SÉANCE DU 29 FRUCTIDOR AN II (LUNDI 15 SEPTEMBRE 1794) - N° 50 207 ment des membres du comité des Transports militaires (95), suivant lequel les suffrages se sont réunis sur les citoyens, 50 Léonard BOURDON soumet à l’Assemblée les détails de la fête qui sera célébrée le cinquième jour sans-culottide (97). Détails de la fête que la Convention nationale a décrétée le 26 fructidor, pour être célébrée le quintidi des Sans-Culottides (98). Le quatrième jour des Sans-Culottides, veille de la fête, la section de Marat déposera dans le vestibule de la salle des séances de la Convention nationale, salon de la liberté, le corps de Marat, sur une estrade élevée à cet effet. Le corps sera reçu par des commissaires de la Convention nationale. Il y sera gardé par un détachement de trente citoyens, six vétérans, douze citoyens de la garde de la Convention, six élèves de l’école de Mars, et six orphelins des défenseurs de la patrie. Le jour de la fête, les autorités constituées, un groupe de citoyens blessés en défendant la patrie, et les sociétés populaires se réuniront dans le jardin national, avant huit heures du matin, autour des jalons qui y seront placés. Chaque membre des sociétés populaires' portera sa carte d’une manière apparente. A la même heure, un détachement des élèves du Camp de Mars, et des orphelins des défenseurs de la patrie, se rendront également dans le jardin national, précédés de leur musique. (95) Le procès-verbal indiquait initialement : Transports, Postes et Messageries. Voir Archiv. Parlement., 2e jour des sans-culottides, n° 33. (96) P.V., XLV, 280-281. C 318, pl. 1286, p. 41 et 39. Décret n° 10 900. Rapporteur anonyme selon C* II 20, p. 300. M. U., XLIII, 506. (97) Débats, n° 725, 485. Moniteur, XXI, 772. (98) Débats, n° 729, 556-559. Moniteur, XXI, 778. Le président de la Convention nationale, placé sur la tribune élevée dans le jardin, proclamera solemnellement, et en présence du peuple, que les armées de la République n’ont pas cessé de bien mériter de la patrie. Cette proclamation faite, les drapeaux destinés pour chaque armée seront portés sur la tribune, et présentés successivement au président, qui les déploiera pour faire lire au peuple le nom de l’armée à laquelle chacun d’eux est destiné. Il attachera ensuite au haut du drapeau le laurier civique, décerné à cette armée. Chaque fois que le président attachera le laurier à un drapeau, il se fera un roulement général de tambours, et les trompettes sonneront la fanfare au milieu des cris répétés de Vive la République! Chacun de ces drapeaux sera remis au même instant entre les mains d’un défenseur de la patrie de chacune desdites armées : ce citoyen recevra, au nom de l’armée, l’accolade fraternelle du président. Le président proclamera le premier article du décret du 24 brumaire, et celui du 5 frimaire, relatifs aux honneurs décernés à Marat. Le cortège se rendra ensuite au Panthéon dans l’ordre suivant : 1°. Corps de cavalerie, et ses trompettes ouvrant la marche. 2°. Groupe de tambours. 3°. Les sociétés populaires. 4°. Musique et groupe d’élèves du camp de Mars. 5°. Les autorités constituées des sections de Paris marchant en masse. 6°. Groupe des élèves du camp de Mars. 7°. Les tribunaux. 8°. Groupe des élèves du camp de Mars. 9°. Groupe d’artistes, représentant la masse du peuple, et destinés à célébrer par des chants les vertus de Marat. 10°. L’institut national de musique. 11°. Groupe de citoyennes en nombre égal à celui des départemens, et portant des corbeilles remplies de fleurs destinées à être jetées par elles sur la tombe de Marat. 12°. Le char de triomphe de Marat. 13°. La Convention nationale. Un ruban tricolore, soutenu par les quatre âges, formera l’enceinte de la Convention. 14°. Les orphelins des défenseurs de la patrie, précédés de leur musique. 15°. Groupe de blessés de toutes les armées. 16°. Groupe des élèves du camp de Mars. 17°. Groupe de tambours. 18°. Corps de cavalerie fermant la marche. Route que tiendra le cortège. Il sortira par le Pont-Tournant, la place de la Révolution, la rue de la Révolution, la rue Honoré, la rue du Roule, la rue de la Monnoie, le Pont-Neuf, la rue de Thionville, la rue Française, la rue de la Liberté, la place Michel, la rue Hyacinthe, la rue Jacques, la place du Panthéon. Le cortège s’arrêtera lorsqu’il sera arrivé sur la place du Panthéon. 208 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Un huissier de la Convention s’avancera vers la porte d’entrée. Il y sera fait lecture du décret qui exclut du Panthéon les restes d’Ho-noré Riquetti-Mirabeau. Aussitôt le corps de Mirabeau sera porté hors de l’enceinte du temple, et remis au commissaire de police de la section. Le corps de Marat sera ensuite porté triomphalement sur une estrade élevée dans le Panthéon. Le président de la Convention, placé sur l’estrade, retracera au peuple les vertus qui ont mérité à Marat les honneurs que la nation entière rend à sa mémoire. En sortant du Panthéon, les défenseurs de la patrie auxquels les drapeaux auront été confiés, se rendront sur la place de l’Estrapade, où ils trouveront quatorze voitures qui leur seront destinées pour remplir l’objet de leur mission. La Convention nationale, précédée de l’Institut national de musique, sera reconduite au lieu de ses séances. Tous les citoyens qui assisteront à la fête seront sans armes. Tous les groupes marcheront sur dix de front. Les sections dans l’arrondissement desquelles passera le cortège, sont invitées à nommer des commissaires pour veiller à ce que le milieu des rues reste toujours libre, et qu’aucune voiture ne circule dans lesdites sections depuis huit heures du matin jusqu’à six heures du soir. Elles sont invitées à placer des inscriptions analogues aux motifs de la fête. Elles veilleront à ce que les citoyens qui voudroient concourir à la fête, en décorant la façade de leurs maisons, ne placent aucun ornement qui traverse la rue, à moins qu’il ne soit élevé à trente pieds au-dessus du sol. A six heures du soir tous les spectacles donneront, de par et pour le peuple, les pièces les plus analogues à la fête. Programme de la musique à exécuter pendant la Fête. Le comité d’instruction publique arrête que l’Institut national, placé au lieu qui lui sera désigné dans le jardin national, exécutera une marche guerrière pour annoncer l’arrivée de la Convention nationale; à cette marche succédera une symphonie par Catel : l’hymne à la victoire, par Chénier, musique de Méhul, sera exécuté avec accompagnement et grand orchestre; une marche guerrière précédera un hymne à la fraternité, par Th. Désorgues, musique de Cherubini. La proclamation faite par le président de la Convention nationale, que les armées de la République n’ont pas cessé de bien mériter de la patrie, sera précédée d’une grande fanfare de trompettes : pendant que le président attachera à chaque drapeau les couronnes de laurier, l’Institut national exécutera une symphonie militaire par L. Jadin; lorsque les défenseurs de la patrie auront reçu les drapeaux, on entonnera le Chant du départ, hymne de guerre par Chénier, musique de Méhul. Le cortège remis en marche et arrivé au Panthéon, l’Institut exécutera, à l’entrée du corps de Marat, une musique mélodieuse, dont le caractère doux et tranquille peindra l’immortalité. Le corps étant déposé, on exécutera un grand choeur à la gloire des martyrs et des défenseurs de la liberté, paroles de Chénier, musique de Cherubini. Signé, Villar, Boissy, Lakanal, Plaichard, Petit, Léonard Bourdon, R. Lindet, Massieu. Ces détails ne satisfont pas l’Assemblée. On demande le renvoi au comité d’instruction publique pour revoir de nouveau le plan proposé. BENTABOLE observe que la fête doit avoir lieu dans un délai très court; il pense qu’il faudrait discuter de ce plan et non le renvoyer. THURIOT demande que puisque le plan de la fête qui doit être célébrée pour la translation des cendres de Jean-Jacques au Panthéon est adopté, ce soit cette fête qu’on célèbre le cinquième des sans-culottides. BENTABOLE s’y oppose; il croit qu’on ne doit plus reculer la fête consacrée à l’ami du peuple, à laquelle Robespierre, ennemi de Marat, a déjà apporté tant de retards. THURIOT réclame vivement contre toute fausse interprétation de sa pensée. Il n’a, dit-il, demandé un délai que pour qu’on ait le temps de présenter un plan nouveau, et il ne veut pas que Bentabole lui prête une pensée qui n’a jamais été dans son cœur. Un article du plan proposoit que la Convention assistât à la fête en costume. [THIBAUDEAU [appuyé par la Montagne] (99) : J’ai entendu au comité le rapport de notre collègue, et j’ai été un de ceux [le premier] (100) qui ont demandé qu’il fût communiqué à la Convention. Mon motif était dans l’article qui concerne le costume. J’ai pensé que, pour mettre la représentation nationale en costume [décrété pour la fête du 20 prairial] (101) il fallait au moins son approbation. Je me souvenais que ce costume a toujours été un des prétextes de l’aristocratie; lorsque, dans l’assemblée Législative, le parti royaliste voulut une décoration particulière pour les députés, les patriotes énergiques s’y opposèrent avec force. Dernièrement dans la fête que Robespierre avait consacrée moins à l’Etre suprême qu’à lui-même, le costume fut encore une occasion de flatter sa basse vanité. [Ces principes ne purent trouver une majorité dans le temps de la fête à l’Etre suprême; et même, il est bon de dire qu’alors une portion de républicains que l’aristocratie accuse aujourd’hui d’être les continuateurs de Robespierre inscrivaient leurs noms pour provoquer l’appel nominal sur l’abolition du costume dès la première occasion où l’on en parlerait. Ces mêmes signataires conspiraient alors contre le (99) J. Univ., n° 1756. (100) Rép., n° 270. (101) Rép., n° 270.