41 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 juillet 1791.) fion que vous devez réserver pour la suite ; dans ce moment, il s’agit seulement de la suppression des ordres de chevalerie. La seconde disposition, qu’il me paraît utile et nécessaire de prononcer, c’est la défense à tous citoyens français de prendre daus les actes auxquels ils interviendront aucune qualité relative a la noblesse héréditaire, ni même aucune expression rappelant l’existence ancienne de leur noblesse; qu’il soit en même temps défendu à tous officiers publics de donner à qui que ce soit pareille qualité. Je demande que l’Assemblée charge son comité de jurisprudence criminelle et son comité de Constitution de lui faire dans trois jours la proposition d’un projet de décret sur les peines qui pourront être infligées à ceux qui contreviendront à cette loi. M. le Président. La parole est à M. Prieur. Plusieurs membres : La discussion fermée! (L’Assemblée ferme la discussion.) M. Canins, rapporteur. La discussion qui s’est établie fait voir, en général, que l'on est tous d’accord sur le principe relativement aux ordres qui existent dans le royaume. MM. Lanjuinais et Rœderer ont proposé une rédaction plus claire du premier article : le comité ne peut pas s’y opposer. Voici, en conséquence, la motion de M.Lanjuinais, rédigée avec celle de M. Rœderer. « Toute corporation, toute décoration, tout signe extérieur qui suppose des distinctions de rang et de naissance sont supprimés. Il ne pourra en être établi de pareils à l’avenir. » M. Boissy-d’Anglas. M. Lanjuinais a pensé que non seulement il fallait détruire les cordons qui exigeaient de3 preuves de noblesse, mais encore les ordres qui supposeraient une distinction quelconque, parce que toute distinction est véritablement une noblesse (Non! non!) et qu’on pourrait substituer une autre noblesse à l’ancienne. Je demande donc que le mot ordre soit expressément inséré dans l’article. M. La Poule. Je prie M. le rapporteur d’ajouter à l’article le mot confrérie. (Rires.) Dans la ci-devant province de Franche-Comté, il y a une confrérie de Saint-Georges dont les membres s’assemblent tous les 23 avril. Ils ont un petit Saint-Georges avec un cordon bleu. (Rires.) Cette confrérie existe depuis environ cinq siècles, sous le nom de « confrérie de Saint-Georges » . Ils prennent ce titre dans tous les actes. Je demande que cela soit expressément dit dans l’article. M. Camus, rapporteur. J’ajouterais volontiers confrérie; mais j’observe qu’il est fâcheux que, quand nous faisons une loi générale, chacun songe à la petite partie du royaume qu’il habite, ou à la petite chose qu’il connaît. Il résulte de là que dans beaucoup de nos lois, il y a des énumérations qui deviennent inutiles, superflues. Il faut que les lois, par leurs expressions mêmes, annoncent une disposition générale. Voici définitivement comme je propose de rédiger l’article : Art. 1er. « Tout ordre de chevalerie ou autre, toute corporation, toute décoration, tout signe extérieur qui suppose des distinctions de naissance, sont supprimés en France; il ne pourra en être établi de semblables à l’avenir. » (Adopté.) M. Camus, rapporteur. Je rédigerai le second article en ces termes : « La décoration militaire actuellement existante étant, comme toute récompense honorifique, purement individuelle et personnelle, ne peut être la base d’un ordre ou d’une corporation; pour la recevoir on ne pourra exiger d’autre serment que le serment civique. » M. Olraud-Duplessls. Je demande que l’on ajoute à l’article le mot provisoirement , parce que vous ne voulez sûrement pas, Messieurs, préjuger qu’à l'avenir il n’y aura de distinctions à accorder qu’aux seuls militaires. Chez les peuples barbares on ne connaît qu’un seul moyen de servir la patrie. Ceux qui portent les armes exigent des honneurs à main armée, et voilà comment les premières distinctions se sont introduites ; chez un peuple civilisé il y a différentes manières de servir sa patrie : ceux qui rendent des services dans les législatures, dans les administrations, dans les tribunaux, ont droit aux décorations dues à tous les citoyens qui ont bien mérité de la patrie. M. de Ufontesqnfon. La décoration militaire vous présente un monument d’intolérance religieuse, que vous ne devez pas laisser subsister. L’ordre du Mérite militaire n'est autre que celui deSaint-Louis appliqué à des protestants, et encore à des protestants étrangers; car les protestants français ne pouvaient pas le recevoir. Or, par le décret qu’on vous propose, on supprime les statuts de l’ordre de Saint-Louis et le serment de catholicité qu’il fallait prononcer. Je demande donc que, par ce même décret, l’ordre du Mérite militaire soit fondu au même instant dans l’ordre de Saint-Louis, et la décoration de l’un remplacée par celle de l’autre. (Applaudissements.) M. Lanjuinais. L’amendement de M. de Mon-tesquiou me paraît très convenable. Je demande, moi, que le ruban soit aux couleurs nationales (Applaudissements.) afin d’oublier, d’effacer toute ancienne distinction. (Applaudissements.) M. Tronchet. Il s’agit d’abord d’examiner si vous devez admettre des distinctions différentes ou une seule distinction nationale. Il y a, suivant moi, le plus grand inconvénient à établir des distinctions différentes attachées à différentes professions, parce que c’est rompre l’un i té de la nation; ce serait, pour ainsi dire, introduire dans le royaume autant de castes différentes. Maintenant j’observe que le mot provisoirement ne remplit pas l’esprit de l’amendement de M. Giraud et qu’il serait d’ailleurs très déplacé. Car mettre dans un second article le mot provisoirement ce n’est que faire une exception à la disposition du précédent article ; .et en mettant que cependant par provision le militaire pourra conserver sa décoration, il s’en suivrait que l’on conserverait cette décoration comme un ordre. Je propose de rédiger l’article ainsi : Art. 2. « L’Assemblée nationale se réserve de statuer s’il y aura une distinction nationale unique qui pourra être accordée aux vertus, aux talents et