208 [Conveiitipn nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, i 24 brumaire an ÏI ' / 14 novembre 1793 de sacrifier ce qu’il a de plus cher depuis la Révolution pour faire triompher la cause de la liberté, et notamment en fournissant, pour la défense de la patrie, tout ce qu’il avait de jeunes gens en état de porter les armes. « Le même peuple viëht de fouler aux pieds pour jamais l’hydre de l’ignorance qui tenait les hommes asservis sous le joug honteux de l’esclavage et, éelairé par les rayons brillants du flambeau de la philosophie, il s’est étonné de voir encore subsister les instruments de luxe de l’hypocrisie et de la superstition, et de la crédulité, de l’ignorance des peuples de l’anti¬ quité, et au milieu de ces attributs qui n’ont servi qu’à nourrir l’oisiveté et désormais inutiles à la société, nous nous sommes écriés : Ce sont' des yertus et des cœurs purs qu’il faut aux hommes pour servir leur patrie et pour adorer l’Etre suprême, et non pas des manteaux et des coupes qui n’ont servi qu’à de vaines cérémo¬ nies, et qu’à induire les peuples en erreur jusqu’à ce jour; c’est pourquoi nous vous apportons ces joujoux d’église qui n’ont servi qu’à amuser ces troupeaux de bêtes noires qui n’ont cessé de tromper le peuple et qui n’étaient autre chose que les enfants de la nuit et du mensonge. « Que ces instruments si inutiles jusqu’à ce jour commencent à servir à l’utilité publique et à défendre surtout cette cause de la raison et de la vérité des droits de l’homme. « Qu’ils tremblent tous, nos ennemis couverts de crimes, car l’amour sacré de la patrie qui brûle dans nos âmes et le courage intrépide qui enflamme nos cœurs ne leur donnera pas de relâche, et nous jurons dans ce santuaire sacré de ne déposer les armes que quand nous aurons exterminé tous ces monstres affreux. Nous vous offrons aussi les débris d’un drapeau qui désho¬ norait notre commune parce qu’il était souillé par les vils attributs de la royauté et nous avons livré lesdits attributs aux flammes avec les emblèmes de la féodalité, et le peuple de cette commune n’a cessé de crier, en dansant autour : Vive la République ! vive la Sainte Montagne ! » Citoyens chers à la patrie, Nous venons vous offrir nos cœurs. Montagne, Montagne chérie, Du peuple le vrai défenseur (bis) Par vos travaux, la République Reçoit sa Constitution, Notre libre acceptation Nous sert de couronne civique. Victoire, citoyens, gloire aux législateurs, Chantons, chantons, leurs noms chéris Sont les noms des vainqueurs. Puissent les vertus et les lumières Fleurir avec profusion Dedans la République entière, Que partout règne l’union. Que chacun déteste les crimes, L’esclavage et les rois, En observant vos sages lois Que tous se rendent sublimes. Chantons avec gaîté : Vive la liberté, Chantons, chantons tous ensemble Vive la Convention ! Les citoyens P.-L. Feré, Rotrou, Bastien et Jeanneney écrivent qu’ils abdiquent les fonctions sacerdotales. Insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre du citoyen Féré (1). « P.-L. Féré, qui est venu avant-hier déposer sur le bureau ses lettres de prêtrise et sa renon¬ ciation formelle pour toute espèce de trai¬ tement, demande acte de l’un et de l’autre. « Ce quartidi, 24 brumaire, l’an II de la République française. » Suit la lettre du citoyen Rotrou (2). « Représentants du peuple, « L’autorité d’un père, appuyée d’une lettre de cachet qui lui permettait de me priver de ma liberté m’avait, il y a 17 ans, attaché à l’autel. Aussitôt que la nation a eu déclaré qu’elle ne reconnaissait plus d’engagements contrairrs à la nature, j’ai rompu mes chaînes; mais il m’en restait encore quelques morceaux, des lettres des différents ordres, surchargées d’armoiries, de titres fastueux et justement proscrits, et je les ai remises au conseil général du département de Seine-et-Oise qui les a condamnées aux flam¬ mes. Citoyens représentants, je vous demande comme une faveur insigne d’achever ma déli¬ vrance en déclarant que tous ceux qui déclare¬ ront, ainsi que moi, avoir été contraints dans leur choix, seront réputés n’avoir point reçu le ca¬ ractère. Il est de votre justice, représentants, d’anéantir jusqu’aux parcelles des fers forgés par le despotisme et le fanatisme. « Rotrou, employé au département de Seine-et-Oise. « Versailles, 9e de la lre décade du 2e mois de l’an II de la République française, une et indivisible. » Suit V adresse du citoyen Bastien (3). Adresse présentée à la Convention nationale par le citoyen Bastien, le quartidi de la 3 e décade du mois de brumaire, Van II de la République française, une et indivisible. « Citoyens représentants, « J’ai eu le malheur d’être prêtre. Mais j’ai, depuis longtemps, tâché d’effacer cette tache sacerdotale par des écrits républicains. Il y a déjà huit jours que j’ai remis mes lettres de prêtrise et de vicaire épiscopal, et je crois être le premier en date du département de la Marne. Je ne puis deviner pourquoi le district de Reims, qui m’en a donné acte, ne les a pas fait passer à la Convention nationale sur-le-champ. J’ai, par le même acte du 16 de brumaire, renoncé à mon traitement ecclésiastique. J’ai des bras et je saurai, s’il le faut, manier la bêche et cultiver la terre. J’ai porté le titre ridicule de docteur en théologie; mais j’ai sacrifié à la saine raison les lettres qui constataient cette absurde préro¬ gative; on en a fait un autodafé dans la Société populaire dont je suis membre. Mais la preuve la plus évidente, la plus victorieuse de mon répu-(1) Archives nationales, carton C 278, dossier 744. (2) Archives nationales, carton G 281, dossier 773. (3) Ibid. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 218.