[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 juin 1791.] 273 laissée aux directoires, de faire procéder à ces travaux de toute autre manière, soit supprimée de l’article. M. l’abbé Gouttes. J’appuie l’amendement du préopinant, avec d’autant plus de raison que l’on a fait des règlements particuliers, en 1776, à ce sujet, et qu’au comité ce liquidation nous avons la douleur de voir qu’avec les règlements les plus sages, on a continué les abus le3 plus grands. Eu conséquence, je demande que cette loi soit étendue non seulement aux ateliers, mais même à tous les travaux publics faits par les municipalités, sans quoi nous serons toujours gaspillés sur tout. On volait le gouvernement ancien; on vole le nouveau. ( Applaudissements unanimes.) M. de ILa Rochefoneanid-Liancourt, rapporteur. Il y a certains ouvrages, comme par exemple, les rechargements de chemins, qui ne sont pas susceptibles de cette mesure-là. M. l’abbé Gouttes. Je demande à répondre. M. Long. Dans nos départements, les adjudications se font au rabais. M. Martineau. Je demande que l’article soit rédigé ainsi : « Les travaux ci-dessus décrétés et tous autres travaux publics, faits, soit par les corps administratifs, soit par les municipalités, ne pourront être faits que par entreprise et adjudication au rabais. » Voilà ce que je demande. M. de La Rochefoucauld-Liancourt, rapporteur. Il me semble que cette règle générale que M. Martineau vient d’établir ne trouve pas ici sa place. Elle la trouvera dans les travaux des ponts et chaussées. J’adopte toutefois sa première observation et je propose, pour l’article, la rédaction suivante : Art. 8. « Ces travaux, donnés à l’entreprise par adjudication au rabais, seront établis et dirigés conformément aux dispositions de l’article 7 de la loi du 19 décembre, et ouverts au plus tard le 1er juillet; et les sommes indiquées dans l’article lor ne pourront être, sous aucun prétexte, employées à aucun autre usage et d’aucune autre manière. » (Cet article, mis aux voix, est adopté.) M. de La Rochefoucauld-Liancourt , rapporteur , donne lecture des articles suivants : Art. 9. « Le ministre instruira, tous les trois mois, la législature du progrès de ces travaux et de leur situation. Art. 10. « L’Assemblée nationale se réserve de prononcer sur la distribution ultérieure des 5,760,000 livres restantes ou par acompte ou définitivement, selon la nature et les circonstances des travaux et des besoins qui lui seront présentés par les divers départements, et conformément aux dispositions de l’article 7 de la loi du 19 décembre. Art. 11. « La municipalité de Paris, sous la surveillance 1» Série, T. XXVII. du département, pourvoira à ce que les divers instruments de travail appartenant à la nation, et qui servaient aux ateliers, soient soigneusement retirés, pour être vendus, et le produit en être versé au Trésor public. Art. 12. « Le présent décret sera présenté dans le jour à la sanction du roi. » (Ces articles sont successivement mis aux voix et adoptés.) M. Prieur. Je demande l’impression du rapport de M. de Liancourt. (Cette motion est mise aux voix et décrétée.) M. le Président. Il reste une proposition de M. Charles de Lameth. _ M. Charles de Lameth. Voici ma proposition : Je demande que la municipalité de Paris soit tenue de présenter au directoire du département le compte général de ses recettes et dépenses depuis le 1er mai 1789 jusqu’à ce jour, pour que le département vérifie ces comptes, les rende publics par la voie de l’impression et les soumette à l’Assemblée nationale avant la lin de la session. ( Marques d'assentiment.) M. Tuant de La Rouverte. Il est inutile qu’une Assemblée soit constituante pour examiner des comptes; je demande que ceux-ci puissent être soumis à la prochaine législature. M. Charles de Lameth. Voici le projet de décret que je propose : « L’Assemblée nationale décrète ce qui suit : Art. 1er. « Le directoire du département de Paris sera tenu de se faire présenter par la municipalité de cette ville le compte général de ses recettes et dépenses depuis le 1er mai 1789 jusqu’à ce jour. Ait. 2. « Ledit compte contiendra l’état des revenus propres à la ville de Paris, et leur emploi, ainsi que les dépenses acquittées sur les fonds du Trésor public, avec mention des époques auxquelles ils ont été délivrés, des ordres en vertu desquels ils ont été payés. Art. 3. « Les comptes ainsi arrêtés et certifiés par la municipalité, vérifiés par le directoire du département, seront rendus publics par la voie de l’impression, et adressés, le plus tôt possible, à l’Assemblée nationale. » (Ce décret, mis aux voix, est adopté.) M. le Président. L’ordre du jour est la suite de la discussion du Code pénal. M. l’abbé Manry. Je demande la parole. (U monte à la tribune.) Plusieurs membres : L’ordre du jour! M. le Président. M. Le Pelletier-Saint-Far-geau a la parole. M. l’abbé Manry. Messieurs, j’ai demandé la parole à M. le Président pour une motion d’ordre : il s’agit d’un décret, rendu hier matin à 18 271 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 juin 17911 l’ouverture de la séance et porté dans la journée à la sanction du roi. Ce décret est relatif à M. d’Angiviller (1) : je viens vous prier de vouloir bien en suspendre l’exécution. Gomme il n’y avait alors presque personne dans l’Assemblée et que le décret n’est pas connu, je vais vous en donner lecture : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité central de liquidation, qui lui a rendu compte de l’absence de M. d’Angiviller, directeur et administrateur général des bâtiments du roi, décrète : « Art 1er. Le roi sera supplié de commettre incessamment une personne pour remplir les fonctions dont le directeur général et administrateur de ses bâtiments est chargé par l’édit du mois de septembre 1776, à l’égard de tous les objets de créance concernant ses bâtiments, antérieurs au 1er juillet 1790. « Art. 2. Les biens, meubles et immeubles, que M. d’Angiviller possède dans le royaume seront saisis à la requête de l’agent du Trésor public; et il sera établi à leur gouvernement et administration des commissaires comptables, pour sûreté de la responsabilité dont ledit d’Angiviller est tenu relativement à l’exercice de ses fonctions et à l’exécution de l’édit du mois de septembre 1776. « Le présent décret sera porté dans le jour à la sanction du roi. » Je ne fixerai pas votre attention sur le premier article de ce décret : mes observations ne sont relatives qu’à l’article second. J’observerai, sur cet article, que M. d’Angiviller, directeur des bâtiments du roi, n'est dépositaire d’aucuns fonds, qu’il n’est ni trésorier ni comptable; c’est un simple ordonnateur qui, sur des bons du roi, alloue des dépenses que le roi a réglées lui-même. A gauche : A l’ordre du jour ! A l’ordre du jour 1 M. l’abbé Maury. M. d’Angiviller est sorti du royaume... M. l’abbé Gouttes. Je demande qu’on passe à l’ordre du jour. Si l’on doit revenir ainsi sur les décrets qui ont été rendus, n’est-ce pas dire à toute la nation qu’elle ne doit avoir pour eux aucun respect? M. l’abbé Maury. Je ne veux point ouvrir une discussion ; je viens seulement représenter à l'Assemblée nationale qu’il intéresse trop essentiellement l’humanité et la justice pour qu’on puisse s’y refuser. M. d’Angiviller est absent du royaume... Un membre à gauche : Vous a-t-il chargé de sa procuration? M. l’abbé Maury. Je ne demande pas, Messieurs, qu’on revienne sur le décret; je demande seulement qu’on en suspende l’exécution. A gauche : L’ordre du jour! M. Gombert. M. l’abbé Maury n’avait qu’à se trouver hier à la séance, il aurait défendu son bon ami, M. d’Angiviller. M. l’abbé Maury. Messieurs, je n’ai d’autre intérêt que celui de l’humanité, de la justice, et je ne veux ici... A gauche : A l’ordre du jour! A l’ordre du jour I M. l'abbé Maury. L’ordre du jour est d’écouter et d’empêcher l’injustice. A gauche : Aux voix, l’ordre du jour ! (L’Assemblée, consultée, décrète qu'elle passe à l’ordre du jour) M. l’abbé Maury. Monsieur le Président, recommencez l’épreuve et demandez à l’Assemblée sur quoi elle délibère. A droite : L’épreuve est douteuse, Monsieur le Président; il faut la recommencer. M. Regnaud (de Saint-Jean-d’ Angély) . Je demande qu’on entende M. l’abbé Maury. Je prouverai, s’il le faut, que le décret rendu hier matin est inexécutable : le but qu’on s’y propose est entièrement manqué. On ne peut saisir des meubles en verlu d’un décret; pour cela il faut un jugement. Or l’Assemblée ne peut pas rendre un jugement. Il faut qu’elle se pourvoie devant un tribunal pour obtenir, quoi? un titre en vertu duquel on pourra saisir ( Murmures à gauche.) M. l’abbé Maury. Je demande seulement que l’Assemblée nationale veuille bien déclarer qu’elle suspend l’exécution de son décret d’hier matin, jusqu’à ce qu’elle se soit lait rendre compte de l’espèce d’administration sur laquelle il porte. A gauche ; Monsieur le Président, l’Assemblée a passé à l’ordre du jour : faites exécuter son décret. M. l’abbé Maury continue de parler au milieu des murmures de la partie gauche qui réclame l’ordre du jour. M. le Président. On insiste pour passer à l’ordre du jour; je vais consulter l’Assemblée. A gauche : Gela est décrété ! (L’Assemblée, consultée de nouveau, décrète qu’elle passe à l’ordre du jour.) M. de Folleville. Je demande que votre décret d’hier soit renvoyé au comité des lettres de cachet; car c’est une véritable lettre de cachet. (Murmures à gauche.) A droite : La motion est appuyée. MM. de Montlosier, Regnaud (de Saint-Jean-d' Angély) et l’abbé Maury insistent pour obtenir la parole. M. de Folleville. Ma motion est appuyée : Monsieur le Président, mettez-la aux voix. M. Goupil-Préfeln. Je demande le renvoi de cette discussion à demain. La partie gauche réclame de nouveau l’ordre du jour. M. d’Allarde. On commet une injustice manifeste. M. Goupil-Préfeln. Il est de votre sagesse (1) Voy. ci-dessus, séance du 15 juin 1791, page 235.