SÉANCE DU 18 BRUMAIRE AN III (8 NOVEMBRE 1794) - N° 13 533 esprits, les faiseurs de complimens ne seroient pas plus habiles que nous et sans avoir étudié sur des bancs de collège, la science grammaticale, nous scavons aimer de touttes nos forces, la Convention nationâle, aprécier les bienfaits que nous tenons d’elle et éxécuter ses décrets, nous scavons cultiver nos terres et engraisser des boeufs pour nos frères des armées voila tout nôtre sçavoir, cette disette d’esprit ne nous a pas empêché de suivre tous les mouvemens de la révolution, ni de la soutenir de tous nos pouvoirs. A peine eûmes nous entendus prononcer le mot de Liberté, que nous nous passionâmes pour elle et soupirâmes après son arrivée. Dès qu’elle parut nos coeurs volèrent audevant d’elle, elle reçut nos caresses, nos adorations et l’homage de nôtre éxistance ; et elle a toujours trouvé en nous des amis sincères et constans qui ont jurés de la conserver ou de périr avec elle. Dès que la main puissante de la philosophie eut brisé la phiole de Rheims et que sa voix eut publié le jugement de mort du fanatisme, nous nous empressâmes de déposer sur l’autel de la patrie les hochêts que l’imbécile piété de nos pères avait consacrés au culte des chrétiens, nos bras guidés par la raison, renversèrent le piédestal du momérisme et le théâtre où des baladins fanatiques intéressoient nôtre crédulité à leurs saintes farces, devint le lieu où nos enfans se forment aux devoirs du citoyen, se familliarisent avec la pratique des vertus et de la morale publique et apprennent à détester les tyrans et tous les tourmenteurs des hommes. Ceux de nous que la république a appellé à sa déffense, ne se sont pas fait tirer l’oreille, comme messieurs les freluquets des villes, ils se sont élancés dans l’arène militaire avec une joyeuse impétuosité; ils terrassent les esclaves des mandrins couronnés et ceux que le fer de ces briguands a frappés sont descendus sous la tombe en criant Vive la République et en formant des voeux pour sa gloire et pour son bonheur. Législateurs, c’est là tout ce que nous avons fait pour la patrie. Il nous reste des coeurs bru-lans de patriotisme et des bras vigoureux, nous les offrons à la Convention; que d’autres communes remplissent le bulletin national de la nomenclature de leurs offrandes et du detail de leurs traveaux civiques ; qu’elles obtiennent des mentions honnorables pour des sacrifices qui, souvent n’ont coûté d’autre peine que celle d’être mis par écrit, qu’elles vantent dans des discours pétillants d’esprit et répandant l’odeur de l’apprêt, leur dévouement à la cause du peuple ; qu’elles grossissent le nombre des héros, qu’elles ont envoyés aux frontières; que parfois se livrant aux écarts d’un patriotisme éfréné, elles voient des aristocrates en foulle; qu’à la nouvelle d’un mouvement ou d’une rixe populaire elles craignent la contre révolution; ou saisissant la verge de fer de Robespierre, elles provoquent contre ceux qui ne partagent pas leur déliré frénétique, les vexations et la tourmente, pour nous, nous n’avons pas la force de crier si haut; nous ne sçavons pas comme ces patriotes par éxelence, torturer nos semblables pour des erreurs échappées à la fragilité humaine; nous ne croyons pas qu’un vent calme puisse faire naufrager le vaisseau de la République, ni que quelques faibles roseaux arrêtent le torrent révolutionaire ; nous ne croyons pas, comme la société délirante d’Ussel que le patriotisme et l’humanité sont incompatibles, ce paradoxe, digne d’embélir le code d’une peuplade de canibales, n’a jamais noirci les écrits du sans culotte Rousseau, nous ne croyons pas que la liberté se plaise sur un thrône cimenté de cadavres et de sang, ni qu’elle aime à ouvrir des bastilles ou à dresser des échafauds, nous ne parlons de la guillotine que pour punir les despotes, les contre révolu-tionaires et les conspirateurs, nous croyons que la justice doit être la pierre fondamentale du gouvernement révolutionaire; qu’il doit être maintenu dans toutte sa fermeté ; que sa marche doit être rapide et régulière et que son cours, semblable à celui d’un fleuve qui a été trop long-tems foitté par la tempête, doit reprendre sa tranquilité primitive, périssent tous les vils hipocrites qui souilleroient la limpidité de ses eaux par des jêts de sang et de boue. Législateurs, tels sont nos principes, vous les avés consacrés dans vôtre adresse du 18 vendémiaire, nous les soutiendrons jusqu’à la mort, restés à vôtre poste et conduisés à sa perfection l’ouvrage de nôtre bonheur, les bénédictions d’un peuple réconnoissant vous attendent à la fin de votre carrière. Pour coppie conforme. Bandeix, maire. 13 Les administrateurs du département de Maine-et-Loire disent à la Convention nationale que maintenant, délivrés des fers que leur avoient forgés l’imposture et la terreur homicide, les habitans confiés à leurs soins manifestent de toutes les manières les principes qu’ils ont trouvés dans la sublime Adresse aux Français. Ils l’invitent à achever la révolution et à consolider la République. Mention honorable, insertion au bulletin (27). \Les administrateurs du département de Maine-et-Loire à la Convention nationale, Angers, le 10 brumaire an III] (28) (27) P.-V., XLIX, 47. (28) C 324, pl. 1394, p. 10. Bull., 21 brum. (suppl.).