481 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [11 mai 1790.] Art. 9. « Les baux à ferme ou à loyer desdits biens, qui ont été faits légitimement, et qui auront une date certaine et authentique, antérieure au 2 novembre 1789, seront exécutés selon leur forme et teneur, sans que les acquéreurs puissent expulser les fermiers, même sous l’offre des indemnités de droit et d’usage. » L’ancien article 9, devenu l’article 10, est adopté sans discussion. Art. 10. « Les municipalités revendront à des particuliers, et compteront de clerc à maître avec la nation, du produit de ces revenus. » M. Delley d’Agïer, rapporteur. L’article 10 du projet, qui deviendrait l’article 11 du décret, porte : Art. 10. « Les municipalités seront chargées de tous les frais relatifs aux estimations, ventes, subrogations et reventes. Il leur sera alloué et annuellement fait raison par le receveur de l’extraordinaire, et proportionnellement aux sommes versées dans sa caisse à leur décharge : 1° d’un seizième du prix déterminé par l’estimation; 2° d’un quart de l’excédent de la revente sur ce prix. » M. Pétion de Villeneuve. Le comité attribue aux municipalités des sommes qui me paraissent exorbitantes. Je prends pour exemple la municipalité de Paris : elle achètera pour 200 millions ; le seizième du prix de l’estimation produira 12,500,000 livres; l’augmentation, lors de la vente, peut être évaluée à 50 millions; le quart de cette augmentation produira donc encore 12,500,000 livres; ainsi vous accorderez à la ville de Paris un bénéfice de 25 millions. Que résultera-t-il de cette prodigieuse faveur ? Les municipalités seront intéressées à baisser le prix de l’estimation, afin que le quart de l’augmentation soit plus considérable. Il me semble qu’il est digne de votre prudence et d’une administration économe de borner ce bénéfice an seizième du prix total des ventes. M. le duc de La Rochefoucauld. Des offres ont été faites sous l’espoir de ces avantages; ne serait-il pas dangereux de prendre aujourd’hui des dispositions différentes de celles qu’on devait naturellement prévoir? M. Regnaud {de Saint-Jean-d' Angely). C’est pour engager l’Assemblée à être conséquente à ses principes que j’appuie la motion de M. Pétion de Villeneuve. L’Assemblée n’a jamais entendu donner à la municipalité de Paris un bénéfice supérieur à un seizième du prix total des ventes. En effet, cette municipalité devait payer d’abord les trois quarts des 200 millions, et bénéficier du quart du prix total de la vente de l’autre quart : le quart d’un quart est assurément un seizième. M. Delley d’Agier. Le maire de Paris avait réellement demande le quart de l’excédent des ventes sur le montant des obligations qui seraient fournies; mais il proposait de rendre compte des frais dont la nation se trouverait chargée. Vous avez vous-mêmes pensé qu’il y aurait du danger à ne pas charger les municipalités de ces frais. C’est alors que vous avez cru convenable de fixer le bénéfice d’une manière qui n’est pas différente de celle que vous propose le comité. L’article que vous avez décrété hier met toutes les municipalités au même taux. Si vous changez quelque chose à une mesure non décrétée, mais suffisam-lw Sérip, T. XV. ment indiquée, les municipalités verront avec peine la diminution des avantages qu’elles espéraient. Si elles retiraient leurs offres, il faudrait avoir recours à des compagnies, et, au lieu d’une dépense qui, tournant au profit des municipalités, dédommagerait une partie de la nation des maux qu’elle a soufferts, on se verrait forcé à contracter avec les capitalistes aux conditions les plus onéreuses. M. de Lahlache présente un projet d’article qui est décrété en ces termes : Art. 11. « Les municipalités seront chargées de tous les frais relatifs aux estimations, ventes, subrogations et reventes; il leur sera alloué et fait raison, par le receveur de l’extraordinaire, du seizième du capital des reventes qui seront faites à ces particuliers, à mesure et à proportion des sommes payées par les acheteurs. » L’article 11 primitif, quideviendra l’article 12 du décret, est lu en ces termes : Art. 11. « Si, pour assurer le payement des obligations aux époques convenues, quelques municipalités étaient dans le cas de faire des emprunts, elles ne pourront y procéder, qu’ après y avoir été autorisées par l’Assemblée nationale qui en déterminera les conditions. » M. Duport. Autoriser les municipalités à faire des emprunts, c’est, pour ainsi dire, les autoriser à ne pas payer avec les deniers que produiront les ventes. Je demande que cet article soit supprimé. M. Le Chapelier. Vous avez autorisé la ville de Paris à faire des emprunts: vous n’avez pu vouloir que ce décret lui fût particulier; toute rétractation serait funeste. Ne pas permettre aux municipalités d’emprunter, ce serait leur permettre de ne pas payer, ce serait ôter à vos assignats la confiance qu’ils doivent obtenir. Pourquoi avez-vous donné tant d’avantages aux municipalités? C’est à cause de l’incertitude de l’époque précise où elles auront revendu aux particuliers ; si ces reventes ne sont pas faites aux échéances des engagements, il faudra bien que les municipalités empruntent pour y satisfaire. Ne souffrez pas que, par de petits amendements, que par des dissertations inutiles, on vous conduise à révoquer un décret sanctionné et proclamé, un décret sur lequel vous ne pouvez revenir sans compromettre votre crédit et la chose publique. M. le Président consulte l’Assemblée qui adopte l’article 12 avec une légère modification de rédaction, ainsi qu’il suit : Art. 12. « Si, pour compléter le payement des obligations aux époques fixées, quelques municipalités avaient besoin de recourir à des emprunts, elles y seront autorisées par l’Assemblée nationale ou par les législateurs, qui en régleront les conditions. » L’ancien article 12 du comité, qui devient l’article 13 du décret, est adopté sans discussion ; en voici la teneur : Art. 13. « Les payements à faire par les municipalités, ou par les acquéreurs à leurs décharges, ne seront reçus à la caisse de l’extraordinaire qu’en espèces ou en assignats. » M. Barnave. Je crois qu’il est prudent de ne pas jeter sur le marché une trop grande quantité de biens domaniaux, afin de ne pas en diminuer la valeur. Je vous propose d’adopter, dans 1 31 4$2 (Assemblée nationale-} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (il mai 1790. ce but, un article additionnel qui formera l’article 14 du titre Ier. Il est ainsi conçu : Art. 14. « La somme totale des ventes à faire aux municipalités, en vertu du présent décret, lie pourra excéder la somme de 400 millions : I’Àssemblée nationale se réservant de prescrire les règles qni seront observées pour lès ventes ultérieures qui pourront avoir lieu. » (Cet article est mis aux voix et adopté sans discussion.) M. Dupont {de Nemours). Le comité des finances m’a chargé de vous proposer l’adoption d’un décret urgent dont je vais vous faire connaître les motifs en peu de mots. Le Trésor public n’a reçu qne 20 millions sur Ïes40 millions que vous lui aviez accordés pour les mois d’avril et de mai. Le premier ministre des finances a demandé la totalité ou une partie des 20 millions qui restent à remettre. Le comité a insisté pour connaître l’état de l’emploi de cette somme; le ministre ne peut donner encore cet état. M. Necker a seulement indiqué qu’ayant à payer des rescriptions pour l’achat des blés, etc., il a besoin de 5 millions pour demain matin. Le comité, certain que les anticipations payées depuis le 1er de janvier excèdent cette somme de 40 millions; certain qu’on travaille aux états qu’il a demandés, et assuré par les bordereaux de chaque semaine de la recette et de la dépense, a cru qu’il u’y avait pas d’inconvénient à ordonner, dès à présent, la remise des •20 millions. Il vous propose le projet de décret fuivant : « La Caisse d’escompte délivrera au Trésor public la somme de 20 millions de billets de caisse, portant promesse d’assignats, en présence des commissaires chargés de surveiller les opérations de la Caisse d’escompte. » M. Bouche. Ou le comité n’a pas fait son devoir, ou c’est le ministre. C’est déjà à la fin d’une séance qu’on est venu vous forcer, pour ainsi dire, à accorder 20 millions. Vous exigeâtes alors que les états de dépense et de recette pour le mois de mai fussent remis dans la huitaine; on ne s’est point conformé à ce décret, et l’on vient aujourd’hui, au moment où la séance va être levée, on vient sans pudeur demander encore 20 millions. Je propose d’ajourner, pour que nous ayons le temps de délibérer. M. de Cerûou entre dans le détail de la recette et de la dépense du Trésor public pour les mois d’avril et de mai, et de sa situation actuelle. Il conclut de ce détail que le Trésor public n’ayant en caisse que 10 millions en espèces, qu’il faut ménager pour le prêt des troupes, la somme de 20 millions en papier qui est indispensable. M. le Préfrfdeiii met aux voix l’ajournement demandé par M. Bouche. L’ajournement est rejeté. M. Ic Président donne une nouvelle lecture du projet de décret présenté par le comité des finances. Il est adopté. En voici la teneur : « L'Assemblée nationale a décrété et décrète que la Caisse d’escompte délivrera au Trésor public la somme de 20 millions en billets, portant promesse de fournir assignats, dans la même forme qui a eu lieu le mois dernier, en présence des commissaires chargés par l'Assemblée d’inspecter les opérations de la Caisse d’escompte. » M. le Président lève la séance à trois heures et demie, et la renvoie à ce soir à l’heure ordinaire. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. THOURET. Séance du mardi 11 mai 1790, au soir (1). Un de MM. les secrétaires donne lecture de l’extrait des pièces suivantes : Adresse de l’assemblée primaire du canton d’Orbais, district de Château-Thierry, contenant une expression énergique des sentiments d’admiration, de reconnaissance et de dévouement dont elle est pénétrée pour l’Assemblée nationale. Adresse de la communauté de Bras-lès-Saint-Maximin en Provence; elle supplie l’Assemblée d’abolir, même pour cette année, la dîme, souS l’offre qu’elle fait de payer un impôt en remplacement. Adresse des officiers municipaux et habitants de la ville de Sos en Gascogne. Ils révoquent une demande faite par le corps municipal de dépendre du district de Condom et du département d’Auch. Adresse de la communauté de Benel, près de Niort; elle demande avec instance de continuer son ancienne union avec cette ville. Adresse des habitants de Berchères-sur-Ver-grès, près de Houdan. Ils font le don patriotique de 511 livres produit des six derniers mois de 1789 des impositions sur les ci-devant privilégiés. Adresse des citoyens de Gardonenque en Languedoc au nombrede 24,000 hommes rassemblés au camp de Boucoiran, le 21 mars dernier, et dont 12,000 étaient armés-, on y lit ces paroles remarquables : « Une Constitution sainte, ayant pour base les droits éternels de l’homme et du citoyen, vient de réunir tout le peuple français en une seule famille, et pour en maintenir la félicité, elle impose à chaque individu de cette famille l’obligation de veiller à la sûreté de tous, comme elle charge tous de la sûreté de chacun. Cet ouvrage de votre haute sagesse, devenu bienfait d’un roi chéri, régénérateur dé l’empiré, a été l’objet de notre serment solennel. Français, citoyens français nous avons juré de conserver de si beaux titres, de soutenir de tout notre pouvoir la Constitution de l’Etat, de faire respecter vos décrets, et de donner à notre monarque bienfaisant des preuves constantes de notre attachement à sa personne sacrée, et de notre inaltérable fidélité : nous avons encore promis de nous dévouer entièrement à cette harmonie fraternelle, aliment essentiel des cœurs français, et que la différence de nos opinions religieuses ne pourra jamais altérer. » Procès-verbal de la prestation du serment des volontaires citoyens de Perpignan, duquel il résulte que tous les habitants de cette ville sont pénétrés de l’amour le plus vrai pour la personne sacrée du roi, et d’un dévouement absolu pour l’exécution des décrets de l’Assemblée nationale, Adresse des électeurs du département d’Eure-et-Loir, qui, disent-ils, tournent natureilemen (1) Cëttë séance est incomplète au Moniteur.