[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [âO juin. 1791.] 349 tion, offre de faire cette fabrication à 4 sols par livre; d’où il résulte que le métal de cloches, dont on vous a offert 12 à 15 sols, et qu’un étranger ne fait valoir qu’environ 12 sols dans une brochure dist ibuée depuis peu, montera à 24 sols, déduction faite de la fabrication : ce qui offre un bénéfice de 100 0/0 au profit de la nation; en sorte que la différence qui résulte de la fabrication d’une monnaie du métal de cloches, de préférence à la monnaie de cuivre, est énorme. Car si, comme nous l’avons: dit au commencement de ce rapport, la nation doit faire sortir de ses coffres le prix du cuivre nécessaire à la fabrication de sa monnaie, et que nous supposons au plus bas devoir monter à 10 millions, et que par l’opération de la fonte de ses cloches, comparée à la vente qu’elle en pourrait faire, elle a trouvé un bénéfice de 100 0/0; il s’ensuit que, d’un côt ■, nous éviterons d’envoyer 10 millions en écus chez l’étranger; que de l’autre, nous gagnerons 100 0/0 à fabriquer de la monnaie de nos cloches, au lieu de les vendre, et que nous aurons une monnaie qui ne nous laissera aucun souci. La division que je vous propose, Messieurs, ne me paraît présenter aucun inconvénient : elle donne à la forme de la monnaie la même apparence, quant à la dimension de ses deux faces; la surcharge de sa pesanteur sera portée dans son épaisseur, et plus justement rapprochée de la valeur intrinsèque des matières con-tituanies de son alliage, et qui sont mainlenannt grevées par une augmentation de prix; elle rentrera plus facilement dans la composition des objets nécessaires aux arts et métiers dont j’ai donuô l’énumération. L’opinion que j’ai manifestée, le 30 du mois dernier, sur la nécessité d’adopter la fabrication d’une monnaie coulée avec le métal des cloches, est appuyée dans ce moment de celle de M. l’abbé Rochon, de l’Académie des sciences, et membre de la commission des monnaies et de celle de vos commissaires de la trésorerie. Eu me résumant, il résulte de ce que j’ai dit que vous avez besoin incessamment d’une grande quantité de monnaie de cuivre, et qu’il est impossible de vous la procurer faute de matière, quoiqu’on ait demandé à employer celle de vos arsenaux destinée à la défense de la nation ; il résulte que vous aurez besoin pour Paris seul, le premier du mois prochain, de 50,000 livres au moins de monnaie de cuivre par section, ce qui fait une somme de 2,400,000 livres, et que la monnaie de Paris ne pourra vous en fournir d’ici à cette époque qu’environ 100,000 livres. Il résulte que vous n’avez que le métal des cloches pour vous tirer de cet embarras, et que c’est ce métal seul qui peut, en outre, vous donner la faculté de retirer incessamment votre monnaie de cuivre, si vicieuse pour la faire frapper, sur d’autres principes si celle de cloches ne suffit pas, ou pour en remettre ia matière dans le commerce qui en a un aussi grand besoin ; il en résulte enfin que vous ne pouvez prendre une détermination trop prompte, tant sur l’adoption de la monnaie de cloches, que sur la réforme de vos monnaies de cuivre. Je vous dois, Messieurs, avant de finir, quelques éclaircissements sur plusieurs articles du projet de décret. J’ai cru ne devoir vous présenter des dispositions que pour le département de Paris, p irce ue le besoin est plus pressant et plus manifeste ans cette capitale; que d’ailleurs la même opération dans les autres départements exige des dispositions générales d’un autre genre, et que je suis convaincu que l’essai que vous aurez sous les yeux, déterm nera bientôt vos dispositions ultérieures. Il m’a paru également convenable de laisser au pouvoir exécutif le choix des entrepreneurs de cette fabrication; car je déclare que je ne prétends favoriser que ceux qui feront les conditions les plus sûres et les plus avantageuses à la nation ; votre comité, j’en suis convaincu, pense de même, et il ne vous aurait sûrement pas marqué une préférence qui aurait pu éveiller la calomnie; vous avez, par des décrets fort sages, éloigné de vos comités tout ce qui pouvait les rendre responsables; mais il ne suffit pas que la femme de César soit sage, il 11e faut pas même qu’elle puisse être soupçonnée. Je crois avoir prouvé, Messieurs : 1° Que si votre comité réussissait dans ses expériences, il n’en résulterait aucun avantage, et qu’il serait obligé de vous proposer tel moyen qui serait dangereux et impraticable dans le moment présent; 2° J’ai prouvé que vous pouvez tirer de vos cloches le parti le plus avantageux et le plus prompt ; 3° J’ai prouvé que vous n’avez rien à craindre d’une fabrication frauduleuse. En conséquence, voici mon projet de décret : « Art. 1er. Les cloches des églises supprimées dans le département de Paris seront fondues et coulées en monnaie, conforme aux anciennes empreintes, à raison de 24 pièces de 1 sol à la livre, et de 48 de 2 liards. « Art. 2. Dans la totalité de la fabrication, il y aura les 2 tiers de la valeur en pièces de 1 sol, et l’autre tiers en pièces de 2 liards. « Art. 3. Les entrepreneurs seront tenus, dans la quinzaine du jour de leur adjudication, de remettre en dépôt, à l’hôtel des monnaies, la somme de 40,000 livres en monnaie fabriquée, et d'en remettre pareille somme à la fin de chacune des semaines qui suivront, jusqu’à l’entière fabrication du métal qui leur aura été délivré. « Art. 4. Le pouvoir exécutif pourra adjuger cette fabrication à un ou à plusieurs entrepreneurs, en prenant les précautions nécessaires à l’uniformité des empreintes. « Art. 5. Le 3 pièces servant à former les matrices seront en cuivre rouge, frappées à la monnaie en quantité suffisante pour hâter l’opération du moulage; elles seront de fa même grau leur et empreinte des poinçons actuels, et échantillonnées de manière à ce que, par leur épaisseur, elles puissent produire 24 pièces de 1 sol à la livre, et 48 pièces de 2 liards. : « Art. 6. Il sera tenu compte aux entrepreneurs du 5 0/0 de déchet dans la fabrication, et le poids de la matière sera constaté par le membre delà commission de la monnaie, que te roi chargera de la surveillance de ces établissements. « Art. 7. La dépouille des cloches ou bois et ferrures, tiendra lieu d’indemnité, aux entrepreneurs des frais, à faire pour les démonter, les descendre et les transporter à leur atelier; mais les crapaudines sur lesquelles posent les axes servant à mettre les cloches eu branle, seront pesées avec lesdites cloches, et elles seront employées dans la fonte. « Art. 8. Il sera désigné aux entrepreneurs uu lieu enclos convenable, dans lequel ils puissent faire sur-le-champ l’établissement de la fabrication.