026 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 décembre 1789.] Vous connaissez actuellement, Messieurs, les motifs qui ont dicté à votre comité les articles qu’il croit devoir vous soumettre : ma dernière mission est de vous en donner -lecture; heureux si votre comité peut se flatter d’avoir rempli vos intentions, et d’avoir justifié la confiance dont vous l'avez honoré: Art. 1er. Tous religieux qui auront fait des vœux solennels, dans quelque ordre ou congrégation qu’ils puissent être, déclareront, dans trois mois, du jour de la publication du présent décret, devant les officiers municipaux ou les juges royaux de leur domicile, s’ils désirent cesser de vivre sous la règle dans laquelle ils ont fait profession, ou s’ils désirent d’y rester. Art. 2. Ceux qui auront déclaré vouloir quitter leur règle, seront, de ce moment, libres de sortir de leurs monastères, et de résider où bon leur semblera, en habit clérical, sous la juridiction de l’évêque diocésain, comme tous les autres ecclésiastiques, sauf ensuite leur recours à l’autorité ecclésiastique en ce qui concerne le lien spirituel seulement. Art. 3. Il leur sera payé annuellement, par quartier et d’avance, savoir : à tout religieux au-dessous de 50 ans, 700 liv.; 800 liv. depuis 50 ans jusqu’à 60 ans-900 liv. depuis 60 ans jusqu’à 70 ans, et 1,000 liv. depuis 70 ans, sans aucune distinction d’ordres. Art. 4. Il sera payé annuellement par quartier et d’avance, aux abbés réguliers qui sortiront de leur ordre, une somme de 2,000 livres. Art. 5. Les religieux sortis du cloître, resteront incapables de toutes successions et dispositions entre-vifs et testamentaires ; mais ils auront la capacité de disposer du pécule qu’ils auront ac-uis depuis leur sortie du cloître, et à défaut de isposition de leur part, leur pécule passera à leurs parents les plus proches. Art. 6. Ils pourront, être employés comme vicaires, et ils seront même susceptibles d’être pourvus de cures ; mais, dans ce dernier cas, leur pension demeurera réduite à moitié. Art. 7. Les religieux qui auront déclaré vouloir continuer de vivre sous leur règle, seront placés de préférence dans les maisons de campagne du même ordre et de la même congrégation, les plus commodes et les plus saines, et subsidiairement dans les maisons des petites villes. Art. 8. Pourront néanmoins être conservées dans les villes plus considérables les maisons dont les religieux se voueront au soulagement des malades, ou qui seront trouvés dignes de présider à l’éducation publique, ou qu’on jugera capables de contribuer au progrès des sciences. Art. 9. Les religieux qui auront déclaré vouloir rester dans leur ordre, pourront en tout temps faire la déclaration, qu’ils désirent en sortir, et quitter ensuite leur monastère, en observant les formes prescrites par les articles 1 et 2 du présent décret ; du moment de leur sortie, ils auront droit à la pension réglée par l’article 3. Art. 10. Le nombre des religieux dans les maisons conservées ne pourra être moindre de 15, non compris le prieur ou supérieur. Art. 11. Tous privilèges et exemptions accordés à tous ordres et congrégations sont supprimés, et les religieux assujettis sans exception à la juridiction des évêques; le régime des congrégations d’ailleurs conservé. Art. 12. Les maisons qui seront conservées comme utiles aux sciences, à l’éducation publique et au soulagement des malades, pourront seules se perpétuer ; mais les effets civils de la solennité des vœux sont abrogés-en conséquence les postulants qui seront admis, demeureront toujours libres de quitter leur ordre, et capables de successions et donations entre vifs et testamentaires. Art. 13. Il sera désigné pour chaque ordre qui aura des maisons destinées à se perpétuer en conséquence de l’article précédent, une maison d’épreuve dans laquelle les postulants passeront le temps prescrit par les statuts avant leur admission. Art. 14. Lorsqu’une maison aura cessé d’être habitée pendant trois ans par le nombre de sujets fixé par l’article 10, elle sera supprimée, et les religieux en seront aussitôt répartis dans les autres maisons du même ordre. Art. 15. Il sera assigné à chaque maison un revenu annuel, à raison de 800 livres par chaque religieux qui y résidera, et en conséquence, la maison sera chargée de toute espèce d’entretien de ses religieux, de tous les frais de culte, et de toutes les réparations usufruitières de ses églises et bâtiments; et la quête demeurera interdite à tous les religieux qui s’étaient maintenus dans l’usage de quêter. Art. 16. Il pourra être assigné, sur les demandes des administrations de département, un revenu plus considérable aux maisons destinées à l’éducation publique et au soulagement des pauvres. Art. 17. L’Assemblée nationale se réserve de décréter incessamment de quelle manière sera acquitté le revenu des maisons conservées, comme aussi de décréter la forme d’administration des possessions des réguliers et des autres possessions ecclésiastiques, leur emploi, l’acquit des fondations des établissements qui seront supprimés, ainsi que le lieu et 1 instant où les pensions des religieux qui sortiront du cloître, commenceront à etre payées. M. de ISoimal, évêque de Clermont, président du comité ecclésiastique , prend la parole pour demander que cette affaire, vu son extrême importance, soit ajournée à une séance du matin» IL ajoute de plus qu’il fait hautement profession de s’être opposé, d’après la voix de sa conscience, à plusieurs des articles proposés par le rapporteur du comité ecclésiastique. L’Assemblée prononce seulement l’impression des articles, se réservant de statuer plus tard sur l’ajournement. M. le Président annonce qu’un courrier extraordinaire de Toulon vient de lui apporter des pièces relatives aux mouvements arrivés dans cette ville; que ces pièces lui paraissent très-importantes. Le vœu de l’Assemblée, recueilli sans délai, est de renvoyer ces pièces au comité des rapports, qui se rassemblera sur-le-champ à cet effet. M. le marquis de Clermont-Mont-Saint-Jean, député du Bugey, demande un congé de vingt-quatre à trente jours, pour aller vaquer à ses affaires à Chambéry en Savoie, où sont ses terres et la résidence ordinaire de sa famille. Le congé est accordé. M. le Président fait ensuite lecture d’une lettre de M. JNecker, qui accompagne l’envoi d’un mémoire que ce ministre adresse à l’Assemblée nationale. 11 est fait lecture de cette lettre conçue en ces termes :