15 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 septembre 1790.] royaume, sur toutes les propriétés, sans aucune exemption, à raison de leur étendue ; 3° que son comité de l’imposition lui présentera, à cet effet, le plus promptement possible, un taux pour la contribution à acquitter par le citoyen le moins aisé; 4° qu’il sera établi un contribution territoriale sur toutes les propriétés foncières et immobilières, à raison de leurs produits respectifs, d’après une somme qui sera déterminée par l’Assemblée nationale, sur le rapport de son comité de l’imposition, d’après la nature et la connaissance qui lui sera donnée des besoins de l’Etat ; 5° qu’il sera établi une contribution industrielle, qui sera payée par tous les citoyens, sans exemption, pour raison de leurs propriétés mobilières, en prenant pour base la valeur des logements qu’ils occupent , dans une proportion uniforme, sauf à augmenter cette proportion, d’après le rapport de son comité de l’imposition, à l’égard de ceux qui exercent une profession, un art ou une industrie quelconque. (L’Assemblée ajourne à mardi prochain, séance du matin, la suite de la discussion sur la contribution foncière.) Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une seconde lettre de M. Guignard signalant le refus de payement des droits de champart ; en voici l’extrait : « Au mépris des décrets de l’Assemblée nationale, [on cherche, par la terreur ou par la force, à se soustraire au payement des dîmes et des droits de champart, et autres redevances ci-devant féodales. M. Esparbès me mande de Cahors que sur les limites du département de la Dordogne, non seulement on refuse de payer ces dettes, mais qu’on a élevé des potences pour effrayer ceux qui voudraient les acquitter. Des troupes de ligne ont été employées pour assurer ces perceptions ; mais elles sont en très petit nombre dans les provinces méridionales. L’augmentation des maréchaussées et l’organisation des gardes nationales paraissant être les seuls moyens sur l’efficacité desquels on puisse compter, il est important que l’Assemblée les prenne en considération. » M. l’abbé Maury. Je n’ai qu’une observation à présenter. Vous avez chargé les tribunaux de veiller au payement des droits et redevances supprimés sans indemnité; mais la plupart des praticiens aspirent à des places dans le nouvel ordre judiciaire : la crainte qu’ils ont de déplaire au peuple rend toute justice impossible à obtenir. Je demande que les corps administratifs soient chargés de prendre tous les moyens qui sont en leur pouvoir, pour assurer le payement des droits et redevances non abolis sans indemnité, et de décider les contestations qui s’élèvent au sujet de ces droits. M. Regnand (de Saint-Jean-d’ Angély .) Cette proposition peut d’autant moins être adoptée que, par un décret, vous avez ordonné aux procureurs du roi de poursuivre les personnes qui refusent de payer les droits conservés. Ces officiers, qui, pour la plupart, seront sans doute maintenus dans leurs fonctions, ne sont pas dans le cas des praticiens dont M. l’abbé Maury a parlé. Il est possible que le décret qui leur a enjoint ces poursuites ne soit pas suffisamment connu. On ne sait que trop que quelquefois on n’exécute pas les décrets qui protègent les propriétés, pour avoir le triste plaisir de vous porter des réclamations et des plaintes. Je propose de charger M. le président d’écrire à M. le garde des sceaux pour lui demander s’il a envoyé le décret dont il s’agit aux tribunaux du département de la Dordogne, ou bien, dans le cas où ce décret aurait été envoyé, quelles sont les causes de son inexécution. M. de Crillon le jeune. Dans le département de l’Oise, le peuple était dans les mêmes dispositions. Sur la réquisition du directoire, les gardes nationales ont marché, et tout est rentré dans l’ordre : vous avez voté des remercîments à ce directoire et aux gardes nationales. Le département de la Dordogne a les mêmes moyens. Il u’est donc pas nécessaire de décréter de nouvelles dispositions. M. de Foucault. La véritable raison de tous ces mouvements c’est que vous n'avez pas de force publique. Hâtez-vous de l’organiser, et le jour où vous aurez terminé ce travail sera celui où vous verrez l’ordre se rétablir. M. Merlin. Il est temps de marcher librement à l’achèvement de la Constitution, et d’écarter les entraves par lesquelles on éloigne le moment où nous pourrons arriver à ce but. Il faut apprendre aux agents du pouvoir exécutif à faire leur devoir; ce n’est pas nous qui devons remplir leurs fonctions. Les décrets sont extrêmement clairs : je demande qu’on renvoie la lettre sur laquelle nous délibérons au ministre qui l’a adressée, pour que fe pouvoir exécutif ordonne aux tribunaux et aux corps administratifs d’exécuter les décrets de l’Assemblée nationale. M. Martineau. Ce n’est pas assez pour le ministre d’avoir vos décrets à la main, il faut qu’il puisse les appuyer par la force armée : le ministre dit qu’elle lui manque. Organisez donc les gardes nationales , augmentez donc les maréchaussées. Si vous ne le satisfaites pas sur ces deux objets, pouvez-vous avec justice le rendre responsable? Je propose d’enjoindre au comité de vous présenter ses vues à cet égard et que les séances du soir soient entièrement consacrées à ces deux objets. M. Bouche. En exécution d’un décret rendu il y a plusieurs jours, il faut ordonner au comité de Constitution de vous faire, ce soir même, sou rapport sur l’organisation des gardes nationales. M. Ce Chapelier. Quelque zèle que le comité apporte dans ses opérations sur une partie qu’il regarde comme la clef de la Constitution, il ne peut encore vous présenter ce rapport; il y travaille matin et soir. Je demande la permission d’observer qu’il s’agit uniquement d’organiser les gardes nationales, suivant les principes de la Constitution, et qu’elles ne peuvent servir l’ordre public mieux qu’elles ne le font maintenant. J’ajoute encore que, sans doute, vous ne discuterez pas cette matière dans une séance du soir. Après quelques amendements, le décret suivant est rendu : « L’Assemblée nationale, délibérant sur la lettre écrite aujourd’hui à son Président, par le ministre du roi, relativement aux obstacles qu’éprouvent, dans quelques paroisses, la perception des droits ci-devant seigneuriaux, qui ne sont pas supprimés sans indemnité ; renvoie au pouvoir exécutif, pour l’exécution des décrets de l’Assemblée sanctionnés par le roi. » M. le Président. Par suite du résultat du scrutin pour la nomination du comité des monnaies, les membres élus sont : ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 septembre 1790.] Jg [Assemblée nationale.] MM. de Cussy, député de Caen ; de Virieu, député du Dauphiné ; Dupré, député de Carcassonne ; Poignot, député de Paris; Belzais de Gourménil, député d'Alençon ; Jourdan, député de Trévoux. M. Garesché, au nom du comité des finances, fait le rapport suivant sur le compte de clerc à maître présenté par la caisse d'escompte (1). Messieurs, votre décret du 4 juin dernier autorise le premier ministre des finances à recevoir de la caisse d’escompte, de clerc à maître, de la distribution de numéraire qu’elle a faite depuis le 1er janvier 1790, jusqu’au 1er juillet suivant, ainsi que des frais relatifs à cette distribution, pour que ladite caisse soit indemnisée, s’il y a lieu. Ce compte, rendu par les administrateurs de la caisse au premier ministre des finances, a été approuvé et renvoyé par lui à votre comité, avec toutes les pièces au soutien des articles qui le composent. Votre comité a examiné et vérifié avec soin tous les articles de change, intérêt et dépenses qui établissent le total des frais appartenant à l’achat, importation et conversion en écus des matières d’or et d’argent acquises dans le royaume et hors du royaume; sa vérification et son examen se sont aussi étendus sur les comptes des correspondants français et étrangers, employés par la caisse pour ces achats, de même que sur les livres de ladite caisse; et votre comité les a trouvés tenus avec tant d’exactitude et de clarté, qu’en donnant aux administrateurs les éloges qu’ils méritaient, il a bien sincèrement désiré que la comptabilité du Trésor public offrît à l’avenir autant d’ordre et de précision. Gomme votre décret du 4 juin dernier reconnaît la nécessité et l’utilité de la distribution journalière d’espèces, à laquelle s’est livrée la caisse d’escompte pendant les six premiers mois de cette année, le travail de votre comité se réduit à vous présenter sommairement, et avec le plus de clarté qu’il lui sera possible : 1° le résultat dû à la caisse, en réglant avec elle de clerc à maître; 2° ce qu’eût été ce même résultat, si les dispositions de vos décrets des 19 décembre et 17 avril derniers n’eussent éprouvé aucun changement. La caisse d’escompte s’attachant littéralement à l’expression de clerc à maître , employée dans votre décret du 4 juin dernier, vous met en son lieu et place, vous abandonne en entier ses bénéfices d’escompte du semestre dernier, et réclame de votre justice : 1° Le remboursement des frais et pertes qu’elle justifie avoir faits pour se procurer les matières u’or et d’argent nécessaires à la distribution journalière d’espèces qu’exigeait d’elle le maintien de la tranquillité publique ; 2° Le remboursement de ses frais d’administration pendant le premier semestre de 1790; 3° Enfin, l’intérêt au taux usité dans le commerce de la totalité des fonds qu’elle a consacrés au service public. Les frais relatifs à l’achat et extraction des espèces montent à ................ 2,877,807 liv. 10 s. 4 d. (1) Le Moniteur ne donne qu’un sommaire de ce rapport. Celui des frais d’administration s’élève à .......... Enfin, celui des intérêts réclamés sur une somme de 70 millions, montant du porte feuille et fonds de caisse, forme ............. 306,164 liv. 1 s. 5 d, 2,100,000 liv. » s. » d. Ces trois objets réunis donnent un total de ...... 5,283,971 liv. Il s. 9 d. dont il faut déduire ....... 1» 592,741 liv. 8 s. 9 d. pour solde des bénéfices d’escompte obtenus le semestre dernier; 2° 6,822 10 5 pour diverses erreurs relevées par votre comité, sur les articles 3, 14, 19,24,32, 34 et 42 du compte des dépenses de l’administration. 3° 350,000 » » pour réduction à 5 0/0 par - : - an, pendant six mois, de 949 563 liv. 19 s. 2 d. l’intérêt porté par la caisse ’ * ' à 6 0/0 sur son capital de 70 millions. Ces trois articles à distraire, s'élevant ensemble à 949,563 1. 19 s. 2 d., reste à la charge du Trésor public 4,334,407 liv. 12 s. 7d. C’est ici, Messieurs, le moment de vous avertir que la caisse d’escompte n’ayant distribué depuis votre décret du 19 décembre dernier, que 30,735,500 livres et ayant acheté 33,097,400 livres de matières, il lui reste en écus à votre disposition une somme de 2,361,900 livres, libre de tous frais et échangeable seulement contre pareille somme de billets de caisse ou assignats: dans un moment où l’on se procure difficilement des espèces à 6 0/0; dans un moment où le gouvernement, pour ménager aux besoins particuliers le numéraire qui circule dans le royaume, se sou met à tirer de l’étranger celui qui lui est absolument nécessaire pour le service public, et le paye 10 à 11 0/0, on peut évaluer comme un bénéfice pour le Trésor public, une remise qui lui évite 230 millions de sacrifices. Tel est, Messieurs, suivant l’avis de votre comité, le résultat du compte de la caisse d’escompte, en réglant avec elle de clerc à maître. Permettez-nous actuellement de vous dire ce qu’eût été ce même résultat, si on eût pris pour base de règlement votre décret du 19 décembre dernier, ou celui du 17 avril. Par celui du 19 décembre, vous attribuiez à la caisse, jusqu’au 1er juillet 1790, un intérêt de 5 0/0 par an sur les 90 millions qu’elle avait comptés au Trésor public dans les derniers mois de 1789, et sur les 80 millions qu’elle y devait verser dans les premiers mois de 1790; et moyennant cet intérêt vous paraissiez, par votre silence, laisser à sa charge le montant de tous les frais qu’elle ferait pour entretenir la distribution journalière d’espèces à laquelle elle s’ôtait volontairement soumise : cet arrangement, en obligeant le Trésor public à l’acquit de 4,250,000 livres d’intérêt, conserverait en outre à la caisse la possession de ses bénéfices dVscompte du semestre dernier, et la jouissance d’une somme en écus de 2,361,900 livres qu’elle avait payée 8 2/3 0/0, et dont le remplacement en coûterait aujourd’hui à l’Etat de 10 à 11: ainsi, sous ce premier rapport, il serait plus avantageux à la caisse, que les dispositions à son égard, de votre décret du 19 dé-