[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j nn-use ami _ 429 dépenses que notre tribunal entraînera indis¬ pensablement. « Saint et fraternité. <( Vivier, directeur du 3e arrondissement; Allix, directeur du (je arrondissement; Arton, directeur du 1er arrondissement; Niège, directeur du 5e arrondissement; Colltgnon, directeur du 4e arrondisse¬ ment. » « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport de son comité des secours pu¬ blics [Briet, rapporteur (1)], sur la pétition de Pierre Donvilliers, aubergiste à Vervins, dont la maison a été incendiée le 15 octobre dernier (vieux style), par le feu pris aux îours nouvel¬ lement construits dans cette commune pour le service des armées; et sur la pétition de la ci¬ toyenne veuve Lalouette, âgée de 95 ans, dont les nippes et effets ont été consumés par le même incendie, décrète ce qui suit ; Art. 1er. « H sera payé par la trésorerie nationale, sur la présentation du présent décret, à la citoyenne veuve Lalouette, la somme de 215 liv. 14 s., importance de l’état estimatif de ses nippes et effets incendiés, certifié véritable par la muni¬ cipalité de Vervins. Art. 2. « Le conseil général et le comité de surveil¬ lance de la commune de Vervins sont spéciale¬ ment chargés de rechercher les causes et les auteurs de l’incendie ci-dessus mentionné. Ils en rendront compte directement au comité des secours publics de la Convention nationale. Art. 8. « Le comité des secours publics fera ensuite un rapport sur les causes et les auteurs de l’in¬ cendie, pour être statué définitivement sur la pétition du citoyen Donvilliers (2). » On fait lecture [Barere (3)] de diverses lettres des représentants du peuple près les armées de l’Ouest, par lesquelles ils annoncent qu’il n’est plus de brigands en deçà de la Loire, et que tout se prépare pour que tous ceux de la Vendée subissent le même sort. Deux citoyens qui ont apporté ces dépêches sont introduits à la barre. Ils présentent une adresse, écrite le 3 nivôse sur le champ de bataille de Savenay, au nom des soldats composant les armées de l’Ouest, de Brest et de Cherbourg réunies, où ils jurent de se montrer toujours de dignes enfants de la République. La Convention nationale couvre d’applaudissements l’adresse de ces intrépides défenseurs de la patrie, et en ordonne la mention honorable et l’insertion au « Bulletin ». (1) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton C 287, dossier 85 1. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 147. (3) D’après les divers journaux de l’époque. L’un des citoyens qui ont apporté les dépêches des représentants du peuple et l’adresse des armées réunies de l’Ouest, a présenté à La Con¬ vention le dernier étendard qu’avait conservé la cavalerie des brigands, l’autre a déposé une décoration militaire, prise sur un rebelle qu’il a tué, et deux bracelets en or, avec un portrait qu’il a également pris sur une femme rebelle. H en fait hommage à la patrie; « parce, dit-il, l’or des brigands ne peut rester dans les mains d’un républicain. » La Convention ordonne qu’il sera fait mention honorable de ce don civique. Un membre [Robespierre (1)] observe qu’entre les belles actions qui ont éclaté dans la guerre de la Vendée, la nation entière doit dis¬ tinguer celle du jeune Barra, comme offrant à la fois le plus beau modèle de l’amour de la patrie et de la piété filiale. Il demande que, pour exciter dans les jeunes cœurs l’amour de la gloire, de la patrie et de la vertu, pour préparer d’autant mieux les pro¬ diges que va opérer la génération naissante, et pour apprendre à nos ennemis à désespérer de soumettre un peuple chez qui les plus sublimes vertus datent de l’âge le plus tendre, les hon¬ neurs du Panthéon soient décernés à Joseph Barra; que cette cérémonie soit prompte et pompeuse; que le génie des arts l’embellisse, et que David soit chargé d’en donner le plan. Un autre membre [Barère (2)] demande que tous les artistes et graveurs concourent à re¬ tracer les traits de ce jeune martyr de la liberté, et qu’un exemplaire soit placé dans chaque école primaire. La Convention applaudit à ces diverses pro¬ positions, et le décret suivant est rendu : « La Convention nationale décerne lès hon¬ neurs du Panthéon au jeune Barra. David est chargé de donner ses soins à l’embellissement de cette fête nationale. « La gravure qui représentera l’action hé¬ roïque de Joseph Barra sera faite aux frais de la République, d’après un tableau de David;: et un exemplaire, envoyé par la Convention nationale, sera placé dans chaque école pri¬ maire (3 ). » Compte rendu du. Moniteur imiversel (4). Robespierre. Parmi les belles actions qui se sont passées dans la Vendée et qui ont honoré, (1) D’après les divers journaux de l’époque. (2) D’après les divers journaux de l’époque. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 148,, (4) Moniteur universel [n° 100 du 10 nivôse an II (lundi 30 décembre 1793), p, 403, col. 2], D’autre part, le Journal des Débats et. des Décrets (nivôse-an II, n» 406, p. 124) rend compte de là motion de Robespierre dans les termes suivants : Robespierre. Parmi les belles actions des répu¬ blicains qui ont combattu dans la Vendée, et en général parmi les traits d’héroïsme qui ont illustré sa guerre de la liberté contre la tyrannie, la nation 430 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES ! J? nivôse an il ( 2 3 décembre 1/93 la guerre de la liberté contre la tyrannie, la nation entière doit distinguer celle d’un jeune homme dont la mère a déjà occupé la Conven¬ tion. Je veux parler de Barra : ce jeune homme âgé de 13 ans, a fait des prodiges de valeur dans la Vendée. Entouré de brigands qui, d’un côté, lui présentaient la mort, et de l’autre lui deman¬ daient de crier : Vive le roi! Il est mort en ci'iant : Vive la République! Ce jeune enfant entière doit distinguer celui d’un jeune homme dont la mère a déjà eu occasion d’entretenir' la Convention : Je veux parler de Barra. Ce jeune républicain, âgé de 13 ans, a fait des prodiges de valeur. Entouré de brigands qui lui présentaient d’un côté la mort et lui demandaient de l’autre de crier : Vive le roi, il est mort en criant : Vive la République ! 11 nourrissait sa mère avec sa paye; il partageait ses soins entre l’amour lilial et l’amour de la patrie. Nous ne pouvons choisir une plus belle occasion pour exciter l’émulation de tous les jeunes citoyens, pour préparer les prodiges qu’opérera la génération naissante. En décernant des honneurs à Barra, nous en décernerons à toutes les vertus, à l’héroïsme, à l’amour de la patrie, à l’amour filial, aux vertus qui sont la base de ces sentiments sublimes. Il était réservé aux seuls Français de voir des héros de 13 ans. C’est la liberté qui produit des hommes d’un si grand caractère. La France doit donc présenter ce glorieux modèle à tous les Fran¬ çais et à tous les peuples : aux Français, afin qu’ils exercent toute leur ambition à acquérir de sem¬ blables vertus et qu’ils apprécient mieux de jour en jour le titre de citoyen français; aux autres peuples, afin qu’ils désespèrent de soumettre une nation qui, parmi les enfants qu’elle élève, compte déjà des héros. Je demande que les honneurs du Panthéon soient accordés à Barra; que la cérémonie qui aura lieu soit faite promptement, avec toute la pompe ana¬ logue à son objet, et qu’elle soit en tout digne de celui à qui nous la destinons. Je demande en outre que le génie des arts s’empare de mon idée et s’attache à l’exprimer avec toute la dignité qui lui convient; que David soit spécialement chargé de prêter ses talents à l’embellissement de cette fête. (Vifs applaudissements.) David. Chaque fois qu’il se présente une occa¬ sion de célébrer les vertus républicaines, je sens plus vivement le prix du peu de talent dont la nature m’a doué, et je l’en remercie avec plus d’effusion. J’accepte cl je m’honore du choix que . vous faites de moi. (Applaudi.) Barère. Je crois devoir ajouter une disposition à la belle motion que Robespierre vient de faire. Sans doute, si le Panthéon français doit être ou¬ vert aux vertus, c’est surtout à celles qu’on ne peut pas même soupçonner d’avoir eu pour motif quelques vues ambitieuses; et Barra, vertueux, courageux, héros à 11 ans, l’a été par sentiment, par l’amour le plus pur de la liberté de son pays. J’appuie donc la motion de Robespierre. J’y ajoute une seule disposition. Vous avez ins¬ titué des écoles primaires; vous leur destinez des livres élémentaires pour jeter dans le cœur des enfants le germe des vertus qui maintiendront la République que vous avez fondée. Je viens se¬ conder votre dessein. Décrétez que dans chaque école, on placera une gravure portant l’image du jeune Barra et le récit du trait qui l’immortalise. Les enfants apprendront par là que la vertu fixe,' à tous les âges, les yeux des représentants du peuple, qu’ils la couronnent partout où ils la trou¬ vent, et que la République s’enorgueillit de toutes les vertus qui peuvent honorer un peuple libre. (Applaudi.) Ces propositions sont décrétées au milieu des applaudissements. nourrissait sa mère avec sa paie, il partageait ses soins entre l’amour filial et l’amour de la patrie. Il n’est pas possible de choisir un plus bel exemple, un plus parfait modèle pour exciter dans les jeunes cœurs l’amour de la gloire, de la patrie et de la vertu, et pour prépa¬ rer les prodiges qu’opérera la génération nais¬ sante. En décernant des honneurs au jeune Barra, vous les décernez à toutes les vertus, à l’héroïsme, au courage, à l’amour filial, à l’amour de la patrie. Les Français seuls ont des héros de 13 ans, c’est la liberté qui produit des hommes d’un si grand caractère. Vous devez présenter ce modèle de magnanimité, de morale, à tous les Français et à tous les peuples : aux Français, afin qu’ils ambitionnent d’acquérir de semblables vertus, et qu’ils attachent un grand prix au titre de citoyens français ; aux autres peuples, afin qu’ils désespèrent de soumettre un peuple qui compte des héros dans un âge si tendre. Je demande que les honneurs du Panthéon soient décernés à Barra, que cette fête soit promptement célébrée, et avec une pompe ana¬ logue à son objet et digne du héros à qui nous la destinons. Je demande que le génie des arts caractérise dignement cette cérémonie qui doit présenter toutes les vertus, que David soit spé¬ cialement chargé de prêter ses talents à l’embel¬ lissement de cette fête. (Vils applaudissements. ) David. Ce sont de telles actions que j’aime à retracer. Je remercie la nature de m’avoir donné quelques talents pour célébrer la gloire des héros de la République; c’est en les consacrant à cet usage que i’en sens surtout le prix. (On applau¬ dit.) Barère. Citoyens, il ne peut y avoir ici qu’un suffrage, ou plutôt des acclamations unanimes pour l’adoption de la belle motion que Robes¬ pierre vient de faire. Élever à la vertu filiale un monument durable dans le souvenir des hommes, récompenser les faits héroïques, c’est le devoir de la Convention. Mais il faut encore tirer de cette mort une leçon vivante pour la jeunesse de la République. Joseph Barra est célèbre à 13 ans; il a déjà, avant que d’entrer dans la vie, présenté à l’histoire une vie illustre; mais ce qui doit le rendre recommandable à la postérité la plus reculée, c’est son dévouement à la République, c’est son attachement aux auteurs de ses jours; il nourrissait sa mère et mourait pour la patrie; il tuait des brigands, et résistait à l’opinion royaliste. Voilà celui à qui les honneurs du Panthéon peuvent être décernés sans exciter l’envie, et sans pouvoir l’accuser d’ambition. Il n’est pas à craindre que jamais il essuie le jugement des contemporains même sur Mirabeau. Des généraux, des représentants, des philo¬ sophes peuvent être excités par orgueil ou par une ambition quelconque; ici, c’est la vertu tout entière, simple et modeste, comme elle est sortie des mains de la nature. C’est cette vertu qui doit présenter son exemple à tous les enfants de la République; c’est son image tracée par les pinceaux du célèbre David, que vous devez exposer dans toutes les écoles primaires. Les enfants, les jeunes gens apprendront chaque jour dans les écoles répu¬ blicaines, que leurs vertus ne sont ni inutiles, ni obscures, et que les représentants du peuple savent les honorer dans tous les âges, et les