux de la discorde. Laissons les individus parler de leurs droits; sians doute, et du moins nous devons le penser, i|s céderont avec le temps à l’opinion publique : mon avis est de recevoir les réserves, mais de ne pas en donner acte. M. Pison du Galand. Permettez-moi, Messieurs, de vous présenter deux réflexions; l’une qst relative à la forme et l’autre concerne le fond : 1° quant à la forme, le clergé étant réuni déjà dans la salle, votre procès-verbal ne doit pas renfermer d’équivoque ; or, puisqu’il était dans la salle, on ne peut recevoir comme réserves du clergé celles qu’il ne fait pas,, celles qu’il ne pourrait pas faire, et qui n’appartiennent qu’à la minorité. 2° Quant au fond, notre conduite est déterminée par le parti que nous avons pris le 30 juin, relativement aux protestations de quelques membres de la noblesse. Il a été arrête que ces actes demeureraient entre les mains de vos secrétaires ; cette première délibération est celle qui doit vous régler dans ce moment. M. Mounier. Il faut faire une distinction pntre les actes qui sont des déclarations et ceux qui sont des protestations. j Quant aux premiers, on peut en donner acte ; quant aux seconds, je crois qu’on ne peut même les recevoir. Les premiers sont plus favorables en ce que c’est pour acquitter sa conscience que l’on se détermine à les présenter à l’Assemblée; c’est en quelque sorte une justification publique vis-à-vis des commettants. M. I�egrand n’admet point la distinction du préopinant. M. Bailly objecte que ce n’est pas le moment de se livrer à cette discussion. M. le comte de llirabeau. Un tel acte est moins une réserve, une protestation, qu’un ordre très-impératifqueMessieursdelaminorité du clergé prétendentintimeràl’Assemblée au moment même où ils se disent réunis à elle pour délibérer en commun. Je laisse à la sagesse des membres de l’Assemblée de décider si ce ne serait pas manquer également à eux-mêmes et à leurs commettants, que de recevoir un acte où des membres des Etats-généraux proclament une volonté différente du vœu de l’Assemblée et destructive de ses arrêtés, tandis qu’aucune puissance sous le ciel, pas même le pouvoir exécutif, n’a le droit de dire je veux aux représentants de la nation. M. de Laborde demande que sur cette discussion on revienne à l’ordre du jour. Un député des communes demande que l’acte apporté par M. le cardinal de la Rochefoucauld soit remis dans les mains des secrétaires pour y faire droit s’il y a lieu. M. le Président consulte l’Assemblée, et elle déclare ne reconnaître l’acte lu par M. le cardinal de la Rochefoucauld que comme un vœu particulier et individuel, et que les nouvelles déclarations en ce genre, qui seraient remises dorénavant, demeureront dans les mains des secrétaires, pour y être statué en même temps que sur les précédentes. MM. le comte de Choiseul d’Aillecourt, le comte de Glairmont, le marquis de Biencourt et le marquis de Saint-Mexin, députés l’un et l’autre de la�noblesse de la sénéchaussée de Guéret, ont remis sur le bureau des déclarations relatives à la teneur de leurs mandats. M. Mathias, curé d’ Eglise-Neuve, rapporteur nommé par le comité de vérification, a dit que le comité avait eu sous les yeux les pouvoirs remis par : MM. De Boisgelin, archevêque d’Aix, député de la sénéchaussée d’Aix. Martinet, prieur de Draon, député de la sénéchaussée d’Anjou. Breuvard, curé de Saint-Pierre de Douai, député du bailliage de Douai. Thomas, curé de Mormanl, député du bailliage de Melun, tous députés pour le clergé, Et par MM. Le comte de Lagalissonnière, député de la sénéchaussée d’Anjou. Le comte de Reuillez, idem. Le comte de Dieuzie, idem. Le duc de Choiseul-Praslin, idem. Le marquis de Vaudreuil, député de la sénéchaussée de Castelnaudary. Acliard de Bonvouloir, député du bailliage de Coutances. De Beaudrap, idem. Le comte de la Villarmois, idem. Le baron de Juigné, idem. De Monlesson, député de la sénéchaussée du Maine. De Hercé, idem. De Vassé, idem. Le comte de Tessé, idem. Le bailli de Fresnay, idem. Le marquis de Saint-Maurice, député de la sénéchaussée de Montpellier. Le marquis de Juigné, dépujté des Marches-Communes de Poitou et de Bretagne. Le marquis de Causans, député de la principauté d’Orange. [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [3 juillet 1789.) 184 MM. Le comte Laroque de Mons, député de la sénéchaussée du Périgord. Le vicomte de Foucault de Lardimalie, idem. Le duc de Mailly, député du bailliage de Péronne. Le marquis d’Ambly , député du bailliage de Reims. Le vicomte de Panat, député de la sénéchaussée de Rhodez. Le marquis de Pleure, député du bailliage de Sé-zanne. Le comte de Rénel, député du bailliage de Toul. Le baron de Pouilly, député du bailliage de Verdun. De Ballidard, député du bailliage de Vitry-le-Fran-çais. Le comte de Failly, idem. Tous députés pour la noblesse, qu’ils avaient été trouvés sans contradiction et en bonne forme. L’Assemblée a reconnu les personnes qui viennent d’être nommées, pour députés et membres de l’Assemblée. M. Mathias a repris, et dit que M. l’abbé de Pampelonne, suppléant, nommé à la place de M. Lafont de Savines, évêque de Viviers, dépulé du clergé de Villeneuve de Berg en Vivarais, avait présenté ses pouvoirs pareillement en forme et sans contradiction, et une déclaration de M. l’évêque de Viviers, contenant que sa santé ne lui permettant pas de se rendre à l’Assemblée, il renonçait, en tant que de besoin, à sa qualité de député. L’Assemblée a arrêté que M. de Pampelonne prendrait séance ; ce qu’il a fait. M. de Talleyrand-Pérlgord, évêque d’Au-tun et MM. les députés des communes de Loudun ayant respectivement rapporté le procès-verbal de leur élection, qu’ils n’avaient pas rapporté d’abord, et dont le rapport avait été ordonné, l’Assemblée a reconnu que ces procès-verbaux ôtaient réguliers, et elle a arrêté que M. l’évêque d’Autun et MM. les députés des communes de Loudun prendraient définitivement séance. M. Salomon, rapporteur nommé par le comité de vérification, a rendu compte d’une réclamation du bailliage de Romorentin, et d’une autre du bailliage de Villcfrancœur, contre la députation du bailliage de Blois ; il a dit que le comité avait pensé que ces réclamations devaient être prises en considération pour l’avenir, mais non pas infirmer la députation. L’Assemblée a confirmé l’avis du bureau. MM. Mourot, Noussiton, Pemartin, et d’Arnan-dat, députés des communes de Béarn, se sont présentés, et ont remis leurs pouvoirs sur le bureau. L’Assemblée en a renvoyé l’examen et le rapport au comité de vérification. On reprend l’examen de la suite des articles du règlement lus dans la séance d’hier. Les voici tels qu’ils ont été arrêtés : « On élira un président tous les quinze jours. Ce président pourra être maintenu dans ses fonctions par un autre scrutin au bout de quinze jours. « On procédera au scrutin dans les trente bureaux, qui seront toujours convoqués pour l’après-midi. « Les bureaux s’occuperont du recensement et dépouillement des billets des votants. « Chaque bureau enverra deux de ses membres dans la salle commune, avec un relevé et une liste générale des suffrages. « Une majorité absolue, c’est-à-dire une voix au-dessus de la moitié, décidera seule l’élection ; si cette majorité n’est point acquise, on fera un nouveau scrutin. « Si les voix sont partagées entre deux membres, le plus âgé sera nommé. « On choisira aussi au scrutin six secrétaires ; une simple pluralité décidera cette nomination. Les secrétaires seront élus pour un mois. » M. le président avertit l’Assemblée de se former en bureaux ce soir à six heures, pour procéder au scrutin pour la nomination du président et des secrétaires. La séance est levée. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. BAILLY. Séance du vendredi 3 juillet 1789 (1). . M. le Président ouvre la séance à 10 heures du matin. M. ïLcclerc de Juigné, archevêque deParis, fait lecture d’une lettre qu’il a reçue du Roi, concernant ce qui s’est passé à Paris, dans la soirée du 30 juin. Teneur de celte lettre : « Je me suis fait rendre un compte exact, mon cousin, de ce qui s’est passé dans la soirée du 30 juin : la violence employée pour délivrer des prisonniers à l’Abbaye est infiniment condamnable ; et tous les ordres, tous les corps, tous les citoyens honnêtes et paisibles, ont le plus grand intérêt à maintenir dans toute sa force l’action des lois protectrices de l’ordre public. Je céderai cependant, lorsque l’ordre sera rétabli, à un sentiment de bonté ; et j’espère n’avoir point de reproches à me faire de ma clémence, lorsqu’elle est invoquée, pour la première fois, par l’Assemblée des représentants de la nation. Mais je ne doute pas que cette Assemblée n’attache une égale importance au succès de toutes les mesures que je prends pour ramener l’ordre dans la capitale. L’esprit de licence et d’insubordination est destructif de tout bien ; et s’il prenait de l’accroissement, non-seulement le bonheur de tous les citoyens serait troublé, et leur confiance serait altérée, mais l’on finirait peut-être par méconnaître le prix des généreux travaux auxquels les représentants de la nation vont se consacrer. « Donnez connaissance de ma lettre aux Etats-i généraux, et ne doutez pas, mon cousin, de touté mon estime pour vous. j « Le 2 juillet 1789. j « Signé : LOUIS. » j Sur l’enveloppe était écrit : « A mon cousin l'archevêque de Paris, duc de Saint-Gloud. » Il a été donné connaissance à l’Assemblée, des présidents et secrétaires particuliers élus daus chacun des trente bureaux dans lesquels ses membres se sont partagés : (1) La séance du 3 juillet est incomplète au Moniteur.