318 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE nier (vieux style) attribuoit exclusivement au tribunal révolutionnaire la connoissance de ce délit; « Considérant en outre que le jugement dont il s’agit est nécessairement lié à un autre jugement rendu au même tribunal, le 23 Pluviôse dernier, qui a acquitté le nommé Levasseur du délit pour lequel Labbé à été condamné; « Que deux jugemens viciés par la même incompétence doivent être également réformés, soit qu’ils acquittent, soit qu’ils condamnent, et qu’il est essentiel de conserver au tribunal révolutionnaire la plénitude de son attribution; « Déclare nuis les jugemens rendus par le tribunal criminel du département de Seine-et-Oise, les 23 Pluviôse, et 27 Germinal derniers, l’un contre Louis Labbé, l’autre en faveur du nommé Levasseur, ensemble les actes d’accusation sur lesquels lesdits jugemens ont été rendus; « Décrète que lesdits Levasseur et Labbé seront traduits au tribunal révolutionnaire, pour y être jugés de nouveau. « Le présent décret ne sera pas imprimé. Il en sera adressé une expédition au tribunal criminel du département de Seine-et-Oise et au tribunal révolutionnaire» (1). 78 Un membre [RUHL], au nom du comité de sûreté-générale, annonce à la Convention que ce comité, sur une dénonciation qui lui a été faite contre le nommé Grand-Clos, fameux armateur à Port-Malo, ayant donné ordre de le mettre en état d’arrestation, les citoyens chargés de cette commission l’ont arrêté en effet, mais que les gardiens qu’on lui avoit donnés l’ayant laissé échapper, ils n’ont pu rapporter que son or, son argent et un gillet tout cousu d’or, avec 200.000 liv. en assignats (ils ont été envoyés à la trésorerie nationale (2) ) il ajoute que ces citoyens ont annoncé en même temps que 20 bâtimens auxquels Grand-Clos est intéressé sont entrés à bon port, que les scellés ont été apposés sur ses magasins remplis d’une immensité de café, de sucre, d’indigo, de toiles fines, etc. etc., et que les gardiens qui l’ont laissé échapper sont eux-mêmes en état d’arrestation (3) . RUHL, annonce que le dénommé Grandclos, fameux armateur à Port Malo, contre lequel on avoit lancé un mandat d’arrêt, a trouvé les moyens d’échapper à la surveillance de ceux qui le gardoient, mais qu’on a trouvé chez lui un gilet garni de pièces d’or de 48 liv., 200.000 liv. en assignats, un sac de ducats d’or, un autre de 500 pièces d’or de 24 liv. et un tonneau rempli d’argent. Le fugitif, outre des magasins immenses remplis de sucre, café, indigo, riz et autres denrées, continuoit Ruhl, est encore pro-(1) P.V., XXXIX, 27. Minute de la main de Pons, de Verdun. Décret n° 9393. Reproduit dans Mon., XX, 668; Débats, n° 625, p. 298; mention dans Mess. soir, n° 656; J. Fr., n° 619; C. Univ., 17 prair.; J. Mont., n° 40; J. Sablier, n° 1361; Audit, nat., n° 620. (2) C. Eg., n° 656. (3) P.V. XXXIX, 28; Audit, nat., n° 620; C. Eg., n° 656; J. S. Culottes, n° 475. priétaire de 20 vaisseaux arrivés en bon port et évalués à 1 milliard. Cette dernière assertion a excité des réclamations. BREARD a soutenu qu’il étoit impossible que 20 vaisseaux marchands valussent une somme aussi énorme. Quand ils seroient chargés des plus précieuses marchandises, disoit GOULY, cela ne pourroit être et il est prouvé que la cargaison d’un navire est très riche, lorsqu’elle est de 4 millions et pour mon compte je soutiens que les 4 navires ne valent pas 50 millions. Un député, qui connoit Grandclos depuis 25 ans a dit à son tour que jamais sa fortune n’a surpassé 6 millions, dont une partie est passée en Angleterre où il comptoit rejoindre ses fils et ses autres parens émigrés, en sorte que ses possessions en France ne s’élèvent pas au-delà de 3 millions. Au reste, disoit le même membre, il ne faut pas croire que les 20 navires appartiennent à Grandclos. Un négociant se garde bien d’exposer des richesses aussi considérables sur la mer, et il a toujours des intéressés dans ses armemens (1) . ( Applaudi ) . Ce même membre [RUHL], demande, au nom du comité, que son rapport soit inséré au bulletin de la Convention et que l’or et l’argent avec les 200.000 liv. en assignats soient remis à la trésorerie nationale. Ces propositions sont décrétées (2) . 79 Au nom du comité d’instruction publique, un membre [GREGOIRE] fait un rapport sur la nécessité d’établir l’uniformité dans la langue française (3) . GREGOIRE : La langue française a conquis l’estime de l’Europe, et depuis un siècle elle y est classique. Mon but n’est point d’assigner les causes qui lui ont valu cette prérogative; il y a 10 ans qu’au fond de l’Allemagne (à Berlin) on discuta savamment cette question qui, suivant l’expression d’un écrivain, eût flatté l’orgueil de Rome, empressée à la consacrer dans son histoire comme une de ses belles époques On connait les tentatives de la politique romaine pour universaliser sa langue; elle défendait d’en employer d’autres pour haranguer les ambassadeurs étrangers, pour négocier avec eux, et malgré ses efforts elle n’obtint qu’im-parfaitement ce qu’un assentiment libre accorde à la langue française. On sait qu’en 1774 elle servit à rédiger le traité entre les Turcs et les Russes; depuis la paix de Nimège, elle a été prostituée pour ainsi dire aux intrigues des cabinets de l’Europe, parce que dans sa marche éclairée et méthodique, la pensée s’exprime fa-(1) C. Univ., 17 prair. (2) P.V., XXXIX, 28. Minute de la main de Ruhl. Bln, 16 prair.; J. Fr., n° 619; M.U., XL, 264; J. Perlet, n° 621; Débats, n° 623, p. 247; Mess, soir, n° 656; Rép., n° 167; Ann. R.F., n° 188; J. Sablier, n° 1360; J. Lois, n° 615; Mon., XX, 647; J. Mont., n° 315; C. Eg., n° 656; Ann. patr., n° DXX. (3) P.V., XXXIX, 29. 318 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE nier (vieux style) attribuoit exclusivement au tribunal révolutionnaire la connoissance de ce délit; « Considérant en outre que le jugement dont il s’agit est nécessairement lié à un autre jugement rendu au même tribunal, le 23 Pluviôse dernier, qui a acquitté le nommé Levasseur du délit pour lequel Labbé à été condamné; « Que deux jugemens viciés par la même incompétence doivent être également réformés, soit qu’ils acquittent, soit qu’ils condamnent, et qu’il est essentiel de conserver au tribunal révolutionnaire la plénitude de son attribution; « Déclare nuis les jugemens rendus par le tribunal criminel du département de Seine-et-Oise, les 23 Pluviôse, et 27 Germinal derniers, l’un contre Louis Labbé, l’autre en faveur du nommé Levasseur, ensemble les actes d’accusation sur lesquels lesdits jugemens ont été rendus; « Décrète que lesdits Levasseur et Labbé seront traduits au tribunal révolutionnaire, pour y être jugés de nouveau. « Le présent décret ne sera pas imprimé. Il en sera adressé une expédition au tribunal criminel du département de Seine-et-Oise et au tribunal révolutionnaire» (1). 78 Un membre [RUHL], au nom du comité de sûreté-générale, annonce à la Convention que ce comité, sur une dénonciation qui lui a été faite contre le nommé Grand-Clos, fameux armateur à Port-Malo, ayant donné ordre de le mettre en état d’arrestation, les citoyens chargés de cette commission l’ont arrêté en effet, mais que les gardiens qu’on lui avoit donnés l’ayant laissé échapper, ils n’ont pu rapporter que son or, son argent et un gillet tout cousu d’or, avec 200.000 liv. en assignats (ils ont été envoyés à la trésorerie nationale (2) ) il ajoute que ces citoyens ont annoncé en même temps que 20 bâtimens auxquels Grand-Clos est intéressé sont entrés à bon port, que les scellés ont été apposés sur ses magasins remplis d’une immensité de café, de sucre, d’indigo, de toiles fines, etc. etc., et que les gardiens qui l’ont laissé échapper sont eux-mêmes en état d’arrestation (3) . RUHL, annonce que le dénommé Grandclos, fameux armateur à Port Malo, contre lequel on avoit lancé un mandat d’arrêt, a trouvé les moyens d’échapper à la surveillance de ceux qui le gardoient, mais qu’on a trouvé chez lui un gilet garni de pièces d’or de 48 liv., 200.000 liv. en assignats, un sac de ducats d’or, un autre de 500 pièces d’or de 24 liv. et un tonneau rempli d’argent. Le fugitif, outre des magasins immenses remplis de sucre, café, indigo, riz et autres denrées, continuoit Ruhl, est encore pro-(1) P.V., XXXIX, 27. Minute de la main de Pons, de Verdun. Décret n° 9393. Reproduit dans Mon., XX, 668; Débats, n° 625, p. 298; mention dans Mess. soir, n° 656; J. Fr., n° 619; C. Univ., 17 prair.; J. Mont., n° 40; J. Sablier, n° 1361; Audit, nat., n° 620. (2) C. Eg., n° 656. (3) P.V. XXXIX, 28; Audit, nat., n° 620; C. Eg., n° 656; J. S. Culottes, n° 475. priétaire de 20 vaisseaux arrivés en bon port et évalués à 1 milliard. Cette dernière assertion a excité des réclamations. BREARD a soutenu qu’il étoit impossible que 20 vaisseaux marchands valussent une somme aussi énorme. Quand ils seroient chargés des plus précieuses marchandises, disoit GOULY, cela ne pourroit être et il est prouvé que la cargaison d’un navire est très riche, lorsqu’elle est de 4 millions et pour mon compte je soutiens que les 4 navires ne valent pas 50 millions. Un député, qui connoit Grandclos depuis 25 ans a dit à son tour que jamais sa fortune n’a surpassé 6 millions, dont une partie est passée en Angleterre où il comptoit rejoindre ses fils et ses autres parens émigrés, en sorte que ses possessions en France ne s’élèvent pas au-delà de 3 millions. Au reste, disoit le même membre, il ne faut pas croire que les 20 navires appartiennent à Grandclos. Un négociant se garde bien d’exposer des richesses aussi considérables sur la mer, et il a toujours des intéressés dans ses armemens (1) . ( Applaudi ) . Ce même membre [RUHL], demande, au nom du comité, que son rapport soit inséré au bulletin de la Convention et que l’or et l’argent avec les 200.000 liv. en assignats soient remis à la trésorerie nationale. Ces propositions sont décrétées (2) . 79 Au nom du comité d’instruction publique, un membre [GREGOIRE] fait un rapport sur la nécessité d’établir l’uniformité dans la langue française (3) . GREGOIRE : La langue française a conquis l’estime de l’Europe, et depuis un siècle elle y est classique. Mon but n’est point d’assigner les causes qui lui ont valu cette prérogative; il y a 10 ans qu’au fond de l’Allemagne (à Berlin) on discuta savamment cette question qui, suivant l’expression d’un écrivain, eût flatté l’orgueil de Rome, empressée à la consacrer dans son histoire comme une de ses belles époques On connait les tentatives de la politique romaine pour universaliser sa langue; elle défendait d’en employer d’autres pour haranguer les ambassadeurs étrangers, pour négocier avec eux, et malgré ses efforts elle n’obtint qu’im-parfaitement ce qu’un assentiment libre accorde à la langue française. On sait qu’en 1774 elle servit à rédiger le traité entre les Turcs et les Russes; depuis la paix de Nimège, elle a été prostituée pour ainsi dire aux intrigues des cabinets de l’Europe, parce que dans sa marche éclairée et méthodique, la pensée s’exprime fa-(1) C. Univ., 17 prair. (2) P.V., XXXIX, 28. Minute de la main de Ruhl. Bln, 16 prair.; J. Fr., n° 619; M.U., XL, 264; J. Perlet, n° 621; Débats, n° 623, p. 247; Mess, soir, n° 656; Rép., n° 167; Ann. R.F., n° 188; J. Sablier, n° 1360; J. Lois, n° 615; Mon., XX, 647; J. Mont., n° 315; C. Eg., n° 656; Ann. patr., n° DXX. (3) P.V., XXXIX, 29.