gg [Assemblée nationale, j Quiconque aura commis l’atientat d’investir d’hommes armés le lieu des séances du Corps législatif, ou de les y introduire sans son autorisation ou sa réquisition, sera puni de mort. « Le ministre ou commandant qui en aura donné ou contresigné l’ordre, les chefs et les soldats qui l’auront exécuté subiront la même peine. •> M. llalouet. Je demande qu’on ajoute à cet article la défense d’investir le Corps législatif de tous attroupements, même de gens non armés. ( Rires ironiques à gauche.) M. Briois-Beaumet*. Il faut prier M. Ma-louet d’étudier la Constitution, il y a la loi martiale. M. llalouet. Il est temps d’assurer au Corps législatif le respect qui lui est dû. M. Duport. Je demande à M. Malouet s’il n’a pas eu la liberté jusqu’à présent. A droite , ironiquement : Oui ! oui ! M. Duport. Alors je demande que Monsieur soit mis à l’ordre, et j’en fais la motion. M. Defermon. On a eu la liberté, et même on en a abusé. M. Pelletier de Saint-Fargeau, rapporteur. Si des lois doivent être faites dans le calme, c’est certainement les lois pénales. Ainsi je prie l’As�mblée de vouloir bien écarter de cette délibération tout ce qui lui est étranger. M. llalouet. Je me joins à la demande de M. le rapporteur, et véritablement je vous supplie de me permettre de vous représenter combien il serait fâcheux que des observations sur des matières aussi importantes fussent tournées en dérision ou fussent repoussées par des préventions. Je vous demande si un attroupement tumultueux autour d’une assemblée délibérante, des cris séditieux ou des cris violents qui semblent demander tel décret, qui semblent repousser tel décret, qui semblent inculper tel membre, je vous demande si de tels attentats ne sont pas la ruine de la liberté. Je vous demande s’il n’est pas temps de vous soustraire, au moins pour vos successeurs, à toute influence de pareils inconvénients. Nous avons su les braver ; car je m’associe à cet honorable courage. Mais croyez-vous que vos successeurs puissent également les braver? N’est-il pas d’abord très indécent que la multitude qui a des représentants, et qui cessera d’être digne de la liberté lorsqu’elle cessera de les respecter, n’est-il pastiès indécent qu’elle veuille toujours influer jusque sous vos yeux sur vos délibérations ? Ne doit-elle pas s’accoutumer à recevoir, avec le plus profond respect, et les délibéiations, et les actes du Corps législatif? Sans doute, la liberté doit lui être conservée pour observer, pour remontrer, pour mesurer même la conduite d’un membre qui se conduit mal, mais l’influence directe de la multitude environnant le Corps législatif et demandant à grands cris qu’on repousse un décret, qu’on en prononce un autre : c’est là le crime des esclaves qui aspirent à la licence ; ce u’est point l’acte des hommes libres, qui chérissent la liberté. [8 juin 1791.] Je demande que les attroupements tumultueux même sans armes soient proscrits autour du Corps législatif; je demande en outre qu’il soit dit qu’ils seront dissipés à L’instant, et que tous les chefs ou instigateurs de ces mouvements seront arrêtés et punis d’un an de prison. M. le Pelletier de Saint-Fargeau, rapporteur. Monsieur le Président, je crois pouvoir remplir les vues du préopinant qui me paraissent fort sages par une addition de l’article 3 qui vient d’être adopté. On pourrait, après ces mots du premier paragraphe : « Pour opérer la dissolution du Corps législatif » ajouter ceux-ci : « ou pour empêcher par force ou violence la liberté de ses délibérations ». M. llalouet. Ce n’est pas encore assez. Je veux que l’on mette les attroupements tum ltueux seront dissipés à l’instant. M. Rewbell. On vous a présenté sous mille formes differentes les mêmes amendements, qui tendent à faire croire que vous n’avez pas été libres dans vos délibérations. A droite : Oui! oui! C’est vrai! M. Rewbell. Vous entendez, Messieurs, vous voyez que j’ai deviné la pensée de ceux qui ont fait l’amendement, puisqu’ils ont crié : c’est vrai; et moi je dis : c’est faux ! M. Foucault-lardimalie. Vous avez deviné ce que tout ie monde vous disait. M. llalouet. Il était possible de me deviner, je me suis assez expliqué. M. Rewbell. Je pense que nos successeurs auront la même énergie que nous et M. Malouet, et que, si leurs délibérations étaient réellement gênees par des émeutes, ils sauraient y remédier. Plusieurs membres à gauche : A l’ordre du jour ! M. Goupilleau. Sans vouloir présumer les intentions de personne et en les jugeant favorablement, j’observe à M. Malouet que nous avons la loi martiale pour repousser les attroupements de toutes espèces. M. llalouet. Je vous supplie, Messieurs, de ne voir dans cette délibération aucun fait passé, aucune circonstance environnante.il est à craindre que les corps administratifs, soit par impuissance, soit par défaut de courage, ne soient toujours hors d’état de repousser les attroupements. A gauche : L’ordre du jour! (L’Assemblée, consultée, se prononce pour l’ordre du jour.) M. de Firieu. L’ordre du jour est la proposition de M. Malouet, je le prouverai. ( Murmures prolongés .) M. l’abbé llaury. Je demanderai que les peines, que réclame M. Malouet contre les attroupements qui pourraient environner le Corps législatif, ne pussent être appliquées qu’à la prochaine législature. ( Rires à gauche. Applaudissements à droite.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAI H ES. [8 juin I79l.j 69 M. Le Pelletier de Saint-F argcan, rap-J porteur. J’ai une observation à faire sur ce qui a été dit de sérieux sur la matière grave qui nous occupe en ce moment. M. Oarnave et plusieurs membres : On a passé à l’ordre du jour. M. Martineau. Monsieur le Président, vous n’avez pas prononcé le décret, et je demande la permission de vous observer que vous ne pouvez passer à l’ordre du jour sur l’observation de M. Malom t. En effet, Messieurs, quel est l’objet de votre loi? C’est de maintenir la sûreté, la pleine liberté du Corps législatif. Or, de quelque manière que l’on porte atteinte à cette liberté, le crime est égal. Les comités proposent de décréter des peines contre ceux qui investiraient de troupes le Corps législatif. Eh bien, ou aura toujours un moyen d’éluder cette loi : On fera environner le Corps législatif d’hommes non armés, qu’on aura soudoyés et qu’on aura préparés à la sédition et à la révolte; et qui vous dit qu’un jour, des ministres ou des factieux n’emploieront pas uu tel moyen. Je ne propose pas que l’on décrète que la sédition, que l’attroupement sera dissipé, c’est une affaire de discipline. Ce qu’il s’agit do faire en ce moment, c’est de caractériser le délit et de déterminer la peine. M. Le Pelletier de Saint-Fargean, rapporteur. Je crois que dans ce qu’a proposé M. Ma-loue!,il y a une vérité à prendre ; mais il ne faut pas adopter toutes les mesures qu’il a proposées. 11 faut assurer la liberté du Corps législatif, mais pour cela vous avez déjà plusieurs moyens. D’un côté, vous avez la loi martia'e contre les attroupements ; d’un autre côté, vous avez une loi particulière qui dit que le Corps législatif aura la disposition et la réquisition de la force publique nécessaire pour assurer la liberté de ses délibérations; c’est un des articles qui a élé décrété lorsque vous vous êtes occupés de l’organisation du Corps législatif. Voilà les mesures, nous n’avons pas besoin de les prendre, puisque nous les avons prises. Il ne s’agit que de reconnaître le principe, c’est que la liberté du Corps législatif ne doit être troublée m par des troupes de ligne, ni par un autre moyeu. En conséquence, je reviens à l’amendement que j’avais proposé à l'article 3 ; il rentre dans celui proposé par M. Martineau qui admet la vérité du principe posé par M. Malouet. Il consiste, je le répète, à ajouter à l’article 3 ces mots : « Ou pour empêcher par force ou violence la liberté de ses délibérations. » (L’amendement proposé par M. Le Pelletier de Saint-Fargeau à l’article 3 est adopté.) Eu conséquence, l’article 3 est rédigé en ces termes : Art. 3 (modifié). « Toutes conspirations ou attentat� pour empêcher ta réunion ou pour opérer la dissolution du Corps législatif, ou pour empêcher par force ou violence la liberté de ses délibérations; « Tous attentats contre la liberté individuelle d’un de s s membres seront punis de mort; « Tous ceux qui auront participé auxdits conspirations ou attentats, par les ordres qu’ils auront donnés ou exécutés, subiront aussi la peine portée au présent article. » {Adopté.) M. Le Pelletier de Saint-Fargeau, rapporteur. L’article 5 resterait donc rédigé comme suit : Art. 5. « Quiconque aura commis l’attentat d’investir d’hommes armés le lieu des séances du Corps législatif, ou de les y introduire sans son autorisation ou sa réquisition, sera puni de mort. « Le ministre ou commandant qui en aura donné ou contresigné l’ordre, les chefs et les soldats qui l’auront exécuté subiront la même peine. » (Adopté.) L’article 6 est mis aux voix dans les termes suivants : Art. 6. « Toutes conspirations ou attentats ayant pour objet d’intervertir l’ordre de la succession au trône, déterminé par la Constitution, seront punis de mort. » (Adopté.) M. Le Pelletier de Saint-Fargean, rapporteur, donne lecture de l’article 7 ainsi conçu : « Si que'que acte était publié comme loi, sans avoir été décrété par le Corps législatif, de quelque forme que ledit acte soit revêtu; « Tout ministre qui l’aura contresigné sera puni de la peine de 20 années de gêne ; <« Et si ledit acte n’est pas extérieurement revêtu de la forme constitutionnelle prescrite par le décret du 7 octobre 1789, tout fonctionnaire public, commandant et olficier qui l’auront, fait exécuter ou publier seront punis de la peine de 10 anné s de gêne; « Le présent article ne porte aucune atteinte au droit de faire publier des proclamations et autres actes réservés, par la Constitution, au pouvoir exécutif. » M. Duport. Je suis d’avis que la peine de la gêne proposée par les comités dans cet article contre le ministre doit être remplacée par la peine de mort. Sans doute, on ne m’accusera pas de vouloir étendre la peine de mort ; mais il me paraît impossible de ne pas établir ce principe dans le Code pénal, de rapporter la plus grande peine au plus grand délit. Ensuite il y a un autre rapport naos ce moment-ci qui me paraît devoir déterminer l’Assemblée à changer la peine : c’est qu’il n’y a que deux peines qui puissent convenir aux ministres: c’est la peine de mort et la dégradation civique ; et je demande que pour le crime que les anciens appelaient la tyrannie, qui est l’usurpation du pouvoir de faire la loi, les ministres soient puais du dernier supplice. M. Le Pelletier de Saint-Fargean , rapporteur. Je présente à l'Assemblée une première observation sur le genre de punition que je propose d’as pliquer aux ministres. 11 y a une raison de convenance à ne point admettre un ministre ou un fonctionnaire public dans la troupe des criminels, et à ne point leur appliquer la peine des travaux publics. Cette raison est celle de ne point dégrader les pouvoirs aux yeux de la multitude; mais la peine de la gêne est une simple réclusion, une réclusion solitaire pendant 20 années. Voilà d’abord mon objection sur la peine. Ensuite, quant à l’application de cette peiue au délit dont nous nous occupons, je ne vous propose pas d’appliquer la peine de mort, parce qu’il faut distinguer, dans les actes des fonctionnaires