332 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j | frimaire an h ensuite et ranimait cette respectable vieillesse par des sons patriotiques dont les tambours faisaient retentir les airs. Là était placé le char de triomphe portant la Liberté. Ce char était suivi du faisceau repré¬ sentant l’Unité et l’Indivisibilité, d’un corps de musique et de tambours, d’un détachement de l’armée révolutionnaire parisienne. Le citoyen Couturier, représentant du peuple, accompagné de deux commissaires du départe¬ ment (Charpentier et Sibillon) était placé entre ce détachement de l’armée révolutionnaire et la Société populaire républicaine, les corps constitués régénérés, tous en bonnet rouge et se tenant sous le bras marchaient ensuite. Un bataillon de la garde nationale marchait immédiatement. Enfin cette marche était terminée par l’aris¬ tocratie et les citoyens et citoyennes de la ville en très grand nombre la fermaient. A chaque arbre de la liberté les airs patrio¬ tiques y ont été joués et chantés, tous les citoyens, unis par les mêmes liens, ont bu dans la même coupe. A la dernière station a été immolé aux senti¬ ments républicains, les élèves de la liberté l’ont ensuite livré aux flammes qu’ils ont jetée au vent (1). Une pluie considérable n’a ralenti ni la mar¬ che, ni le patriotisme, aucun citoyen n’a quitté le poste et cette fermeté, qui a étonné l’aris¬ tocratie, n’a fait qu’accroître la gaîté des pa¬ triotes. Ainsi a été célébrée cette promenade civique à jamais mémorable. Périssent les aristocrates, les modérés, les gens qui affectent le patriotisme et qui ne sont qu’égoïstes; ne perdons jamais de vue la sim¬ plicité de la franchise, l’unité qui en ont (sic) fait l’ornement et l’exemple terrible, mais juste, dont ils ont été témoins et dont ils doivent s’attendre à éprouver les effets. Cette fête ne pouvait mieux se terminer qu’en secouant les préjugés dont nos pères nous ber¬ çaient et auxquels les tyrans nous assujetis-saient en nous rendant tributaires d’une société, qui se jouait de notre crédulité. Un bal public s’est établi dans la principale église et s’est prolongé jusqu’au lendemain 7 heures du matin, heure à laquelle la brillante jeunesse s’est retirée en criant Vive la République ! vive la Montagne ! vivent les sans -culottes ! Signé : Couturier; G-erosme; Seringe-Laurin, Meunier, Bruerre aîné, Jamet, Le Wasseur, Libre, ci-devant Roy, Crespin, Baron de Lisle. Pour copie conforme : Crosnier, secrétaire. Le citoyen Jean-Baptiste Simonin, de Toul, département de la Meurthe, fait don à la nation d’une somme de 566 livres qui lui est due à titre de constitution, avec les intérêts échus; il re¬ grette que son grand âge de 70 ans et la modi¬ cité de sa fortune, qui ne consiste que dans une (1) Cette phrase est textuelle dans le manuscrit. pension de 251 livres, ne lui permette pas de faire tout le sacrifice que lui dicterait son amour pour la patrie. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre du citoyen Simonin (2). « Citoyen, « Je m’adresse à vous avec toute la con¬ fiance que vous méritez, par le zèle que vous mettez à servir vos concitoyens dans les affaires qu’ils vous confient. Voici le sujet de la mienne. Il m’est dû par la nation une somme de 566 li¬ vres 8 sols 6 deniers de Lorraine avec 2 années de rente, comme vous le verrez par les papiers ci-inclus, et reconnue et avouée par le départe¬ ment de la Meurthe après les recherches et vérifications faites par le district de Toul. J’en fais don et l’offre à la nation. Si je n’eusse pas été malade pendant trois mois et plus, il serait déjà fait; j’eusse désiré que la somme fût plus considérable, il en eût été de même. Je ne suis point fortuné, la pension que je viens d’obtenir de 251 livres 18 sols 4 deniers me suffira, je l’espère, si elle m’est continuée, pour mon entretien dans la place que vous savez que j’oc¬ cupe. Vous voudrez bien faire à ce sujet tout ce qu’il conviendra de faire, de mon côté ma soumission aux lois de la patrie sera mon unique occupation. Vous connaissez ma con¬ duite à ce sujet. Je n’aurai après cela qu’une parfaite reconnaissance des peines et des soins que je vous occasionne. « Je suis avec fraternité, . « Le citoyen Simonin, prêtre. « Toul, le 2 frimaire l’an II de la République française, une et indivisible, 1793. Les membres du conseil général de la com¬ mune de Nîmes, témoignent leur horreur sur la barbarie exercée par les Anglais contre 300 pa¬ triotes français, dans le port de Gênes; ils en demandent une vengeance éclatante. « Que Londres soit détruit! s’écrient-ils : Sénat plus puissant que celui de Borne, prononce sa des¬ truction, et tous les Français s’empresseront de t’obéir; nouveaux Argonautes, ils franchiront l’espace qui nous sépare de l’Angleterre, et bien¬ tôt Londres ne sera plus : que le nom odieux d’Anglais soit proscrit en France; que celui de la nation la plus barbare lui soit substitué, afin de rappeler aux générations à venir le mas¬ sacre de 300 Français dans le port de Gênes. » Mention honorable, insertion au « Bulletin » (3). (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 216. (2) Archives nationales, carton G 283, dossier 808. (3) Procès-verbaux de la Convention t. 26, p. 216. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 9 frimaire an n 29 novembre 1793 333 « A Nîmes, le 30 brumaire, l’an II de la Répu¬ blique française, une et indivisible. Suit la lettre des membres du conseil général de la commune de Nîmes (1). « Représentants du peuple français, « Il est donc vrai que la nation anglaise qu’on croyait généreuse et philosophe, est devenue le fléau de l’humanité et que Londres, nouvelle Carthage, renferme dans ses murs des tigres altérés de sang. Anglais, que ton nom soit proscrit à jamais, puisque tu es semblable au monstre qui méconnaît l’espèce dont il est sorti, et qui, n’étant plus propre à la génération, cesse d’être sans avoir produit son semblable. « Gênes a vu le spectacle le plus terrible; 300 Français ont été les victimes de la férocité anglaise. Ils fuyaient la tyrannie de l’Espa¬ gnol fanatique, de ce pontife scélérat qui ose se dire le ministre d’un Dieu de paix. L’asile mo¬ mentané où ils s’étaient rendus devait être res¬ pecté, le Génois neutre ne devait pas entendre le bruit du canon, ni la foudre anglaise éclater dans son port, pleins de sécurité et dans l’espé¬ rance de revoir bientôt leur chère patrie, de mettre leurs pieds sur la terre de la liberté, et de jouir des bienfaits d’une Constitution sainte. Vain espoir ! Tout à coup ils sont assaillis par la flotte anglaise, en vain leurs mains levées vers le ciel implorent la clémence de l’ennemi; en vain des cris perçants de douleur et de lamentation se font entendre. Pitt, l’in¬ fâme Pitt, a donné l’ordre de proscription, il faut qu’il s’exécute; le plomb meurtrier de 100 bou¬ ches d’airain fond sur eux, les atteint, et bientôt ils ne sont plus. Infortunés, vous êtes les vic¬ times de votre patriotisme, mais, hélas ! nous bornerions -no as à de vains regrets? Non, votre sang répandu crie vengeance. Guerre, guerre éternelle à une nation si criminelle ! Représen¬ tants, rappelez-vous les crimes que l’orgueil et l’avarice ont commandés à l’Anglais, ils sont consignés dans les fastes de l’histoire; partout vous le trouverez injuste et criminel, violant les traités, ne respectant ni les droits des nations ni ceux de l’humanité. « Faut -il, peuple franc et généreux que tu souffres tant d’injustices, le moment n’est -il pas venu de fondre avec la rapidité de l’éclair sur ton ennemi naturel? Fier d’être entouré de l’océan, il se croit inaccessible; mais Carthage croyait l’être comme Londres, et les Romains la détruisirent. Que Londres soit détruit. Sénat plus puissant que celui de Rome, prononce sa destruction et tous les Français s’empresseront de t’obéir, ils exécuteront tes oracles : nou¬ veaux Argonautes, ils franchiront l’espace qui nous sépare de l’Angleterre, et bientôt Londres ne sera plus. « Représentants, continuerons -nous de pro¬ noncer le nom odieux d’Anglais? Non, qu’il soit proscrit en France, et qu’il lui soit substi¬ tué celui de la nation la plus barbare afin de rappeler aux générations à venir le massacre des 300 Français dans le port de Gênes. T (1) Archives nationales, carton C 284, dossier 820; Mercure universel [10 frimaire an II (samedi 30 no¬ vembre 1793), p. 151, col. 1]. « Les membres composant le conseil général de la commune de Nîmes. » (Suivent 19 signatures (1). La Société populaire de Vézelise, département de la Meurthe, fait part à la Convention natio¬ nale de l’arrêté qu’elle a pris pour célébrer la fête de la Décade, après laquelle le bureau s’est trouvé chargé d’une foule de parchemins, bre¬ vets, lettres de prêtrise, maîtrise et autres actes portant abolition de privilèges et fonctions abo¬ lis; elle annonce que pendant le cours de cette séance, les vrais sans-culottes se sont empressés d’enlever les confessionnaux, dont il a été dressé un autodafé, auquel le président a mis le feu aux cris de : Vive la République! vive la Mon¬ tagne î Mention honorable, insertion au « Bulletin » (2) . Suit la lettre de la Société populaire de Vézelise aux citoyens Jacob et Golombel, représentants du peuple (3). La Société populaire de Vézelise, département de la Meurthe, aux citoyens Jacob et Golombel, représentants du peuple. « Vézelise, le 3e frimaire de l’an II de la République française, une et in¬ divisible. « Citoyens, « Nous adressons à la Convention nationale copie du procès-verbal de notre séance du 24 brumaire dernier, nous en joignons ici deux exemplaires pour vous instruire du degré de l’esprit public dans notre commune et qui se communique à toutes celles du district. Nous vous prions 'de tenir la main à ce que notre procès-verbal soit connu de la Convention. « Salut et fraternité. « Jacquinet, président ; Contât, secrétaire. » (1) D’après V Auditeur national [n° 434 du 10 fri¬ maire an II (samedi 30. novembre 1793), p. 2] et le Mercure universel [10 frimaire an II (samedi 30 no¬ vembre 1793), p. 152, col. 1], la lecture de cette adresse fut accueillie par les plus vifs applaudisse-ments. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 217. (3) Archives nationales, carton C 285, dossier 830.