SÉANCE DU 3 BRUMAIRE AN III (24 OCTOBRE 1794) - N° 10 19 Liberté, Patrie, Égalité, Représentants du peuple, Les citoyens de Marmande vous doivent aussi l’expression de leurs sentimens et le compte fidèle de l’esprit public qui règne dans leur commune. Nous avons vu avec une joie sincère la chûte du dernier tyran, la liberté des français ne doit pas moins au 9 thermidor qu’au 10 août et pour la gloire de la Convention nationale, il existe entre ces deux révolutions cette différence imémorable que la première est due presque toute entière à sa mâle énergie, et à son généreux mépris de la mort. Représentants du peuple ne perdez pas le fruit d’une si belle victoire ; ne souffrez pas que des êtres ambitieux immoraux et cupides, dignes satellites de Catilina réveillent de coupables espérances et veuillent encore asservir le peuple par la terreur, le pillage et la mort, que les rênes du gouvernement révolutionnaire dont nous désirons le maintien ne soient confiées dans toute l’étendue de la République qu’à des mains fermes et pures ; que partout la confiance et l’amour des loix républicaines succèdent à ce sentiment douloureux et oppressif qui étouffoit en nous les plus beaux sentimens de la nature. Ah ! ce n’est pas parmi nous que l’aristocratie relève la tête et que le patriotisme gémit opprimé. Nous conserverons toujours ce feu sacré qui brûla dans nos coeurs depuis l’aurore de la liberté ; nous avons une égale haine pour l’aristocratie dans toutes les formes hideuses, et pour l’oppression trium virale. Nous regardons la liberté des opinions et de la presse comme la sauvegarde de nos droits et cinq ans de révolution nous ont trop éclairés pour avoir à redouter l’abus de ce droit imprescriptible qu’a tout homme libre de penser, de parler et d’écrire. Représentans du peuple, nous regardons comme les ennemis déclarés, comme les fauteurs infâmes des troubles et de la guerre civile, ceux qui voudroient nous détacher du seul centre d’unité que nous connoissions, de la Convention nationale, nous ne cesserons de l’environner de notre confiance et de notre attachement parce qu’elle est à la hauteur de ses augustes fonctions. Vive la République, vive la Convention nationale; tel sera toujours le cri de ralliement des vrais républicains. Suivent 127 signatures. I [Les citoyens composant la société populaire et républicaine de la commune du Puy, épurée publiquement les 26, 27, 28 et 30 thermidor, à la Convention nationale, s. d.] (35) (35) C 325, pl. 1403, p. 30. Adresse imprimée de 7 pages. Bull., 8 brum. (suppl.); M. U., XLV, 171. Égalité, fraternité, liberté ou la mort. Citoyens Représentans, Ecoutez de vieux patriotes, à qui cinq ans de révolution ont appris à penser. Nous vous faisons passer les résultats de nos réflexions sur la situation actuelle de la République, et en particulier de notre département : ils sont dictés par la franchise et ont mûri dans le calme des passions. Si c’est être Républicain que de faire retentir chaque jour les tribunes des sociétés populaires, de vociférations ; si c’est être patriote par excellence, que de crier sans cesse : égorgeons, traduisons au Tribunal révolutionnaire, aux commissions de sang (36), tel ou tel individu, parce qu’il est notre ennemi; parce qu’il nous déplait, n’étant pas toujours de notre avis, ou parce qu’on se plait à le dire aristocrate. Si c’est être vertueux, que d’imposer des taxes révolutionnaires et les faire tourner à son profit, que de prêcher l’abstinence et se gorger de mets avec une foule de courtisanes (37). Si c’est être ami du Peuple, que de le flagorner pour l’égarer et le faire servir d’instrument à sa fortune et se mettre à la place de ceux qu’on traduit à l’échafaud. Si c’est défendre les intérêts du Peuple, que de s’accoler quelques êtres immoraux et préparer dans les ténèbres, des listes de proscription, dicter des arrêts de mort, menacer à chaque instant de la guillotine, quiconque ne partage pas ces opinions sanguinaires, circonvenir les représentans, surprendre leur religion, attiser les vengeances de ceux qui se laissent subjuguer par les passions, accaparer les emplois publics, en écarter la probité, afin de rétablir l’anarchie et la terreur. Dans ce sens, Représentans, nous ne sommes ni Patriotes, ni Républicains, ni Vertueux. Mais, s’il faut lutter avec énergie contre la tyrannie ; s’il faut terrasser l’immoralité et l’anarchie, poursuivre à outrance les aristocrates, les égorgeurs, les calomniateurs, les dominateurs et les démagogues, surveiller les fédéralistes, les modérés et déclarer une guerre à mort à tous les royalistes et à toutes ces hordes sanguinaires qui ne vivent que de désordre ; s’il faut partager sa fortune avec ses frères indigens ; s’il faut honorer la piété filiale, la vieillesse et le malheur, s’il faut être bon fils, bon époux et bon père, pardonner à l’erreur, combattre le vice, courir sans cesse dans les campagnes pour propager l’instruction, éclairer ses frères agriculteurs, sur leurs vrais intérêts, leurs devoirs et l’austère observance des lois; s’il faut maintenir l’unité et l’indivisibilité de la République et le gouvernement révolutionnaire dans toute son intégrité jusqu’à la paix ; s’il faut, enfin, donner l’exemple de toutes les vertus publiques et privées. Représentans, nous (36) En note dans l’adresse : « Telles que celles d’Orange, de Commune-Affranchie et autres ». (37) En note dans l’adresse : « La commission d’Orange et de Nimes avoit à sa suite une foule de courtisanes ». A la place de « foule » le texte portait « une trentaine ». 20 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE avons toujours rempli avec zèle ces devoirs sacrés. Tel est notre genre de patriotisme ; comptez sur ceux qui ont le plus contribué à exterminer les bandes des Saillant, Borrel, Charrier, Noyant, Allier, Précy et autres. Nous entendons crier de toute part ; haro sur l’aristocratie et le modérantisme ; nous n’avons point parmi nous de modérés et les aristocrates sont ou punis, ou reclus ; mais citoyens Représentans, nous ne sommes pas à l’abri des intrigues des vociférateurs et continuateurs de Robespierre, des patriotes de nouvelle date. Ne prenez pas législateurs, pour le voeu de la masse du peuple, l’exaspération de quelques têtes qui l’ont terrorifié : notre seul point de ralliement est la Convention ; achevez d’anéantir les factions ; il ne faut dans une République que des frères et aucun parti. Nous vous avons dit la vérité; nous savons que nous sommes calomniés et comme il importe à notre société populaire, à notre commune et à tout ce département de faire connoître la vérité, nous vous demandons un représentant qui verra tout par lui-même et décidera entre nous et nos calomniateurs. Et ont signé à l’original : Lioger, président, J.L.M. Lioger, agent national du district, Molade, officier ministériel, Entier, officier municipal, Bertrand, juge, André, vétéran, Arion, capitaine, Bresson, officier de santé, Dulac, Clet, Chambelland, Guilhaume, J.F. Pinede Second, A. Rostain, imprimeurs, Bresson, Cossy, secrétaires et 139 autres signatures. m [La société populaire d’Angoulême à la Convention nationale, le 26 vendémiaire an III] (38) Représentans Votre Adresse aux Français vient d’être lue à notre tribune, elle est l’expression sincère de nos voeux les plus chers et le tableau fidèle de nos principes, principes sacrés et étemels que la nature imprima dans toutes les âmes vertueuses avec des caractères ineffaçables. Le silence imposant qui regnoit pendant cette lecture, les vifs applaudissemens dont elle a été couverte, ne laissent aucun doute sur notre voeu bien formel de maintenir le gouvernement qui a mérité la confiance du peuple et qui doit assurer le triomphe de la liberté. Oui, Représentans, vous venés de porter le coup le plus terrible aux intriguans, aux fripons, à tous ces scélérats qui dans les ténèbres du crime, marchant à côté de l’ombre du dernier tiran, trament encore la perte de la Patrie, malgré ses triomphes éclatans sur les brigands couronnés. Les cruels ! ils ne parviendront pas à leur but criminel ; ils nous forgent des chaines horribles sous l’enclume, et sous le manteau du despotisme, mais leurs efforts seront vains, ils ne jouiront pas de la satisfaction barbare qu’ils en attendent. Non, non, la République n’aura bientôt plus d’écueils à craindre ; la justice et la vertu, ces principes régulateurs de l’homme de bien ne seront plus profanés par des bouches impures, par des êtres immoraux, hypocrites et continuateurs de l’infâme Robespierre. La nation française ne les aura pas vainement mis à l’ordre du jour, ils ne serviront plus de prétexte au méchant pour commettre des vexations, des iniquités révoltantes; nous allons reprendre une nouvelle existence, l’horizon politique sera dégagé des nuages qui l’obscurcissaient et l’ont trop longtems infesté ; des jours sereins vont enfin luire pour le citoyen vertueux, pour l’homme paisible et modeste, dont la plus grande passion est l’amour de son païs ; l’opinion ne sera plus comprimée ; le calme renaitra, la loi ne punira pas un moment d’erreur, elle protégera l’innocence opprimée, elle ne frappera que le véritable coupable. Quelle douce et consollante perspective ! tous les actes du gouvernement porteront le caractère impartial de la justice, non de cette justice défigurée avec des couleurs sanguinaires, justice qui ne peut convenir qu’à de vils conspirateurs, mais de cette justice sainte et divine, principale garentie du bonheur social, qui fut de tous les tems, de tous les âges et qui appartient à tous les peuples de l’univers comme un don qui leur fut fait par l’auteur de la nature. Nous nous réjouissons, nous vous félicitons, intrépides législateurs, vous avés juré de rester à votre poste jusqu’à ce que le vaisseau Républicain soit à l’abri de toute espèce de tempête, c’est à dire jusqu’à ce que tous nos ennemis soient terrassés ou anéantis; l’éternel a reçu ce serment il ne sera pas vain. Et nous aussi bons et braves Charentois, amis prononcés des vertus et des moeurs répu-blicainnes, ennemis irréconciables de tous les dominateurs, et nous aussi, nous jurons de regarder comme ennemi du peuple tout homme qui voudrait élever auprès de la Représentation nationale une autorité rivale, insolente et usurpatrice, constament et fortement attachés au char de la Révolution, nous ne l’abandonnerons pas un seul instant, nous saisirons l’audacieux qui oserait y porter une main sacrilège et nous n’aurons d’autre point de r aliment que la Convention nationale, ni d’autre mot d’ordre que cette devise sacrée, La liberté ou la Mort. Fait et adopté unanimement par les membres de la société et les citoyens des tribunes à Angoulème le 26 vendémiaire l’an 3e de la République françoise une et indivisible. (38) C 325, pl. 1403, p. 29. Bull., 5 brum. Suivent six signatures illisibles.