226 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* [17 février 1791.) il faut que tous les travaux domestiques soient exemptés. Et remarquez que la désignation de tous les genres d’occupations qui doivent être exceptés serait aussi difficile à faire que celle des professions imposables, et que la moindre omission exposerait une foule de malheureux à être poursuivis. Je demande que le eomité fasse la nomenclature de toutes les professions soumises au droit ; cette nomenclature n’est pas si difficile à faire, puisque les anciennes lois l’ont faite, puisqu’on la trouve sur les registres de tous les parlements. M. de Choiseul-Praslin fils. Je propose un sous-amendtment qui est que les fonctionnaires publics n’auront pas besoin de patentes pour exercer leurs fonctions, à moins qu'ils n’exercent quelque art ou manufacture particulier. M. Malouet. Il est injuste qu’un homme qui ne peut pas payer la valeur de 3 journées de travail pour obtenir le droit qui lui serait le plus précieux, celui de citoyen actif, soit soumis, pour obtenir la permission de travailler, à p endre une patente de 6 livres ou 9 livres. Gela est évidemment impossible : or, c’est précisément le résultat que vous obtenez, si vous exigez un droit de patente sans exception de toutes les personnes travaillant en leur particulier. Je demande donc, Messieurs, que l’indication soit précise. (Murmures.) Un membre : Dépêchez-vous ! M. Malouet. Permettez-moi, Monsieur le Président, de demander qu’aucun membre n’ait le droit de me dire : Dépêchez-vous! Je demande, Messieurs, l’indication précise de toutes les professions soumises au droit de patente, et je demande en outre qu’on excepte formellement tout homme n'ayant pas le moyen de payer la contribution de citoyen actif. M. Merlin appuie la motion de M. Martineau. M. d’André. Il est ridicule d’établir des exceptions à une loi, avant de l’avoir généralisée; cette marche serait sujette à toute sorte d’embarras, de réclamations et de prétextes plus ou moins spécieux pour se soustraire à l’esprit de la loi, qui n’est jamais plus juste que lorsqu’elle est générale et s’étend également sur tous, sauf quelques exceptions que la raison et l’équité réclament et commandent. De plus, une nomenclature d’arts et métiers, dont on n’a pas de modèle parfait, laisserait une ouverture trop étendue à la cupidité et à la mauvaise foi, qui ne se croiraient jamais compris sous telle ou telle dénomination. Si vous aimez mieux faire la nomenclature de toutes les professions soumises au droit que celle des professions peu nombreuses qui en doivent être exemptes, je soutiens que la loi est impossible. Chaque département a des professions différentes, selon la nature de ses productions et de ses manufactures ; chacun donne aux mêmes professions des noms différents; il n’est personne dans cette Assemblée, il n’y a pas un membre du comité qui puisse en dresser un tableau exact. Je demande donc qu’on se borne à désigner les exceptions ; et j’appuie celle qui a été proposée par M. ûécretot, en faveur des ouvriers n’ayant pas le moyen de travailler à leur compte. Je réponds à ceux qui ont craint que cet amendement ne pût devenir abusif, que perdre une petite partie de l’impôt est un bien moindre mal que celui d’enlever la subsistance du malheureux qui gagne à peine dans sa journée de quoi vivre. On peut d’ailleurs se fier à la surveillance des municipalités et des commissaires de police. Quant à l'amendement de M. Malouet, je remarque que tout homme, ayant un commerce public, doit payer la contribution de citoyen actif. M. Defermon. Toute énumération des professions, arts et métiers qui doivent être soumis au droit de patente serait nécessairement imparfaite ; elle ne distinguerait certainement pas le malheureux qui ne gagnerait presque rien dans sa profession, de celui qui l’exercerait avec succès. Elle laisserait toujours prise à la chicane et aux contestations. Il suflit de soumettre au droit de patente, par une disposition générale, tous les citoyens exerçant quelque art ou métier, sous des réserves raisonnables et exprimées par la loi. Quant à l’amendement de M. Décretot, il n’atteint pas le but qu’on se propose et n’est propre qu’à rendre nul le produit de l’impôt. Le droit de patente est un vérit ible impôt indirect, qui pèse indirectement sur le consommateur. Le même motif qui vous engage à diminuer le droit.de patente pour les comestibles, doit vous faire excepter ceux qui ne retirent de leur travail aucun revenu imposable. Vous avez déjà décrété que l’homme qui ne gagne que le dernier salaire pour sa journée de travail, ne sera pas soumis à la contribution mobilière; mais qu’il sera inscrit à la suite du rôle pour être soumis à la surveillance de ses concitoyens, qui sauront si en effet il n’a pas le moyen de payer l’impôt. Toutes les difficultés qui se sont élevées sur l'article 13, seront écartées, si vous dites que tout homme qui n’est pas soumis à la contribution mobilière sera exempt du droit de patente. M. Decretot. Je retire mon amendement et je me rallie à l’opinion de M, Defermon. M. Defermon. Voici la nouvelle rédaction que je vous propose : Art. 12 (art. 13 du projet). « Toutes personnes faisant le commerce ou exerçant, autrement qu’en qualité d’apprentis ou compagnons, une profession, art ou métier quelconque, seront assujetties à se pourvoir de patente, et ne pourront, à compter du premier avril prochain, continuer leur commerce ou profession sans avoir satisfait aux formalités ci-devant prescrites. JNe seront point assujettis à se pourvoir de patente, les fonctionnaires publics, s’ils exercent d’autres professions étrangères à leurs fonctions, ni ceux qui ne payent pas la taxe de trois journées de travail au rôle de la contribution mobilière. » (Get article est décrété.) Art. 13 (art. 14 du projet). * Les boulangers, qui n’auront pas d’autre commerce ou profession, rie payeront que la moitié du prix des patentes, réglé par l’article 11 du présent décret. » (Adopté.) M. d’Allarde, rapporteur, donne lecture de l’article 15 du projet, portant une exception en faveur des médecins, chirurgiens, accoucheurs et sages-femmes. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [i7 février 1791.J 227 M. Bonssion. Il serait inouï d’assujettir au droit de patente cette classe de citoyens. M. Moreau appuie l’opinion de M. Boussion. Un membre observe que cet article est inutile par suite de l’adoption de la dernière disposition de l’article 8 et de la nouvelle rédaction de l’article 12. (L’article 15 du projet est supprimé.) Un membre propose que les titulaires de certains offices existants ne puissent être assujettis à prendre des patentes pour la continuation et l’exercice de leurs fonctions. (Cette motion est renvoyée à 1 examen du comité.) M. d’AlIarde, rapporteur , donne lecture de l’article 16 du projet. Un membre : Je pense que le comité a très bien fait de n’imposer aucun droit de paterne aux personues dénommées en l’article; mais je croîs qu’il est nécessaire d’obliger ces particuliers à prendre des patentes qui leur seront délivrées gratis, et qui contiendront leurs noms et leurs demeures, ainsi que les lieux qu’ils se proposent de fréquenter. M. Aubry-dti-Bochet. Au fond, cet article est un privilège indirect; mais il est juste de favoriser la classe indigente qui ne peut subsister que par le produit de sa revente. Seulement je propose qu’il leur soit défendu, par la permission gratuite ou patente de pauvreté qu’ils obtiendront de la police, d’embarrasser la voie publique,... (Rim.)...et que la patente ne leur soit accordée que sur le consentement par écrit du propriétaire ou principal locataire de la maison devant laquelle ils voudront se placer. M. de Lachèze. J’adopte l’avis du comité, et je demande la question préalable sur tous les amendements, mais j’observe à l’Assemblée qu’il faut ajouter dans l’article encore une exception en faveur des marchands qui vendent des fleurs et une multitude de petits objets, tels qu’allu-mettes, amadou, etc. Prenons garde, Messieurs, qu’en généralisant tout., et ne spécifiant pas les exceptions pour la classe des nécessiteux, nous n’ouvrio is la porie aux vexatiuns. Je demande qu’on ajoute ces mots : « Vendant des comestibles et vieux habits, fleurs et autres menues denrées sur éventaires . » M. Defermon. Je crois qu’il convient de retrancher de l’article ces mots : les marchands et marchandes, pour ne laisser subsister que ceux-ci : « revendeurs et revendeuses » et j’observe que s’il est important de laisser aux pauvres, qui n’ont pas de capitaux à consacrer à un grand commerce, les moyens de vivre de la revente des comestibles dans les marchés et lieux publics, d’un autre côté, il serait fort contraire aux vrais principes de la concurrence en matière de commerce, de favoriser, sous une forme déguisée, le commerce proprement dit abandonné à toute sorte de personnes inconnues. La concurrence du commerce non avoué est destructive de la concurrence utile; en conséquence, on ne peut pas trop la limiter sans cependant aller jusqu’au point de détruire la faculté qu’on veut accorder aux pauvres, de faire le commerce de revente des comestibles. M. de La Galissonnière. 11 est d’autant plus nécessaire de restreindre l’article, que l’article 19 assujettit au droit de patente les colporteurs et autres porteurs de balles dans les bourgs, villes et campagnes. M. dMIlarde, rapporteur. Nous proposons de rédiger ainsi l’article : Art. 14 (art. 16 du projet). « Les revendeurs et revendeuses de fleurs, fruiis, légumes, poissons, beurre et œufs, vendant dans les rues, halles et-marchés publics, ne seront point tenus de se pourvoir de patentes, pourvu qu’ils n’aient ni boutiques ni échoppes, et qu’ils ne fassent aucun autre commerce, à la charge par eux de se conformer aux règlements de police. » (Get article est décrété.) M. d’AlIarde, rapporteur , donne lecture de l’article 17 du projet. M. Clombert. Dans les différents articles du projet de décret, il n’a point du tout été question des maîtres de forges, des maîtres faïenciers, des maîtres de papeteries et de tuileries, en un mot de tous les commerçants qui ont des ateliers considérables. Il s’agit de savoir, Messieurs, si on leur fera payer leurs patentes sur le prix de leur habitation particulière ou sur le prix de leurs baux, parce que si on les faisait payer sur l’habitation particulière, des gens qui occupent des ouvriers immensément, ne payeraient pas, d’une manière proportionnée, les patentes. Je demande donc que les maîtres de forges et tous ceux qui tiennent des usines en générai soient tenus de payer la patente relativement au prix de leurs baux. M. Lucas. Je demande qu’on augmente considérablement les droits à payer par les marchands de vin et aubergistes surtout. Je demande que le droit soit porté à six sols par livre du prix du loyer. (Murmures.) M. Pierre de Delley. Rien ne doit vous porter à favoriser les cabarets, surtout dans les campagnes; car ce ne sont point des auberges utiles pour recevoir les passauts : c’est le réceptacle où va se corrompre une partie des habitants et qui cause une partie des désordres dont on se plaint communément. (Applaudissements .) Je demande que le minimum soit porté pour les cabarets à 30 livres. M. lleurtanlt-Lamerville. Si vous mettez un nouveau droit sur le vin, c’est imposer encore les terres; si avec cela il était adopté des droits d’entrée aux villes, il y aurait trois ou quaire impôts territoriaux sur les vignes. Je demande que l’article soit adopté avec la rédaction du comité. Voix diverses : Oui J oui 1 NonI nont. M. Ramel-Mogaret. Messieurs, vous avez donné deux moyens de taxes sur la valeur locative des bâtiments : l’un, pour la contribution foncière; l’autre pour la contribution mobilièie. Je demande au comité suivant quelle base l’évaluation du loyer se fera pour la perception du droit de patente.