SÉANCE DU 6 MESSIDOR AN II (24 JUIN 1794) - N° 15 141 non tout cela n’est pas l’effet du hazard ou d’une force aveugle; c’est l’ouvrage d’une intelligence suprême, qui s’est complue à ordonner toutes ces choses. L’homme descend dans son cœur, il pénétre sa propre existence, il reconnoit qu’il pense, qu’il veut et qu’il aime et il se dit : et moi aussi je suis un être intelligent, je suis différent de cette terre que je foule, de cet animal que je conduis, j’ai des rapports avec lui, mais j’en ai aussi avec l’auteur de tous les êtres : ah ! sans doute, il y a en moi quelque chose qui ne périra pas, j’ai une ame immortelle. Representans, ce n’etoit point assez pour vous d’avoir proclamés les droits de l’homme et la Constitution française en présence de l’Etre suprême; ce n’étoit point assez d’avoir, a différentes fois, proclamé le libre exercice des cultes, il manquoit à votre gloire, on devoit attendre de votre sagesse une déclaration so-lemnelle que le peuple françois reconnoit l’Etre suprême et l’immortalité de l’ame, dogmes inséparables, fondemens étemels du juste et de l’injuste, de la paix, de la véritable égalité, de la liberté et du bonheur Le Rappellerons nous ? des insensés ou des méchants ont osé dire, non, il n’y a point de Dieu, tout est l’effet du hazard; la vertu est un mot vide de sens; notre intérêt voila notre unique régie; le succès voilà la mesure du juste ou de l’injuste. Vous les avés terrassés, ces nouveaux titans qui vouloient escalader le ciel et boulverser la terre : vous avés de nouveau sauvé la République; vous avés détourné un danger mille fois plus grand que l’effet de toutes les puissances coalisées; vous avés, pour le dire en un mot, reconcilié l’homme avec lui-même, avec le ciel, avec la nature, avec son semblable, vous avés redonné à son être ce sentiment sublime qui l’attache à tout ce qui est en lui et hors de lui; qui lui fait mesurer le passé, le présent et l’avenir. Etre-Suprême ! tu vas recevoir l’hommage libre et pur du peuple le plus généreux, le plus magnanime, la nation françoise. Chez elle ce sera le besoin de tous les momens de t’honorer, d’aimer son frère, d’aimer surtout sa patrie, d’être juste, d’être reconnoissant, de se pénétrer des vrais principe de l’Egalité et de la liberté, pour que jamais nul individu n’usurpe un pouvoir quelconque sur un autre individu, pour qu’on ne reconnoisse jamais d’autre autorité que celle de la raison universelle, que tu as créée, que tu as créée pure et que les hommes avaient défigurée et rendue méconnois-sable, pour servir leur ambition et leur orgueil. Amour paternel, amour filial, amour conjugal, pureté des mœurs, pudeur, respect de soi même et des loix, noble ambition de l’estime universelle, amour de la vraie gloire passion des grandes âmes, besoin de tous les hommes sainte humanité, heureuse bienfaisance, désintéressement, frugalité, amitié gage des vertus, sentiment qui fait le bonheur de l’homme dans tout le cours de la vie et le précis de la morale : ne fais pas à un autre ce que tu ne veux pas qu’il te soit fait, fais lui au contraire tout ce que tu voudrais qui te fut fait... Etre-Suprême ! Hommes qui couvrés la face du globe ! voilà nos maximes; voilà les françois, voilà ceux qui ont juré d’être libres ou de mourir : voilà ceux qui vivront, qui seront libres, ceux qui par leur courage et leur exemple fonderont la liberté sur la terre. Représentans ! voila votre ouvrage. L’immortalité sera votre récompense. Dès à présent vous entendés le concert de tout un peuple qui s’unit pour vous féliciter; vous recueillés les larmes de l’homme de bien, du bon père, de la tendre mère, du fils respectueux; que ne pouvés vous entendre les accens de ces hommes simples et droits, de ces hommes précieux, de ces cultivateurs, de ces artisans, qui vous bénissent et dont il est impossible de rendre les transports. » [3 signatures illisibles]. 15 Les citoyens composant la société populaire de Neuchâtel, département de Seine-et-Oise, expriment à la Convention nationale l’indignation dont ils ont été pénétrés à la nouvelle de l’attentat dirigé contre Collot-d’Herbois et Robespierre; l’assurent qu’ils envient la gloire du brave Geffroy, et l’invitent à rester à son poste. Mention honorable, insertion au bulletin (1). [Neuf châtel, 22 prair. II] (2). « Citoyens Réprésentans La Republique vient encore d’être témoin des lâches manœuvres de nos ennemis dans l’assassinat de Robespierre et de Collot d’Herbois. Mais leurs poignards ne les ont pas servi selon leurs désirs, nous frémissons du crime en nous félicitant de ce qu’il n’est pas consommé; le génie de la liberté a protégé d’une manière éclatante ces deux vertueux déffenseurs des droits du Peuple, il n’a pas permis qu’ils fussent otés a la Patrie au moment où leur éxis-tence est si chere, où ils jettent le désespoir dans l’àme scélérate des tirans qui ne peuvent se venger que par l’assassinat. De tous les points de la république, il doit etre rendu des actions de grâces à l’etemel de les avoir conservés en dépit des Pitt et des Cobourg et tous ces tirans que nous devons vouer à l’éxécration. Citoyens representans; nous ne comptons parmi vous que des amis du peuple disposés à se sacrifier pour le triomphe de la liberté, qui eussent envié le sort de Robespierre et de Col-lot d’Herbôis, s’ils eussent succombé sous le fer assassin. Fiers de votre vertu et du désespoir du crime poursuivez vos travaux au milieu des périls qui menacent vos jours; la liberté vous couvre de son egide bienfaisante, le peuple français est débout pour vous venger et laver dans le sang du dernier des tirans leurs perfides assassinats. Les républicains de la Société populaire de Neufchatel n’aspirent qu’a la gloire de se montrer de nouveaux Geoffroy et de faire un rempart de leurs corps aux fideles representans du Peuple. Vive la republique ! vive la montagne ! Bienfait, Blondel, Marguery [et 1 signature illisible]. (1) P.V. , XL, 118. Mentionné par Débats , n° 644. (2) C 309, pl. 1204, p. 8; pour Débats il s’agirait de « Neufchatel, Seine-Inférieure ». SÉANCE DU 6 MESSIDOR AN II (24 JUIN 1794) - N° 15 141 non tout cela n’est pas l’effet du hazard ou d’une force aveugle; c’est l’ouvrage d’une intelligence suprême, qui s’est complue à ordonner toutes ces choses. L’homme descend dans son cœur, il pénétre sa propre existence, il reconnoit qu’il pense, qu’il veut et qu’il aime et il se dit : et moi aussi je suis un être intelligent, je suis différent de cette terre que je foule, de cet animal que je conduis, j’ai des rapports avec lui, mais j’en ai aussi avec l’auteur de tous les êtres : ah ! sans doute, il y a en moi quelque chose qui ne périra pas, j’ai une ame immortelle. Representans, ce n’etoit point assez pour vous d’avoir proclamés les droits de l’homme et la Constitution française en présence de l’Etre suprême; ce n’étoit point assez d’avoir, a différentes fois, proclamé le libre exercice des cultes, il manquoit à votre gloire, on devoit attendre de votre sagesse une déclaration so-lemnelle que le peuple françois reconnoit l’Etre suprême et l’immortalité de l’ame, dogmes inséparables, fondemens étemels du juste et de l’injuste, de la paix, de la véritable égalité, de la liberté et du bonheur Le Rappellerons nous ? des insensés ou des méchants ont osé dire, non, il n’y a point de Dieu, tout est l’effet du hazard; la vertu est un mot vide de sens; notre intérêt voila notre unique régie; le succès voilà la mesure du juste ou de l’injuste. Vous les avés terrassés, ces nouveaux titans qui vouloient escalader le ciel et boulverser la terre : vous avés de nouveau sauvé la République; vous avés détourné un danger mille fois plus grand que l’effet de toutes les puissances coalisées; vous avés, pour le dire en un mot, reconcilié l’homme avec lui-même, avec le ciel, avec la nature, avec son semblable, vous avés redonné à son être ce sentiment sublime qui l’attache à tout ce qui est en lui et hors de lui; qui lui fait mesurer le passé, le présent et l’avenir. Etre-Suprême ! tu vas recevoir l’hommage libre et pur du peuple le plus généreux, le plus magnanime, la nation françoise. Chez elle ce sera le besoin de tous les momens de t’honorer, d’aimer son frère, d’aimer surtout sa patrie, d’être juste, d’être reconnoissant, de se pénétrer des vrais principe de l’Egalité et de la liberté, pour que jamais nul individu n’usurpe un pouvoir quelconque sur un autre individu, pour qu’on ne reconnoisse jamais d’autre autorité que celle de la raison universelle, que tu as créée, que tu as créée pure et que les hommes avaient défigurée et rendue méconnois-sable, pour servir leur ambition et leur orgueil. Amour paternel, amour filial, amour conjugal, pureté des mœurs, pudeur, respect de soi même et des loix, noble ambition de l’estime universelle, amour de la vraie gloire passion des grandes âmes, besoin de tous les hommes sainte humanité, heureuse bienfaisance, désintéressement, frugalité, amitié gage des vertus, sentiment qui fait le bonheur de l’homme dans tout le cours de la vie et le précis de la morale : ne fais pas à un autre ce que tu ne veux pas qu’il te soit fait, fais lui au contraire tout ce que tu voudrais qui te fut fait... Etre-Suprême ! Hommes qui couvrés la face du globe ! voilà nos maximes; voilà les françois, voilà ceux qui ont juré d’être libres ou de mourir : voilà ceux qui vivront, qui seront libres, ceux qui par leur courage et leur exemple fonderont la liberté sur la terre. Représentans ! voila votre ouvrage. L’immortalité sera votre récompense. Dès à présent vous entendés le concert de tout un peuple qui s’unit pour vous féliciter; vous recueillés les larmes de l’homme de bien, du bon père, de la tendre mère, du fils respectueux; que ne pouvés vous entendre les accens de ces hommes simples et droits, de ces hommes précieux, de ces cultivateurs, de ces artisans, qui vous bénissent et dont il est impossible de rendre les transports. » [3 signatures illisibles]. 15 Les citoyens composant la société populaire de Neuchâtel, département de Seine-et-Oise, expriment à la Convention nationale l’indignation dont ils ont été pénétrés à la nouvelle de l’attentat dirigé contre Collot-d’Herbois et Robespierre; l’assurent qu’ils envient la gloire du brave Geffroy, et l’invitent à rester à son poste. Mention honorable, insertion au bulletin (1). [Neuf châtel, 22 prair. II] (2). « Citoyens Réprésentans La Republique vient encore d’être témoin des lâches manœuvres de nos ennemis dans l’assassinat de Robespierre et de Collot d’Herbois. Mais leurs poignards ne les ont pas servi selon leurs désirs, nous frémissons du crime en nous félicitant de ce qu’il n’est pas consommé; le génie de la liberté a protégé d’une manière éclatante ces deux vertueux déffenseurs des droits du Peuple, il n’a pas permis qu’ils fussent otés a la Patrie au moment où leur éxis-tence est si chere, où ils jettent le désespoir dans l’àme scélérate des tirans qui ne peuvent se venger que par l’assassinat. De tous les points de la république, il doit etre rendu des actions de grâces à l’etemel de les avoir conservés en dépit des Pitt et des Cobourg et tous ces tirans que nous devons vouer à l’éxécration. Citoyens representans; nous ne comptons parmi vous que des amis du peuple disposés à se sacrifier pour le triomphe de la liberté, qui eussent envié le sort de Robespierre et de Col-lot d’Herbôis, s’ils eussent succombé sous le fer assassin. Fiers de votre vertu et du désespoir du crime poursuivez vos travaux au milieu des périls qui menacent vos jours; la liberté vous couvre de son egide bienfaisante, le peuple français est débout pour vous venger et laver dans le sang du dernier des tirans leurs perfides assassinats. Les républicains de la Société populaire de Neufchatel n’aspirent qu’a la gloire de se montrer de nouveaux Geoffroy et de faire un rempart de leurs corps aux fideles representans du Peuple. Vive la republique ! vive la montagne ! Bienfait, Blondel, Marguery [et 1 signature illisible]. (1) P.V. , XL, 118. Mentionné par Débats , n° 644. (2) C 309, pl. 1204, p. 8; pour Débats il s’agirait de « Neufchatel, Seine-Inférieure ».