SÉANCE DU 16 THERMIDOR AN II (3 AOÛT 1794) - N0S4-5 93 l’histoire des Grecs et des Romains pour trouver des législateurs et des héros. Vive la montagne ! Les membres composant le comité de correspondance : Madiens, Peyrollonaz, Astier, Ribou, Vivien, Pingard, Buffet, Chalamet fils, Seqltn; Desserres, Delassault, P. Servier, Mesclon fils, Pratz fils ( présid .) 4 La société populaire de Melun (1) applaudit à la vigilance de la Convention nationale qui a découvert les conspirateurs, et à l’énergie qui les a punis le 9 thermidor; elle invite les citoyens français à se garantir de l’engouement pour des individus, qui enhardit les ambitieux, et à ne s’attacher qu’aux principes qui assurent la liberté et l’égalité. Mention honorable et insertion au bulletin (2). [Melun, s.d .] (3) Citoyens représentants C’est à présent que les tyrans ne peuvent se dissimuler que la liberté est impérissable, puisque votre vigilance et votre énergie ont découvert et punit (sic) des traîtres que le peuple ne pouvoit soupçonner, quand, dépositaires d’une partie de votre autorité, ils semblaient mériter votre confiance par l’apparence des vertus. Quelles leçons pour les peuples ! Quel exemple surtout pour les ambitieux ! Français, ne voyons désormais dans la Convention que l’assemblage de nos représentans, sans distinguer les individus, en nous rappellant ce Roland, qui entourait si souvent son nom des éclairs de l’éloquence pour éblouir le peuple qu’il trom-poit. Mettons-nous en garde contre les prestiges de l’orateur égoïste qui ne veut que briller. Effaçons de notre mémoire les noms des rédacteurs de ces adresses et de ces rapports fameux ordonnés par la Convention. Ne nous occupons que d’elle. Tenons à ses principes : ils sont immuables, et ne nous attachons pas aux hommes qui peuvent changer. Rallions-nous donc à un centre commun. Fortifions le gouvernement par l’obéissance aux lois, et périssons, s’il le faut, pour maintenir la liberté et l’égalité. Et vous, ambitieux de tous les genres, conspirateurs de toutes les classes, vous aurez appris à ce peuple si fier et si jaloux de sa liberté, mais si bon et si confiant, à se défier des plus belles apparences. Il manquait, en effet, à son caractère républicain cette défiance salutaire qui sait éventer les ambitieux, sous quelques masques qu’ils se cachent. Voyez quelle attitude le peuple a conservéfe] sur le bord du précipice, et avec quel sang-froid (1) Seine-et-Marne. (2) P.-V., XLIII, 2. Mentionné par Bm, 27 therm. (1er suppl1). (3) C 314, pl. 1 259, p. 37. il a sondé les profondeurs de l’abime entrouvert sous ses pas. Voyez comme, à la voix de ses représentants, l’illusion s’est promptement dissipée, et comme il a repoussé les factieux pour se réunir à la majorité de la Convention. Que nos ennemis se persuadent que ce n’est pas les phantomes de la liberté et de l’égalité que le Français poursuit. Il cherche la réalité. Il veut qu’après 5 ans de combats et de sacrifices, tous les citoyens soient libres et égaux. Ce n’est pas pour se donner de nouveaux tyrans qu’il a fait expirer la royauté et qu’il a mis en fuite l’aristocratie. Il veut bien suivre les guides qui l’éclairent, mais il ne souffrira plus de maîtres qui le dominent. Tremblez, nouveaux Catilinas ! Le bras du peuple est levé pour vous frapper. Il égorgeroit César au milieu du sénat, et précipiteroit Manlius à la vue du Capitole. Voilà, citoyens représentants, quels sont les sentiments de la société de Melun, ainsi que ceux de tous les bons citoyens de notre commune. Restez donc fermes à votre poste. Consolidez notre gouvernement, et toutes les sections de la République suivront l’exemple des sections de Paris. Lorsque nous apprîmes que vous étiez en péril, nous célébrions alors la fête des jeunes martyrs de la liberté. A cette nouvelle désastreuse, nous fûmes un moment étonnés, et une sorte de stupeur s’empara de nos esprits. Mais bientôt, nous rappellant le courage dont vous aviez déjà donné tant de preuves, nous pensâmes que le génie de la République vous couvrirait de son égide, que la liberté triompheroit, et cependant nous enviâmes à nos frères de Paris l’avantage de vous faire un rempart de nos corps et d’éloigner de vous le fer des assas[s]ins. Grâces soient rendues à l’Etre suprême qui veille sur nos destinées. Que, d’un bout à l’autre de la République, des chants d’allégresse lui témoignent notre reconnaissance. Qu’une fête annuelle rappelle à tous les âges les événemens du 10 thermidor, les noms des citoyens qui, dans cette crise affligeante, se sont dévoués pour sauver la patrie. Et que nos enfants n’y répètent les noms de Robespierre, de Saint-Just et de Couthon, qu’avec l’horreur que doivent inspirer des traîtres et des liberticides. Mucinot ( secrél .), Guingand (présid.), N. Ceze (?) (secret.) 5 Une députation de la section de la Maison-Commune est admise à la barre : en retraçant les effets de l’oppression qui pesoit sur la France, elle exprime la reconnois-sance des citoyens envers la Convention, dont la fermeté et l’énergie ont détruit la tyrannie et puni les tyrans. Mention honorable, insertion au bulletin (1). [ Applaudissements ] (1) P.-V.. XLIII, 2. 94 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE [s.d] (1) Citoyens représentants, Avant le 9 thermidor, la vertu étoit à l’ordre du jour, et la vertu étoit opprimée. Le glaive de la justice ne devoit peser que sur les ennemis de la République, et il frappoit indistinctement les patriotes et les conspirateurs. La liberté étoit garantie à ceux qui l’avoient reconquise, et c’étoit à eux qu’elle étoit ravie. La prison et l’échafaud étoient réservés aux conspirateurs, et l’un[e] et l’autre dévoroient les plus infati-guables vengeurs du peuple. Tous les citoyens s’appelloient frères et amis, et tous, étrangers les uns aux autres, se cherchoient, et ne se trouvoient plus. Tous trembloient de se communiquer. La liberté étoit dans toutes les bouches, et tout, jusqu’à la pensée, étoit esclave. On ne parloit qu’au nom de la justice, de l’humanité et de la raison, et l’on ne voyoit qu’assassinats, emprisonnements et dilapidations. Ce que les Néron, les Catilina, les Cromvel, tous les despotes enfin, n’avoient osé faire, un seul homme, plus immoral, plus féroce, plus traître qu’eux, le faisoit habituellement. La liberté touchoit à sa dernière heure, mais la Convention s’est levée. Elle a trouvé le peuple debout autour d’elle, et, dans un instant, la France a été purgée de ce monstre qu’on ne devrait plus nommer. Entendez de toutes parts les cris d’allégresse, les actions de grâce des Français; mais entendez aussi ces mots terribles qui les accompagnent : « Nous ne voulons plus de tirants; vainement ils se déguiseront, l’oiel (sic) perçant de la liberté saura les démasquer, et partout ils recevront la mort ». Voilà le vœu, le dernier mot des Français; et il n’en est pas un qui ne soit disposé à le sceller de son sang. Si la section de la Maison-Commune, à côté du foyer de la révolte, au milieu même de la fange contre-révolutionnaire, est restée fidèle à la Convention, que ne devez-vous pas attendre d’elle, représentants, quand, fermes à vos postes, vous consoliderez, par la sagesse de vos décrets, la République une et indivisible, qu’elle a juré et jure de maintenir, jusqu’à l’extinction du dernier des membres qui la composent. Vive la République ! Vive la liberté ! Morand ( présid .). 6 Le représentant du peuple Ysabeau dépose sur le bureau 32 croix de Saint-Louis, qui lui ont été remises pendant sa mission (2). (1) C 314, pl. 1 259, p. 42; J. Sablier, n° 1 477; J. Mont., n° 96; J. Paris, n° 581; Ann. R.F., n° 245; J. Fr., n° 678. Mention dans F.S.P., n° 395; Mess. Soir, n° 714; M.U., XLII, 266; J. Lois, n° 677. (2) P. V., XLIII, 3. 7 Les orphelins nommés les enfans de la patrie, sont admis à la barre; ils remercient la Convention qui a sauvé leur mère; ils promettent de ne vivre que pour défendre la patrie et la représentation nationale (1). [Applaudissements] [s.d.] (2) L’orateur de la députation : Citoyens représentans, Les Orphelins de la Patrie, réunis à la société des Jeunes Français, seroi[e]nt-ils les derniers à vous féliciter d’avoir sauvé leur mère ? Heureux d’avoir pu nous rendre utiles dans un nouveau Dix Août, nous n’avons su venir vous parler que lorsqu’il ne nous est resté rien à faire. Oui, nous avons déjà pu combattre la tyrannie, puisque nous savions déjà la haïr. Grâces soi[e]nt à jamais rendues aux dignes et courageux représentants qui ont signalé les triumvirs sur leur thrône et ont arraché le masque sacré sous lequel ils se sont caché si longtems. Désigner les tyrans aux amis de la liberté, c’étoit leur commander de les combattre et de les vaincre. A peine la voix de la patrie allarmée se fit-elle entendre que nous jurâmes tous la mort de ces trois sélérats qui n’avoi[e]nt usurpé une immense popularité que pour mieux subjuguer le peuple, et qui n’affectoi[e]nt l’amour de la patrie que pour mieux assassiner les patriotes. Etoit-ce donc pour ces nouveaux Cromwel que le sang de nos pères a coulé dans les combats, et les cadavres ensanglantés de nos frères et de nos amis n’auroi[e]nt-ils donc servi que de marchepied à l’infâme Robespierre ?... Si nos cœurs frémissent encore au souvenir du danger que vient de courir la République, ils sont pénétrés de tendresse et de reconnoissance à la vue des augustes représentants qui l’en ont préservée. 0 vous, dignes pères de la patrie, vous qui, par votre courage et par votre énergie, venez d’acquérir des droits éternels à la gratitude des Français et du genre humain, recevez le serment que nous venons vous faire de vivre et de mourir dignes de vos travaux et de vos bienfaits. N’oubliez pas, au[x] jours d’orage, s’il pouvoit en exister encore, que dans la société des Jeunes Français, il est près de cent jeunes républicains qui, fiers de répandre leur sang pour épargner le vôtre, se feront un bonheur et une gloire de former autour de vous un rempart de leur corps et de défendre jusqu’à leur dernier soupir les droits de la république et de la représentation nationale (3). (1) P.-V., XLIII, 3. (2) C 314, pl. 1 259, p. 43. Bm, 16 therm.; Moniteur (réimpr.), XXI, 385; Débats, n° 682, 288; J. Lois, n° 677; J. univ.. n° 1 715; J. Sablier, n° 1 477; M.U., XLII, 266; J. Mont., n° 96; Mess. Soir, n° 714; F.S.P., n° 395; Ann. R. F., n° 245; J. Fr., n° 678. (3) L’adresse est signée Lemerle, présid. 94 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE [s.d] (1) Citoyens représentants, Avant le 9 thermidor, la vertu étoit à l’ordre du jour, et la vertu étoit opprimée. Le glaive de la justice ne devoit peser que sur les ennemis de la République, et il frappoit indistinctement les patriotes et les conspirateurs. La liberté étoit garantie à ceux qui l’avoient reconquise, et c’étoit à eux qu’elle étoit ravie. La prison et l’échafaud étoient réservés aux conspirateurs, et l’un[e] et l’autre dévoroient les plus infati-guables vengeurs du peuple. Tous les citoyens s’appelloient frères et amis, et tous, étrangers les uns aux autres, se cherchoient, et ne se trouvoient plus. Tous trembloient de se communiquer. La liberté étoit dans toutes les bouches, et tout, jusqu’à la pensée, étoit esclave. On ne parloit qu’au nom de la justice, de l’humanité et de la raison, et l’on ne voyoit qu’assassinats, emprisonnements et dilapidations. Ce que les Néron, les Catilina, les Cromvel, tous les despotes enfin, n’avoient osé faire, un seul homme, plus immoral, plus féroce, plus traître qu’eux, le faisoit habituellement. La liberté touchoit à sa dernière heure, mais la Convention s’est levée. Elle a trouvé le peuple debout autour d’elle, et, dans un instant, la France a été purgée de ce monstre qu’on ne devrait plus nommer. Entendez de toutes parts les cris d’allégresse, les actions de grâce des Français; mais entendez aussi ces mots terribles qui les accompagnent : « Nous ne voulons plus de tirants; vainement ils se déguiseront, l’oiel (sic) perçant de la liberté saura les démasquer, et partout ils recevront la mort ». Voilà le vœu, le dernier mot des Français; et il n’en est pas un qui ne soit disposé à le sceller de son sang. Si la section de la Maison-Commune, à côté du foyer de la révolte, au milieu même de la fange contre-révolutionnaire, est restée fidèle à la Convention, que ne devez-vous pas attendre d’elle, représentants, quand, fermes à vos postes, vous consoliderez, par la sagesse de vos décrets, la République une et indivisible, qu’elle a juré et jure de maintenir, jusqu’à l’extinction du dernier des membres qui la composent. Vive la République ! Vive la liberté ! Morand ( présid .). 6 Le représentant du peuple Ysabeau dépose sur le bureau 32 croix de Saint-Louis, qui lui ont été remises pendant sa mission (2). (1) C 314, pl. 1 259, p. 42; J. Sablier, n° 1 477; J. Mont., n° 96; J. Paris, n° 581; Ann. R.F., n° 245; J. Fr., n° 678. Mention dans F.S.P., n° 395; Mess. Soir, n° 714; M.U., XLII, 266; J. Lois, n° 677. (2) P. V., XLIII, 3. 7 Les orphelins nommés les enfans de la patrie, sont admis à la barre; ils remercient la Convention qui a sauvé leur mère; ils promettent de ne vivre que pour défendre la patrie et la représentation nationale (1). [Applaudissements] [s.d.] (2) L’orateur de la députation : Citoyens représentans, Les Orphelins de la Patrie, réunis à la société des Jeunes Français, seroi[e]nt-ils les derniers à vous féliciter d’avoir sauvé leur mère ? Heureux d’avoir pu nous rendre utiles dans un nouveau Dix Août, nous n’avons su venir vous parler que lorsqu’il ne nous est resté rien à faire. Oui, nous avons déjà pu combattre la tyrannie, puisque nous savions déjà la haïr. Grâces soi[e]nt à jamais rendues aux dignes et courageux représentants qui ont signalé les triumvirs sur leur thrône et ont arraché le masque sacré sous lequel ils se sont caché si longtems. Désigner les tyrans aux amis de la liberté, c’étoit leur commander de les combattre et de les vaincre. A peine la voix de la patrie allarmée se fit-elle entendre que nous jurâmes tous la mort de ces trois sélérats qui n’avoi[e]nt usurpé une immense popularité que pour mieux subjuguer le peuple, et qui n’affectoi[e]nt l’amour de la patrie que pour mieux assassiner les patriotes. Etoit-ce donc pour ces nouveaux Cromwel que le sang de nos pères a coulé dans les combats, et les cadavres ensanglantés de nos frères et de nos amis n’auroi[e]nt-ils donc servi que de marchepied à l’infâme Robespierre ?... Si nos cœurs frémissent encore au souvenir du danger que vient de courir la République, ils sont pénétrés de tendresse et de reconnoissance à la vue des augustes représentants qui l’en ont préservée. 0 vous, dignes pères de la patrie, vous qui, par votre courage et par votre énergie, venez d’acquérir des droits éternels à la gratitude des Français et du genre humain, recevez le serment que nous venons vous faire de vivre et de mourir dignes de vos travaux et de vos bienfaits. N’oubliez pas, au[x] jours d’orage, s’il pouvoit en exister encore, que dans la société des Jeunes Français, il est près de cent jeunes républicains qui, fiers de répandre leur sang pour épargner le vôtre, se feront un bonheur et une gloire de former autour de vous un rempart de leur corps et de défendre jusqu’à leur dernier soupir les droits de la république et de la représentation nationale (3). (1) P.-V., XLIII, 3. (2) C 314, pl. 1 259, p. 43. Bm, 16 therm.; Moniteur (réimpr.), XXI, 385; Débats, n° 682, 288; J. Lois, n° 677; J. univ.. n° 1 715; J. Sablier, n° 1 477; M.U., XLII, 266; J. Mont., n° 96; Mess. Soir, n° 714; F.S.P., n° 395; Ann. R. F., n° 245; J. Fr., n° 678. (3) L’adresse est signée Lemerle, présid.