160 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE dent qu’à surveiller les ennemis de la liberté et à vous entourer de cette masse de confiance due à vos glorieux travaux et si nécessaire pour les continuer. Ceux-là sont les amis stipendiés de Pitt et Guillaume, qui provoquent les mises en liberté de ces aristocrates qui ne profitent de leur élargissement que pour conspirer contre la patrie. Oh ! qu’ils connoissent peu l’opinion publique, ceux qui vous affirment que les nombreuses adresses que vous recevez tous les jours, se fabriquent à Paris, comme s’il étoit défendu de parler et d’écrire sous nos chaumières ! Ceux-là se trompent, qui ont la témérité de prétendre que c’est pour soutenir le modérantisme et l’aristocratie, que nos enfans, nos frères et nos concitoyens ont mis la victoire en permanence dans nos armées. Ils ont beau faire, ces ennemis des droits de l’homme ; leur injustice ne fera que nous rendre plus fermes dans nos principes. Nos voeux les plus ardens seront toujours pour l’union de la Convention avec les Jacobins; et notre dernier mot sera toujours, respect, confiance dans la Convention, estime et considération pour les sociétés populaires. Périssent tous les traîtres, de quelque masque qu’ils se couvrent! Suivent les signatures. 15 La société populaire de Laignes [Côte-d’Or] adhère aux principes de la Convention nationale; elle sollicite un prompt échange des défenseurs de la patrie, en captivité chez l’étranger. Renvoi au comité de Salut public (24). 16 Un membre demande que la Convention nationale porte une loi contre la calomnie. Léonard BOURDON : Les folliculaires doivent-ils impunément se répandre en calomnies contre les patriotes qui ont servi avec fidélité la cause de la liberté? Dans le seizième numéro de Y Orateur du Peuple, par Fréron, j’ai été accusé de vols, d’assassinats. Plusieurs voix : L’ordre du jour. Léonard BOURDON : Je déposerai au comité la preuve que toutes ces atrocités sont calomnieuses. Je demande donc que la Convention nationale charge ses comités de lui présenter un projet de loi contre les calomniateurs. Plusieurs voix : L’ordre du jour ! (24) P.V., XL VII, 177. PELET : Il ne peut y avoir de justice particulière pour nous ; il ne doit pas exister de privilège pour les députés. Je demande donc l’ordre du jour, motivé sur le droit que nous avons, comme les autres citoyens, de poursuivre les calomniateurs devant les tribunaux ordinaires. Un membre : Comment peut-on exercer le recours contre les auteurs d’écrits qui ne sont signés ni des imprimeurs, ni des auteurs (25)? Bourdon objecte qu’il ne s’agit pas de lui, mais d’une loi générale contre les calomniateurs. On observe que déjà plusieurs décrets enjoignent au comité de Législation de présenter ce projet de loi. En conséquence, on demande et l’assemblée adopte l’ordre du jour motivé sur les décrets existans à cet égard (26). La Convention nationale passe à l’ordre du jour, motivé sur ce qu’il existe un décret qui charge les comités, réunis, de Législation, de Salut public et de Sûreté générale de lui présenter un rapport sur cet objet (27). 17 La société populaire de Grasse [Var] transmet à la Convention nationale le legs fait à la patrie par Jean-Baptiste Woiré, d’Origny-sur-Oise, caporal dans la cinquante-cinquième demi-brigade, consistant dans le sabre dont il s’est servi contre les ennemis, une piastre et un écu de six livres. Mention honorable, insertion au bulletin (28). [La société républicaine des sans-culottes de Grasse à la Convention nationale, du 11 vendémiaire an III] (29) Représentans du peuple, Jean-Baptiste Woiré, d’Origni-sur-Oise, canton de Ribemont, district de Saint-Quentin, département de l’Ain [sic pour Aisne], caporal dans la compagnie de Longelin de la 55e demi-brigade, mort dans un de nos hospices militaires, a légué à la République, son sabre, une piastre forte et un écu de six livres. L’expression ne rend pas notre émotion et nos applaudissemens quand le legs de ce brave déffenseur de la patrie, a été déposé sur le bureau du président. (25) Moniteur, XXII, 252; Débats, n° 753, 366. (26) Débats, n° 753, 366; Ann. Patr., n° 653; Ann. R.F., n" 24; C. Eg., n“ 787; F. de la Républ., n" 25; Gazette Fr., n" 1018; J. Fr., n' 750; J. Mont., n° 4; J. Perlet, n” 752; J. Univ., n 1785; Mess. Soir, n“ 788; M.U., XLIV, 380; Rép., n” 25. (27) P. V., XLVII, 177. C 321, pl. 1335, p. 32. (28) P.-V., XLVII, 177. Bull., 1er brum. (suppl.). (29) C 321, pl. 1342, p. 16. SÉANCE DU 24 VENDÉMIAIRE AN III (15 OCTOBRE 1794) - N° 18 161 Représentais, nous vous faisons passer les deux pièces métalliques et nous attendons vos ordres quant au sabre souvent rougi du sang de nos ennemis. Le comité de correspondance, Dousson, Huce, Pugnaire l’aîné. 18 Les sections de Bonne-Nouvelle a et des Piques bf en masse, les membres du tribunal du deuxième arrondissement de Paris c, les autorités constituées de la section du Bonnet-Rouge d, les membres du comité révolutionnaire du cinquième arrondissement du département de Paris e, et les administrateurs du district de Versailles [Seine-et-Oise] f, les officiers publics et employés à l’état civil des citoyens de Paris g, viennent successivement à la barre protester devant la Convention nationale de leur adhésion aux principes qu’elle a manifestés dans son Adresse aux Français, et jurer de ne connoître d’autre point de ralliement qu’elle seule (30). a La section de Bonne-Nouvelle se présente en masse. L’orateur (31) : Citoyens Représentants, La section de Bonne-Nouvelle vient en masse vous féliciter sur l’adresse que vous avez faite au Peuple français. Les principes qu’elle contient vivifient tous les coeurs, raniment le courage des patriotes de bonne foi, et vous donnent un nouveau droit à leur reconnaissance. Comme il serait possible, citoyens représentants, que certains propos tenus dans la société des Jacobins par un membre de notre ancien comité révolutionnaire, et imprimés dans quelques journaux, eussent pu donner à la Convention une idée peu favorable des citoyens qui composent la section de Bonne-Nouvelle, et que la Convention, donnant quelque créance à ces mêmes propos, eût douté un instant de nos sentiments pour elle, nous venons encore démentir une calomnie déshonorante pour son auteur, désabuser la Convention et lui peindre avec autant de franchise que de vérité l’esprit qui anime et dirige la grande majorité de notre section. Il a été avancé aux Jacobins qu’à l’assemblée générale de la section de Bonne-Nouvelle, les aristocrates et les modérés s’étaient opposés à la lecture de l’adresse de la Convention nationale. (30) P.-V., XLVII, 177-178. F. de la Républ., n" 25; Gazette Fr., n° 1018; J. Perlet, n’ 752; Mess. Soir, n" 788; Rép., n° 25. (31) C 322, pl. 1354, p. 13. Moniteur, XXII, 247; Débats, n” 753, 361-363; Bull., 24 vend. Avant de démentir cette allégation, il faut vous dire, citoyens représentants, que ceux-là, qu’une poignée d’individus traitent parmi nous d’aristocrates et de modérés, sont précisément ceux qui ont tout fait pour la révolution; qui de tout tems ont cohopéré avec la Convention au renversement de la tyrannie, et qui emploient le plus d’énergie pour l’empêcher de renaître : ceux qui dans la nuit du 9 au 10 thermidor ont, les armes à la main, fait un rempart de leurs corps à la Convention, ou éclairé leurs concitoyens sur la nécessité d’abandonner à leur sort mérité une portion d’individus immoraux, pour ne s’attacher qu’à la représentation nationale, collectivement prise ; ceux qui depuis comme avant cette époque n’ont tenu d’autre langage que celui que les principes autorisent ; ceux qui ont demandé et obtenu l’ordre du jour sur l’adresse de Dijon, comme la considérant contraire aux sentiments que la Convention manifestait; ceux qui veulent le triomphe de la justice et la disparution de l’intrigue; ceux enfin qui veulent la liberté tout entière, mais qui préfèrent lui élever un autel plutôt sous un berceau de fleurs arrosé d’une onde pure que sous un berceau de cyprès baigné du sang de leurs concitoyens. Il faut vous dire encore que nos calomniateurs, et le nombre en est petit, sont précisément ceux qui, par de faux fuyants ou des motions vagues ont retardé à notre dernière assemblée générale, la lecture de votre adresse au Peuple, réclamée dès l’ouverture de la séance par tous les citoyens que vous voyez dans votre sein; que ce sont ceux qui ont fait adhérer à l’adresse de Dijon après avoir fait rapporter à une heure fort avancée d’une séance, l’arrêté contraire qui avait été pris sur cette même adresse dans une séance précédente; que ce sont ceux qui pendant le règne de la terreur, enfanté par l’ambition et soutenu par le crime, servaient d’instrument au despotisme outré qu’ils partageaient avec plaisir et exerçaient avec autant d’indécence que de brutalité; que ce sont ceux qui pour se mettre à couvert des reproches dus à leur conduite inconséquente, se sont réfugiés depuis le dépouillement de leur autorité, dans le sein d’une société généralement respectable, soit pour y trouver protection, en cas qu’ils n’y soient pas démasqués, soit pour y faire corps avec d’autres eux-mêmes, et recouvrer s’il était possible une autorité dont la dépossession récente leur a paru un acte contre-révolutionnaire ; que ce sont ceux enfin qui, grands meneurs des assemblées générales et des sociétés sectionnâmes défuntes, regardaient toujours un crime comme une erreur ou une erreur comme un crime, suivant que leur intérêt personnel, leur passion et leur égoïsme y trouvaient mieux leur compte. Tel est, citoyens représentants, le tableau fidèle que nous devions vous faire des citoyens calomniés et calomniateurs de la section de Bonne-Nouvelle. Gardez-vous de croire aux discours mensongers qui pourraient distraire vos bonnes intentions. Punissez les ennemis de la révolution sous telle forme qu’ils se montrent! Il est tems, et