216 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 114 juin 1790.] M. de Sérant. Je demande que les prêtres desservant les hôpitaux puissent être appelés à l’épiscopat. M. l’abbé Mougins de Roquefort. Cet amendement honore l’humanité; aussi je l’appuie en demandant que non seulement ceux qui se sont voués au soulagement des malades, mais ceux qui se consacrent à l’instruction publique, puissent être appelés à l’épiscopat. M. Moreau. Il y a aussi une autre classe d’ecclésiastiques qui mérite bien l’attention de l’Assemblée; ce sont les principaux des collèges; je demande qu’ils soient aussi désignés dans les cas d’exception. M. de SIHery. Lorsqu’on fait des lois, il faut qu’elles soient applicables à tous les cas : il est possible qu’un siège venant à vaquer, il ne se trouve dans les diocèses aucun curé qui ait exercé le ministère pendant dix ans ; je demande alorscom-ment se pourraient faire les élections ? M. Dumouehel. Sans doute, ceux qui se sont consacrés à l'éducation publique méritent bien l’attention de l’Assemblée. N'exercent-ils pas une administration vraiment utile dans l’intérieur des maisons qui leur sont confiées? Parce que leurs soins se dirigent vers des enfants, sont-ils moins respectables? Je demande donc que, pour l’avenir seulement, les principaux des collèges soient éligibles aux évêchés, et que les professeurs de théologie le soient pour le présent et pour l’avenir: les instituteurs de vos évêques sont-ils moins digues des places que ceux qu’ils ont instruits? M. Prieur. En appuyant la proposition du préopinant , j’y ajouterai , par amendement : « tous les ecclésiastiques qui se sont consacrés à l’éducation publique ». M. l’abbé Grégoire. Ce n’est que par modestie que M. Dumouehel a présenté un plan qui l’excluait lui-même : c’est une raison de plus d’appuyer l’amendement de M. Prieur. M. Martineau. Tout le monde est d’accord sur le principe. Je demande donc que l’article soit adopté, sauf la rédaction. M. Fabbé Gouttes. Je demande que chaque partie de l’article soit successivement mise aux voix. Un membre demande que les prédicateurs soient aussi conservés dans l’article. M. Bouche. On veut sans doute parler de ces missionnaires éclairés qui suivent les préceptes qu’ils enseignent et non les prédicateurs de cour. M. Fabbé de Saint-Esteven. On ne prétend pas sans doute exclure les prêtres des missions étrangères, qui , après avoir quitté ce qu’ils ont de plus cher, se sont exposés à tous les dangers pour annoncer la parole de Jésus-Christ. Qu’ap-pelle-t-on être les descendants des apôtres? C’est prendre un bâton pour aller prêcher la foi, et exposer sa vie au milieu des infidèles. J’ai été huit ans dans les missions, et on croira peut-être que je parle pour moi; mais je déclare que je renonce aux évêchés, parce que je suis trop vieux. M. de Sïllery. Je dois rendre justice au respectable ecclésiastique qui vient de porter la parole. Je l’ai vu dans les Indes-Orientales, où, pendant cinq années, il a souvent été mis en prison pour son zèle à soutenir et à défendre la religion chrétienne. M. le Président met aux voix les divers amendements. Ils sont adoptés. M. Martineau, rapporteur. Je propose à l’Assemblée de décréter les amendements dans les termes qui suivent : «Art. 9. Les curés et autres ecclésiastiques qui, par l’effet de la nouvelle circonscription des diocèses se trouveront dans un diocèse différent de celui où ils exerçaient leurs fonctions, seront réputés les avoir exercées dans leurs nouveaux diocèses, et ils seront en conséquence éligibles, pourvu qu’ils aient d’ailleurs le temps d’exercice ci-devant exigé. « Art. 10. Pourront aussi être élus les curés actuels qui auraient dix années d’exercice dans une cure du diocèse, encore qu’ils n'eussent pas auparavant rempli les fonctions de vicaire. « Art. 11. Il en sera de même des curés dont les paroisses auraient été supprimées en vertu du présent décret, et il leur sera compté comme temps d’exercice celui qui se sera écoulé depuis la suppression de leurs cures. c Art. 12. Les missionnaires, les vicaires généraux des évêques, les ecclésiastiques desservant les hôpitaux, ou chargés de l’éducation publique, seront pareillement éligibles lorsqu’ils auront rempli leurs fonctions pendant quinze ans, à compter de leur promotion au sacerdoce. « Art. 13. Seront pareillement éligibles tous dignitaires, chanoines, et en général tous bénéficiers et titulaires qui étaient obligés à résidence, ou exerçaient des fonctions ecclésiastiques, et dont les bénéfices, titres, offices ou emplois se trouvent supprimés par le présent décret, lorsqu’ils auront quinze aunées d’exercice comptées, comme il est dit des curés dans l’article précédent. » (Ges articles sont décrétés.) M. Martineau, rapporteur. L’article 11 du titre 2 du projet était ainsi conçu : « Art. 11. La proclamation de l’élu se fera toujours en l’église cathédrale, en présence du peuple et de tout le clergé de l’église cathédrale et avant de commencer la messe solennelle qui sera célébrée à cet effet. » Vos précédents décrets rendentune modification nécessaire dans la rédaction de cet article 11 qui devient le 14. Nous vous proposons le texte suivant : « Art. 14 (ancien art. 11). La proclamation de l’élu se fera par le président de l’assemblée électorale dans l’église où l’élection aura été faite en présence du peuple et du clergé, et avant de commencer la messe solennelle qui sera célébrée à cet effet. » (Adopté.) Les articles 15 et 16 présentés en termes nouveaux par le comité sont adoptés sans discus-. sion, ainsi qu’il suit : « Art. 15 (ancien art. 12). Le procès-verbal de l’élection et de la proclamation sera envoyé au roi par le président de l’assemblée des électeurs, pour donner à Sa Majesté connaissance du choix qui aura été fait. « Art. 16 (ancien art. 15). Au plus tard, dans le mois qui suivra son élection, celui qui aura été élu à un évêché sê présentera en personne à son [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 juin 1790.] évêque métropolitain, et, s’il a été élu pour le siège de la métropole, au plus ancien évêque de l’arrondissement avec le procès-verbal d’élection et de proclamation, et il le suppliera de lui accorder la confirmation canonique. » M. Martineau, rapporteur , donne lecture de l’ancien art. 16, qui deviendra le 17e du décret. « Art. 16. L’évêque métropolitain ne pourra refuser la confirmation canonique qu’après en avoir délibéré avec tout le clergé de son église, et à la charge par lui de donner par écrit les raisons de son refus, signé de lui et des deux tiers au moins des membres de son conseil. » M. Dnquesnoy. Je demande la question préalable sur cet article : il n’est pas possible que l’évêque puisse refuser la confirmation à celui qui aura obtenu le suffrage du peuple. S’il en était autrement, vous verriez bientôt les évêques n’admettre que les ecclésiastiques qu’ils sauraient devoir perpétuer l’esprit de corps, si dangereux pour une constitution libre. M. l’abbé Gouttes. Les électeurs peuvent faire de mauvais choix ; il faut bien que l’évêque et son conseil examinent le sujet. C’est le seul moyen d’exclure de l’état ecclésiastique ces hommes dont les mœurs sont absolument contraires à l’esprit de cet état. M. l’abbé Bourdon, curé d'Évaux. Quand l’Assemblée a refusée au roi le pouvoir de rejeter les juges qui lui étaient présentés, il est bien étonnant qu’on nous propose de donner à un évêque le droit de pouvoir contredire le suffrage du peuple. On craint, dit-on, que la cabale et l’intrigue n’agissent dans les assemblées des électeurs; je demande si elles n’auront pas bien plus d’effet dans la cour de l’évêque. Je demande donc que 1 eveto ecclésiastique ne soit point établi par la Constitution. M. ldanjuinais.il faut que la confirmation de l’évêque soit un acte nécessaire et libre, ou bien vous confondez les deux pouvoirs, te pouvoir temporel et le pouvoir spirituel, et vous détruisez la religion. On demande que la discussion soit fermée.) Cette proposition mise aux voix est décrétée.) M. l’abbé Bilion, curé du Vieux-Pouz anges . Dans la primitive Eglise on n’a jamais demandé la confirmation métropolitaine. Je demande la division de l’article, que je rédige ainsi : « L’évêque métropolitain ne pourra refuser la confirmation canonique qui lui aura été demandée. » (On observe que la discussion est fermée, et que la proposition de M. l’abbé Dillon est une motion et non un amendement.) M. Laborde de Mérévllle. Plusieurs membres du comité ecclésiastique qui siègent dans cette partie de la salle m’observent que l’article proposé par M. Martineau n’est pas le vœu de la majorité du comité. Je demande que l’article lui soit renvoyé. M. Martineau. Je n’ai proposé aucun article à l’Assemblée qui D’ait auparavant été consenti par le comité, et particulièrement celui que nous discutons en ce moment. 217 (L’Assemblée décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur le renvoi au comité.) M. de Sillery. Si vous accordez aux évêques le droit de refuser la confirmation qui leur sera demandée, et qu’ils la refusent effectivement, il faudra bien, sans doute, procéder à une nouvelle élection. Je demande donc qu’après cette seconde élection, si le môme ecclésiastique est élu, l’évêque ne puisse plus refuser la confirmation. M. Lanjuinais. Ou l’Assemblée entend faire des lois pour la religion catholique, qui est celle de l’Etat, ou pour une religion qu’il lui plairait de faire. A Dieu ne plaise qu’une pareille idée soit jamais mise à exécution! Je la repousse loin de ma pensée. L’amendement proposé ne fait que reculer la difficulté, et nous fait toucher au doigt combien il est nécessaire que la confirmation ne soit accordée que par ceux qui ont reçu de Dieu une mission expresse. M. Treilhard. Il faut prendre bien des précautions pour que les fonctions du sacerdoce ne soient accordées qu’à des gens qui en soient véritablement dignes; mais il faut avoir soin aussi que jamais l’évêque ne puisse refuser la confirmation à un sujet par des prétextes frivoles. Il s’agit donc de composer avec le plus grand soin le synode; en conséquence, je demande l’ajournement de l’article jusqu’à ce que cette for mation soit achevée. M. Goupil de Préfeln. On a d’autant moins à„,craindre que la confirmation des évêques soit refusée sous faux prétextes, que la voie d’appel comme d’abus sera toujours ouverte. . (On demande la question préalable sur l’ajournement. L’Assemblée décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur l’ajournement.) M. l’abbé Bourdon, curé d'Évaux. Je demande, pour l’intérêt public, que l’Assemblée mette toujours dans ses délibérations la plus grande lenteur, et qu’elle renvoie aux comités ecclésiastique et de Constitution une question qui a besoin encore d’ètre éclaircie. Je suis bien surpris de voir que les membres qui, quatre ou cinq fois, sont venus nous annoncer qu’ils ne prenaient aucune part aux délibérations sur tout ce qui regarde le clergé, s’élèvent en ce moment avec précipitation pour rejeter un ajournement ou un renvoi qui ont pour objet unique d’éclairer l’Assemblee sur des matières d’une grande importance. M. Prieur demande la parole. On demande à aller aux voix. L’Assemblée décide que M. Prieur sera entendu. M. Prieur. Je ne conçois pas comment, lorsqu’il s’agit de déléguer aes pouvoirs importants, on peut presser ainsi la délibération. Une partie de l’Assemblée s’oppose à ce qu’on délibère; je vais justifier ma résistance personnelle. Ma religion n’est point éclairée; la discussion n’a porté jusqu’à ce moment que sur des demandes en ajournement et en renvoi au comité. L’article proposé donne à l’évêque le droit d'iuvalider l’élection du peuple, et l’article suivant à un synode métropolitain celui de refuser indéfiniment l’institution canonique : ou croit corriger ces dispositions en disant, dans un autre article, que l’examen du métropolitain ou du synode ne por-