394 [Etats gên. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Bordeaux. autre côté, de prévenir le trop grand préjudice ou Ja ruine d’établissements chers et précieux à la religion et à l’Etat, et que par conséquent il est expédient de pourvoir à leur équitable indem nité. Qu’il est également nécessaire d’assurer dans chaque diocèse des moyens d’éducation gratuite pour les pauvres clercs, des moyens� d’une retraite honnête pour les curés et autres prêtres que l’âge ou les infirmités contraignent à quitter les fonctions du saint ministère, et enfin une dotation convenable pour les fabriques indigentes. Qu’il est juste et nécessaire que les curés et vicaires dépendant de l’ordre de Malte jouissent d’un sort égal aux autres, le tout à la charge des commanderies, et que lesdites cures soient inamovibles comme les autres. Et pour mieux mettre nos députés en état de faire valoir ces demandes, MM. les curés sont invités à leur fournir des mémoires sur les moyens qu’ils estimeront les plus convenables pour opérer leur succès. Ils demanderont enfin que les novales soient déclarées appartenir aux curés comme par le passé, nonobstant les arlicles 4, 10 et 14 de l’édit de 1762, desquels on demandera la révocation. 33° Ne pourront néanmoins consentir définitivement aucun impôt jusqu’à ce qu’une loi solennelle ait assuré la périodicité, des Etats généraux, la nécessité de leur consentement pour tout impôt ou emprunt, la liberté individuelle et les propriétés, et sera la loi qui interviendra sur ces quatre objets adressée à toutes les cours souveraines pendant la tenue même des Etats généraux, pour y être déposée et • promulguée dans tout le royaume. 34° Nos députés seront enfin chargés de représenter aux Etats généraux l’état déplorable où a été réduite l’église métropolitaine de Bordeaux, par l’incendie du 25 août 1787, qui en a consumé les combles et l’a dégradée dans presque toutes ses parties ; que ce monument, si précieux à la religion, si recommandable par son antiquité, la beauté de son ensemble et sa qualité de première église de cette province, est d’autant plus intéressant pour cette ville, que c’est le lieu où se réunissent, à certains jours de l’année, pour les cérémonies publiques, les divers ordres de citoyens qui ne s’y voient assemblés aujourd’hui qu’avec la crainte et le danger d’être écrasés par la chute des voûtes considérablement endommagées par le feu; qu’il est d’autant plus instant de pourvoir à sa restauration, qu’un plus long retard en entraînerait la ruine totale; que cette église, en faveur de laquelle les rois de France se sont plu en diverses époques à signaler leur zèle et leur amour pour la religion, excitera sans doute encore les dispositions bienfaisantes du monarque qui nous gouverne, pour parvenir à son rétablissement; qu’en conséquence nos députés seront chargés très-expressément d’engager les Etats généraux ou du moins la chambre entière du clergé à demander au Roi une des abbayes actuellement vacantes ou la première qui viendra à vaquer pendant la tenue des Etats généraux d’un revenu suffisant pour pouvoir entreprendre successivement lesdites réparations, d’après le procès-verbal et devis juridique qui en a été envoyé au gouvernement, et les revenus de ladite abbaye y être employés jusqu’à leur entière confection . Signé Gouge, et l’archevêque de Bordeaux. CAHIER. DE L’ORDRE DE LA NOBLESSE DE LA SÉNÉCHAUSSÉE DE GUYENNE, remis à ses députés aux Etats généraux (1). La noblesse de la sénéchaussée de Guyenne, pénétrée du plus profond respect pour son Roi, animée du zèle le plus pur pour le bien de l’Etat, voit renaître avec transport l’occasion heureuse d’offrir à son prince et à sa patrie un hommage et des sentiments dont elle se fera toujours gloire de montrer l’exemple. C’est en conciliant les intérêts du trône et de la nation trop longtemps séparés, qu’elle s’est livrée aux travaux qui doivent concourir à régénérer la France. Puissent ses efforts assurer à jamais le bonheur d’un souverain, assez grand pour ne l’avoir point trouvé au faîte du pouvoir! Puisse le résultat de ce grand œuvre national cimenter la prospérité d’un peuple auquel il ne manque que la précieuse influence dhme bonne administration ! A la vue du travail immense, préparé par le temps, par l'oubli des principes les plus sacrés, et par une multitude de causes secondes, l’esprit s’étonne, mais le patriotisme s’éveille; il n’est pas possible, sans doute, de se flatter que, dans une première session des Etats généraux, leur zèle et leur activité puissent rendre à la vie, réformer ou créer tant d’objets différents qui seront soumis à leur examen ; Aussi est-ce d’après cette considération que l’ordre de la noblesse croit devoir tracer à ses députés une marche qui, sans rien négliger, présentera tous ces objets divers, suivant la graduation. de leur importance, dans quatre sections destinées à les classer. SECTION PREMIÈRE. Objets préalables, fondamentaux et constitution - nels, qui doivent être arrêtés avant de pouvoir passer à aucune autre discussion. Art. 1er. Attendu que la manière de voter ne peut être réglée que d’après le consentement de chaque ordre en particulier, il est enjoint aux députés de ne point s’écarter, à cet égard, de la forme antique et constitutionnelle de voter par ordre. Art. 2. Quoique Sa Majesté, par une prévoyance bien digne de sa justice, et par des expressions pleines de bonté, ait cru devoir éloigner toute idée de gêner les suffrages, cependant, comme le passé doit instruire pour l’avenir , il est indépensable d’arrêter préalablement que tous les membres des Etats généraux seront regardés comme personnes inviolables, placées sous la sauvegarde de la foi publique, et libres de faire tous les efforts raisonnables pour l’exécution d’un mandat dont ils ne doivent être responsables qu’en-vers leurs constituants. Art. 3. Après s’être assurés de la liberté absolue des avis et des personnes, pendant la tenue des Etats généraux, les députés de la noblesse réclameront le maintien de la constitution monarchique, et demanderont à faire constater : 1° La succession au trône, telle que celle qui, par une suite constante et non interrompue jusqu’à nos jours, nous a évité les troubles indispensablement attachés à tout autre ordre de choses. (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Corps législatif, {États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Bordeaux.] 395 2° La plénitude du pouvoir exécutif résidant uniquement dans la personne du monarque. 3° La reconnaissance du droit ancien et imprescriptible qu’a la nation d’accorder seule tous les impô ts directs ou i ndirects; de concouri r , essentiellement avec le monarque, à la formation des lois de toute espèce, générales ou particulières, hors les règlements nécessaires pour faire exécuter tout ce qui aura été déterminé par les Etats as* semblés. Art. 4. La liberté individuelle étant lepremier rapport qui doit résulter de toute société bien constituée, les députés aviseront à tous moyens qui pourront l’assurer inviolablement ; mais attendu que dans un tel sujet, la justice et l’humanité commandent de ne pas perdre un instant, qu’un jour ajouté à la captivité d’une victime du pouvoir arbitraire devient un crime de la société chargée de la protéger, comme enfin le premier acte de la nation française, réunie et rendue à ses droits, doit être un hommage à la liberté, les députés demanderont : 1° Qu’il soit formé un comité, dans le sein des Etats généraux, pour faire la recherche et l’examen de toutes les prisons qui sont soustraites à la juridiction des tribunaux. 2° Qu’après cet examen, Sa Majesté soit suppliée de rompre les fers des malheureux que de faux exposés, des trames ourdies par les passions et l’intrigue, ou même de légères faiblesses auraient conduits dans ces affreux séjours; de renvoyer devant leurs juges naturels ceux qui, par des délits constatés, appartiennent à la loi, qui doit seule les punir. Enfin, de rendre à leur état et à la liberté ces illustres et respectables militaires qui, lors des suites désastreuses des édits du 8 mai, n’oublièrent jamais qu’ils étaient citoyens, préférèrent des disgrâces éclatantes à de viles récompenses, plutôt que de tirer l’épée contre une patrie à laquelle leur sang est dû ppur la défendre et non pour l’opprimer. 3° Qmaprès un préalable qui fera certainement connaître à quel degré peut monter l’abus de ces ordres vexatoires, si connus sous le nom de lettres de cachet, il soit statué sur leur suppression absolue ; et parmi les moyens à présenter pour un but si désirable , ils demanderont d’abord l’exécution des anciennes ordonnances, qui veulent que dans les vingt-quatre heures, les tribunaux prennent connaissance de la capture de tout citoyen, arrêté en vertu d’un ordre quelconque, et qu’il soit fait une nouvelle loi pour admettre les cautions, dans tous les cas où le détenu ne sera point accusé d’un délit qui entraîne peine afflictive. Art. 5. Un des movens les plus sûrs de prévenir désormais les malheurs qui affligent la France depuis si longtemps, est sans doute le retour périodique des Etats généraux. C’est pourquoi les députés demanderont que ce retour soit fixé invariablement à une distance peu éloignée, et que même elle soit nécessairement rapprochée dans tous les cas d’une urgence indispensable, telle qu’une guerre malheureuse ou une régence; mais avec la réserve expresse qu’aucune commission intermédiaire ne puisse être établie dans l’intervalle, attendu que les cours souveraines, avouées par la nation entière, et responsables envers elle, doivent être seules chargées d’enregistrer, sans modification quelconque , les lois qu’elle aura faites, de les garder avec une surveillance scrupuleuse, et de les garantir contre toute entreprise. Art. 6. Le règlement du 24 janvier dernier, et les lettres de convocation qui l’ont précédé, étant contraires aux droits et aux usages nationaux, contenant d’ailleurs plusieurs vices essentiels, ne peuvent être considérés que comme une simple instruction informe, dénuée de tout caractère obligatoire; en conséquence les députés demanderont qu’il soit fait une loi qui, relative aux changements et aux autres rapports survenus depuis' la dernière tenue des Etats, règle leur formation pour l’avenir, par des combinaisons plus régulières. Art. 7. Gomme il est essentiel que chacune des parties du corps politique connaisse les limites du pouvoir que la nature, la raison et la loi lui ont départi, dans le but unique de se fortifier mutuellement, et non de se détruire, les députés demanderont qu’il soit fait une loi fondamentale qui établisse et consacre tous les articles ci-dessus énoncés, et afin de pouvoir se livrer avec confiance et sécurité aux autres qui doivent les occuper, ils n’entreprendront aucune espèce de travail avant que lesdits articles aient été définitivement arrêtés. section 11. Objets sur V obtention desquels les députés seront chargés d'insister fortement pendant la première tenue des Etats généraux. Art. 1er. Les députés demanderont à connaître, avec la plus sévère exactitude, l’état actuel des finances, non-seulement dans leur ensemble, mais encore dans les détails particuliers de chaque département. Ils rechercheront avec soin l’origine, les progrès et les causes légitimes du déficit. Art. 2. Après cet examen, les députés demanderont : 1° Que la dette nationale soit invariablement consolidée ; 2° Que les sommes attribuées à chaque département soient fixées, même celles de la maison de Sa Majesté, d’après l’offre généreuse et paternelle qu’elle en a faite à ses peuples; 3° Que tous les ans un compte rendu soit imprimé et publié, dans le plus grand détail, avec la liste des pensions et les motifs qui les ont fait obtenir; 4° Que chaque ministre soit responsable, aux Etats généraux, des infractions qu’il aura faites aux lois du royaume, ainsi que du mauvais emploi des finances de son département, soit par inconduite ou incapacité. Art. 3. Si les impôts actuels joints aux réformes, aux ressources de l’économie et aux autres moyens qui pourront être suggérés, ne sont pas suffisants pour égaliser la recette et la dépense, les députés sont autorisés à consentir ce qui sera urgent et nécessaire pour en faire le complément, mais seulement jusqu’au temps où la réforme générale des impôts aura pu être opérée, et les nouvelles formes mises en exécution ; et à la charge qu’il soit établi, dans les Etats de chaque province, une caisse nationale d’où sortiront, aux échéances arrêtées par les Etats généraux, les fonds destinés à payer la dette publique, pour être remis directement aux créanciers de l’Etat, dans l’ordre et le rang qui leur auront été assignés. Art. 4. Les députés demanderont que la création, l’organisation et le régime des Etats provinciaux, soient arrêtés au sein des Etats généraux , afin que l’administration de chaque province soit liée avec l’administration générale. Art. 5. La liberté de la presse étant aux affaires publiques ce qu’est une discussion libre dans les intérêts particuliers, les députés insisteront sur 396 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Bordeaux.] l’abolition de toute censure, et aviseront aux moyens les plus convenables pour garantir des atteintes de la licence la religion, les mœurs et l’honneur des citoyens. Art. 6. Gomme les réformes multipliées dans l’administration de la justice civile et criminelle exigeront nécessairement un temps considérable pour y procéder, les députés demanderont une loi provisoire, qui assure une expédition plus prompte, fixe un ordre invariable dans le rang et l'appel des causes inscrites dans chaque tribunal, donne la plus grande activité dans les formes, pour vider les prisons, assigne les moyens les plus humains pour les rendre salubres, et supprime tous committimus , évocations et commissions particulières, en sorte qu’aucun citoyen, corps ou communauté, ne puisse être enlevé à ses juges naturels et locaux, sauf les cas de droit qui sont indiqués par les ordonnances actuelles du royaume, ou qui le seront dans un nouveau corps de législation. Art. 7. La propriété des corps et communes, devant, être aussi sacrée que celle des particuliers, non-seulement en vertu de la propriété elle-même, mais encore en raison des vices qui accompagnent toujours une administration éloignée, les députés rappelleront l'exécution des anciennes ordonnances, et notamment celle de Blois de 1579, qui veulent que les communes administrent seules et librement leurs revenus, et aient une entière liberté dans l’élection de leurs officiers municipaux. Ils insisteront particulièrement sur les désordres qui régent aujourd’hui dans la municipalité de la ville de Bordeaux, d’après l’anéantissement des principes de sa constitution, et réclameront de la justice de Sa Majesté, de rendre à ses fonctions son premier magistrat qui, victime d’un zèle honorable, gémit depuis si longtemps sous les décrets d'un tribunal incompétent. Art. 8. Les sacrilices que la noblesse est déterminée à offrir pour le bien de l’Etat, ne doivent pas lui faire perdre de vue les membres de son ordre que le sort a dévoué aux malheurs de l’indigence. Sa générosité deviendrait injustice, si quelques nouvelles routes ne lui étaient pas ouvertes pour maintenir la balance qui doit exister dans tous les ordres de l’Etat. C’est pourquoi les députés demanderont aux Etats généraux de prendre en considération la noblesse indigente. Ils proposeront de l’assimiler au régime et aux privilèges dont jouit celle de Bretagne, relativement au commerce, en l’assujettissant aux formalités prescrites à cet égard. SECTION III. Objets qui présentent de trop grandes difficultés pour être terminés dans une seule tenue clés Etats généraux, et qui, exigeant un temps considérable, tant pour l'examen que pour l'exécution, seront seulement proposés. Art. 1er Les députés proposeront de s’occuper de toutes les réformes nécessaires dans l’administration do la justice civile et criminelle; et à cet effet qu’il soit établi un comité de magistrats et de jurisconsultes, choisis dans l’universalité du royaume, qui commencera préalablement par la rédaction d’un code pénal, et rendra compte de son travail à la première tenue des Etats généraux. Art. 2. Que Sa Majesté soit suppliée de réformer l’abus des moyens trop multipliés d’acquérir la noblesse, soit par diverses charges, avec ou sans finance, ou par des lettres d’anoblissement, obtenues sans vérification de leur exposé ; et que les députés demandent aux Etats de pourvoir incessamment à la vérification des nobles. Art. 3. Qu’on cherche tous les moyens défavoriser l’agriculture, le commerce et l’industrie utile ; de lever les obstacles qui les troublent, ou en arrêtent les progrès, tels que les douanes et droits qui gênent la circulation intérieure, l’excès de ceux qui se perçoivent sur les objets d’exportation, l’obtention ou le renouvellement des privilèges exclusifs, et particulièrement toute espèce de changements dans les monnaies. Art. 4. De consentir à l’aliénation des domaines royaux, si elle est jugée nécessaire, pourvu que les Etats prescrivent la forme obligatoire dans laquelle la vente en sera faite, et que le produit soit totalement employé à libérer la dette que la nation aura reconnue. Art. 5. Qu’il soit formé un plan d’éducation publique dont les principes soient analogues à la constitution nationale, et que Sa Majesté soit suppliée de nommer un comité à cet effet. Art. 6. Que la réduction du nombre trop multiplié des fêtes soit prise en considération, comme nuisant infiniment à l’agriculture, au commerce et aux arts utiles. Art. 7. Qu'il soit pourvu à une plus grande sûreté publique et intérieure du royaume, par l’augmentation des maréchaussées, ou par tel autre moyen que les Etats jugeront convenable. Art. 8. Que Sa Majesté soit suppliée très-instamment de faire rédiger un code militaire stable, qui conserve à l’ancienneté les avantages précieux d’une longue expérience; qui assure, dans chaque classe, la juste considération et les récompenses dues au mérite ; maintienne la subordination nécessaire au succès et à la gloire de nos armes; rassure l’état des officiers, en leur accordant des juges réguliers lorsqu’ils sont inculpés ; fixe les moyens les plus sages, les plus économiques et les plus humains, de procurer au soldat sa nourriture, son entretien, un logement sain, et supprime enfin ces châtiments avilissants qui n’inspirent qu’un dégoût trop dangereux pour le service de la patrie. Art. 9. Afin que la seconde Assemblée nationale puisse adopter les plans les plus sages sur tous les objets d’administration, que Sa Majesté soit suppliée de former plusieurs comités de législation, guerre, marine, finances, agriculture, commerce et arts, composés de personnes éclairées, désignées par la voix publique, et qui soient autorisées à appeler encore le concours de toutesles lumières de la nation. SECTION IV. Octroi de l'impôt. Art. 1er. Après que les députés auront obtenu les articles de la première section, délibéré sur ceux de la seconde, et proposé ceux de la troisième, ils seront autorisés à consentir à la prorogation des impôts actuels, ou à la création de nouveaux, en observant cependant : 1° Que tous impôts, soit prorogés, soit créés, directs ou indirects, ne dureront que jusqu’à l’époque fixée pour la tenue la plus prochaine des Etats généraux, auquel temps ils cesseront de droit et de fait. 2° Que tous impôts directs, connus sous le nom de taille, corvée, capitation, dixième et vingtième, seront supprimés et représentés par deux nouveaux, seuls et uniques, dont l’un sur les capitalistes, et l’autre sur les propriétaires d’immeubles. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Bordeaux.] 397 3° Que dans les diverses manières d’asseoir ce dernier sur les propriétés foncières, produisant fruits annuels, l’impôt en nature sur ces fruits sera indiqué, comme étant le seul peut-être qui réunisse les avantages d’une prestation facile et d’une juste proportion au revenu des contribuables. 4° Que les Etats provinciaux soient spécialement chargés de l’assiette et répartition desdits impôts, avec la faculté de verser directement dans le trésor royal les sommes qui devront lui être remises, et de retenir celles destinées aux frais de l’administration dans chaque province. Art. 2. Mais de quelque manière que soient assis définitivement lesdits impôts, l’ordre de la noblesse charge ses députés de déclarer qu’il renonce formellement à toute distinction à cet égard; qu’il entend les supporter avec la plus entière égalité, soit dans la répartition qui en sera faite, soit dans la forme de les acquitter. Art. 3. S’il était proposé quelque objet de délibération importante, non prévu dans le présent cahier, il est enjoint à nos députés de prendre nos instructions ultérieures à cet égard. Clos et arrêté le 7 avril 1789, à quatre heures de relevée, dans l’assemblée de la noblesse de la sénéchaussée de Guyenne , et par son ordre, en présence de M. le grand sénéchal, qui l’a signé au bas de chaque page, ainsi que le secrétaire et les commissaires, à la fin de celui. Signé Gala-theau, commissaire; le chevalier de Casaux, commissaire ; de Sen tout, commissaire; le vicomte de Segur, commissaire ; le chevalier de Vertha-mon; lechevalier deGautreteau; de La Gorge, commissaire ; le marquis de Mons de Dunes, commissaire; Mabolin-Conteneuil, commissaire; le chevalier Froger de Larigaudière, commissaire ; le vicomte de Pontac, commissaire; Lavie, commissaire ; Ghillaud aîné, commissaire : CAHIER GÉNÉRAL. * Des demandes du tiers-état de la sénéchaussée de Guyenne (1). C’est un exemple bien rare, un spectacle touchant, que celui d’une nation appelée à la liberté par son monarque. Ce bienfait unique, combien n’en renferme-t-il pas? La liberté de l’homme dans la disposition de sa personne, de ses biens et de toutes ses facultés, liberté de l’âme dans l’exercice de sa volonté pour le consentement aux lois, aux devoirs, aux sacrifices qu’elle doit s’imposer; liberté de la pensée dans les écrits publics ; liberté de la parole dans les assemblées nationales ; L’égalité des droits communs dans l’inégalité des rangs et des fortunes ; toutes les classes se rapprochant en trois ordres pour y chercher l’intérêt de tous les citoyens dans le vœu de chacun ; personne n’ayant plus à se glorifier, plus à rougir de sa condition, mais uniquementde ses actions; l’honneur attaché désormais aux talents et le mérite aux vertus, mais attendant leur prix et leur récompense de l’estime de la nation ; les grands à leur tour recherchant la faveur du peuple, par des sacrifices, des monuments ou des services publics; le peuple intéressé par sa reconnaissance à défendre les grands contre les entreprises d’une puissance illimitée : voilà tous les biens que le Français va recevoir d’un Roi qui méritera seul les noms de juste, de bienfaisant et dlami du peuple. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. C’est à tous ces titres que le tiers-état de la sénéchaussée de Guyenne lui jure un dévouement inépuisable, un amour sans bornes, une éternelle fidélité, des sentiments enfin qui passeraient même, s’il était possible, la mesure de sa bonté. Ge sont là les gages de sa confiance et de sa sécurité dans rénonciation de ses nombreuses doléances, et les demandes qui, justement accueil-lies, les feront cesser et disparaître. Constitution. Le tiers-état de la sénéchaussée de Guyenne demande qu’il soit établi une constitution fixe qui détermine irrévocablement les droits du Roi et ceux de-+a nation. Que pour base do cette constitution, il soit statué que les Etats généraux seront convoqués à des époques certaines et invariables dont les termes rapprochés seront fixés par l’assemblée elle-même. Que dans l’intervalle de la tenue des Etats généraux , aucune commission intermédiaire ne pourra les suppléer. Que les élections des députés aux Etats généraux seront toujours parfaitement libres, et les formes de ces élections réglées de manière à conserver à chaque citoyen son droit de suffrage. Que pour assurera l’ordre du tiers-état une influence égale à sa représentation, les délibérations soient prises les trois ordres réunis, et que les voix soient comptées par tête et non par ordre. Que la personne d’un député aux Etats généraux soit déclarée inviolable et sacrée ; qu’il ne soit comptable qu’aux seuls Etats généraux de tout ce qu’il aura pu dire ou faire dans le sein de l’assemblée. Que sur toutes les matières importantes et principalement sur celles qui sont relatives à la constitution, ce ne soit qu’à la troisième délibération prise à jour successif, que le résultat des opinions puisse être définitivement arrêté. L’organisation des Etats généraux ainsi déterminée, le tiers-état demande qu’il soit statué qu’à la nation seule assemblée en Etats généraux appartient le droit de consentir l’impôt et d’en fixer la durée en proportion des vrais besoins de l’Etat. Que nul emprunt ne puisse être faitquedu consentement des Etats généraux, lesquels, en autorisant l’emprunt, indiqueront les fonds qui devront en opérer l’amortissement. Qu’il soit pareillement statué que le concours du pouvoir de la nation et du souverain sera nécessaire pour la formation des lois générales et permanentes du royaume ; que ces lois ainsi faites seront publiées et enregistrées dans les cours souveraines de justice, sans qu’elles puissent apporter à cet enregistrement aucun délai ni modification. Que cependant les règlements de simple administration continueront d’être confiés au conseil du monarque, pourvu qu’ils ne contiennent rien de contraire à la législation générale et qu’ils soient soumis à la révision des Etats généraux. Qu’il soit statué que les Etats généraux seront juges de tous les cas de forfaiture des tribunaux souverains. Qu’il soit reconnu comme loi constitutive de l’Etat que la liberté et la propriété individuelle du citoyen sont inviolables. Que les lettres de cachet et tous les ordres arbitraires soient abolis ; que toute personne arrêtée en vertu d’ordres supérieurs sera dans les vingt-quatre heures traduite devant ses juges naturels et jugée suivant les lois du royaume.