470 j Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 130 mars 1191. j M. d’Estourniel. Je demande qu’il ne soit rien statué sur la matière et qu’on s’en rapporte entièrement aux appréciations du ministre, dont les dépenses sont fixées. Un membre : Je propose de laisser au ministre de la guerre, sous sa responsabilité, le soin de pourvoir ainsi qu’il le jugera convenable, à la foi* n i i are des vivres et fourrages. M. Emmery, rapporteur. Il n’est pas question de savoir quelle latitude d’autorité on laissera aux conseils d’administration des régiments; mais de décréter un principe qui est nécessaire au ministre administrateur, pour savoir se conduire dans son département. M. Itegnaud (de Saint-Jean-d’ Angély). L’ad-ministratmn des vivres et fourrages, telle qu’elle a existé, offrait b s plus grands abus. Je crois donc qu’en admettant le projet qui vous a été présenté par M. Emmery, il faut, au lieu d'adopter son idée, (jui est de donner une entreprise à forfait à i.ne compagnie, qu’il y ait une régie nationale. Je crois qu’il y aurait un moyen d’intéresser cette régie à bien administr ret à faire le mieux possible l’avantage île la nation; ce serait de prendre sur les 12 mois de l’année le r levé général du prix des denrées, d’eu faire un prix moyen, et de dire aux régisseurs : « Sur tous les bénéfices que vous pourrez faire à la nation au-. sous de tel prix, vous aurez telle portion de remise dans le bénéfice; et, ce que je vous propose, vous serez obligés de l’adopter pour toutes vos compagnies de finances. M. Emcttery, rapporteur. D’après les observations qui vinnent d’être présentées, la discussion ne semble pas porter que sur les articles 3 et suivants du projet de décret; les deux premiers article-ne paraissant susceptibles d’aucune difficulté, rien ne doit s’opposer à ce qu’on les mette dès maintenant aux voix. (Marques d'assentiment.) Voici ces articles : Art. 1er. « En temps de paix, les fournitures de toute espèce, pour le service ordinaire de l’armée dans scs garnisons et quartiers, seront faites par entreprises laissées au rabais, sauf les exceptions qui seront énoncées ci-après, et celles qui pourraient è re déterminées dans la suite par les législatures, sur la demande du ministre de la guerre. » (Adopté.) Art. 2. « Les adjudications seront toujours faites publiquement, au jour et au lieu indiqués par des affiches qui aunon eront les conditions du marché : les affiches devront être placardées, au moins 6 sunaiues à l’avance, dans tous les chefs-lieux de départements et de districts du royaume, s’il s’agit d’une entreprise générale, et, s’il s’agit d’une entreprise partielle et locale, dans tous les chefs-lieux de cetie localité. » (Adopté.) Un membre propose de renvoyer à la séance de demain soir la suite de la discussion sur le surplus du projet de décret. (Cette motion est décrétée.) M. le Président lève ia séance à trois heures. ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU MERCREDI 30 MARS 1791. Lettre de II. de (îrosboîs, à M. le Président de l'Assemblée en lui envoyant la protestation ci-dessous. Monsieur le Président, J’ai l’honneur de vous envoyer ia protestation que j’ai cru devoir rédiger relativement au décret rendu dans la séance du 28 de ce mois; les cahiers dont Messieurs les gentilshommes du bailliage de b’esançon, m’avaient chargé, m’en imposaient l’obligation formelle. Je vous prie de vouloir bien en donner eounaissanoeà l’Assemblée ainsi que de ma démission que vous verrez que je remets entre les mains de mes commettants, Je suis avec respect, Monsieur le Président, votre très humble et très obéissant serviteur. De Grosbois, député de la noblesse du bailliage , de Besançon Paris, ce 30 mars 1791. Protestation et démission de 11. de Grosbois, député par l'ordre de la noblesse du bailliage de Besançon, aux états généraux. Du 30 mars 1791. L’Assemblée a décrété le 28 de ce mois que, si le roi sortait du royaume, et si, après avoir été invité par une proclamation du Corps législatif, il ne rentrait pas en France, il serait censé avoir abdiqué la royauté. Ce décret, auquel beaucoup démembrés de l’ Assemblée sesonteppo.-és vainement, contre ie projet duquel iis ont réclamé, et auquel ils ont déclaré ne vouloir prendre aucune part, ce décret, dis-je, me semble présenter une innovation trop importante et avoir des conséquences trop danger, uses, pour que je croie pouvoir me contenter de l’opposition verbale quej’yai, ainsiquemes collègues, constamment apportée. Je pense devoir constater ma réclamation dans un écrit public, y consigner mon opinion totalement différente de celle qu’a adoptée l’Assemblée, et rendre de cette manière hommage aux principes que mes commettants m’ont ordonné de professer ‘en leur nom, pour lesquels tout bon Français verserait son sang, et qui, pour cette nation fameuse dans l’univers, par son amour pour ses rois, étaient jusqu’à ce jour une seconde religion. Chargé par un article exprès de mes cahiers de maintenir l’ancienne Constitution monarchique et les lois fondamentales du loyaume dans leur intégrité, de soutenir qu’elles ne peuvent être changées par les états généraux, puis-je me taire lorsque je crois voir cette Constitution, non pas attaquée mais détruite et n’en conservant plus que le vain nom; ces lois, à J’ombre desquelles le royaume a vieilli avec gloire, non pas seulement altérées, mais véritablement anéanties? En e i I et, cette prérogative éminente qui mettait ie roi au-dessus de toute atteinte, celte sauvegarde sans laquelle la tranquillité de l’Etat peut être à chaque instant troublée, l’inviolabilité de la personne sacrée du souverain n’existe vvlus; [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [31 mars 1791.1 471 on prévoit un cas, on détermine un moment où il sera censé avoir abdiqué la royauté, où, sans avoir volontairement déposé sa Couronne, il cessera d’être roi. Et par quel étrange abus d’idées et de mots peut-on prétendre que cette inviolabilité n’est point détruite? C’est, dit-on, parce que le roi, qui ne règne que parla Constitution, doit être le premier sujet des lois et n’est pour cela soumis à personne. Le roi ne règne que par la Constitution. Sa couronne que ses augustes aïeux portent de puis mille ans, est-ce cette Constitution d’un jour qui l*a placée sur sa tête? Nu s commettants nous avaient-ils donc envoyés pour l’asseoir sur le trône? Leur empressement à reconnaître, à consacrer, à respecter la Constitution monarchique, ne nous assure-t-il pas de celui qu’ils auraient mis à nous donner des ordres encore plus précis, s’ils avaient pu prévoir qu’on voulût attaquer les droits et les prééminences du roi ? Mais leurs sentiments d’amour, de respect et de fidélité pour lui ne leur ont pas permis de prévoir ni même de supposer ces atteintes. Le roi est sujet delà loi, et pour cela n'est soumis à personne. Sans doute, il doit la respecter, s’y conformer : ce principe ne peut être contesté, et le roi, qui est la loi vivante, s’identifie avec elle, et devient par là plus auguste. Mais la loi est un être moral qui par lui-même ne peut rien; lorsqu’elle prononce une peine, il est nécessaire que quelqu’un l’applique; et voilà celui auquel on soumet le monarque, celui qu’on ne peut s’empêcher de reconnaître pour supérieur, et c’est ainsi que, dans le cas prévu par le décret du 28 mars, la dignité royale est avilie, son inviolabilité, son indépendance essentielles sont détruites, le roi devient justiciable; le chef suprême de la nation, qui jusqu’à ce jour ne reconnut pas même des égaux, se voit subordonné. Je me garderai de m’étendre davantage sur des raisonnements tant de fois reproduits, et aussi souvent renversés. Mais peut-il rester quelques doutes dans ces bons esprits, sur le danger de ce principe, que le roi ne règne que par la Constitution? On n’a encore prévu qu’un cas où le roi peut-être soumis à une peine; mais les hypothèses ne pourraient-elles pas se multiplier? Dans des temps de troubles, quel vaste champ pour l’intrigue et pour l’ambition! Tout ce qui compose la Constitution, dira-t-on, est également sacré, la violation des moindres règles établies par elle sera transformée en un crime; le souverain qui aura commis, ou une erreur ou un oubli, sera accusé d’avoir voulu la renverser ; des intrigants, des ambitieux qui auraient acquis la faveur du peuple, porteraient peut-être l’audace jusqu’à lui prodiguer ce nom devenu malheureusement si commun, et jamais encore mérité, celui de criminel de lèse-nation, tenteraient ainsi d’écarter du trône son légitime possesseur, et s’efforceraient de l’envahir au milieu des discordes et des guerres cruelles que de si grands intérêts ne mauquent jamais d’allumer. Telles peuvent être les conséquences funestes de ce décret; elles feront horreur à tout bon Français, à tout fidèle sujet du roi. Je déclare donc qo’après m’être opposé à ce que l’Assembiee traitât une question que je ne croyais pas pouvoir loi ê:iv soumise, je n’ai pris aucune part à la délibération dans laquelle ce décret a été rendu. Je déclare que je regarde la personne du roi comme sacrée, inviolable, et au-dessus de tout jugement; que dans aucun temps, sous aucun prétexte le roi ne peut-être justiciable d’aucun tribunal ni d’aucun corps. En conséquence, au nom de mes commettants, pour me conformer à leurs ordres, nommément au contenu de l’article 23 des cahiers dont ils m’ont chargé, pour justifier vis-à-vis d’eux de mon exactitude et de ma fidélité à suivre leurs instructions, je proteste contre le décret rendu à la séance du matin du lundi 28 mars 1791. Je renouvelle encore également en leur nom et d’après l’obligation formelle qui m’en est imposée, les différentes protestations générales et particulières que j’ai faites, et nommément celles des 27 et 30 juin 1789, 19 avril et 20 juin 1790. Je déclare enfin, que je ne crois ni pouvoir ni devoir demeurer plus longtemps dans une Assemblée qui consacre comme des conséquences nécessaires de la Constitution qu’elle a établie, qui rédige en lois des principes entièrement contraires à ceux que j’ai promis de maintenir, aussi opposés à l’esprit qu’à la lettre de mes cahiers, des principes enfin que je ne croirais pouvoir adopter sans crime, puisque les uns me semblent blesser le respect dû à la propriété qui est le fondement essentiel de toute société ; les autres attaquer les lois fondamentales de la monarchie, qui ne peut subsister lorsque la dignité royale est avilie et le monarque subordonné; d’autres enfin contraires à des points essentiels de notre religion, sur lesquels je ne crois pas même permis de douter, lorsque nos maîtres en doctrine, les évêques de France, et le chef de l’Eglise ont proclamé leur décision. Je déclare donc que je remets entre les mains de mes commettants les pouvoirs qu’ils m’avaient fait l’honneur de me confier, et que de ce moment je cesse d’avoir l’avantage d’être leur représentant. De GrosBOIS, député de la noblesse du bailliage de Besançon. Paris ce 30 mars 1791. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. TRONCHET. Séance du jeudi 31 mars 1791, au matin (1). La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin. M. IVugnon, au nom du comité d'emplacement. Une vérité que chaque jour vient manifester, c’est qu’il faut très difficilement permettre d’acquérir aux petits districts ; je les considère comme des voyageurs qui doivent se loger comme on se loge en passant. Pour une administration de 24 heures, il ne faut pas soumettre les administrés à un impôt, local de 12 années. Ces corps temporaires (loin de vous toute allusion personnelle) se pressent de jouir des avantages de la propriété, sans s’occuper beaucoup de l’avenir; et c’est précisément l’avenir que des administrateurs ont à considérer. li est des hommes qui, ayant leur esprit en argent comptant, mettent leur réputation de tapi) Cette séance est incomplète au Moniteur.